1846, DUNKERQUE : sur les quais de la gare maritime, se traîne une étrange cohorte de malheureux ( 467 individus déclarés) tristes, sales, malades pour la plupart.. et cela depuis plusieurs mois : ce sont des Prussiens. Des sortes de "passeurs" malhonnêtes ont circulés dans leurs villages en leur faisant miroiter la richesse et les châteaux en Espagne... mais au Brésil !
Les voilà qui réunissent leurs maigres économies, le Brésil c'est loin et c'est cher , on prend femmes et enfants et on part.....
Mais à Dunkerque tout se complique, la Compagnie Maritime véreuse leur demande beaucoup plus d'argent pour la traversée vers le Brésil. Les plus nantis ont pu partir, les autres, la majorité, sont carrément abandonnés sur les quais, pas d'argent, pas de nourriture... la bonne Société de Dunkerque venait les voir le Dimanche comme on va au spectacle et tout de même on s'est émus de ces pauvres hères faméliques ! Après plusieurs mois, ignorés de tous ,le Gouvernement se décide à réagir : Qu'est-ce qu'on pourrait bien en faire, "ces gens-là" ne parlaient pas un mot de français, presque tous malades ! Mais ON VENAIT DE COLONISER L'ALGERIE et c'est alors qu'on pense à eux
Protestions dans tous les Etats-Majors, on va quand même pas faire des français de ça (tiens ça me rappelle quelqu'un !!)..
Et les voilà embarqués sur plusieurs bateaux vers l'Algérie, (des alsaciens-lorrains étaient venus rejoindre le gros de la misérable troupe (869 familles ont embarqué, dont 325 enfants) ! quelques naissances et plusieurs décès à bord, arrivée à MERS-EL-KEBIR ! même les grands chefs algériens aux côtés des officiers français ont trouvé bizarre ce bataillon de la cour des miracles et un officier (j'espère qu'il est en enfer !!) de répondre aux questions "Mais ce sont de pauvres allemands dont nous avons pitié, ils ne tiendront pas longtemps" !!!
Rien ne leur a été épargné ; les moustiques, la malaria, le paludisme, la terre inculte après un voyage épouvantable, il y avait des hommes seuls, beaucoup de femmes avaient perdu leur mari, et aussi... des enfants sans parents !!
Et bien, c'est cette armée de va-nu-pieds (ils ne les avaient pas encore noirs.. les pieds) QUI A CREE LA STIDIA (et plus tard le village de Ste Léonie !) LES PLUS COSTAUDS ONT RESISTE !!!
Et c'est ainsi que des années plus tard, j'entendais des mots d'allemand chez ma vieille tante Liza, alors qu'elle nous servait au petit déjeuner des tartines de graillons (comme là-bas !)