« Il était une fois, dans un autre temps, vivaient des femmes, une tribu composée exclusivement de femmes, sur un vaste territoire de hautes terres steppiques. Elles régnèrent longtemps sur ce pays en maîtresses incontestées. Pour la perpétuation de leur modèle de vie, elles capturaient des hommes pour la procréation. Et le plaisir avec. Façon de joindre l’utile à l’agréable. Elles ne gardaient que les nouveau-nés de sexe féminin ; les mâles étaient donnés aux tribus voisines, les tribus des géniteurs, où cette progéniture était célébrée telle des naissances de lignées royales. Les années passèrent, dans une succession de saisons binaires : un été sec avec des brises agréables et un hiver qui apportait une neige fine et douce.
Puis, un jour, des hordes de contrées lointaines envahirent le pays des amazones. Certaines moururent au combat ; d’autres prirent la fuite. Aucune ne fut capturée. Celles qui survécurent se dispersèrent sur l’immense étendue de la steppe. D’une grande beauté, elles furent pourchassées pour cela par les guerriers, les souverains, les marchands d’esclaves. Elles prièrent Dieu et les saints, chacune de son côté ; un djinn leur apparut simultanément. Elles exprimèrent, ensemble, le vœu d’être changées en gazelles. Elles étaient conscientes qu’elles continueraient à être pourchassées, chassées. Mais elles préférèrent finir mortes sur la table des hommes que vivantes dans leur lit. Le génie qui accourut à leur secours les mit devant ce terrible choix. Il n'en avait pas d’autre. »

— Histoire triste, dit la jeune femme. Mais, les histoires tristes sont les plus belles. L’histoire des gazelles est presque aussi triste que la mienne, à la différence que la mienne n’est pas belle. Après un dur stage de six mois en captive, en esclave sexuelle de cinquante barbus armés, j’ai fini pute. Ton conte de gazelles et mon histoire sont assez similaires même si j’ai choisi l’autre option, rester vivante et finir dans la couche des hommes.
— Pour l’argent, lâcha l’homme, sentencieux.
— Pour vivre !