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Robert II le pieux 3 suite Les Capétiens
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Les Capétiens 987-1498


Cette dynastie royale a régné en France de 987 à 1792. On appelait autrefois ces souverains les rois de la troisième race, venus après les Mérovingiens et les Carolingiens. Les Capétiens de ligne directe régnèrent jusqu'en 1328. Des branches collatérales leur succédèrent. Les Capétiens-Valois de 1328 à 1498 ; les Valois-Orléans de 1498 à 1515 ; les Valois-Angoulême de 1515 à 1589 ; les Bourbons de 1589 à 1792. Le surnom de Capet fait sa première apparition vers 1030 dans la chronique d'Adémar de Chabanne, il s'applique alors au père d' Hugues Capet, le duc Hugues Ier. Il ne qualifie Hugues Capet qu'au début du XIIe siècle et le terme capétien apparaît pour la première fois chez le chroniqueur anglais Raoul de Diceto mort en 1202. Les révolutionnaires le donnèrent par dérision à Louis XVI détrôné le citoyen Capet et à sa famille. Le surnom vient du mot cappa, chape, et désigne le porteur d'un petit manteau. Peut-être fait-il allusion à la chape abbatiale, Hugues et son père étant abbés laïques de nombreuses abbayes. Au XIIe siècle, la chape étant devenue un chaperon ou chapeau, Hugues Capet fut considéré comme l'homme au chapeau et la légende, appuyée sur cette fausse étymologie, naquit, selon laquelle il n'avait pas pu ou voulu recevoir la couronne.
On ne citera ici que les Capétiens directs 987-1328 et les Capétiens-Valois 1328-1498 et on laissera également de côté les branches capétiennes qui ont été à la tête de principautés et seigneuries en France par exemple en Bourgogne et celles qui ont occupé des trônes étrangers à Constantinople, à Naples, en Navarre, en Hongrie aux XIIIe-XIVe siècles.

Les premiers Capétiens et la féodalité 987-1180

Élaboration de la dynastie

Lorsque, à la mort du Carolingien Louis V, Hugues Capet, duc des Francs, fut élu roi de France (on disait alors roi des Francs à Senlis par une assemblée de grands, laïques et ecclésiastiques, qui le préféra à un concurrent carolingien, Charles de Basse-Lorraine, oncle du roi défunt, puis sacré à Noyon le 1er juin ou le 3 juillet 987, la longévité et la puissance de sa postérité n'étaient pas prévisibles. Certes, sa famille avait joué un grand rôle politique depuis son arrière-grand-père Robert le Fort, d'origine inconnue, qui détint sous Charles le Chauve de grands pouvoirs, entre Seine et Loire, sur la Neustrie en voie de s'appeler France, et plus tard Île-de-France. Son grand-oncle Eudes, fils de Robert, avait été déjà élu roi après la mort de Charles le Gros, en 888, et avait régné dix ans 888-898 et son propre père Hugues Ier le Grand, duc de France de 923 à 956, avait été le tuteur de Louis IV d'Outremer 936-954 et le véritable maître du royaume. Mais le nouveau roi et ses successeurs allaient accomplir une tâche énorme : assurer la continuité dynastique, affermir le pouvoir royal face aux grands seigneurs dont beaucoup étaient aussi puissants qu'eux le comte de Périgord à qui Hugues Capet et son fils Robert demandent : Qui t'a fait comte ? réplique : Qui vous a faits rois ?, donner une base économique et administrative à la royauté, faire progresser le pouvoir monarchique et la puissance nationale dans le Midi et les défendre contre l'Empire à l'est et contre l'Angleterre dans l'ouest même du royaume, acquérir un prestige national et international, devenir des rois très chrétiens.
L'essentiel de ce programme, qui ne fut sans doute pas conçu clairement ni systématiquement par les souverains et leur entourage, fut réalisé en deux siècles, lente évolution ponctuée de succès et d'échecs sur laquelle les documents parvenus jusqu'à nous nous renseignent mal.
La continuité dynastique fut due d'abord à la chance qui assura à tous les Capétiens des héritiers mâles jusqu'en 1314, mais aussi à une politique persévérante qui choisit la primogéniture la reine Constance, troisième femme de Robert le Pieux, chercha pourtant à imposer le cadet Robert contre l'aîné Henri et imposa la succession dynastique. En effet, l'élection du roi par les grands subsista jusqu'en 1179, mais chaque souverain fit, de son vivant, élire et couronner son fils aîné : Robert le Pieux dès 988, en 1017 Hugues mort en 1025, puis Henri Ier en 1027, Philippe Ier en 1059, Louis VI à une date indéterminée, Philippe mort en 1130 en 1129, puis Louis VII en 1131 et Philippe II Auguste en 1179.

Le domaine royal

La base territoriale et économique de la puissance des premiers Capétiens, c'est le domaine royal. Au sens strict, le domaine royal est composé d'un ensemble de biens matériels châteaux, terres, moulins, de droits et de redevances, de vassaux directs et de rapports privilégiés avec certains évêchés, monastères et églises ; mais, comme ces ressources sont surtout concentrées dans certaines régions où le roi exerce un pouvoir direct, il est concrètement, sinon juridiquement, permis d'évaluer le domaine en termes territoriaux. Le domaine, essentiellement composé en 987 des biens patrimoniaux des Robertiens, ancêtres d'Hugues Capet, comprenait, autour du grand axe Paris-Orléans, de la Seine à la Loire, voies économiques de premier ordre, des terres fertiles qui connurent un défrichement énergiquement mené et une forte poussée démographique. Les principales acquisitions de la période il y eut aussi des pertes : mouvance du Vendômois, comté de Dreux furent Sens, Bourges, le Vexin français, le Gâtinais, la mouvance du Forez. Mais, outre les défrichements et l'équipement rural, les rois créèrent des villeneuves et favorisèrent la puissance économique des villes de leur royaume – foires et marchés –, notamment à Paris. Louis VI crée sur la rive droite le marché neuf des Champeaux, noyau du quartier des Halles. Sur ces domaines, les Capétiens installent au XIe siècle des agents domaniaux, les prévôts, chargés de percevoir droits et redevances.
Face aux grands féodaux, le roi sut user non seulement de ses droits de seigneur sur ses vassaux directs, mais il se refusa à prêter l'hommage pour les fiefs qui faisaient de lui un vassal par exemple, vassalité de l'abbaye de Saint-Denis pour le Vexin et, au cours du XIIe siècle, chercha à imposer en théorie et en pratique la suzeraineté royale à tous les seigneurs du royaume. Dans ce domaine, les Capétiens – notamment Louis VI le Gros – réduisirent les châtelains brigands Hugues de Puiset, Bouchard de Montmorency, Thomas de Marle, occupèrent ou détruisirent leurs donjons Montlhéry, 1104 ; Le Puiset, 1112 ; Coucy, 1130, et assurèrent la tranquillité et la prospérité des églises, des paysans et des marchands. Les premiers Capétiens favorisèrent aussi en général l'essor urbain et le mouvement communal, qu'il s'agisse de communes rurales coutumes de Lorris octroyées par Louis VI ou de véritables villes Louis VII aurait tenté de faire reconnaître l'appartenance de toutes les villes communales du royaume au domaine royal.
Si Robert le Pieux alla tenir une cour à Toulouse, les liens du Midi avec les Capétiens se distendirent pourtant encore dans la seconde moitié du XIe siècle. Louis VII ne se contenta pas d'intervenir en Auvergne et de séjourner en Languedoc. En épousant, en 1137, Aliénor, fille et héritière de Guillaume X d'Aquitaine, il parut étendre le domaine royal et la puissance capétienne vers le sud d'une façon décisive ; mais, en 1152, il divorça et Aliénor se remaria avec Henri Plantagenêt. Pis encore, Henri Plantagenêt devint en 1154 roi d'Angleterre et la menace qui pesait sur la monarchie capétienne depuis qu'en 1066 le duc de Normandie était devenu roi d'Angleterre et que le Capétien avait ainsi en Normandie un vassal, roi aussi et plus puissant que lui, devint plus précise et plus grave. L'empire Plantagenêt, outre l'Angleterre, comprenait en France la Normandie, l'Anjou, l'Aquitaine, presque tout l'Ouest, en dehors de la Bretagne, pratiquement indépendante. À l'est, face à l'empereur, les Capétiens avaient remporté un succès de prestige en 1124. L'empereur Henri V menaçant de détruire Reims, Louis VI appela à l' ost royal, en tant que suzerain, des contingents de tous les seigneurs ecclésiastiques et laïques, n'essuya aucun refus et Henri V, intimidé, n'insista pas. Cet épisode fut, dès l'époque, considéré comme une manifestation d'unité nationale autour du roi capétien.

Un caractère sacré

C'est surtout dans le domaine religieux que les Capétiens connurent de grands succès de prestige. Déjà Hugues Capet avait dû beaucoup à l'Église : à l'évêque Adalbéron de Reims son intervention décisive à Compiègne, aux abbayes royales un soutien efficace. Les abbayes de Fleury Saint-Benoît-sur-Loire, puis de Saint-Denis jouèrent un rôle décisif dans l'établissement d'une historiographie capétienne – où une généalogie imaginaire rattachait d'ailleurs Hugues Capet à Charlemagne, source de tout prestige monarchique – et d'une mystique monarchique. En même temps, l'idée d'une division de la société en trois catégories : clercs, chevaliers, travailleurs, faisait du roi capétien le guide nécessaire de cette troïka poème au roi Robert le Pieux de l'évêque Adalbéron de Laon. Des clercs furent les conseillers efficaces des rois qui, en retour, comblaient de dons et de privilèges églises et abbayes. Le plus célèbre de ces ministres fut Suger, abbé de Saint-Denis, conseiller de Louis VI et de Louis VII, régent pendant la IIe croisade mort en 1151. Louis VII dut un grand prestige à sa participation, avec l'empereur, à cette IIe croisade 1147-1149 et à son pèlerinage à Saint-Jacques-de-Compostelle 1154. Les rois capétiens acquirent, sur deux plans en particulier, une auréole sacrée. Malgré certains épisodes de leur vie privée, plusieurs d'entre eux, aidés par les écrivains ecclésiastiques, firent figure de dévots, sinon de saints : à Robert le Pieux, le moine Helgaud de Fleury consacre une véritable hagiographie ; Suger décrit la mort de Louis VI comme celle d'un saint ; Aliénor reproche à Louis VII de vivre comme un moine. Et surtout, le roi capétien prend un caractère sacré à cause du sacre et de son pouvoir miraculeux. Lors de la cérémonie qui se déroule à Reims au cours du XIe siècle, le Capétien est oint du chrême qui tend à l'assimiler à un évêque et lui confère une auréole d'autant plus grande que, selon la légende, le chrême aurait été apporté à saint Remi par une colombe pour le baptême de Clovis. Enfin, dès Robert le Pieux, le roi avait la réputation de guérir certains malades en les touchant et, sous Philippe Ier, la croyance s'instaura qu'il guérissait par simple toucher les écrouelles ou scrofules adénite tuberculeuse.

Les grands Capétiens et l'unité territoriale 1180-1314

De Philippe II Auguste 1180-1223 à Philippe IV le Bel 1285-1314, cinq souverains d'envergure, dont trois ont un règne d'une longueur et d'une importance exceptionnelles Philippe Auguste, Louis IX et Philippe le Bel, règnent sur un pays qui devient le plus prospère, le plus puissant et le plus prestigieux de la chrétienté. Les Capétiens recouvrent la plus grande partie des domaines passés sous domination anglaise, étendent l'influence de la monarchie aux régions touchées par le commerce maritime, en Méditerranée, dans l'Atlantique et la Manche, en mer du Nord. Ils rattachent solidement au royaume et au domaine royal le midi de la France et renforcent la « centralisation » monarchique. Mais, dès la fin du règne de Saint Louis 1226-1270, apparaissent des difficultés liées aux transformations de l'économie, en particulier au développement du secteur monétaire et à la crise des revenus seigneuriaux ainsi qu'aux luttes sociales dans les villes.

L'essor économique

Au début du XIVe siècle, le roi de France est réputé le plus puissant de la chrétienté parce que la population de son royaume est la plus nombreuse vingt millions environ contre quatorze à l'Allemagne, quatre à l'Angleterre. Le développement des échanges extérieurs et intérieurs a entraîné, à peu près au même moment qu'à Gênes, Florence et Venise et avant les autres États européens, la reprise de la frappe de l'or écu de Saint Louis, 1263 et l'émission de gros d'argent. Les défrichements ont continué en beaucoup de régions et les rendements se sont élevés, notamment sur certains domaines bien gérés aux terres fertiles, en Artois notamment. Deux produits ont pris au XIIIe siècle une grande importance dans les exportations françaises : le vin et le sel. Les revenus du roi de France lui permettent de mener une politique d'achat de fidélités, surtout de part et d'autre des frontières du royaume, dans le Nord-Est et l'Est, en bordure de l'Empire, en distribuant des fiefs de bourse ou fiefs-rentes. Paris devient, grâce à la présence habituelle du roi capétien et de ses services, une capitale prospère et forte Halles et murailles de Philippe Auguste, réglementation des corporations sous Saint Louis conservée dans le Livre des métiers du prévôt Étienne Boileau, peuplée 200 000 habitants au début du XIVe siècle, de loin la plus populeuse de la chrétienté, rayonnant par son Université statuts de 1215 et de 1231 – on dit que l'Italie a le pape, l'Allemagne l'empereur, la France l'Université, son art Notre-Dame de Paris, Sainte-Chapelle, ateliers de miniatures et d'ivoires. Louis IX fournit à la chrétienté le modèle vivant du roi chrétien, et sa canonisation en 1297 rehausse le prestige de la dynastie capétienne et du royaume de France.

Le roi, empereur en son royaume

Dès 1190, la chancellerie royale emploie parfois à la place de rex Francorum, « roi des Francs », le titre de rex Francie, « roi de France », attestant l'unification du royaume. L'expression devient usuelle en 1204 et le terme de regnum Francie, royaume de France, apparaît en 1205. Le terme de couronne, de plus en plus usité, reflète la croyance en une idée et une réalité monarchique transcendant la personne du roi. Celui-ci devient « empereur en son royaume », ce que le pape Innocent III reconnaît de facto dans la lettre Per venerabilem (1202). À la fin de la période, une violente querelle entre Philippe IV le Bel et le pape Boniface VIII se termina par l'affirmation de l'entière souveraineté du Capétien au temporel : il récusait aussi bien l'ingérence du pape au nom des « deux glaives » que celle de l'empereur. À cette époque, les conseillers du roi, formés dans les facultés de droit (à Orléans, Toulouse ou Montpellier, car Paris n'avait pas de faculté de droit civil) et nommés pour cette raison les « légistes », mirent au point la théorie du roi non seulement « empereur en son royaume », mais aussi supérieur aux lois, rex solutus legibus.

L'extension du domaine royal

Cependant, les grands Capétiens avaient soutenu contre les rois d'Angleterre des luttes où ils remportèrent des succès décisifs qui accrurent considérablement le domaine royal malgré l'amputation répétée de certains grands fiefs donnés en apanage à des frères ou à des fils de roi. Entre 1203 et 1205, le roi d'Angleterre Jean sans Terre ayant été condamné par la cour de France à la perte de ses domaines français pour félonie 1202, Philippe Auguste conquit la Normandie, le Maine, l'Anjou, la Touraine, le nord du Poitou et de la Saintonge. En 1214, la victoire remportée à Bouvines par Philippe Auguste sur l'empereur et le comte de Flandre alliés à l'Angleterre fit du Capétien le plus puissant seigneur de son royaume et d'Europe. En 1224, Louis VIII soumit l'ensemble du Poitou et de la Saintonge et prit La Rochelle, grand port du vin, au roi d'Angleterre qui ne conservait que la Guyenne avec Bordeaux. Saint Louis, après avoir repoussé une attaque d'Henri III, fit renoncer le roi d'Angleterre à ses droits sur les territoires perdus et lui fit prêter hommage pour la Guyenne et divers domaines dans le Sud-Ouest traité de Paris, 1258.
Les Capétiens mirent aussi la main, outre diverses acquisitions secondaires, sur le comté de Mâcon, sur la Champagne et la Brie dont l'annexion définitive au domaine royal ne se fit qu'en 1361, et Philippe le Bel fit entrer dans la mouvance française une partie du Barrois, la châtellenie de Tournai et Lyon.
Surtout, les Capétiens firent au XIIIe siècle des progrès décisifs dans le Midi à la faveur de la croisade contre les Albigeois. L'intervention de Louis VIII puis de Saint Louis, sous la régence de Blanche de Castille, valut au Capétien, au traité de Paris 1229, le Bas-Languedoc futures sénéchaussées de Beaucaire-Nîmes et de Carcassonne-Béziers et l'expectative du reste des domaines du comte de Toulouse Toulousain, Albigeois, Rouergue, Quercy et Agenais pour son frère, Alphonse de Poitiers, et sa femme, Jeanne de Toulouse. L'influence capétienne, forte à travers Alphonse à partir de 1249, se transforma en possession à la mort d'Alphonse et de Jeanne en 1270. Inaugurée par Simon de Montfort au début du siècle, la pénétration française par les coutumes du Nord, le droit romain et les lents progrès de la langue d'oïl se développa avec les fonctionnaires capétiens. La solution des problèmes territoriaux dans le Midi fut complétée par le traité de 1258 avec le roi d'Aragon renoncement du Capétien au Roussillon et à la Catalogne, de l'Aragonais au Languedoc, l'entrée de Montpellier dans la mouvance française 1293 et l'acquisition du comté de Bigorre en 1293. Mais la Navarre ne fut que provisoirement réunie à la Couronne 1314-1316.
Ainsi les Capétiens s'installaient solidement sur les façades maritimes où renaissait le commerce international, en Méditerranée où était fondée Aigues-Mortes, dans l'Atlantique d'où les « rôles d'Oléron » définissant à la fin du XIIe siècle le droit maritime pour les bateaux transporteurs de sel se diffusèrent en Flandre, en Angleterre et dans la Baltique, dans la Manche où la conquête de la Normandie fut complétée par l'acquisition du port de Honfleur 1281, dans la mer du Nord enfin où les « affaires de Flandre » prirent une importance capitale sous Philippe le Bel qui y connut des fortunes diverses.

La centralisation monarchique

Une fois leur domaine dilaté et leur royaume affermi, les grands Capétiens consolidèrent leur pouvoir grâce au développement d'une administration centralisée. Dans le domaine apparaissent sous Philippe Auguste des fonctionnaires royaux, représentants du roi et de ses prérogatives, les baillis, qui se stabilisèrent au cours du XIIIe siècle dans des circonscriptions territoriales ou bailliages (dans certaines provinces, ces officiers et leur ressort gardèrent, dans leurs fonctions nouvelles, le vieux terme de sénéchal et de sénéchaussée). Des « enquêteurs royaux » allèrent, à partir de Saint Louis, contrôler l'action des fonctionnaires royaux, réparer les torts éventuels des monarques et rétablir les droits que baillis et sénéchaux avaient pu laisser usurper ou bafouer. La domesticité du roi se développa et constitua un « hôtel » qu'une série d'ordonnances organisèrent à partir de 1261. Sur le plan financier, Philippe le Bel retira en 1295 son Trésor du Temple et le confia à une Chambre ou Cour des comptes. Sous Saint Louis, l'appel à la justice royale personnelle (image du roi rendant la justice sous un chêne à Vincennes) ou institutionnelle se développa au point que la Cour du roi fut débordée. Aussi une juridiction spéciale, le Parlement, s'instaura peu à peu ; elle était pratiquement constituée à la fin du règne de Philippe le Bel. Mais en 1307, le règlement qui l'organisa reçut encore le nom d'« ordonnance des parlements » au pluriel.

Vers 1280, le bailli Philippe de Beaumanoir, rédacteur et commentateur des Coutumes de Beauvaisis, déclare que le roi, ministre de Dieu pour le bien et souverain par-dessus tous, peut faire tous établissements pour le commun profit ». Mais il doit les faire à une triple condition : 1. par grand conseil après consultation de son entourage et des grands ; 2. pour le profit commun ; 3. conformément aux lois divines et humaines. Ainsi s'établissait une nouvelle image du roi et du pouvoir royal, alliant la tradition féodale, les nouvelles théories des canonistes et des légistes, l'idéal religieux transformé qui, sous l'influence notamment des ordres mendiants (Dominicains et Franciscains auxquels Saint Louis était très favorable, insistait sur la pratique des vertus et des œuvres plus que sur le respect des rites. En même temps, la royauté devenait aussi nationale par la langue. En 1274, les Grandes Chroniques de France, à la gloire de la dynastie capétienne, rédigées en latin à Saint-Denis, furent traduites en français par le moine Primat. Enfin Philippe le Bel innova dans les rapports de la monarchie avec la nation en convoquant des assemblées de barons, prélats et représentants des villes pour en recevoir des avis en 1302, 1303, 1308 et, limitées semble-t-il à des délégués de certaines villes, en 1309 et 1314. Mais ces assemblées issues de la tradition féodale du « conseil » n'avaient aucun droit à contrôler la royauté, elles n'avaient rien de parlementaire au sens moderne du terme. Elles étaient appelées simplement à donner des avis ou même à accepter des demandes royales et à entériner des décisions du monarque. Il reste que cet embryon de représentation nationale – des historiens y ont vu les premiers états généraux – était né à l'occasion de difficultés rencontrées par la monarchie : en 1302 et 1303 à propos du conflit avec la papauté, en 1308 au sujet de l'affaire des Templiers et des problèmes monétaires, en 1314 sur la question des monnaies et la levée d'un subside pour la guerre.

Difficultés économiques et monétaires

Dès la fin du XIIIe siècle, l'écroulement des voûtes de la nef de la cathédrale de Beauvais élevées à 64 mètres fut le symbole d'une limite technique atteinte. L'essor économique de la France capétienne s'était essoufflé. Les défrichements s'étaient ici et là arrêtés et les essarts avaient même parfois reculé. La moyenne et petite noblesse avait éprouvé des difficultés croissantes qui avaient frappé châtelains puis simples chevaliers, parfois, comme en Mâconnais, dès la première moitié du XIIIe siècle. Ceux-ci, de plus en plus endettés, accensaient des parties de plus en plus étendues de la réserve domaniale pour lesquelles ils recevaient des cens en argent – qui lui-même se dépréciait – et s'appauvrissaient sans cesse. Les tenures paysannes de leur côté se fractionnaient et se rétrécissaient continuellement. Le fossé, dans les villes, s'élargissait entre riches et pauvres. Grèves et conflits du travail éclatèrent, surtout dans les villes drapantes, à Douai dès 1245, à Paris en 1270, 1277 et 1279, puis à partir de 1280 à Ypres, Bruges, Douai, Tournai, Provins, Rouen, Caen, Orléans, Reims, Béziers, Toulouse. Les difficultés de l'économie se manifestèrent aussi dans le domaine monétaire : l'insuffisance des signes monétaires, les intrigues des marchands italiens qui étaient les principaux conseillers du roi en la matière, le désir de la monarchie de se procurer des ressources en manipulant les monnaies conduisirent à des mutations monétaires qui furent en général l'équivalent de nos dévaluations.
Une réévaluation en 1306 provoqua une émeute des ouvriers et artisans parisiens qui fut durement réprimée : Philippe le Bel fit pendre les meneurs et supprima les corporations. En 1314, la monarchie était devenue très impopulaire et le royaume était au bord de la révolte.

La mise en place d'un État moderne 1314-1498

Plus que du changement de branche dynastique en 1328, c'est de la mort de Philippe le Bel que datent aussi bien les signes manifestes de crise de la monarchie que les efforts d'adaptation du gouvernement royal à la gestion d'un État moderne. Alimenter régulièrement les finances par la levée d'impôts permanents, organiser le gouvernement et l'administration notamment, en matière de justice, par la consolidation du Parlement, défendre le royaume grâce à une armée régulière, associer l'élite sociale du pays à l'action de la Couronne, surtout en période de difficultés, tel fut le programme de plus en plus conscient et systématique des rois capétiens et de leurs conseillers.
Mais ils se heurtèrent à une triple série de difficultés. La crise économique du XIVe siècle et les conséquences de la Grande Peste affaiblirent le potentiel matériel et démographique du royaume. Les luttes sociales réaction seigneuriale, jacquerie, émeutes urbaines entravèrent l'établissement de l'absolutisme royal. La guerre réveillée avec l'Angleterre prit la forme d'un duel engageant l'existence de la dynastie et l'indépendance de la couronne de France.
Ce n'est que dans la seconde moitié du XVe siècle que la dynastie put surmonter ces épreuves : liquider à son profit la guerre de Cent Ans, vaincre les dernières résistances intérieures, favoriser la reprise économique et démographique et même, en se lançant dans l'aventure des guerres d'Italie, pénétrer du même coup dans le monde de la Renaissance.

L'action de la monarchie

Le premier problème qui se pose de façon urgente aux Capétiens après 1314, c'est celui de trouver de l'argent pour subvenir à un train royal de plus en plus fastueux, pour rémunérer fonctionnaires et soldats, de plus en plus nombreux. Entre 1332 et 1344, les recettes royales augmentent de 158 000 livres et les dépenses de 440 000 livres. Pour faire face à cet accroissement, pour financer la guerre, les Capétiens du bas Moyen Âge cherchent à remplacer l'impôt féodal extraordinaire par un impôt permanent. C'est ce que Philippe V cherche à obtenir dès 1321 d'une assemblée de barons, prélats et représentants des villes. Ces efforts se heurtèrent à la résistance opiniâtre des trois ordres de la société et de leurs représentants aux assemblées. De nombreux essais échouèrent entre 1315 et 1356, par exemple celui de la gabelle sur le sel, instituée en 1341, abolie à la demande des états de Paris (pour la langue d'oïl et de Toulouse pour la langue d'oc en 1346. Cependant, la Chambre des comptes était organisée par l'ordonnance de Vivier-en-Brie 1320. La guerre de Cent Ans fournit à la royauté l'occasion décisive d'établir l'impôt. Ce fut fait entre 1356 et 1370 : impôts directs le fouage et la taille et indirects les aides, parmi lesquelles la gabelle sur le sel reprise en 1355-1356, définitive à partir de 1383.
Ce processus ne s'accomplit cependant pas sans difficultés ni sans abandons, même de la part de la monarchie. Charles V abolit sur son lit de mort 16 sept. 1380 tous les fouages, qui ne furent rétablis qu'en 1388. En 1417, Jean sans Peur supprima également les aides dans les pays de langue d'oïl, à l'exception de ses domaines ; Charles VII les rétablit en 1436. La levée de ces impôts entraîna la création de nouveaux fonctionnaires et de nouvelles institutions : les élus chargés de lever les aides, les greniers à sel pour la gabelle 89 entre 1355 et 1422, 139 sous Charles VII, les généraux chargés d'organiser les aides et de surveiller les élus 4 à la fin du règne de Charles VII, à Tours, Montpellier, Paris et Rouen, la Chambre ou Cour des aides organisée à la fin du XIVe siècle.
Le Parlement, d'où les clercs furent exclus en 1319, fut définitivement organisé par l'ordonnance du 11 mars 1345 avec ses trois Chambres : Grand-Chambre ou Chambre des plaids, Chambre des enquêtes et Chambre des requêtes. Parallèlement à la justice, les rois organisent la police de Paris, confiée au prévôt qui siégeait au Châtelet, prison et cour de justice criminelle qui, au cours du XVe siècle, étendit largement son action hors de Paris.
Le Parlement, ainsi que les justices du Châtelet et des bailliages et sénéchaussées, engendra toute une société nouvelle de gens de loi dépendant de la monarchie : parlementaires de plus en plus laïques et roturiers, mais constituant bientôt de puissantes familles, procureurs se formant en confrérie de Saint-Nicolas et Sainte-Catherine en 1342, avocats organisés en corporation en 1340-1345, greffiers confrérie en 1351, notaires confrérie en 1351, huissiers, sergents, clercs de la basoche.
Dans le domaine militaire, l'engagement de plus en plus important de combattants soudoyés amènera l'apparition, vers la fin du règne de Philippe VI, de véritables entrepreneurs militaires se faisant appeler capitaines semblables aux condottieri italiens qui offraient aux princes les services de leur route ou compagnie. Bientôt apparut le danger de certaines de ces bandes, les Grandes Compagnies. Charles V tenta d'organiser les routiers par des ordonnances de 1373 et 1374, mais celles-ci restèrent lettre morte. Il fallut attendre 1445 pour que des progrès décisifs soient réalisés dans ce domaine.
Aux XIVe et XVe siècles, les rois de France multiplièrent la convocation d'assemblées, sur le modèle de celles qu'avait réunies Philippe le Bel. Mais, plus que l'aide qu'ils en attendaient, ces assemblées leur causèrent des difficultés, soit en repoussant leurs demandes, soit en cherchant à contrôler l'administration royale. Il est vrai que les souverains et une partie de leur entourage n'étaient pas disposés à accepter une sorte de monarchie constitutionnelle et que, s'ils s'éloignèrent de formes monarchiques proprement féodales, ce fut pour affirmer leur supériorité à partir de la théorie des droits régaliens d'une part, du caractère sacré de la Couronne de l'autre.
En matière régalienne, les souverains affirmèrent et firent respecter leur monopole de frappe de la monnaie, de contrôle des poids et mesures, de levée de l'impôt. Dans le domaine du sentiment, ils développèrent un faste et un rituel monarchiques destinés à impressionner Cour, cérémonies publiques : baptêmes, mariages, funérailles, entrées solennelles dans les villes ; ils tendirent à faire de la famille royale tout entière une sorte de famille sacrée, celle des princes du sang. Charles V donna une impulsion décisive à cette évolution en favorisant d'une part les écrits de conseillers traitant de la monarchie sacrée l'auteur anonyme du Songe du verger ; Jean Golein, avec sa traduction en 1372 du Rational des divins offices de Guillaume Durand où il inséra un Traité du sacre, d'autre part en faisant traduire les principaux traducteurs sont ses conseillers Nicolas Oresme et Raoul de Presles des œuvres de l'Antiquité païenne et chrétienne saint Augustin et surtout Aristote où puiser une théorie et une pratique de la monarchie rationnelle et de droit divin. C'est alors que se charge d'un sens spécial l'expression de roi très chrétien dont l'exclusivité est réclamée pour le roi de France. Il faut replacer dans ce climat l'importance exceptionnelle du sacre de Charles VII à Reims pour le succès de la cause de Jeanne d'Arc et du roi de Bourges. Enfin, le sentiment monarchique fut renforcé par la création de l'ordre chevaleresque de l' Étoile par Jean le Bon en 1351.

Les obstacles

Mais l'action monarchique se heurta d'abord à la crise économique et à la mortalité effroyable de la Grande Peste. Une famine générale consécutive à des intempéries reparut en 1315-1317. Les revenus seigneuriaux s'amenuisèrent. Le commerce de luxe traditionnel étoffes de prix recula devant la production et l'exportation de produits de prix et qualité moindres. La Peste noire, à partir de 1348, fit périr un tiers de la population du royaume. Les souverains en mal d'argent aggravèrent ces difficultés par de nouvelles dévaluations monétaires. De 1336 à 1355, les mutations reprirent dans de grandes proportions, surtout pendant la période 1337-1343 ; mais ces mesures, défavorables pour les rentiers, c'est-à-dire les seigneurs, aidaient débiteurs et locataires. Inversement, la stabilisation de la monnaie, sous Charles V, à partir de 1360, consacra les privilèges des possédants et le mécontentement des salariés s'accrut d'autant plus que, dès 1350, le roi Jean le Bon avait freiné par ordonnance royale la hausse des salaires consécutive aux ravages de la Peste noire. Les mutations, sous la pression des besoins militaires, reprirent à la fin du règne de Charles VI et au début de celui de Charles VII.

Les mécontentements divers et contradictoires amenèrent des réactions qui se tournèrent souvent contre la monarchie et ses prétentions fiscales et administratives. En 1315 éclata le soulèvement qui couvait sous Philippe le Bel et qui prit souvent un aspect régional derrière lequel se camouflaient les intérêts des privilégiés seigneuriaux, mais également toutes sortes de revendications. Louis X 1314-1316 dut concéder des chartes à presque toutes les provinces. Cependant, ces concessions étaient disparates, souvent de pure forme, et elles avaient été arrachées en ordre dispersé, sans que la masse se fût émue. Si elles retardèrent les progrès de l'autorité monarchique, elles ne l'empêchèrent pas.
En 1355, des états généraux consentirent à Jean le Bon la levée d'un impôt, mais lui imposèrent un strict contrôle de son emploi. Réunis à nouveau à Paris en octobre 1356 (il s'agit toujours des états de langue d'oïl, ceux de langue d'oc, assemblés à Toulouse, se montrant beaucoup plus dociles, après le désastre de Poitiers, ils voulurent sous la conduite de l'évêque de Laon, Robert Lecoq, et d'un riche drapier parisien, Étienne Marcel, prévôt des marchands, imposer au régent Charles de Normandie un véritable régime de monarchie constitutionnelle : une commission de réforme de quatre-vingts membres, des représentants en province pour contrôler les fonctionnaires royaux, un conseil de vingt-huit délégués quatre prélats, douze chevaliers et douze bourgeois, lesquels conseillers auraient la puissance de tout faire et ordonner dans le royaume comme le roi. Pendant deux ans, les états et plus particulièrement le conseil, dominé par les partisans d'Étienne Marcel, gouvernèrent pratiquement la France du Nord. Nobles et prélats se rapprochèrent peu à peu du régent qui louvoyait. Les états de février 1358 limitèrent encore le pouvoir royal ; une émeute populaire se déchaîna, massacra les conseillers du régent en sa présence et Charles dut admettre au conseil Étienne Marcel et ses partisans. Mais, fin avril, il s'enfuit de Paris et organisa la reprise du pouvoir, tandis qu'Étienne Marcel, paraissant malgré lui compromis avec le bas peuple, les paysans révoltés, les Jacques, et même avec le roi de Navarre, Charles le Mauvais, qui intriguait avec les Anglais, perdait l'appui de la bourgeoisie parisienne. Dans la nuit du 31 juillet au 1er août, Étienne Marcel était assassiné. La révolution parisienne était finie et la France avait perdu sa meilleure occasion d'instaurer une monarchie constitutionnelle. Le régent, bientôt roi, reprit habilement celles des mesures de 1356-1358 qui pouvaient servir à la monarchie ; mais il s'agissait de réformes octroyées et, si le pays pouvait conseiller, il lui était interdit de contrôler.

Au début du règne de Charles VI, une série d'émeutes urbaines, dont la plus spectaculaire fut celle des Maillotins à Paris 1382, révéla le malaise social qui se manifestait contre les agents du roi. Une tentative plus profonde eut lieu en 1413. Des représentants de l'Université et de la bourgeoisie présentèrent aux princes en février 1413 un programme de réformes très proches de celles prônées un demi-siècle plus tôt par Étienne Marcel. Les princes tergiversant, une violente émeute populaire dirigée par la corporation des bouchers, riches comme les grands bourgeois mais méprisés par eux et rejetés vers le peuple, imposa à la Cour une ordonnance de réforme, l'ordonnance cabochienne, du nom du chef des bouchers, Caboche, qui instaurait un contrôle efficace de l'administration royale et qui a été définie comme le plus beau programme de réformes qu'ait connu un État au Moyen Âge R. Fawtier. Elle fut abolie dès septembre 1413 par la Cour royale qui dirigea une féroce répression dans Paris. Cette attitude traditionnelle de la monarchie à l'égard du peuple parisien jeta la capitale dans les bras du duc de Bourgogne et même dans une certaine collaboration avec les Anglais. C'est de ceux-ci que vint le plus mortel péril pour la monarchie capétienne aux XIVe et XVe siècles. En 1316, le problème de la succession royale se pose pour la première fois depuis 987. Louis X, à sa mort, le 5 juin 1316, ne laissait qu'une fille de quatre ans, mais la reine était enceinte. Le fils qui naquit le 15 novembre mourut quatre jours après. La couronne fut donnée par une assemblée de grands au frère de Louis X, Philippe, à qui avait été confiée la régence. En 1322, même situation à la mort de Philippe V : une fille et la reine enceinte. Même résultat ; le nouveau-né étant une fille, le troisième fils de Philippe le Bel prit la couronne. Même situation encore à la mort de Charles IV en 1328, mais il n'y avait plus de fils de Philippe le Bel et le régent à désigner avait toutes les chances, si le nouveau-né était une fille ou ne survivait pas, d'être le prochain roi. L'assemblée de grands et de notables, qui avait à choisir entre le roi d'Angleterre, Édouard III, petit-fils de Philippe le Bel par sa mère, Philippe, comte de Valois, petit-fils de Philippe III par son père, et Philippe, comte d'Évreux, petit-fils également de Philippe III et mari de la fille de Louis X le Hutin, n'hésita guère. Les décisions de 1316 et de 1322 avaient déjà écarté les femmes du trône et, par conséquent, de la transmission du droit de succession la loi dite salique ne fut invoquée par des juristes qu'à l'époque moderne ; ce qui semble avoir été déterminant, c'est que l'action du sacre était une sorte d'ordination et que l'Église n'ordonnait pas des femmes. En ce qui concernait Édouard III, sa jeunesse et surtout le fait qu'il était étranger contribuèrent à sa disqualification. Philippe de Valois devint Philippe VI.
Tout sembla alors réglé. Édouard III prêta hommage à Philippe VI pour la Guyenne en 1329. Mais, lorsque le conflit pour la possession de la Guyenne entraîna en 1337 une rupture qui était le commencement de la guerre de Cent Ans, Édouard revendiqua publiquement, le 7 octobre 1337 à Westminster, la couronne de France. Pourtant, si les désastres de la guerre de Cent Ans mutilèrent pratiquement la France d'un tiers environ de son territoire au traité de Brétigny 1360, il n'y eut pas de véritable menace dynastique anglaise, même quand, après Poitiers (1356), Jean le Bon fut prisonnier d'Édouard III à Londres. En revanche, après Azincourt 1415, le traité de Troyes 1420 faisait du roi d'Angleterre Henri V le successeur de Charles VI et, à sa mort, les deux couronnes devaient rester unies à jamais sous lui et ses successeurs. Mais le dauphin Charles n'accepta pas son déshéritement. Ses partisans (Jean de Terre-Rouge dans le Traité de la succession à la Couronne et les Droits du Dauphin) invoquèrent la nullité juridique des clauses dynastiques du traité de Troyes, une succession au trône ne pouvant être assimilée à une succession privée comme l'avait déjà dit le Songe du verger. La résistance du «roi de Bourges , les succès de Jeanne d'Arc, le sacre de Reims 1429, les victoires des armées de Charles VII sur celles d'Henri VI, roi d'Angleterre et de France , rendirent définitivement couronne et royaume à la dynastie.

Les succès et leurs causes

Au milieu de terribles épreuves, la lutte contre l'étranger a apporté à la monarchie un soutien inappréciable, celui du sentiment national. La remontée démographique et économique qui s'amorçait permit alors à Charles VII et à son fils et successeur Louis XI (1461-1483) d'accélérer le retour aux progrès monarchiques.
L'unité territoriale de la France et l'agrandissement du domaine royal s'accomplirent d'abord par la récupération de toutes les possessions anglaises, y compris la Guyenne, perdue depuis le milieu du XIIe siècle, et excepté Calais. Cette récupération fut effective en 1453. Ces apports au domaine furent complétés par les annexions du XIVe siècle le Dauphiné et Montpellier sous Philippe VI et les acquisitions de Louis XI : la Cerdagne et le Roussillon conquis en 1463, rendus par Charles VIII en 1482, le duché de Bourgogne et la Picardie, après la mort de Charles le Téméraire 1477, l' Anjou, le Barrois et la Provence par héritage de Charles du Maine 1481. Charles VIII épousait enfin en 1491 Anne, héritière du duché de Bretagne. La monarchie française avait repris l'Ouest et débordé, à l'est et surtout au sud-est, jusqu'aux Alpes et à la Méditerranée.
L'autorité monarchique fut restaurée et renforcée. Charles VII créa enfin une armée permanente par une série d'ordonnances de 1445 à 1448 qui réorganisèrent le service des nobles, réglementèrent le service des communes, créèrent des unités de cavaliers compagnies d'ordonnances et de fantassins francs-archers et arbalétriers. Louis XI recruta surtout son infanterie parmi des mercenaires étrangers : les Suisses.
Depuis longtemps, sous Philippe le Bel en tout cas et davantage encore à l'époque du Grand Schisme 1378-1417, une partie du haut clergé français avait pris ses distances vis-à-vis de la papauté. La Pragmatique Sanction de Bourges 1438 sembla sanctionner ce gallicanisme en faisant désigner les évêques et abbés par élection et en limitant considérablement les droits du Saint-Siège en matière de bénéfice, d'appel et de taxes. Mais, plus que l'existence d'une Église nationale, ce qui intéressait le roi, c'était la nomination des évêques, et Louis XI pensa qu'il était plus commode de s'entendre à ce sujet avec le pape. Malgré les vives protestations du Parlement, il abolit la Pragmatique Sanction dès 1461 ; mais un concordat entre la royauté et la papauté ne fut signé qu'en 1516.
Les souverains surent enfin utiliser les états généraux au profit de leur politique. Charles VII obtint d'eux les subsides nécessaires pour achever la guerre de Cent Ans. Louis XI ne les réunit qu'une fois, en 1468, pour se faire relever de la promesse de constituer la Normandie en apanage pour son frère Charles. Au début du règne de Charles VIII, les régents convoquèrent les états généraux en 1484. Pour la première fois nationaux toutes les provinces étaient représentées, pays d'oc comme pays d'oïl), illustrés par l'éloquence et le sérieux des délégués du tiers état, ils cherchèrent de nouveau à imposer leur contrôle à la monarchie. Mais l'égoïsme de la noblesse et du clergé, l'hostilité sournoise de la Cour en firent une manifestation qui n'eut d'autre lendemain que la crainte qu'elle laissa au pouvoir monarchique et aux privilégiés.
Charles VIII meurt sans héritier en 1498, à la fin du Moyen Âge. Il laisse la couronne à une autre branche capétienne, celle des Valois-Orléans représentée par son cousin Louis d'Orléans. La dynastie capétienne a alors solidement affermi son pouvoir en France, mais en laissant une assez large autonomie aux parlements provinciaux qui combinent loyalisme monarchique et particularisme. Les distances, la difficulté de maîtriser l'espace demeurent la principale limitation au pouvoir royal.
Si l'on ne croit plus que la valeur individuelle des rois (la plupart d'entre eux n'ont été ni des guerriers valeureux, ni des politiques intelligents, mais des hommes faibles et parfois malades) ait bâti la monarchie et fait la France, les causes qui ont assuré le triomphe de l'idée monarchique restent mal élucidées. La tradition jacobine leur a conservé le mérite de l'unité nationale (territoriale, centralisatrice, sentimentale)
Les rapports de la Couronne avec les féodaux, l'Église, la bourgeoisie montante, le peuple étaient ambigus et demeurent obscurs. S'il faut accorder à l'entourage royal – qui a socialement et intellectuellement changé, des grands officiers du XIe siècle aux juges, aux légistes, aux conseillers bourgeois – une grande importance dans l'œuvre capétienne, il n'est pas sûr qu'ils aient eu d'une politique systématique une conception beaucoup plus claire que celle des souverains (attitudes à l'égard des apanages, des monnaies, de l'Église). Si les Capétiens ont joué et bénéficié du sentiment national, ils n'ont pas eu, et ils l'ont montré face aux assemblées et aux états généraux, la volonté d'associer vraiment une représentation nationale à leur pouvoir. S'ils ont eu le sens de la supériorité de la Couronne sur leur personne, ils n'ont pas eu celui d'une responsabilité envers la nation, mais envers Dieu, se réservant jalousement à partir du XIVe siècle l'expression : par la grâce de Dieu.

Lien
http://youtu.be/kc3StB2Mafk Robert II le pieux



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Posté le : 19/07/2014 13:28

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Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
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