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Jacques Lacan 1
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Le 13 avril 1901 à Paris 3ème, naît Jacques Lacan,

psychiatre et psychanalyste français


Docteur en médecine, psychiatre en 1932, il se spécialise en Psychanalytique
Auteurs associés, il a pour détracteurs Sacha Nacht et pour partisans, Françoise Dolto, Serge Leclaire, Jean-Bertrand Pontalis, Octave Mannoni, Moustapha Safouan, Jacques-Alain Miller, Élisabeth Roudinesco, ses principaux travaux sont : Psychanalyse - Stade du miroir - Réel, symbolique et imaginaire - Signifiant - Sujet de l'inconscient - Forclusion, il meurt le 9 septembre 1981, à 80 ans à Paris 6e

Après des études de médecine, Lacan s'oriente vers la psychiatrie et passe sa thèse de doctorat en 1932. Suivant également une psychanalyse avec Rudolph Loewenstein, il intègre la Société psychanalytique de Paris SPP en 1934, et en est élu membre titulaire en 1938. Ses premières communications, qui concernent son interprétation de l'épreuve du miroir empruntée à Françoise Dolto, donnent lieu à l'invention du stade du miroir en psychanalyse.

C'est après la Seconde Guerre mondiale que son enseignement de la psychanalyse prend de l'importance. Tout en se réclament d’un freudisme véritable — le retour à Freud —, son opposition à certains courants du freudisme notamment l’Ego-psychology, l'aspect novateur de ses thèmes et sa conception de la cure conduisent à des scissions avec la SPP et les instances internationales. Tout en poursuivant ses recherches, Lacan donne des séminaires de 1953 à 1979, soit quasiment jusqu'à sa mort : successivement à l'hôpital Sainte-Anne, à l'École normale supérieure, puis à la Sorbonne.
Lacan a repris et interprété l'ensemble des concepts freudiens, mettant à jour une cohérence dégagée de la biologie et orientée vers le langage, en y ajoutant sa propre conceptualisation et certaines recherches intellectuelles de son époque tel le structuralisme et la linguistique. Lacan compte parmi les grands interprètes de Freud et donne naissance à un courant psychanalytique : le lacanisme.
Figure contestée, Lacan a marqué le paysage intellectuel français et international, tant par les disciples qu'il a suscités que par les rejets qu'il a provoqués.

Les deux thèses lacaniennes

Jacques Lacan a dominé pendant trente ans la psychanalyse en France. Il l'a marquée de son style ; il y laisse une trace ineffaçable. Aimé et haï, adoré et rejeté, il a suivi sa voie sans s'en écarter, ne laissant personne indifférent, s'imposant même à ceux qui ne voulaient pas de lui. Pour les psychanalystes, son œuvre et sa pensée sont incontournables, quelles qu'en soient les contraintes, les difficultés, voire les limites. Il n'a pas seulement, comme les élèves de Freud puis les analystes de la seconde génération tels Melanie Klein, Donald W. Winnicott et Wilfred R. Bion, enrichi la psychanalyse d'un apport original et personnel. Il a été le seul à reprendre et refondre dans son ensemble l'œuvre du fondateur, et à lui rendre l'hommage de la cohérence des voies et des rigueurs auxquelles elle dut se plier pour produire et imposer l'existence de l'inconscient. Il fut le seul à se donner la double ambition de faire revivre une parole à ses yeux oubliée et trahie, et de tenter d'y égaler la sienne.
L'essentiel de l'apport théorique de Lacan a consisté à poser ces deux énoncés corrélatifs, "l'inconscient est le discours de l'Autre" et "l'inconscient est structuré comme un langage" . En fin de carrière, il a ajouté une structure pseudo-topologique dans la structuration des trois instances, le réel, le symbolique et l'imaginaire, en dessinant une figure appelée le nœud borroméen.

Le désir est le désir de l'Autre

L'Autre n'est pas une autre personne que moi-même, il n'est pas situé hors de moi. L'Autre est d'abord le langage, le lieu du code reconnu par une communauté linguistique dans lequel, dès sa naissance, l'enfant est baigné, et par lequel il est également obligé de se couper de lui-même pour se dire, parler de lui. L'Autre est ainsi l'Autre maternel, primordial et cet Autre pris lui-même dans le langage interprète en fonction de ses signifiants les manifestations de l'enfant. Mais c'est aussi un autre lieu, l'inconscient, du fait de l'intervention d'une métaphore, la métaphore du Nom-du-Père, qui intervient dans le discours de la mère : le père, comme père symbolique la métaphore paternelle, lui apparaît progressivement comme celui qui lui interdit de jouir de sa mère. Il installe pour l'enfant l'ordre du langage qui nomme les liens de parenté et l'interdit de l'inceste. Cette opération fait basculer dans l'inconscient le désir qu'avait l'enfant de capter pour lui seul le désir de la mère. Ainsi se constitue le refoulé originaire.
L'Autre, ainsi constitué par la métaphore paternelle, est aussi le garant de la valeur de la parole. Le sujet qui parle à un autre s'adresse en fait à l'Autre reconnu comme tel. Dans la psychose, la parole atteste justement que cette fonction est défaillante : les hallucinations verbales par lesquelles le sujet psychotique s'entend insulté par tel ou tel illustrent la façon dont la parole ne vaut pour le sujet que dans une sorte de face-à-face imaginaire dans lequel cet Autre n'existe pas. C'est en ce sens que l'Autre est une place dans la structure du sujet.
Lacan a été amené à mettre en avant trois termes qui scandent sa pensée :
1° "le désir est désir de l'Autre" : l'être humain ne se constitue que dans l'Autre et l'objet de son désir est d'abord celui qu'il aperçoit dans l'Autre ;
2° le symbolique, c'est-à-dire l'ordre propre où existe l'être humain : c'est le registre de la parole en tant que dette à accomplir ;
3° le désir est pierre angulaire de l'inconscient, en ceci qu'il est désir d'autre chose : la cause du désir manque et l'objet du désir est, dès l'origine, perdu et, en conséquence, le sujet n'existe que grâce à la castration, qui réarticule le manque et permet d'exister grâce à ce manque.
Si on reprend les choses plus haut, il faut revenir à ce que Freud avait appelé le clivage du sujet. Il s'agit là d'un mécanisme intrapsychique qui conduit à la coexistence chez un même sujet de deux attitudes psychiques opposées et indépendantes l'une de l'autre, maintenues simultanément sans lien entre elles.
S. Freud avait proposé ce terme à propos du fétichisme et des psychoses, et on le retrouve dans bien des tableaux cliniques : une partie du sujet tient compte de la réalité, une autre la dénie – ou encore une part du sujet agit d'une certaine façon tandis qu'une autre part agit d'une autre, sans aucun lien.
Lacan reprend ce terme pour caractériser différents lieux du sujet qui vont se décrire dans ce qu'il appelle une topologie : le clivage constitue pour lui l'effet de ce qu'il appelle bouts de réel, qui existent eux-mêmes sans aucun lien entre eux. Il est ainsi amené à figurer le réel de l'être humain à l'aide d'une représentation topologique qui le représente plus réellement que la réalité même de l'être humain dans son vécu.

Le nœud borroméen

Lacan invente en même temps un mode de transmission du savoir psychanalytique qui va passer par un langage réputé objectif, c'est-à-dire représentable et objectivable, le symbolisme mathématique. En imaginant le nœud borroméen, Lacan inscrit le réel du sujet dans une représentation où le réel, le symbolique et l'imaginaire RSI sont représentés par des cercles imbriqués les uns dans les autres et formant un nœud. Mais il affirme que cette mise à plat du nœud inscrit ce qui peut s'écrire du réel. Cela signifie que le nœud borroméen n'est pas le réel en tant que tel. Suivre le dessin que forment ces trois ficelles liées entre elles, c'est suivre le trou du refoulement primaire qui structure le sujet. Chacun des ronds de ficelle du nœud nomme le RSI, mais n'existe que dans la mesure où il suppose un trou l'intérieur du rond, une consistance imaginaire la surface du rond et une existence dans le réel. Chacun de ces ronds est noué à un autre de telle manière que, si l'on pratique une coupure sur l'un quelconque des ronds, les trois sont dénoués. Il n'y a donc dans ce nœud pas d'ordre possible, et chaque catégorie, ou rond, est nouée aux deux autres. Le réel n'existe qu'à rencontrer par le symbolique et l'imaginaire sa limite. Et ainsi pour chacune des trois catégories.
Ces arrêts réels, non symboliques, produisent donc trois effets nécessaires : symptôme, angoisse, inhibition.
En inventant le nœud borroméen, Lacan a été obligé de réorganiser entre eux plusieurs concepts. La recherche de ce qu'est le réel et la découverte du nœud borroméen vont obliger Lacan à repenser autrement ces trois catégories. L'imaginaire, par exemple, déterminé par la consistance, ne sera plus une instance d'illusion, d'imagination, mais sera tout aussi réel que le symbolique et le réel.

Les effets cliniques du nœud

À son fameux slogan, l'inconscient est structuré comme un langage , Lacan ajoutera cette phrase : …avec une réserve : ce qui crée la structure est la manière dont le langage émerge au départ chez un être humain, Yale University, 1975. Lacan a dû, par exemple, repositionner le symbolique, qui n'est plus placé au-dessus de l'imaginaire et du réel comme on pouvait le déduire de ses écrits antérieurs : il advient comme un rond quelconque.
Apparaît ainsi un quatrième rond, le symptôme, que Lacan nomme sinthôme, qui a une fonction particulière : il ordonne les choses en les différenciant. Le sinthôme oblige à formuler une équivalence entre les Noms-du-Père et les symptômes, comme si sa fonction était en fait de suppléer à une faille fondamentale du Nom-du-Père. Dans la séance analytique, R, S, et I ne sont plus donnés d'emblée, ils doivent être corrélés ou, selon les termes lacaniens, suturés, afin qu'ils puissent tenir ensemble.
L'écriture topologique de Lacan se complétera dans les dernières années de sa vie par ce qu'il appelle la bande de Möbius et le cross-cap.

Conclusion

Que reste-t-il des élaborations lacaniennes ? Une abondance extraordinaire de groupes, de sous-groupes, qui tentent tous de capter tel point de la théorie lacanienne et de le poursuivre au travers de la formation d'écoles, de revues, de réunions de groupe, tout cela en attendant la publication complète et incontestable des œuvres – ce qu'il est aujourd'hui prématuré de prévoir. La liste des œuvres de Lacan est considérable et se présente pour la plupart comme des articles de circonstance. On peut cependant noter : les Écrits 1966, qui regroupent de nombreux textes déjà parus, dont le Séminaire sur la Lettre volée, le Stade du miroir, et quelques-uns des Séminaires, qui, par le succès qu'ils remportèrent auprès des psychanalystes parisiens, constituent des repères importants dans la tradition actuelle, même s'ils n'ont pas encore eu, pour certains, de publication officielle : les Écrits techniques de Freud 5 / 1976, la Topologie et le temps 1978 / 1979.

Sa vie

Jacques-Marie Émile Lacan est le premier enfant d'une famille appartenant à la moyenne bourgeoisie. Son grand père paternel Emile était un placier qui avait épousé la fille de son patron, vinaigrier à Orléans. Il grandit dans l'appartement parisien de ces grands parents, avec lesquels habitent ses parents. C'est un milieu catholique et conservateur. Sa mère, Émilie Baudry, fille de rentier, est très pieuse quand son père, Alfred, responsable financier des mêmes vinaigres Dessaux, accompli ses obligations religieuses sans ferveur remarquable. Son puiné nait en 1902 et meurt d'une hépatite en 1904. Sa sœur Madeleine, qui se mariera avec un cousin et s'installera en Indochine, nait en 1903. Marc, son cadet de sept ans, se fera moine bénédictin sous le nom de François
Enfant tyrannique et lunatique, Jacques Lacan entre au collège Stanislas en 1907, où il suit très brillamment la scolarité primaire et secondaire. À quatorze ans, il découvre l' Éthique, dont il ne jugera que tardivement le point de vue de l'éternité moins tenable pour un être humain que l'impératif moral de Kant. C'est explicitement sur l'impossibilité d'interaction entre corps et esprit établie en logique par Spinoza que, devenu étudiant en médecine, il fondera son rejet d'une explication des délires par la lésion d'un organe. Dans une époque où le fou continue bien souvent d'être vu comme un dégénéré et est enfermé comme un criminel, c'est encore sur l'Éthique qu'il fondera tout aussi explicitement sa démarche de considérer la folie raisonnante non comme une altération de la raison mais comme l'expression d'un désir obéissant à une logique propre, différente du sens commun mais pas moins digne.

La fin de la Grande guerre est une rupture avec son milieu. En classe de philosophie, il reçoit avec un intérêt vif l'enseignement de Jean Baruzi, auteur d'une thèse sur Jean de la Croix, qui pratique aussi Leibniz, Saint Paul et Angelus Silesius. Saint Paul sera une référence importante dans sa réflexion ultérieure sur le désir et la loi. Angelus Silesius sera cité lui aussi à plusieurs reprises. Son père, rentré du front, n'est plus le même, le père aimant de son enfance. Le fils renonce à la foi et découvre Dada à la La Maison des Amis des Livres. Aussi est ce contre l'avis de son père qu'il débute des études de médecine.

La médecine et la langue de 1920 à 1927

Il assiste à la première lecture d'Ulysse de James Joyce que Sylvia Beach donne à la librairie Shakespeare et Co. le 7 décembre 1922.
En 1924, au terme de l'externat, il interrompt ses études de médecine et envisage de s'installer au Sénégal. Introduit auprès de Maxime Weygand, il se présente à Léon Daudet en monarchiste nouvellement converti et sollicite avant son départ un appui, une entrevue de cinq minutes auprès de Charles Maurras, peut être pour faire de la politique. D'après, semble-t il, les souvenirs de son frère Marc François, il rencontre effectivement Maurras et participe à des réunions de l’Action française.
La sociologie positiviste de Maurras qui présente le sujet comme un produit de son milieu, partant de sa culture, a pu créer un malentendu avec une conception qu'Édouard Pichon poussera jusqu'à l'absurde d'un inconscient national. Le jeune Lacan s'inspire pour sa part de la thèse de l'éthologue Jakob von Uexküll sur le rôle déterminant de l'environnement non pas seulement sur l'évolution des espèces mais sur l'élaboration d'un langage. Il se montre en cela fidèle au projet spinozien d'une anthropologie déterministe selon laquelle l'illusion cartésienne du libre-arbitre est le fruit de l'inconscience de ses déterminations et préfigure plutôt la conception de Claude Lévy-Strauss qui identifie le développement du psychisme individuel à un jeu dans la structure sociale à laquelle appartient cet individu. Le départ pour les colonies n'aura finalement pas lieu et l'étudiant reprend son cursus à la Faculté de médecine de Paris en neurologie, la spécialité psychiatrie n'existant pas à l'époque.
Parce qu'il a perdu la foi pendant son adolescence et qu'il se sent une responsabilité d'ainé, il vit comme un échec personnel l'ordination sacerdotale de son frère à l'abbaye d'Hautecombe en 1926. Le 4 novembre, il fait sa première présentation de malade à la Société neurologique de Paris, rivale fondée à la Pitié par Joseph Babinski, successeur de Jean-Martin Charcot, de la Société française de psychologie fondée par Pierre Janet à la Salpêtrière, et commence son internat l'année suivante.
Il s'initie à la linguistique structuraliste de Ferdinand de Saussure à travers les compte rendus de Charles Pfersdorff et le cours en Sorbonne d'Henri Delacroix, ancien élève d'Henri Bergson, cours dont il tirera en 1930 un exemple pour étudier un cas de psychose où le délire s'exprime par une forme de langage écrit.

L'école française des aliénistes et le surréalisme 1928-1933

C'est auprès du chef du service de l'asile de Maison Blanche Marc Trénel, élève de Paul Sérieux et spécialiste de la psychiatrie légale, qu'il apprend la clinique des troubles du langage . Le 2 novembre 1928, il présente à la Société neurologique de Paris un cas de pithiatisme résistant à la psychothérapie dont il diagnostique, contre la nosographie enseignée et le consensus établi, la nature psychonévrotique41 en l'absence de lésion organique.
Sa curiosité pour la criminologie éveillée par Marc Trénel, il exerce son année d'internat 1928-1929 à Infirmerie Spéciale des Aliénés de la Préfecture de police de Paris sous la direction de Gaëtan Gatian de Clérambault. C'est auprès de l'inventeur de l'automatisme mental et de l'érotomanie qu'il apprend à observer les néologismes idéogéniques par lesquels Paul Guiraud caractérise les langues psychotiques. En dépit de son opposition au point de vue mécaniste et organiciste de Clérambault et des jalousies sourcilleuses de celui ci, il reconnaitra en lui, non sans une ingratitude provocatrice à l'endroit des nombreux professeurs brillants dont il aura reçu l'enseignement et Sigmund Freud, son seul maître en psychiatrie.
Comme son titre d'interne le permet, il ouvre une consultation privée dans son sombre rez de chaussée de la rue de la Pompe. En juillet 1930, après avoir lu dans une revue confidentielle, Surréalisme asdlr, L’Âne pourri de Salvador Dalí, il contacte le peintre et vient l'écouter dans sa chambre d'hôtel disserter sur les rapports entre création artistique et paranoïa. Il fréquente dès lors le directeur de la revue, André Breton, ancien infirmier psychiatrique sensible au rôle de suppléance joué par le délire et adepte de Freud qui est allé rencontrer celui ci à Vienne en 1922. Il est très ami avec Pierre Drieu La Rochelle, dont la femme délaissée, Olesia Sienkiewicz, dactylographie ses textes.

L'école allemande du Burghözli et le concept de personnalité paranoïaque

de 1930 à 1931

En août et septembre 1930, il accompli un stage à la Polyclinique du Burghözli, qui en est le service de psychiatrie ambulatoire, sous la direction de l'ex assistant de Carl Gustav Jung et successeur d'Eugène Bleuler, Hans Maier. Il poursuit l'expérience de soins sans enfermement systématique de 1931 à 1933 à l’hôpital qu'Henri Rousselle a ouvert en 1922 dans les locaux du service des admissions et de l'infirmerie de l'hôpital Sainte-Anne. Établissement autonome dirigé par Édouard Toulouse, c'est le premier service ouvert. Avec son dispensaire et son service social, il préfigure, non sans insuffisances, la politique de secteur qui se mettra en place en 1960 à partir de l'impulsion donnée par Georges Daumezon.
C'est au cours de cet internat dans l'établissement Henri Rousselle à Sainte-Anne qu'il peut faire l'observation de la genèse de la paranoïa et du développement du délire à partir de ses propres prises en charge et les théorise comme un effet de structure. Avec son collègue Henri Ey, il applique la leçon d'Hans Maier de rapporter les symptômes, au delà de leur description détaillée, à la personnalité propre du patient51. Pour faire valider sa formation, il se contraint à un discours conformiste sur l'hérédodégénérescence mais s'efforce d'y apporter toutes les nuances possibles. Du côté du freudisme, ce ne sont que déchirements teintés de chauvinisme entre partisans et opposants de l'analyse profane, au spectacle duquel il assiste les 30 et 31 octobre 1931 avec son collègue Henri Ey lors de la sixième Conférence des psychanalystes de langue française.
C'est cependant dans le service voisin "Clinique des Maladies mentales et de l’Encéphale" que dirige Henri Claude à Sainte Anne même, qu'il perfectionne en compagnie d'Henri Ey et Pierre Mâle la clinique. C'est là que Georges Heuyer, successeur d'Ernest Dupré en 1921, a introduit la psychanalyse dans l'institution hospitalière en confiant le poste de psychologue à Eugénie Sokolnicka et que Georges Dumas, enseignant en Sorbonne opposé à Henri Claude et à la psychanalyse, a fondé le célèbre Laboratoire de psychologie. C'est là que le 18 juin 1931 lui est confié, ainsi qu'à Joseph Lévy-Valensi, l'examen d'une érotomane criminelle qui relève de la médecine légale.

Aimée ou la psychanalyse sortant du puits de la médecine en 1932

Le cas Aimée lui donne les arguments de sa thèse de doctorat. Soutenue fin 1932, celle ci, par une réfutation des explications organicistes et un dépassement des théories psychogénétiques universellement professées par les écoles française et allemandes, introduit, discrètement mais fermement, dans la psychiatrie institutionnelle la conception freudienne de la paranoïa. Elle lui confère le diplôme de docteur en médecine, spécialité médecine légale, ainsi que le titre d'assistant des hôpitaux, mais ce sont ses amis surréalistes et son premier analysant seuls qui mesurent l'importance de l'événement et saluent ... pour la première fois, une idée homogène et totale du phénomène hors des misères mécanistes où s’embourbe la psychiatrie courante.
Cette cure et cette thèse ne sont pas le premier acte ni le premier écrit de psychanalyse en institution hospitalière mais la première adoption de la théorie freudienne par la Faculté, sous la forme officielle d'un diplôme. Ils interviennent à un moment où la communauté internationale des psychiatres sollicitée par l'opinion publique est en particulier agitée par les scandales des crimes passionnels, tel le cas de Madame Lefebvre, et une révision permanente de la nosographie induite par la discussion des concepts freudiens à ce sujet. Lacan y recourt à tout l'appareil théorique de son collègue viennois comme autant de preuves de la pertinence de ces concepts, pulsion insuffisamment socialisée, contenu manifeste et contenu latent du délire, narcissisme secondaire, fixation anale, irrésolution de l'Œdipe, homosexualité féminine refoulée, inefficience du surmoi, sublimation... pour caractériser paranoïas d'auto punition et paranoïas de revendication.
Cette nosographie ne sera pas retenue mais son propos est de renouveler le traitement moral de Philippe Pinel en invitant le médecin à ne plus se contenter d'user de considération philanthropique mais de jouer des ressorts de la vie affective propre au patient et de la relation d'autorité qu'il entretient avec lacan. Jacques Lacan, par un renversement d'une morale qui fustige l'illusion constatant la leçon spinozienne qu'au contraire la vie psychique de chacun est d'agir pour la satisfaction de ses différences, invite à reconnaître que chez le paranoiaque les illusions n’ont pas moins de consistance et d’intérêt que les vérités, c'est-à-dire qu'il a une personnalité propre, éventuellement productive et poétique, et non pas seulement altérée. Il s'agit de substituer à la tentative de dialogue normative une analyse des mécanismes de ces illusions au sein du monologue du psychotique pris au sérieux.
En un temps où un représentant de la psychiatrie en place tel Paul Guiraud concède à peine que tout en conservant notre entière indépendance à l'égard de la psychanalyse orthodoxe, nous pensons que dans les cas de ce genre, il faut admettre l'action de mobiles inconscients, l'innovation qu'apporte la thèse de Jacques Lacan est celle d'une cure en institution hospitalière de la paranoïa par la psychanalyse, que Sigmund Freud réservait a priori encore neuf ans plus tôt aux troubles névrotiques, c'est à dire à l'exclusion des psychoses telle la paranoïa.

Médecin des asiles, Un clinicien parmi les profanes de 1933 à 1937
Invité le 21 juin 1932 à la Société psychanalytique de Paris, il a entamé quelques mois avant la soutenance de sa thèse une psychanalyse didactique auprès de Rudolph Loewenstein, médecin zurichois installé à Paris en 1926 et amant de Marie Bonaparte. Celle ci, unique analysante de Sigmund Freud en France avec Eugénie Sokolnicka, est la mécène de la SPP. En octobre 1933, il est invité par son professeur Hans Maier à écouter Ferdinand de Saussure lors de la conférence annuelle de la Société Suisse de Psychiatrie.
Quelques semaines plus tard, Man Ray et Paul Éluard, le sollicite au sujet du procès des sœurs Papin, qui a pris une tournure politique, les partisans de l'ordre espérant une condamnation à mort. Il intervient pour appuyer son collègue le Docteur Logre et les journalistes Jean et Jérôme Tharaud dans leur contestation des trois experts qui ont conclu à la responsabilité pénale. Le cas lui est l'occasion de reprendre la conception des crimes passionnels formulée dans sa thèse à savoir que le passage à l'acte est la satisfaction d'un désir au cours d'un délire soudain, une auto punition, sans préméditation donc. Il précise que l'énucléation à vif répond à une image, à réaliser donc, de soi au miroir de l'autre comme un corps morcelé. Il s'appuiera sur le cas Papin pour réviser sa théorie des psychoses jusqu'en 1950.
Le 29 janvier 1934, il épouse Marie-Louise Blondin, dite Malou, sœur de son ami Sylvain Blondin, chirurgien des hôpitaux. Presque simultanément à l'obtention du titre de Médecin des asiles, sa demande d'adhésion à la SPP est agréée le 20 novembre 1934, trois jours après le suicide de son ancien professeur Gaëtan Gatian de Clérambault.
Les années trente sont celles de sa participation au séminaire qu'Alexandre Kojève donne sur la phénoménologie hégélienne à l'École pratique des hautes études. Non seulement ce séminaire est un lieu de rencontre entre des personnalités très différentes, Raymond Aron, Raymond Queneau, Jean Hyppolite, Maurice Merleau-Ponty, Georges Bataille etc. mais c'est aussi un lieu de formation intellectuelle très important pour Lacan, qui reprend à Kojève nombre de ses conceptions, concernant le désir humain comme désir de désir, ou la dimension, primordiale pour Lacan comme pour Kojève, de la reconnaissance, voire ses affirmations sur la nature imaginaire du moi.
En 1936, il déménage 97 boulevard Malesherbes, où il ouvre une consultation de psychanalyse. C'est là qu'en la présence silencieuse du psychiatre se tiennent les comités de rédaction surréalistes de L'Acéphale, antithèse de la revue scientifique L'Encéphale.
En août, il participe pour la première fois au congrès de l’IPA, qui se tient cette année à Marienbad. Il est invité le 31 juillet à y prononcer une communication brève sur le stade du miroir, dont le texte est perdu, mais le président Ernest Jones, connu pour être peu complaisant, ne le laisse pas terminer au-delà des dix minutes imparties. C'est la première fois qu'on ose ne pas se contenter de paraphraser Sigmund Freud, de se référer à des savants non psychanalystes, en l'occurrence Henri Wallon, de proposer un concept original. La réception est plutôt chaleureuse.
En 1937 nait son premier enfant, Caroline. Malou lui donnera deux autres enfants, Thibaut, né en 1939, et Sibylle, née en 1940.

Ruptures de 1938 à 1944

En 1938, Lacan rédige un article dans l'Encyclopédie française dans un volume dirigé par H. Wallon, qui lui vaut de nombreuses demandes de réécriture, qu'il accepte. Dès lors s'établit solidement sa réputation d'auteur difficile à lire qui le suivra toute sa vie.
Il a désormais des clients, il donne des consultations, il achète des propriétés, il mène une vie sentimentale et sexuelle agitée ; bref, cet ambitieux est en train d'arriver à la réussite sociale. En 1938, il devient membre de la Société psychanalytique de Paris S.P.P. et y fait la connaissance de F. Dolto. Il rencontre G. Bataille, et, en 1949, C. Lévi-Strauss, avec qui il se lie, comme il le fait avec M. Merleau-Ponty. L'ouvrage fondamental de Lévi-Strauss, les Structures élémentaires de la parenté, paru en 1949, en donnant à la prohibition de l'inceste une place centrale, avait permis de mettre un pont entre nature et culture dans l'évolution des sociétés. Lévi-Strauss fonde ainsi l'anthropologie structurale, et l'étiquette structurale tentera Lacan un moment pour se qualifier lui-même et son œuvre. Puis il tentera vainement d'intéresser Heidegger à ses conceptions, rencontrera Althusser, fera tout pour séduire l'intelligentsia parisienne et européenne.
Avec son attirance pour la conception structuraliste du langage dont l'œuvre de Saussure a été l'initiatrice, la doctrine de Lacan s'oriente vers une toute nouvelle problématique de la psychanalyse. Il prend désormais un tournant majeur, qu'il marque par sa démission de la S.P.P. 1953. La même année, il fonde avec F. Dolto une nouvelle Société française de psychanalyse, et, toujours la même année, il rédige un article intitulé le Symbolique, l'Imaginaire et le Réel, et prononce une conférence, le Discours de Rome, où il inaugure la notion de séance psychanalytique à durée variable. L'article de 1953 marque la fondation d'une nouvelle topique, par laquelle Lacan tient à proclamer son retour à Freud.

En 1938, l'Encyclopédie française fait appel à lui pour rédiger l'article Famille mais la reconnaissance par ses pairs, en fait Rudolph Loewenstein, de sa pratique de psychanalyste tarde, alors que son confrère Daniel Lagache, universitaire agrégé, est titularisé par la SPP dès 1937. De simple membre, il n'en devient lui-même membre titulaire que le 20 décembre 1938 après un exposé clinique illustrant la rénovation de la psychiatrie par la psychanalyse, en l'occurrence le concept d'impulsion et plus généralement la pratique de l'écoute des patients. A la recherche d'une structure préœdipienne correspondant à stade du moi morcelé, il en appelle à cette occasion à une notion de Réel, lieu d'une « pulsion à l'état pur se manifestant par une béatitude passive face à l'horreur. Loewenstein a conditionné son soutien à cette candidature, qu'il continue sa psychanalyse avec lui. À peine titulaire, Lacan met fin à son analysenote.L'analyste ne s'autorise que de lui même.
Au cours de l'année 1939, l'année de la mort de Sigmund Freud, il noue une liaison avec l'actrice cinématographique Sylvia Bataille, née Maklès.
Elle est mariée à son ami Georges Bataille mais vit séparée de celui ci depuis 1933. Il est mobilisé et affecté à l'hôpital militaire des Franciscains à Pau.
Le 13 juin 1940, la veille de l'entrée des allemands dans Paris, sa consœur Sophie Morgenstern se suicide. Jacques Lacan, démobilisé des services de santé des armées, rejoint en famille Marseille, principale ville de la Zone libre, où il retrouve André Malraux à cours d'argent. Il prend en location la maison que ce dernier possède à Roquebrune pour abriter sa maîtresse enceinte. La mère de Judith Bataille s'étant imprudemment déclarée avec sa fille comme juives au commissariat de Cagnes, son futur gendre s'introduit subrepticement dans la salle où sont rangés leurs dossiers et les dérobe sur une étagère. Il retrouve la sœur de Sylvia Bataille et le beau frère de celle ci, André Masson à Montredon chez la Comtesse Pastré, dont l'association Pour que vive l'esprit cache des artistes, telle Youra Guller, sous le coup de la loi contre les juifs et sert d'antenne légale au réseau du Centre américain de secours.
En 1941, alors qu'ils sont tous deux encore mariés, nait leur enfant, Judith Bataille, à laquelle la loi confert le nom du mari de sa mère. Le choix du prénom d'une héroïne juive et castratrice est en soi un programme et dans la circonstance un défi. L'épouse légitime demande alors le divorce qui sera prononcé après guerre.
À cours d'argent, incapable de donner le secours financier qu'André Malraux lui a réclamé pour faire libérer son frère, il revient à Paris prendre son poste dans le service désormais dirigé par Henri Ey à Sainte Anne. Les patients, arrivant déjà dénutris, meurent de faim et de froid en masse. Une partie de l'hôpital est réquisitionnée par l'occupant pour servir d'hôpital militaire, une autre abrite le réseau communiste Front national sanitaire, que dirige Lucien Bonnafé. Jacques Lacan y propose son aide à un confrère, Jacques Biézin, menacé par les lois antisémites, mais il reste en retrait de l'engagement de ses collègues résistants, Julian de Ajuriaguerra, Jean Talairach, Pierre Deniker, René Suttel, Henri Cénac-Thaly, qui est arrêté en 1943, le Capitaine Delcourt, Virginie Olivier alias Charlotte, qui meurt à Ravensbrück. Durant toute l'Occupation, il suspend toute publication et toute activité d'enseignement mais poursuit son activité de psychanalyste privé qu'il transfert dans un nouvel appartement, 5 rue de Lille. Parmi ses patients, René Diatkine, un camarade de Julian de Ajuriaguerra.

De la Société psychanalytique de Paris à la Société française

de psychanalyse de 1945 à 1953

Des mouvements comme celui du linguiste Édouard Pichon, théorisant un inconscient national dépendant de la langue, passent à l'arrière-plan du fait des expériences récentes. L'exil de Loewenstein, amant de Marie Bonaparte, fervent défenseur du biologisme et ayant l'autorité morale des pionniers de la psychanalyse, amène un changement des rapports de forces, Lesquels ?. Dans cet après-guerre à peine commencé, la figure de Lacan prend une importance, ne serait-ce que par effet d'aspiration : il fait partie des quelques titulaires d'avant-guerre n'ayant pas eu à choisir l'exil.
C'est à la fin des années 1940 et au début des années 1950 que le sujet des séances courtes commence à être traité par Lacan. Il s'agit en fait à l'époque davantage de séances de longueur variable que de séances véritablement courtes – comme vers la fin de sa vie où il donne des séances de quelques minutes à peine. Ce sujet devient le vase de Soissons de la psychanalyse française. Lacan reçoit un premier avertissement concernant ces séances en 1951. À la suite de la rébellion des élèves psychanalystes en 1953, due à l'obscurité du fonctionnement et à un certain autocratisme de l'institut qui est chargé de leur enseignement, une crise institutionnelle secoue la SPP. Cette crise mélange à la fois les problèmes de répartition des pouvoirs entre la Société de psychanalyse et l'institut, le poids respectif des différents courants et les pratiques – désapprouvées par presque tous à l'époque – de Lacan. Celui-ci est démis de son titre de président de la SPP. Daniel Lagache quitte la SPP et décide de fonder un institut d'inspiration universitaire, la Société française de psychanalyse, suivi par Françoise Dolto et Juliette Favez-Boutonnier. Lacan les suit, tout au moins pour un temps. Il est donc une des causes, mais non le fomenteur, de cette première scission. L'International Psychoanalytical Association décide que la nouvelle société ne pourra être affiliée qu'après enquête sur ses méthodes d'enseignement et d'analyse – ce qui vise implicitement Lacan.

L'inconscient est structuré comme un langage

Cette phrase de Lacan : L'inconscient est structuré comme un langage, est centrale dans son élaboration théorique. Il prend appui pour le démontrer sur les trois œuvres majeures de Freud, L'Interprétation des rêves, Psychopathologie de la vie quotidienne et Le mot d'esprit et sa relation à l'inconscient. C'est ainsi qu'il effectue un retour à Freud.
Une interview qu'il accorde à Madeleine Chapsal, pour L'Express, en 1957, révèle la portée de ce qu'il avance :
"Voyez les hiéroglyphes égyptiens : tant qu'on a cherché quel était le sens direct des vautours, des poulets, des bonshommes debout, assis, ou s'agitant, l'écriture est demeurée indéchiffrable. C'est qu'à lui tout seul le petit signe “vautour” ne veut rien dire ; il ne trouve sa valeur signifiante que pris dans l'ensemble du système auquel il appartient. Eh bien ! les phénomènes auxquels nous avons affaire dans l'analyse sont de cet ordre-là, ils sont d'un ordre langagier.
Le psychanalyste n'est pas un explorateur de continents inconnus ou de grands fonds, c'est un linguiste : il apprend à déchiffrer l'écriture qui est là, sous ses yeux, offerte au regard de tous. Mais qui demeure indéchiffrable tant qu'on n'en connaît pas les lois, la clé."
Lacan se livre alors à un plaidoyer pour démontrer en quoi toute l'œuvre freudienne peut et doit être lue avec l'appui de ces références linguistiques et que, pour ces raisons mêmes, ce qui fait l'efficience de la psychanalyse est lié au fait de parler, qu'elle est une expérience de parole.

Il propose la métaphore d'un hamac :

"l'homme qui naît à l'existence a d'abord affaire au langage ; c'est une donnée. Il y est même pris dès avant sa naissance, n'a-t-il pas un état civil ? Oui, l'enfant à naître est déjà, de bout en bout, cerné dans ce hamac de langage qui le reçoit et en même temps l'emprisonne ".

Structuralisme

Vers 1953/1954, Lacan opère un virage qui le fait abandonner momentanément ses références à Hegel, l'hégélianisme à la mode de Kojève pour le structuralisme86. Quand Lacan a abordé la fonction du symbolique et la nécessité d'un pacte entre le moi et le petit autre, c'est là qu'il a pris ses appuis dans la notion de structure, qui est strictement équivalente à celle de langage. C'est dans son grand texte inaugural Fonction et champ de la parole et du langage, qu'il se réfère aux études de Claude Lévi-Strauss, pour y énoncer, à sa suite, cette grande loi primordiale des échanges et de la parenté.
Il introduit par ailleurs en 1953 des concepts qui deviendront fondamentaux dans son œuvre, les trois registres : Réel, Symbolique, Imaginaire. Il commence à travailler à une théorie du signifiant en redécouvrant Ferdinand de Saussure et en s'appuyant sur Roman Jakobson. C'est aussi là qu'il commence à citer régulièrement la thèse de Claude Lévi-Strauss, Les structures élémentaires de la parenté.
En 1960, Henri Ey organise un colloque à l'abbaye Saint-Florentin de Bonneval sur le thème de l'inconscient : il y réunit des psychanalystes de la jeune génération, des philosophes comme Gilles Deleuze, Merleau-Ponty et Jean Hyppolite. Presque tous les débats se rapporteront de près ou de loin, évasif à la théorie lacanienne de l'inconscient, désormais formée dans ses grandes lignes et résumée par le mot d'ordre lacanien par excellence : "l'inconscient est structuré comme un langage". Dès cette époque, en France, la psychanalyse semble se résumer à ce positionnement : être avec ou contre Lacan. Il a acquis une position centrale et cristallise les débats.
Les douze ans qui s'écouleront entre la fondation de la SFP et sa dissolution en 1965 sont une période de grands changements dans le paysage psychanalytique français. D'un point de vue institutionnel, il s'agira de dix ans de négociations pour que les psychanalystes ayant fait scission en 1953 soient reconnus par l'IPA. L'enquête de l'IPA se concentrera progressivement sur Lacan et ses séances dites courtes – en fait à l'époque de durée variable, cette durée étant toujours inférieure à la norme de l'IPA. L'enquête conclura en 1963 que la SFP pourra recevoir l'agrément si elle retire à Lacan et à Françoise Dolto son titre de didacticien, c'est-à-dire qu'elle lui enlève le droit de former des psychanalystes et de continuer son enseignement. Cela provoqua l'éclatement de la société fondée par Daniel Lagache, tous ceux ne pratiquant pas et ne soutenant pas la technique de Lacan se voyant condamnés à l'exclusion des instances internationales s'ils continuent à protéger Lacan. Ainsi naîtra en 1964 l'Association psychanalytique de France, sous les auspices de Daniel Lagache, Jean-Bertrand Pontalis, Didier Anzieu et Jean Laplanche. Pour les lacaniens, il s'agira de l'École française de psychanalyse, bientôt renommée École freudienne de Paris.

Lacan, psychanalyste et chef d'école

Cette section ne cite pas suffisamment ses sources janvier 2014. Pour l'améliorer, ajouter en note des références vérifiables ou les modèles ou sur les passages nécessitant une source.
À soixante-trois ans, Lacan fonde sa propre école. Les statuts de la nouvelle école sont autocratiques en ce que Lacan y préside à tout[réf. nécessaire]. Ils sont aussi beaucoup plus avantageux pour les plus jeunes car ils sont moins hiérarchisés. Il n'y a en effet qu'un rang hiérarchique à proprement parler : celui qui sépare Lacan des autres. Les organes décisionnels sont toujours composés par lui et n'outrepassent jamais ses avis. La publication des Écrits en 1966 lui apporte une célébrité longtemps attendue : il fait dorénavant partie des ténors du structuralisme et son nom est cité à côté de ceux de Claude Lévi-Strauss, de Roland Barthes et de Michel Foucault. Cette célébrité nouvelle amène un afflux important de jeunes à l'EFP, jeunes qui se mettent à imiter son style, à s'habiller et à parler comme lui.
Lacan introduit en 1969 une pratique expérimentale pour habiliter un psychanalyste comme psychanalyste de l'école, la passe, qui se révèlera à la fois être un facteur de dissension et un échec selon l'aveu même de Lacan. Facteur de dissension parce que l'adoption de cette procédure provoque immédiatement une scission : plusieurs membres historiques dont François Perrier, Piera Aulagnier et Jean-Paul Valabréga démissionnent de l'EFP et fondent le quatrième groupe. Un échec, parce que cette procédure, faite pour éviter les pièges de l'idéalisation et de la bureaucratisation, va avoir l'effet inverse de celui souhaité. En onze ans, seulement dix-sept personnes passeront avec succès.
Peu après la fondation de son école, Lacan opère un nouveau tournant dans son enseignement, qu'on appellera la relève logiciste. À la suite des interventions du tout jeune Jacques-Alain Miller, Lacan se tourne vers Frege, Gödel et la topologie. Son but est d'assurer que la réception de son enseignement ne soit pas sujette aux dérives qui ont marqué selon lui la réception de Freud. Les nœuds, les formes impossibles, les mathèmes vont désormais envahir les séminaires du maître et les rendre encore plus difficiles d'accès. Lacan espère ainsi sortir définitivement du caractère encore trop descriptif de ce qu'il qualifiera désormais de linguisterie.
Après avoir suturé, pas clair temporairement le sort de la psychanalyse à celui des sciences sociales, c'est l'échappée vers les sciences exactes : Seule demeurait, unique aliment de l'ermite au désert, la mathématique.Maintenant qu'il n'est plus lié à aucune négociation, sa pratique en tant que psychanalyste relève quasiment de l'expérimentation débridée, non neutre. Il peut aussi bien demander à une personne de venir trois fois pour trois séances éclairs de quelques minutes dans la même journée et la garder une heure entière la semaine d'après. Il avait déjà l'habitude de se lever, de parler, de manger, d'écrire pendant les séances : dorénavant il joue aussi avec des bandes de Möbius, des bouts de ficelle et de papier. Il reçoit à son cabinet tout le jour durant un flot ininterrompu de personnes. Les choses en sont à ce point que souvent on ne prend même pas rendez-vous.
Profitant de la réforme des universités consécutive aux événements de mai 1968, Lacan, d'abord assisté de Serge Leclaire, tente de s'implanter dans l'université par le biais d'un département de psychanalyse à Vincennes, Paris VIII. Malgré la proposition du président du département, il n'y occupera aucun poste, mais le département sera une sorte de bastion lacanien, non neutre. Cette dernière expérience cristallisera les oppositions déjà existantes entre différents courants au sein de l'EFP. La reprise en main du département au nom de Lacan par Jacques-Alain Miller en 1974, marquée par le remplacement de plusieurs chargés de cours, provoqua une vive polémique à l'intérieur et à l'extérieur de la faculté, chez les psychanalystes et les non-psychanalystes.
Quel ques années plus tard, le suicide d'une psychanalyste ayant échoué à la procédure de la passe sert de révélateur aux dissensions d'une école dont beaucoup doutent qu'elle soit encore dirigée par le maître et non par son entourage proche. En effet, Lacan a des absences se montre de plus en plus fatigué et délègue de plus en plus la gestion des affaires à son gendre Jacques-Alain Miller. Il décide de dissoudre l'EFP. Après quelques années de crise perpétuelle, l'EFP, seule école fondée par Lacan, est dissoute le 5 janvier 1980.
Souffrant d'une cancer du colon dont il a tardé à se faire opérer, déjà très diminué depuis un accident de voiture survenu en 1978, Lacan réduit sans les cesser ses activités à partir de février 1980. Le 15 mars, il choisit, non sans humour, l'hôtel Pullmann Saint Jacques pour prononcer d'une voix claire et forte, debout pendant plus d'une heure devant un parterre de huit cent personnes une conférence intitulée Dissolution, qui est un programme de refondation de la Cause freudienne. Sa dernière intervention publique est donnée à la conférence internationale qui se tient à Caracas du 12 au 15 juillet 1980. Durant ses derniers mois, il se remet d'une aphasie, conséquence d'un AVC, au domicile de sa fille Judith Miller et son gendre Jacques Alain Miller, où la chambre de son petit fils, polytechnicien, est disponible. Alors que son carnet de rendez vous est rempli,

Il meurt le 9 septembre 1981 à la clinique Hartmann à Neuilly sur Seine, d'une insuffisance rénale consécutive à l'ablation en urgence de sa tumeur.

Le 10 septembre son frère Marc François, silencieux bénédictin, lui rend hommage en l'église Saint Pierre du Gros Caillou : « Jacques Lacan a parlé. Le corps est enterré par toute la famille, réunie physiquement mais pas moralement, dans le cimetière de Guitrancourt, près de sa maison de campagne.

Caractères généraux de l'œuvre et de la pensée de Jacques Lacan

"L'inconscient est structuré comme un langage". Cette phrase donne une assez bonne idée générale de la pensée de Lacan. Elle rappelle, en utilisant le concept d'inconscient, que Lacan s'inscrit dans le courant psychanalytique. Elle indique, avec le terme de structure, l'approche particulière de Lacan, qui est l'approche structuraliste. Enfin, elle spécifie son apport, qui consiste principalement dans l'importance donnée à la nature du langage dans l'explication du fonctionnement psychique.

Freud avait désigné l'inconscient comme concept explicatif majeur du fonctionnement psychique. Il avait tâché de l'étudier à partir de ses manifestations, qu'elles soient normales ou pathologiques. L'abandon des méthodes d'hypnose et de suggestion a marqué un tournant dans la pensée freudienne, tournant qui a commencé à permettre à la psychanalyse de sortir de la simple technique de suggestion et de psychothérapie. À partir de ce moment, Freud n'interprète plus la maladie psychique qu'en fonction de la parole du patient. Lacan souligne que, dans les travaux de Freud, l'inconscient se laissait saisir de deux manières : lorsque le locuteur ou le rêveur commet un déplacement dire un mot à la place d'un autre ou lorsqu'il produit une condensation, le mot d'esprit famillionaire, analysé par Freud. Il affirme que le déplacement et la condensation, en l'espèce de la métonymie et de la métaphore, sont les deux seuls moyens de produire de la signification si l'on se réfère aux analyses de Jakobson, et qu'ainsi l'inconscient a un fonctionnement comparable à celui du langage.
Lacan a donc voulu renouveler la réception de Freud en opérant une lecture structuraliste de son œuvre, utilisant pour cela les outils de la linguistique. Ces outils, il ne fera pas que les réutiliser, il les remaniera pour servir son propos. C'est à la fois cette volonté de renouvellement de la lecture de Freud et le remaniement des outils théoriques de la linguistique qui valent à Lacan son succès auprès des uns et son rejet par les autres.

Les concepts majeurs de la psychanalyse lacanienne

Le stade du miroir : le moi traité comme un effet d'optique, Situation et enjeux

Objet de la première communication donnée par Lacan à un colloque international, le stade du miroir n'a cessé d'accompagner sa réflexion pendant toute son œuvre. En effet, dans sa réflexion sur ce stade ou cette phase, Lacan va reposer de manière tout à fait neuve un certain nombre de problèmes propres à la psychanalyse : sur la nature du moi, sur les rôles - pas clairement séparés chez Freud - du moi idéal et de l'idéal du moi, mais aussi sur la nature du narcissisme, point crucial de la théorie psychanalytique.

Les stades du miroir

Lacan ayant commencé à travailler sur ce concept vers 1936 et l'ayant remanié jusqu'en 1960 environ, on comprendra aisément qu'il est impossible de réduire une réflexion de plus de vingt ans à une seule théorie. Il y aura par exemple le stade du miroir avant et après l'invention des trois ordres que sont le Réel, le Symbolique, et l'Imaginaire. Il y aura le stade du miroir avant et après l'invention de l'objet. Ce concept s'inscrira donc dans l'histoire de la réflexion lacanienne et, malgré sa célébrité qui pourrait laisser croire à quelque chose de simple et de réutilisable hors même du lacanisme, il est nécessaire pour le comprendre de le restituer dans les problématiques propres à la pensée de son inventeur.
Le stade du miroir est avant tout une réflexion sur deux concepts : celui de corps propre, le terme wallonien de corps propre désignant l'intuition de l'unité de sa personne par le bébé, et celui de représentation - c'est-à-dire à la fois la capacité à organiser les images et à se situer dans l'ordre de ces images. Lacan affirme que l'enfant anticipe sur son unité corporelle pas encore physiologiquement accomplie - du fait de la maturation incomplète du système nerveux - en s'identifiant à une image extérieure qu'il a été capable de différencier des autres : la sienne. Pour avoir pu différencier son image de celle des autres, il a fallu qu'il comprenne la différence entre l'image, au sens de tout ce qui est vu et la représentation - l'image qui est mise à la place de ce qu'elle figure. Ma propre image dans le miroir ne peut être en effet qu'une représentation, elle me montre ce qu'en aucun cas je ne saurais voir directement, sans utiliser d'artifice. C'est ainsi que l'on peut comprendre une première différence entre le Je, celui qui voit son image et qui s'identifie à celle-ci, et le moi, l'image à laquelle l'enfant s'identifie.

Version finale du schéma du stade du miroir selon Lacan. S barré :

le sujet divisé.
M : Miroir.
A : le grand Autre.
C : le corps propre.
a : l'objet du désir.
i'(a) : moi idéal.
S : sujet de l'inconscient. I : idéal du moi.
Cela découvre le sens de l'identification pour Lacan : c'est une tension entre un Je, qu'il renommera plus tard "sujet de l'inconscient", et un moi toujours social, posé dans l'ordre de la logique, puisque le corps distingué comme étant le corps propre l'est du fait d'une induction logique et dans l'ordre social, plus tard Lacan soulignera l'importance du fait que l'assentiment d'un adulte soit donné à ce qui n'est qu'une intuition d'identification. Le stade du miroir, c'est donc l'aliénation active du sujet à une image, image qui ne peut servir à ce processus d'identification que si elle est reconnue à la fois comme artificielle par l'enfant et désignée comme représentation adéquate par l'adulte.
On croit parfois que le stade du miroir dévoile un moment du développement de l'enfant. Or ce qu'il entend dévoiler c'est la dynamique même de l'identification, dynamique qui reste la même tout au long de l'existence. Il décrit la structure - que Lacan appelle encore paranoïaque en 1949 - du sujet, divisé entre le Je, bientôt le sujet de l'inconscient, et le moi. Le Moi est redéfini comme une instance qui relève de l'image et du social, pur mirage, mais mirage nécessaire.

Le stade du miroir est-il un concept lacanien ?

La première rupture avec le conformisme institutionnel des psychanalystes

Il faut voir dans cette conceptualisation une prise de position novatrice pensée à partir de la deuxième topique de Freud. Ou le moi s'élabore à partir du ça en s'adaptant à la réalité : c'est la thèse de l'école américaine de l'Ego psychology, contre laquelle Lacan n'a pas de mot assez dur ; ou bien le moi se structure en fonction des étapes de la modification du ça, qui lui-même constitue la structure décisive parce que inconsciente de l'être humain, de l'être parlant. C'est là la thèse fondamentale de Lacan qui va en quelque sorte lui servir d'entrée dans la théorie, le stade du miroir.
L'expérience fondatrice que fait l'enfant de six à dix-huit mois est l'expérience dans laquelle il reconnaît son visage dans le miroir que lui tend sa mère, à une époque où il vit encore son corps comme morcelé et indistinct du corps de sa mère : il se voit et comprend que c'est lui et que ce n'est pas lui. Cette rencontre, vécue dans une intense jubilation, conduit l'enfant à son identité et le fait décoller par rapport à son rapport fusionnel avec sa mère. En même temps, l'image perçue est inversée et se trouve ainsi être imaginaire, alors que son corps ne l'est pas. En même temps aussi, il continue de vivre son rapport aux autres dans une perspective de séduction et d'agressivité qu'il tente de résoudre par l'imitation. La méconnaissance du moi s'installe à ce moment au cœur du moi et c'est avec cet autre que moi que l'enfant va découvrir ses objets libidinaux, processus qui amènera plus tard l'enfant au désir de l'autre. La doctrine lacanienne se précisera progressivement après l'élaboration de cette thèse, dont il reprendra le texte dans les Écrits 1966. Mais l'intervention de Lacan au congrès de Marienbad se passe mal (une interruption malencontreuse de son président hérisse l'ombrageux Lacan et dès ce moment sa méfiance à l'égard de la psychanalyse officielle se radicalise en opposition définitive. La reprise de cette thèse au congrès de Zurich en 1949 n'aura d'ailleurs pas davantage d'écho, malgré son importance, si l'on songe que ce processus intervient au moment même de la naissance de l'accès au langage, qui pose la question de l'altérité fondatrice de qui parle quand je parle.

Les débuts d'un grand maître

Lacan avait l'habitude de faire des emprunts à ses contemporains. Concernant le stade du miroir, les pages d'Henri Wallon dans Les origines du caractère chez l'enfant sont régulièrement citées, ainsi que les origines kojéviennes de la définition dynamique de l'identification conçue comme mouvement. Élisabeth Roudinesco rappelle aussi que la distinction Moi/Je qu'opère Lacan dans différents textes, et très importante pour sa réflexion, a certainement pour origine les remarques d'Édouard Pichon sur la difficulté qu'il y avait à traduire le Ich de Freud systématiquement par moi alors que dans certains contextes, le "Je" paraissait plus adapté. Même si ces problèmes de traduction ont effectivement intéressé Lacan, le Je lacanien est avant tout un Je imaginaire.
Néanmoins, sans nier l'apport de tous ces penseurs, la réflexion lacanienne sur le stade du miroir n'a que peu à voir avec la dialectique du développement que l'on retrouve chez Henri Wallon, qui n'a pas pour objet de recherche les problèmes conceptuels concernant l'identification en psychanalyse, comme il ne s'intéresse pas au narcissisme, ni à la nature imaginaire ou non du moi ou de l'objet du désir. Si l'on peut supposer une importance considérable de l'hégélianisme à la manière de Kojève, celle-ci s'efface dès 1954, peu de temps après l'entrée en jeu des concepts de Réel, Symbolique et Imaginaire.
Quant à l'apport de Pichon concernant la distinction Je/Moi, on sait que cette distinction subira des aventures conceptuelles bien éloignées des considérations théoriques du grammairien. Lacan a emprunté à Kojève, à Wallon, à Pichon, voire à Dali, mais force est de constater que le stade du miroir selon Lacan n'a, en définitive, rien de Wallonien, de Kojèvien, de Pichonien ni de Dalinien

Le retour à Freud

L'enseignement de Jacques Lacan débute sur un mot d'ordre du retour à Freud. La volonté d'un retour à Freud suppose que Lacan considérait qu'il existait une lacune en France, donc un besoin de retourner à l'œuvre de Freud, de la retrouver, et qu'il mettait implicitement en cause la qualité des traductions, de l'enseignement des psychanalystes et des théoriciens de la psychanalyse de son époque. Lacan s'opposa dès ses débuts à ce qu'il considérait comme une dérive de la psychanalyse : l'ego-psychology, représentée par Anna Freud et Rudolph Loewenstein.

Outre les différends théoriques avec ses pairs, ce qui caractérise l'attitude de Lacan dans son retour à Freud, c'est une lecture qui ne cherche pas à rester dans l'orthodoxie freudienne, mais plutôt à dégager ce qu'il y a d'original chez Freud, ainsi que le formule Jean-Michel Rabaté : De même qu'Althusser se demandait comment lire Marx de façon “symptomatique”, en séparant ce qui est authentiquement “marxiste” de ce qui est purement “hégélien” dans ses écrits, Lacan se demande où et comment repérer les textes où Freud se montre authentiquement “freudien”.
L'attitude de Lacan consiste à se réclamer de Freud tout en se moquant d'idées auxquelles Freud croyait fermement, comme la possibilité de réduire la psychologie, en dernière analyse, à la biologie. Le retour à Freud ne consiste donc pas seulement en une critique de l'enseignement des élèves de Freud, mais en une critique - au sens étymologique, opérer un choix entre le bon et le mauvais - de l'enseignement de Freud, qui n'a pas toujours su, selon une optique lacanienne, rester fidèle à lui-même ou explorer les conséquences de ses découvertes.
C'est dans cette manière de concevoir son retour à Freud que l'on peut saisir la pensée lacanienne, qui retourne chaque fois à Freud, qui s'en réclame, et qui pourtant, pour des raisons parfois historiques - la linguistique n'avait pas, du temps de Freud, l'audience qu'elle aura dans les années cinquante - et souvent théoriques, en diffère considérablement.

Le concept de structure

Lacan fait apparaître dans la psychanalyse, la perspective structuraliste : en opérant une lecture rigoureuse de Freud, il montre que Freud est déjà dans une perspective structurale, à partir de la deuxième topique.
Lacan a affirmé à plusieurs reprises devoir sa conception de la structure à Claude Lévi-Strauss, qui a été lui-même un lecteur attentif de Freud. Et la thèse de Claude Lévi-Strauss, Les structures élémentaires de la parenté, est l'ouvrage écrit par un contemporain le plus cité dans les séminaires de Lacan. Il convient donc, sans pour autant admettre sans critique préalable que la structure de Lacan et la structure de Lévi-Strauss sont les mêmes, de s'intéresser à la définition du terme de structure que Lévi-Strauss peut développer dans l'ouvrage en question.

Nœud borroméen illustrant l'intrication du Réel, du Symbolique et de l'Imaginaire au sens lacanien.
Une définition illustrant le sens que l'anthropologue français donne à ce terme est :
"Les institutions humaines elles aussi sont des structures dont le tout, c'est-à-dire le principe régulateur, peut être donné avant les parties, c'est-à-dire cet ensemble complexe constitué par la terminologie de l'institution, ses conséquences et ses implications, les coutumes par lesquelles elle s'exprime et les croyances auxquelles elle donne lieu. Ce principe régulateur peut posséder une valeur rationnelle sans être conçu rationnellement ; il peut s'exprimer de façon arbitraire, sans pour autant être privé de signification. "
De cette définition ressort que le tout de la structure en est le principe régulateur, indépendant des parties. La structure chez Lévi-Strauss est structure logique, c'est un ensemble de relations entre des termes interchangeables.
Selon Lacan, ce principe régulateur, la structure du sujet, c'est l'intrication de trois fonctions : le Réel, le Symbolique, l'Imaginaire, ce qu'il appellera R.S.I. En 1972, il représente cette intrication des trois fonctions par le nœud borroméen, qu'il appellera aussi le nœud-bo. Il suffit que n'importe lequel parmi les trois anneaux soit rompu pour que tous les anneaux soient indépendants. Ce tripode R.S.I, comme il sera appelé par Lacan lui-même, marque à la fois l'aboutissement de ses recherches antérieures, dans une perspective topologique, en même temps qu'un nouveau paradigme. C'est un des concepts clef de son œuvre.

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Posté le : 12/04/2014 21:54
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Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
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