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Charles Dickens 2
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La tournée américaine de 1867-1868.

La passion de Dickens pour la scène, la popularité dont il jouit, l'incitent à entreprendre des lectures publiques de ses œuvres. Il commence, lors de manifestations caritatives, par se produire devant de petits groupes d'amis, puis s'essaie à des auditoires plus vastes.
À partir de 1858, le succès est tel qu'il entreprend d'en tirer profit et, jusqu'à la fin de sa vie, ces récitals constituent une part majeure de ses activités118. D'après un témoin de l'époque, « sa lecture n'est pas seulement aussi bonne qu'une pièce, elle est meilleure que la plupart d'entre elles, car sa performance d'acteur atteint les sommets ».
Entre avril 1858 et février 1859, il donne cent-huit représentations, ce qui lui rapporte 1 025 £, c'est-à-dire presque la moitié de ses gains littéraires qui ne dépassent pas 3 000 £ par an. Au-delà de l'aspect financier, cependant, la passion qui l'habite lorsqu'il est devant un auditoire est telle qu'elle devient quasi obsessionnelle, qu'il entre comme en transe et que la salle est transportée d'enthousiasme, Dickens, selon les témoins, la tenant sous son charme, exerçant une puissante fascination.
Il sillonne l'Angleterre, l'Écosse, l'Irlande, et plus ses tournées se prolongent, plus grandit le nombre des auditeurs. Ses lettres sont gonflées de fierté, et George Dolby, devenu son agent, écrit qu'« en dehors des bénéfices financiers, le plaisir qu'il ressent dépasse l'ordre des mots ». Les témoins sont unanimes pour rendre hommage à cette maîtrise, au talent de lecteur, au génie de la déclamation : hypnotisme, charme, sens aigu de la mise en scène, tels sont les mots relevés, et le geste accompagne la parole, le suspens se voit savamment ménagé, les effets de voix restent saisissants. Même Mark Twain, au départ sceptique et irrité de « l'emphase très anglaise du personnage », cède à ce qu'il appelle « la splendide mécanique.
J'avais presque l'impression que je voyais les roues et les poulies à l'œuvre ». Birmingham, Sunderland, Édimbourg, ses élans de bonheur à tant de gloire se succèdent : « J'ai vraiment beaucoup de succès » ; « Je n'ai jamais contemplé d'auditoire sous un tel charme » ; « Le triomphe que j'y ai reçu dépasse tout ce que j'ai connu. La cité a été prise d'assaut et emportée », etc.. À Belfast, on l'arrête dans la rue, le couvre de fleurs, ramasse les pétales qu'il a touchés ; les hommes pleurent, autant et même plus que les femmes.


La tournée d'adieu.

À la fin des années 1860, parents et amis s'inquiètent de la fatigue qui s'abat sur Dickens lors de ses tournées qui, comme tout ce qu'il entreprend, se passent dans un comble d'excitation. Son rendu du meurtre de Nancy par Sikes dans Oliver Twist, en particulier, qui mesmérise le public, le laisse pantelant d'épuisement, et son fils Charley le met en garde : « Je n'ai jamais rien entendu de plus beau, mais ne le faites plus ».
À cela s'ajoute le traumatisme de devoir prendre le train, ce qui, depuis l'accident de Staplehurst, lui est de plus en plus pénible. Son médecin personnel, le docteur Francis Carr Beard, dont les notes signalent des emballements cardiaques alarmants, surtout pendant la scène d'Oliver Twist, finit par lui interdire ces récitals. Dickens passe outre, part pour une nouvelle tournée américaine en 1867, et une autre en octobre 1868 sur les routes anglaises.
Il en revient à bout de forces après soixante-quatorze représentations sur les cent prévues. Désormais, dans la quiétude de Gad's Hill Place, souvent avec Ellen Ternan, il se consacre à son dernier roman et trouve quelque repos. En bonne vedette qu'il est, cependant, et contre l'avis de tous, il insère dans son emploi du temps douze récitals d'adieu à Londres fin 1869 et les derniers de janvier à mars 1870.


Trois mois plus tard, le 9 juin 1870, il était mort.


L'ultime Dickens Les deux derniers romans


Dickens et ses deux filles.

Le quatorzième roman de Dickens, et le dernier à avoir été achevé, L'Ami commun, paraît de mai 1864 à novembre 1865.
Il présente une vue panoramique de la société anglaise vouée à la superficialité urbaine et l'avidité destructrice, dont la Tamise, décor, actrice et surtout symbole, charrie les corps-rebuts que se disputent des vautours humains.
Quant au Mystère d'Edwin Drood, resté incomplet, il serait la culmination des thèmes et des motifs explorés tout au long de l'œuvre.
Certains critiques, Edmund Wilson par exemple, voient dans son héros, Jasper, un auto-portait, homme divisé, à la fois du monde et de l'imaginaire, socialement familier mais étranger menaçant. Si tel est le cas, le personnage disparu, Edwin, serait vraisemblablement revenu, ce retour symbolisant « la résurrection et la vie », comme le sacrifice de Carton.


La mort de Dickens

Il existe un doute sur les circonstances exactes de la mort de Dickens. La critique n'a pas encore tranché, mais semble pencher vers la version de John Forster.
La version officielle
Georgina est à Gad's Hill Place le 8 juin 1870 lorsque, après avoir travaillé dans son chalet, Dickens la rejoint à 18 heures pour le dîner, les traits défaits186. Elle lui demande s'il se sent mal : « Oui, répond-il, très mal depuis une heure ». Elle veut appeler un médecin, à quoi il répond No (non), et s'effondre. Georgina se précipite en disant : « Venez vous allonger »; « Oui, sur le sol », murmure-t-il avant de perdre connaissance.
Georgina appelle le médecin local, puis Mamie, Katey et Charley qui la rejoignent. Elle envoie peut-être aussi chercher Ellen Ternan.
Telle est la version racontée par John Forster, qui déclare la tenir de la bouche de Georgina.


La version officieuse

Il en existe une autre, qui lui donne un rôle tout différent : Dickens n'est pas pris de malaise chez lui, mais à Winsdor Lodge, Peckham, où réside Ellen Ternan.
Ellen le transporte mourant, voire mort, en calèche jusqu'à Gad's Hill Place distant de 24 milles, où il est tiré près de la table afin que soit simulée la scène racontée par Forster.
Pour étayer cette version des faits, le témoignage le plus important, d'après David Parker, conservateur du musée Charles Dickens, est celui d'un certain Mr J. C. Leeson, dont le grand-père, le révérend J. Chetwode Postans, est nommé en 1872 pasteur de l'église Linden Grove Congregational Church située en face de Windsor Lodge. Le gardien de l'église, en poste avant lui, lui aurait mystérieusement confié que « Dickens n'est pas mort à Gad's Hill », dires dont la portée n'apparaît que lorsqu'est connue la véritable histoire de la liaison de Dickens et la raison de ses fréquentes visites à Peckham.
L'acteur Felix Aylmer, alors en relation avec Mr Leeson, rassemble les données, puis publie peu après son Dickens Incognito, paru en 1959, mais sans s'y référer et en gardant la version de Forster.
David Parker attribue cette attitude non pas au fait qu'Aylmer a pu avoir des doutes, mais parce qu'il ne veut pas prendre le risque de faire scandale : d'un côté, il ne s'y sent pas autorisé intellectuellement ; de l'autre, il a peur que cela nuise à sa carrière tant est « sacré » tout ce qui touche à Dickens. Quoi qu'il en soit, les documents en sa possession ayant été remis au musée Charles Dickens par sa sœur après sa mort en 1979, « le dossier relatif à Peckham peut, sur ma recommandation en tant que conservateur, précise David Parker, être analysé par les chercheurs ».


Conclusions en l'état

Le coin des poètes.
Si cette hypothèse se vérifiait, Georgina Hogarth serait complice d'une mystification : à la mort de Dickens, n'écoutant que sa loyauté, elle aurait participé au dernier acte d'un camouflage persistant depuis 1858, date de la rencontre avec la jeune actrice, soit une douzaine d'années.
Pourtant, Claire Tomalin se garde de prendre parti, et David Parker, jugeant qu'elle n'a pas tort, trouve bien des raisons de discréditer l'hypothèse de Peckam : piètre fiabilité des témoins, impossibilités pratiques, rôle des domestiques, et surtout témoignage du médecin, le docteur Stephen Steele, impartial, assure-t-il, puisqu'il n'est pas le médecin personnel de Dickens, et qui confirme l'avoir trouvé inconscient sur le sol vers 18 h 30.
En définitive, l'état actuel des recherches rendrait à Georgina Hogarth la véracité de sa version des faits, telle qu'elle l'a livrée à John Forster.
Le coin des poètes
En conclusion de son article sur la vie publique de Dickens, John Drew écrit que, par une ultime ironie, son dernier effort pour dominer le destin s'est trouvé contrarié. L'immense popularité qu'il a tant chérie n'a pas voulu que sa dépouille fût inhumée, comme il le souhaitait, « sans frais, sans ostentation et strictement en privé dans le petit cimetière jouxtant le mur du château de Rochester ».

En grande pompe, la nation lui a offert une tombe dans le Coin des poètes de l'abbaye de Westminster, et tout entière a pris le deuil.


Dickens, le réformateur ?

Les émeutes de Gordon.
Selon Hugh Cunningham, il devient difficile de considérer Dickens comme un réformateur, bien que telle a été sa réputation de son vivant et longtemps après sa mort.
Non qu'il n'ait pourfendu les maux de la société, mais sans leur opposer de système cohérent, ses réponses aux problèmes soulevés restant marquées au coin par sa foi en la capacité de l'être humain à accéder à la bonté.
À l'aune de son œuvre, la mutation qu'a connue la Grande-Bretagne au XIXe siècle se mesure par le passage de la diligence au chemin de fer, de la campagne à la ville, du monde rural à celui des usines.
Trois hommes l'ayant influencé ont compris et analysé ce bouleversement, Adam Smith qui prône le laisser-faire, Thomas Malthus qui recommande le contrôle des naissances, et Jeremy Bentham, partisan du plus grand bonheur pour le plus grand nombre par l'intervention du pouvoir politique.
Instinctivement, Dickens s'est retourné contre les deux premiers, en particulier dans Les Temps difficiles, où les cadets de Thomas Gradgrind portent dérisoirement leurs noms et, dans le même roman, a activement stigmatisé les dérives engendrées par la stricte application des théories du troisième.
Dans Barnaby Rudge, Dickens dénonce la férocité aveugle de la foule qu'il a prise en horreur depuis l'agitation chartiste du Pays de Galles en 1842. Pourtant, sa méfiance envers ce mouvement est d'origine théorique : alors que le Chartisme présuppose la bonté naturelle de l'homme, lui est convaincu que si bonté il y a, elle est le fruit d'un fragile processus de civilisation. Pour le préserver, il convient que les autorités ne cèdent à aucune clémence envers les fauteurs de trouble. D'où son admiration pour la police, les détectives privés, les organismes chargés du respect de la loi.
Une mise en cause plus littéraire que politique

Cela dit, il s'attaque à certaines institutions qu'il considère comme des fléaux sociaux, par exemple la Loi sur les pauvres de 1834, modifiant l'ancienne loi d'assistance aux indigents datant de l'époque élisabéthaine.
Cette nouvelle loi, faisant suite à celle de 1832, mettait fin à l'assistance à domicile aux indigents, considérée comme trop onéreuse, et instituait leur enfermement en hospices. Dans Oliver Twist, le petit Oliver est confié à l'une de ces institutions, et Dickens en dénonce la gouvernance, en particulier l'autorité dont s'investissent de petits clercs suffisants et ignorants, tel le bedeau Mr Bumble, responsable du malheur des résidents.
Plus tard, dans La Petite Dorrit, il stigmatise l'institution pénitentiaire qui, entre autres, maltraite un vieillard malingre, Nandy, doux joueur de flûte parqué avec dix-neuf congénères de son âge dans la puanteur d'un trou. L'action de Dickens, écrit Hugh Cunningham, est restée littéraire ; il n'a pas activement milité pour changer les choses qui ont perduré longtemps après sa mort, jusqu'en 1894.
Sensible à la condition ouvrière, il visite des usines dans le Lancashire dès 1838 et ce qu'il y voit le remplit d'étonnement et de dégoût.
Il entend, écrit-il alors, « frapper un grand coup », qui, commente Hugh Cunningham, « n'est jamais venu, même dans Les Temps difficiles ». L'Edinburgh Review lui demande un article qui reste dans les limbes ; il se contente, quatre ans plus tard, d'envoyer au Morning Chronicle une lettre passionnée contre la Chambre des Lords à propos d'un amendement qu'il réprouve.
Vers le milieu des années 1850, il publie de nombreux articles dans Household Words sur les accidents du travail, blâmant les patrons et les magistrats qui « se mettent en quatre pour les comprendre ». Pour autant, alors qu'il est très sensible au travail des enfants, aucun de ceux qu'il met en scène dans ses livres ne travaille en usine : seul David Copperfield est employé à coller des étiquettes, tâche sans commune mesure avec l'esclavage des mines ou des manufactures de textile et de métallurgie ; quant au petit Joe, à jamais balayant le même carrefour dans La Maison d'Âpre-Vent, il se meurt plus d'ennui et de faim que de la dureté du labeur200.


Field Lane dans les années 1840.

Dickens s'est peu préoccupé de l'accès à l'éducation pour tous et du contenu des programmes, questions agitant la Grande-Bretagne au cours des décennies 1830 et 1840 et jamais vraiment résolues, le rôle dévolu à l'État l'intéressant moins que l'éthique et la pédagogie des établissements. Dans son œuvre, les mauvais maîtres sont légion, du brutal Wackford Squeers que rosse le jeune Nicholas Nickleby et Mr M'Choakumchild obnubilé par le « fait », jusqu'au plus titré et socialement respecté de tous, Bradley Headstone, qui ravage les jeunes esprits par les insuffisances de son caractère et en arrive au meurtre pour satisfaire son ego.
Pourtant, il est convaincu que l'éducation est primordiale dans la lutte contre le crime. Plaçant beaucoup d'espoir dans les Ragged Schools, destinées depuis 1818, à l'initiative du cordonnier John Pounds de Portsmouth, à éduquer les enfants défavorisés, il en visite une en 1843, la Field Lane Ragged School, et est consterné par ce qu'il y voit.
Il entreprend alors d'œuvrer pour une réforme de ces établissements, plaide en vain auprès du gouvernement pour une augmentation des crédits, donne lui-même des fond et rédige Un chant de Noël, au départ pamphlet sur la condition des enfants pauvres, puis récit dramatique qu'il juge plus percutant. En effet, son but est d'inciter le gouvernement à changer la loi, faute de quoi, laisse-t-il entendre, l'ignorance et le besoin condamnent les nantis à devenir des « Scrooge » desséchés, s'autorisant de leur richesse et de leur rang pour mépriser les malheureux plutôt que de leur venir en aide.
Peu à peu, cependant, il en vient à penser que la source des maux sociaux est à trouver dans les conditions d'habitat et d'hygiène réservées aux familles pauvres203. En 1851, il déclare à la Metropolitan Sanitary Association que la réforme de ce qu'on commence à appeler « la santé publique » doit précéder tous les autres remèdes sociaux, que même l'éducation et la religion ne peuvent rien tant que la propreté et l'hygiène ne sont pas assurées. Il s'intéresse d'autant plus au problème qu'un de ses beaux-frères a fondé l' « Association pour la santé des villes » et lui envoie des rapports circonstanciés, par exemple sur les dangers que représente le mode d'inhumation. Ses Esquisses de Boz et Oliver Twist (en particulier la description de Jacob's Island au chapitre 50) témoignent que son souci du problème est déjà ancien, et dans la préface de Martin Chuzzlewit en 1849, il revient sur « l'absence de progrès en matière d'hygiène dans le logement des pauvres gens ». Cent quatre-vingts enfants meurent cette année-là du choléra dans l'institution Drouet de Tooting, dont Dickens dénonce aussitôt la négligence dans quatre articles pour l'Examiner ironiquement intitulés « Paradis à Tooting ». Il réclame une centralisation des efforts sanitaires, au grand dam des conservateurs qu'il raille en Mr Podsnap. Il reprend le sujet régulièrement dans Household Words en 1854, puis encore en 1869.


Que proposer, puisque l'État fait défaut ?


La guerre de Crimée.
Le responsable ultime de tous ces maux, pense-t-il depuis longtemps, est le gouvernement, non pas tant les dirigeants qui vont et viennent, que l'administration pesante qui les accompagne. Chasse gardée de l'aristocratie, le recrutement devrait, selon le rapport Northcote et Trevelyan de 1853, se faire par concours, ce qu'approuve Dickens.
Les lenteurs du changement, cependant, alimente sa haine de la bureaucratie, que renforce l'ineptie déployée lors de la Guerre de Crimée de 1854 : entre avril et août 1855, il attaque violemment l'incompétence du pouvoir dans sa revue et se déchaîne dans le chapitre « Où il est question de la science du gouvernement » de La Petite Dorrit où le « Ministère des circonlocutions » est décrit comme « se faisant un devoir de ne rien faire ».
Dickens a cru en la philanthropie, s'est investi dans Urania Cottage voir Urania Cottage pour les « femmes perdues », l'hôpital des enfants malades de Great Ormond Street, des programmes de logements pour les ouvriers. Pour autant, il stigmatise les dérives philanthropiques en Mrs Pardiggle qui « enfile aux nécessiteux sa bienveillance comme une camisole de force » et, se consacrant corps et âmes à ses causes africaines, néglige ses enfants réduits à errer, affamés, morveux et sans soin, dans sa maison. Curieusement, malgré ses attaques contre l'Amérique, c'est à Boston qu'il trouve des institutions (publiques, à la différence de celles de son pays) qui lui paraissent secourir les plus pauvres de manière efficace et digne. Ne rien faire, pense-t-il, ou continuer en l'état, c'est préparer le lit d'une révolution à la française ; le capitalisme doit s'allier aux forces laborieuses, les écarts qu'il engendre pouvant être atténués par la bonne volonté de tous. En définitive, plutôt que d'économie politique, c'est d'humanité, de décence, des valeurs du Nouveau Testament qu'il parle.
Dickens et la Révolution française
Que Charles Dickens soit plus réformateur que révolutionnaire apparaît clairement dans sa perception de la Révolution française : dans Le Conte de deux cités (1859), œuvre romanesque ayant pour théâtre la France autant que l'Angleterre de l'Ancien Régime et de la Révolution, il contribue à la fondation de l'opinion anglaise à l'égard des événements français de 1789 à 1793.
Dickens réalise une synthèse entre la pensée d'Edmund Burke et de Thomas Carlyle : du premier, il ne conserve que l'éloge de la constitution anglaise en opposant la violence et la misère de Paris au calme et à la prospérité de Londres ; au second, principale source d'inspiration, il emprunte l'idée de l'inexorabilité d'une révolution considérée comme l'action vengeresse d'un peuple contre la corruption de la société de l'Ancien Régime ; Dickens envisage, avec le sacrifice ultime de Sydney Carton en place de Charles Darnay, héritier de la famille qui était à l'origine des malheurs des Manette, la possibilité d'échapper au cycle de la violence et du châtiment.


Les grands axes de la création dickensienne

Au regard de la puissance créatrice de Dickens, les contraintes auxquelles il a dû se plier, les influences qu'il a reçues et les moules dans lesquels il s'est glissé restent peu de choses.
Comme l'écrit Robert Ferrieux, « Son génie les a acceptés, assimilés, et, sans rien copier, il a bâti un univers original, à la fois fidèle au monde qu'il a connu et totalement différent, un univers en soi, d'essence poétique, unique dans la création littéraire ».

La publication en feuilleton

Presque toutes ses œuvres ont été publiées au rythme de parutions hebdomadaires ou mensuelles, contrainte dont il a su tirer profit, tant il l'a maîtrisée et s'en est servi pour tenir son public en haleine et parfois moduler le fil de l'action, voire les personnages, selon ses réactions.
C'est grâce à ses feuilletons réguliers, relayés au-delà des abonnements par les bibliothèques ambulantes sillonnant le pays, qu'ont prospéré les revues recevant ses feuillets, d'abord celles d'éditeurs indépendants, puis les siennes, dont Household Words et All the Year Round.
Chaque numéro comporte un cahier des charges tacite : respect du nombre de pages, autonomie de chaque numéro, avec son commencement, son apogée et sa fin, sa dépendance envers les chapitres précédents, l'annonce implicite du prochain, le ménagement d'un suspens, l'instauration d'une incertitude, l'avancée de l'intrigue sans en dévoiler la suite tout en lançant de discrètes pistes.
Paradoxalement, cette publication étalée exige une structuration de l'ensemble rigoureuse pour informer à l'avance les illustrateurs dont les planches sont longues à graver et tirer et qui doivent fournir une illustration de couverture qui, comme l'emballage, propose dès le départ une vision globale ; il convient aussi d'éviter les redites et de relancer l'intérêt à intervalles réguliers, d'où cette récurrence de rebondissements programmés, de façon dramatique au milieu et secondaire aux numéros 5 et 15. Ainsi, dans Dombey et Fils, la mort du petit Paul, d'abord prévue pour le quatrième numéro, s'est trouvée repoussée au cinquième. Ce mode de publication a été apprécié du public, pour la modicité de son prix, la convivialité d'une lecture familiale ou de quartier, les supputations sur les événements à venir, la nostalgie des actions situées dans le passé. Selon Robert Patten, « elle collait au rythme de la vie, s'insérait dans l'ordonnance des semaines ou des mois, apportait ordre et régularité dans un monde soumis à de rapides mutations ». Par ce médium, ajoute-t-il, Dickens a démocratisé la littérature


Les romans de Dickens ressortissent presque tous à la version victorienne du Bildungsroman, roman d'apprentissage, appelé aussi « roman de formation » ou « roman d'éducation »N 9,. Un protagoniste est en effet considéré de l'enfance à la maturité, avec une frustration initiale qui l'écarte de son environnement familial, engagé dans une longue et difficile maturation ponctuée de conflits répétés entre son désir et l'ordre établi, enfin réalisant l'adéquation entre l'un et l'autre qui lui permet de réintégrer la société sur de nouvelles bases; Ce passage de l'innocence à l'expérience a des variantes, par exemple, et c'est peut-être la plus caractéristique, celle de Les Papiers posthumes du Pickwick Club où le héros, homme d'expérience au regard de la société, adulé par son groupe d'amis, considéré comme un sage, un philosophe, un prophète, se lance sur les routes et au bout du chemin, s'aperçoit, surtout grâce à son passage en prison pour un quiproquo, qu'il ne sait rien, qu'il a tout à apprendre, et qui gagne, par son sacrifice, son abnégation, l'expérience du cœur, une saine connaissance des hommes et cette sagesse dont il se croyait naguère nanti.
Ce genre est issu du modèle picaresque, dont le prototype est Don Quichotte, héros pseudo-héroïque assorti d'un valet pétri de bon sens, que Cervantes a le premier confié au voyage. Dickens l'a admiré, de même que Lesage et son Gil Blas de Santillane ou son Diable boiteux, dans lequel Asmodée soulève le toit des maisons pour observer ce qui s'y passe, métaphore de la démarche du narrateur à la troisième personne.

Au-delà de Cervantès et de Lesage, Dickens s'est laissé guider par les modèles anglais du XVIIIe siècle, découverts dans sa prime jeunesse et objets permanents de sa vénération. Parmi eux ont surtout compté Defoe, Sterne, Smollett, Fielding, enfin Goldsmilth dont la veine sentimentale l'a inspiré pour prôner l'idéal de l'homme bon (Oliver Twist, Nicholas Nickleby, etc.), et aussi l'excentricité naïve de personnages comme Mr Pickwick et Mr Micawber, Mr Jarndyce ou Mr Meagles.
Dès le début de David Copperfield, le narrateur en dresse la liste et ajoute : « Ils ont nourri mon imagination et mon espoir de quelque chose au-delà de ce lieu de de ce temps j'ai été l'enfant Tom Jones une semaine durant, j'ai enduré la vie de Roderick Random pendant un mois de suite Tel fut mon seul et mon constant réconfort ». Autre influence, note Monika Fludernik, celle, souvent négligée, de William Godwin, dont le Caleb Williams a certainement servi de modèle pour la critique sociale et de source, parmi d'autres, pour ses métaphores carcérales, encore que ce soit surtout la prison pour dettes, connue par procuration, qu'il ait décrite.


William Hogarth, par lui-même.

Le mode satirique adopté par Dickens est lui aussi issu du siècle précédent. Comme ses modèles, Dickens sait repérer les travers, les faiblesses et les vanités humaines ; cependant, note Monika Fludernik, son approche est moins « au vitriol » que celle de ses prédécesseurs : ainsi Casby, escroc puni en fin de parcours, reste un homme dont le texte mentionne les souffrances, alors que le vicaire de Peregrine Pickle, qui lui ressemble beaucoup, reçoit un châtiment sans pitié relevant de la pure farce.
Il en est de même avec la critique des inepties bureaucratiques : alors que Fielding et Godwin s'acharnent sur les juges et les jurés, Dickens s'en prend à l'institution, le tribunal de la chancellerie, le ministère des circonlocutions. Sont également partagés avec le XVIIIe siècle ses portraits de femmes qui, selon Monika Fludenik, doivent quelques traits, en deçà des rencontres personnelles, à la Sophia et l'Amelia de Fielding, de même qu'à l'Emilia de Smollett (Peregrine Pickle), quoique l'idéalisation victorienne à la Coventry Patmore, l'influence des contes de fée et du mélodrame de scène ait contribué à en modeler les contours.
L'œuvre du peintre William Hogarth a aussi, dès ses débuts, beaucoup inspiré Dickens, en premier lieu, note Malcom Andrews, d'un point de vue formel. En effet, ses séries de gravures, comme A Harlot's Progress (La carrière d'une prostituée), Marriage à-la-mode, relevant d'un ensemble cohérent et structuré, lui ont servi de modèle pour le récit séquentiel, par exemple dans Meditations on Monmouth Street, où différentes vignettes très visuelles défilent devant le narrateur Boz, technique également employée dans Oliver Twist, avec sa pléthore de pièces exiguës, basses de plafond et en clair-obscur. Au-delà de cet aspect structurel, les scènes de la vie quotidienne, telles que les a caricaturées Hogarth, se retrouvent, souvent sans grande modification, en mots simplement transportés au siècle suivant.


Sous-genres

Même dans les trois romans d'initiation où intervient le « je », David Copperfield, partiellement La Maison d'Âpre-Vent, et Les Grandes Espérances, les œuvres de Dickens relèvent aussi, comme le notent Paul Davis et Philip V. Allingham, de plusieurs sous-genres pratiqués à son époque.
Si Dickens a voulu prendre ses distances avec ce que Thackeray a appelé « l'École du roman de Newgate », il s'y est néanmoins essayé dans l'épisode central d'Oliver Twist et dans certains autres de ses romans qui présentent la composante criminelle et policière retrouvée chez plusieurs de ses amis, Wilkie Collins, et Ainsworth en particulier.
Les Grandes Espérances, par exemple, regorge de pontons-prisons, de forçats, d'escrocs, de meurtriers, de caïds gérant les affaires du crime, et s'y déroulent des épisodes d'une violence sanglante. Tout au long du roman, demeurent aussi l'énigme de l'excentrique Miss Havisham, que seule la conclusion dénoue, et le suspens entourant le forçat Magwitch, dont le retour de la déportation australienne appelle la potence, réconciliant de ce fait le héros avec lui-même et scellant la fin de ses grandes espérances, puisque les biens incriminés étant confisqués par la Couronne, « d'espérances il n'y a plus ».
Cet aspect de son œuvre est indissociable des relents, auxquels, écrit Robert Mighall, il sacrifie dès ses débuts, de la tradition gothique née au xviii siècle
avec Walpole et son Château d'Otrante (1754), poursuivie, entre autres, par Mrs Radcliffe dans Les Mystères d'Udolphe (1794), et que Walter Scott exploite avec La Fiancée de Lammermoor en 1819. Ainsi, dans Les Papiers posthumes du Pickwick Club, la récurrence des fantômes, des incidents terrifiants ou simplement grotesques, surtout dans les récits intercalés, témoigne du désir de l'auteur « d'envoyer des frissons dans le dos à ses lecteurs et de les faire en même temps se tordre de rire ».
Nombre d'autres romans présentant les mêmes caractéristiques, par exemple Le Magasin d'antiquités, « paradigme du roman d'horreur » selon Victor Sage, où sévit le nain Quilp, gargouille malfaisante et « méchant gothique par excellence », et au cours duquel la petite Nell est lancée avec un grand-père malade sur des routes inhospitalières « hantées de persécution et menant droit au trépas ».
Encore faut-il remarquer que Dickens se départit du modèle udolphien en lui faisant abandonner sa maison-forteresse pour gagner la campagne. De même, avec Barnaby Rudge, même si le gothique entoure Barnaby, le « fantôme », le « spectre », le « vagabond de la terre », il s'en démarque quelque peu puisque ce personnage, censé être central, occupe rarement le devant de la scène. De plus, dans ce roman, Dickens réprouve la bigoterie anti-catholique, ici poussée aux extrêmes du crime, alors qu'elle va de soi dans le monde gothique : sa sympathie va délibérément aux victimes de la furie protestante.
En réalité, explique Michael Hollington, Dickens a tenté une nouvelle approche du genre dans ses premiers écrits : en utiliser les conventions pour dénoncer les abus trouvés à sa porte.
Esquissée par Boz, poursuivie dans Oliver Twist, cette tendance culmine dans La Maison d'Âpre-Vent où les lenteurs de la loi sont rendues, plus que décrites, par la métaphore labyrinthique des ténèbres et du brouillard, où erre une société de fantômes et de vampires, qui s'effondre lors d'une Walpurgis Nacht de dégoulinante combustion spontanée.
En 1860, avec la Miss Havisham des Grandes Espérances, vieille-femme-jeune mariée figée dans le temps en son manoir délabré ironiquement nommé « Satis House », Dickens explore le thème de l'auto-incarcération, trait gothique lui aussi dévié, puisque l'enfermement n'est imposé par personne d'autre que la victime. Comme l'écrit Robert Mighall, Miss Havisham « se gothicise avec application, déployant un art consommé de la mise en scène et de l'effet », et, « posture frankensteinienne », elle façonne sa fille adoptive Estella en un monstre d'ingratitude.
Comble de l'ironie, c'est de cette poupée glacée que le héros, Pip, s'éprend à jamais, amour si constant malgré le mépris témoigné qu'il relève aussi de la veine sentimentale du siècle précédent.
Tous les romans de Dickens, même les plus sombres tels Le Conte de deux cités et Les Temps difficiles, comportent des aspects comiques, de situation comme de caractère. Le lecteur est appelé à rire sans méchanceté de la grandiloquence souveraine de Mr Micawber, avec mépris de l'auto-étouffement du langage officiel du ministère des circoncolutions non sans commisération de la prestation théâtrale de Mr Wopsle ou du mariage de Wemmick, toutes scènes organiquement essentielles à l'intrigue et au thème central.
La palme comique revient sans doute à la création de deux personnages extraordinaires dans Les Papiers posthumes du Pickwick Club, Mr Jingle et Sam Weller.
Jingle est le champion du degré zéro de l'éloquence, sa syntaxe réduite à un empilement spartiate de mots cocasses mais redoutablement dramatiques, « langage télégraphique tintinnabulant comme son nom » : « éprouvé, à bout, petite boîte, bientôt, tas d'os, rapport police, fausses conclusions, tirer le rideau ». Quant à Sam Weller, outre son sens comique de la répartie, il pratique l'art du proverbe détourné, perverti ou forgé, d'où cet intarissable florilège d'aphorismes commentant chaque événement de façon incongrue mais essentielle. Ainsi, lors du décès de la seconde épouse de son père, une acariâtre évangéliste morte d'avoir trop bu, il trouve le mot de la fin en toute simplicité : « C'est fini et on y peut rien, et c'est une consolation, comme ils disent toujours en Turquie quand ils s'sont trompés de tête à couper ».
En gardant Les Grandes Espérances comme exemple, on trouve aussi le genre « roman à la cuillère d'argent » (Silver Fork Novel), florissant dans les années 1820 et 1830, descriptif d'une élégance clinquante et critique des frivolités de la haute société, classe pour laquelle Dickens n'a que mépris, mais qui fascine beaucoup de ses lecteurs. Ses romans peuvent se concevoir comme des « anti-romans à la cuillère d'argent » tant y est féroce la satire des prétentions et de la morale des riches et de leurs flagorneurs. Le titre même, Les Grandes Espérances, s'avère de ce fait ironique, puisque d'« espérances » en réalité, il n'y en a pas, les biens du forçat restant impurs et, de toute façon, confisqués à son retour par la Couronne.
À tous ces genres subalternes, Philip V. Allingham ajoute la catégorie du roman historique, Dickens ancrant ses récits avec un luxe de détails qui finissent par donner une idée des événements, des personnalités et de la manière de vivre de l'époque choisie. Ainsi, Les Grandes Espérances commence juste après les guerres napoléoniennes, se poursuit jusqu'aux années 1830-1835, puis saute à la décennie suivante de 1840 à 1845, et au fil de ces passages temporels, certaines indications topiques servent de points de repère : billets de banque, mode de locomotion, emplacement des potences, souverains mentionnés, etc..
Thématique
Tous les thèmes abordés par Dickens ont un rapport avec sa propre expérience, même dans les romans qui, a priori, en semblent éloignés, Le Conte de deux cités et Les Temps difficiles par exemple.
Sa thématique peut se décliner autour de trois axes principaux que John O. Jordan appelle les « fictions de l'enfance », les « fictions de la cité » et les « fictions du genre, de la famille et de l'idéologie domestique ». S'y ajoute un thème récurrent, particulièrement développé dans Les Grandes Espérances, celui que Thackeray a appelé dans son Le Livre des snobs, « donner de l'importance à des choses sans importance », ou encore « admirer petitement de petites choses ».
L'enfance


William Wordsworth.

Il est de tradition que Dickens a importé depuis la poésie romantique, surtout celle de Wordsworth, le rôle de l'enfant innocent comme figure centrale du roman. Autrefois considéré comme un adulte incomplet et peu intéressant, l'enfant est devenu vers la fin du xviiie siècle un être humain qualitativement différent et exigeant un soin approprié à son bien-être et à la préservation de son innocence.
La « dure expérience de l'enfance » qu'a connue Dickens, selon l'expression de John Forster, ressentie comme la fin de son innocence et le facteur déterminant de sa maturité, l'a rendu très réceptif à la conception wordsworthienne de l'enfant proche du divin et prédéterminant l'adulte, sentiment encore exacerbé par la mort prématurée de Mary Scott Hogarth.
Plusieurs facteurs, écrit Robert Newsom, « obligent cependant à complexifier cette histoire ».
Les Victoriens, surtout les adeptes de la Basse Église, considéraient aussi l'enfant comme particulièrement vulnérable aux mauvaises tentations, en premier la désobéissance qui conduit à tous les péchés.
Si Dickens s'est toujours opposé à la sévérité de la religion, qu'il associe à l'Ancien Testament, il n'en imagine pas moins certains petits monstres de malhonnêteté ou de méchanceté, The Artful Dodger, du gang de Fagin, Tom Scott, attaché au nain Quilp ou encore Tom Gradgrind, à l'égoïsme vertigineux.
D'autre part, ajoute Robert Newsom, « les adorateurs d'enfants à la Wordsworth sont rares dans son œuvre, et ceux qui le sont s'avèrent bien peu efficaces », tel le grand-père de Nelly.
Quant aux mères affectueuses, elles meurent jeunes, comme celle de David Copperfield, ou elles ont disparu : ainsi, Oliver Twist se retrouve à l'hospice, tandis que le narrateur spécule ironiquement sur les douces femmes qui l'ont peut-être entouré à sa naissance.
En fait, les enfants des premiers romans sont victimes non seulement de négligence, mais aussi d'un sadisme parfois fort audacieux pour l'époque : Quilp propose à la petite Nell d'être sa « numéro 2 », c'est-à-dire sa femme quand sa « numéro 1 » sera morte, et il accompagne sa déclaration de force baisers sonores sur ses « parties roses », comme il les appelle, si bien que le lecteur se demande « s'il a envie de la manger ou de la violer », « ou peut-être les deux », et Wackford Squeers, tout comme Mr Creakle fouettent les petits garçons avec un appétit jubilatoire. Autre variante d'enfant maltraité, celle du puer senex : Nell est adulte avant l'heure mais par nécessité, tandis que Paul Dombey, « le petit Paul », s'entend dès le berceau décrit par tous comme « vieux-jeu », ce qui l'inquiète, croyant que cela signifie « maigre », « facilement fatigué ». Jeté dans un moule de conformisme, poussé comme une graine en serre, il se meurt sans comprendre d'être vieux à neuf ans : il y a là l'esquisse d'une conscience limitée, écrit Robert Newsom, technique que déploie Dickens assez souvent, comme avec Joe le Balayeur, pour intensifier le pathos de la situation.
Vers le milieu de sa carrière, Dickens présente des récits à la première personne en prise directe avec son enfance. 1848 est une période de deuil pour lui et la veine personnelle l'a saisi, ses Fragments autobiographiques voisinant avec David Copperfield.
De plus, ce genre est à la mode depuis la publication de Jane Eyre en 1847 et l'immense notoriété qu'il confère bientôt à son auteur. Sans doute Dickens n'entend-il pas se laisser supplanter dans la faveur publique, d'autant qu'avec La Foire aux vanités, Thackeray occupe lui aussi la une des journaux littéraires. Robert Newsom résume ainsi la situation : « Si Jane Eyre doit beaucoup à Oliver Twist, David Copperfield, Esther Summerson et Pip lui doivent tout autant ».
La conscience de l'enfant se donne alors à lire directement, encore que, problème inhérent à toute écriture autobiographique, sa reconstitution a posteriori par une mémoire adulte accentue, par effet de loupe et aussi de style, les réactions affectives, la colère, l'angoisse, la désespérance.
Il y a là une subtile mystification narrative : les bouffées de reviviscence, dont le flux reste maîtrisé avec art, sont transcrites comme renaissant au présent, mais sans que l'adulte ne s'efface tout à fait.
Au début des Grandes Espérances s'enroulent ainsi la perspective enfantine et la rétrospection adulte, lorsque Pip raconte comment il en est venu à se nommer et quelle idée il s'est faite de ses parents d'après les lettres gravées sur leur tombe. Robert Newsome écrit qu'ici, Dickens présente une enfance « désormais éloignée des glorieuses nuées divines de Wordsworth, éclose dans un monde déchu », marqué, comme le dit le héros au chapitre 32, de la « souillure de la prison et du crime », enfance privée d'enfance, l'innocence lui ayant été refusée.
Dernier avatar, les adutes-enfants, hommes ou femmes refusant de grandir, par exemple Harold Skimpole, inspiré par l'écrivain Leigh Hunt, Flora Finching, Dora, cette fleur que David Copperfield a prise comme première épouse. Dickens ne les ménage pas s'ils allient l'irresponsabilité à la méchanceté, mais sait être indulgent envers ceux qui témoignent d'une bienveillance à tout crin : Mr Pickwick, les frères Cheeryble, Mr Micawber, tous irrésistiblement comiques et dont « la fraîcheur, la gentillesse, l'aptitude à être satisfaits », comme il est dit au chapitre 2 de David Copperfield, s'avèrent en définitive utiles, voire indispensables à la communauté.

La cité

Avant que Dickens n'écrive sur Londres, d'abord dans les Esquisses de Boz et Les Papiers posthumes du Pickwick Club, la cité n'avait figuré dans la fiction que comme décor occasionnel pour une intrigue domestique : avec lui, elle devient l'un des protagonistes de l'œuvre et l'un des moteurs de son succès.
Toute sa vie, Dickens a capitalisé sur l'expérience acquise alors que, jeune reporter, il sillonnait les rues, habitude d'ailleurs poursuivie toute sa vie. Il en ressent une joie poussée jusqu'à l'exubérance, et même lorsqu'il se trouve à l'étranger, Londres n'est jamais loin de ses pensées.
Ainsi, ses récits promènent sans répit le lecteur dans la capitale, avec ses flèches de clochers striant l'horizon, le dôme de St. Paul's dressant sa masse : ordre, chaos, le panoramique se juxtapose au personnel, deux perspectives se télescopant sans cesse, comme dans l'épisode Todgers de Martin Chuzzlewit.
Les bruits de la ville résonnent en contrepoint, « chœur symphonique de la ville », selon Murray Baunmgarten : grincement des trains, sifflets des gares, cris des vendeurs de journaux ou des colporteurs, parfois en un rendu onomatopéique comme dans Dombey et Fils.
Telle la puissante Tamise qui l'irrigue, Londres est en effet parcourue d'un mouvement permanent
, flux de la foule mais aussi mutations la rendant, pour ses habitants, les personnages, le narrateur et le lecteur, difficile à appréhender, tantôt marché, labyrinthe, prison, tantôt agent de régénération.
Les historiens notent l'exactitude de ce rendu : ainsi, alors que, dans les années 1850, les chantiers de rénovation ouvrent de nouveaux jardins et squares publics, l'aller et retour quotidien de Wemmick depuis son château miniature jusqu'à la Cité de Londres s'effectue au milieu de troupes d'acteurs et de musiciens ambulants ayant quitté les ruelles pour occuper ces espaces libérés dans un perpétuel va-et-vient. Dans cette dramaturgie, écrit Murray Baumgarten, Dickens insuffle à la cité, « lanterne magiqueN 10, ballad opera et mélodrame du XIXe siècle », la vitalité d'un Hogarth, avec des instantanés en action, autant d'effets de réel comme jaillis d'un diorama tri-dimentionnel.
« Dickens a été le démiurge d'une capitale en mouvement, ajoute Philippe Lanson, Son imaginaire détermine à ce point la capitale que la peinture, la sculpture, la scène, la photographie naissante, tout semble illustrer ses romans.
Ils prennent Londres non pas pour cadre, mais comme entité vivante, intime, multicellulaire ».
Et Alain de renchérir : « Partout où Dickens évoque un personnage, il fonde pour toujours une cellule de Londres qui ne cesse de se multiplier à mesure qu’on découvre des habitants ; l'impression de nature est alors si forte qu’on ne peut refuser ces êtres ; il faut les suivre, ce qui est mieux que les pardonner. L'atmosphère Dickens, qui ne ressemble à aucune autre, vient de cette sécrétion de l'habitation par l'habitant ».
L'idéologie domestique
Si Dickens a été reconnu de son vivant comme le prophète du foyer, ceux qu'il décrit ne connaissent en général ni l'harmonie ni le bonheur : dans son œuvre George Newlin compte 149 orphelins, 82 enfants sans père, 87 sans mère. Seuls, quinze personnages ont eu ou ont encore leurs deux parents, et la moitié de ces familles, écrit-il, « serait aujourd'hui considérée comme dysfonctionnelle ».
Pour explorer les tensions sociales, économiques et politiques de son temps, son énergie créatrice s'est donc employée à dépeindre des familles grotesques et fracturées.
Pourtant, lorsqu'il lance Household Words et écrit à Forster que sa revue sera empreinte d'« une philosophie de Noël,une veine de générosité chaleureuse, rayonnante de joie dans tout ce qui relève du chez-soi et de l'âtre », il reprend une antienne déjà connue : depuis Un chant de Noël en 1843, que relaie chaque décembre un nouveau conte dédié, il incarne cet esprit aux yeux de tous, ce que notent les commentateurs, Margaret Oliphant par exemple, ironisant sur « l'immense pouvoir spirituel de la dinde » traditionnelle, ou J. W. T. Ley qui le nomme « L'Apôtre de Noël ». Aussi une partie de sa fiction a-t-elle contribué à façonner l'idéologie domestique de son époque, la famille, jusqu'alors héritage d'une lignée, devenant un sanctuaire jugé adéquat pour chacun de ses membres.
Dans cette idéalisation du foyer, la femme assure l'harmonie de la sphère privée : ainsi la petite Nell, Agnes Wickfield, Esther Summerson, la petite Dorrit et, après quelques hésitations, Bella Wilfer. Catherine Waters note que deux de ces jeunes femmes portent le sobriquet « petite » et qu'en effet, la petitesse prévaut dans cette représentation de l'idéal domestique : celle, rassurante, des personnes (Mrs Chirrup, Dot Peerybingle), à quoi correspond l'étroitesse chaleureuse des lieux (le bateau des Peggotty, le château miniature de Wemmick), alors que les grandes bâtisses et les manoirs, où se mêlent public et privé, n'abritent plus que des hôtes aliénés ou sans cœur (Chesney Wold, Satis House, la maison de Mr Dombey).
Outre ces purs « anges du foyer », Dickens met en scène des personnages féminins plus ambigus, à la fois confirmation et critique de l'idéologie domestique dominante : ainsi l'aristocratique Lady Dedlock, dont l'apparence glaciale se conforme aux attributs de sa classe, mais que l'intimité dévoile peu à peu en proie à de sourdes passions. Le narrateur omniscient se garde de l'effraction, ne l'appelant que my Lady et, prudemment à l'extérieur, laisse l'histoire révéler d'elle-même une transgression cachée et son douloureux résultat, la perte d'un enfant. La hautaine dame, au fond, n'est qu'une « femme perdue » socialement intégrée, alors que Rosa Dartle, elle, à jamais blessée par la trahison de Steerforth, refuse toute compromission et nie farouchement sa prétendue spécificité féminine.
De plus, après 1858, et nombre de critiques y voient l'influence d'Ellen Ternan, les héroïnes de Dickens s'affirment plus volontaires, plus promptes à exprimer leurs désirs, sans compter des personnages mineurs apparaissant dans des nouvelles ou des pièces de théâtre, « femmes coquettes et capricieuses, intéressées, certes, mais aussi des femmes complètes, vivantes, authentiques… et féminines ».
Dans Les Temps difficiles, Dickens aborde la question du divorce, tissée dans la texture narrative à travers les personnages de Louisa Gradgrind et de Stephen Blackpool.
Outre le fait qu'il y est personnellement confronté, il fait écho au projet de loi de 1854, A Divorce and Matrimonial Causes Bill, que relaient deux essais parus dans Household Words. Si tous les mariages de Coketown sont désastreux, le paradigme de l'échec reste celui de Blackpool qui ne peut engager une procédure de divorce à cause du prix prohibitif, des complications légales, de l'ostracisme moral.
Ainsi, par ses descriptions répétées d'orphelins, vieilles filles célibataires, mères monstrueuses, familles disloquées, Dickens expose l'instabilité de l'idéal domestique qu'il cherche pourtant à affirmer. Certes, écrit Natalie McNight, il s'est appuyé sur les stéréotypes de son temps, mais il en révèle aussi les tensions et les contradictions, et sa fiction les transcende par sa richesse imaginative.


Le snobisme

D'où vient l'argent chez Dickens ? Il est issu du travail, explique Henri Suhamy, mais n'est acceptable que s'il s'agit du travail d'autrui.
Miss Havisham tire ses revenus de la location de ses biens, argent pur que ne souille pas le dur labeur. Aussi, parce qu'elle est riche, la vieille dame, malgré son excentricité, jouit-elle de l'estime générale et, bien qu'exclue de la vie, elle ne l'est pas de la société, image même d'une aristocratie terrienne demeurée puissante quoique figée dans le passé. En revanche, l'argent venu de Magwitch est frappé d'interdit social car d'un forçat, gagné sur une terre criminelle et à la force des bras. De quels atouts doit-on disposer pour accéder à la « distinction » ? Un titre, ou à défaut, des liens familiaux avec la classe moyenne supérieure : ainsi, Mrs Pocket fonde son aspiration de tous les instants sur le fait que son grand-père a « failli » être anobli, et Pip entretient l'espoir que Miss Havisham finira par l'adopter, car l'adoption, comme en témoigne Estella qui se conduit en petite dame née, est tout à fait acceptable.
L'argent et l'éducation, indifféremment de tout apprentissage professionnel, sont plus importants mais non suffisants. À ce compte, c'est l'odieux Bentley Drummle qui incarne l'idéal social, ce qui explique pourquoi Estella l'épouse sans sourciller.
Or l'argent est corrupteur : son attrait prévaut sur tout, la loyauté, la gratitude, la conscience même, et l'idée de gentleman, selon John Hillis-Miller, « fait banqueroute ».
Ce rejet, amorcé par Dickens dans La Petite Dorrit et confirmé dans Les Grandes Espérances, n'est pas forcément partagé par les contemporains : pour Thackeray, l'idée du « gentleman » doit être réévaluée mais reste un concept indispensable, et pour Trollope, l'éthique ne saurait être spontanée qu'« avec ces qualités défiant l'analyse que montrent l'homme et la dame de distinction ». Enfin, richesse et distinction n'apportent pas le bonheur, « un monde que dominent l'appât de l'argent et les préjugés sociaux conduisant à la mutilation de l'être, aux discordes de famille, à la guerre entre homme et femme ».


Le réalisme à la Dickens

« Une rue de Londres décrite par Dickens est bien comme une rue de Londres, mais est encore plus comme une rue chez Dickens, car Dickens utilisé le monde réel pour créer son propre monde, pour ajouter une contrée à la géographie de l'imagination ».
Ainsi Lord David Cecil résume-t-il le réalisme dickensien, ce qui implique que le réalisme à l'état pur n'existe pas et que l'intention finit par s'effacer devant l'énergie de la vision.


Un univers poétique


Tel est le point de vue traditionnel, issu de Chesterton, puis de Humphry House, qui voit dans l'œuvre de Dickens, outre sa satire sociale et morale, ou ses interrogations sur ce qu'est la civilisation, dans la lèpre des choses comme dans la corruption des cœurs, et surtout parce que gens, lieux et objets prennent valeur de signes, de symboles, les personnages se mouvant comme des emblèmes et les paysages s'entourant d'un halo de signification.
Même, par exemple dans Les Grandes Espérances, lorsqu'il décrit les ruelles sombres et entortillées comme la fumée qui en souille les murs, explique Henri Suhamy, Dickens ne fait pas naître la laideur : sous sa plume, le laid devient cocasse, le tohu-bohu foisonnement de vie, et le marais plat avec sa potence et ses tombes, le fleuve noir comme le Styx, la mer inaccessible, ses carcasses et ses épaves, la ville labyrinthique, tout cela représente, plus qu'il ne les évoque, la mort, le désert de la vie, l'éternité, mais aussi l'espérance et la foi en l'avenir.
Alors, le monde apparaît comme un autre atlas où les mouvements des astres, des flots, des lumières, la nuit, le brouillard, la pluie ou la tempête isolent les demeures, perdent les itinéraires, traquent les êtres, les attendent comme le destin. Dans cet univers, les hommes se rencontrent mais ne s'unissent pas, se touchent pour se repousser, se joignent pour se combattre ; univers en soi où êtres et choses trouvent une place qui n'est pas celle qui leur serait assignée dans la réalité, avec ses lois propres, sans hérédité par exemple, ni grande influence du milieu, avec des marées erratiques et des probabilités bafouant la mathématique.
Alors, l'étrange devient le normal et le fantastique simplement l'inhabituel : c'est-là un univers poétique.
Aussi, comme l'écrit Virginia Woolf dès 1925, « L'extraordinaire puissance de Dickens a un effet étrange.
Elle fait de nous des créateurs, pas seulement des lecteurs et des spectateurs ».
La critique contemporaine n'en dit pas moins : selon Nathalie Jaëck, les romans de Dickens sont volontairement duplices, avec, au cœur de cette écriture créant le réalisme à l'anglaise, une subversion intrinsèque, un désir d'introduire, au sein du système de représentation qu'elle construit, une mise en échec, une alternative formelle : « situé au moment crucial où le réalisme se voit confronté à ses limites, et où le modernisme ne s'est pas encore érigé en système, le texte dickensien s'installe dans cet espace de transition : il construit très méthodiquement une machine littéraire réaliste efficace, en même temps qu'il expérimente les moyens formels de gripper le bel ouvrage ».
Une langue protéiforme
D'après Patricia Ingham, « la maîtrise de la langue dont fait preuve Dickens, unique par son invention et sa densité , en fait le James Joyce de l'Époque victorienne. Déployant toutes les ressources linguistiques possibles, depuis la création de vocables jusqu'à l'allusion littéraire, choix rarement sans modèles littéraires plus anciens qu'il développe souvent au-delà de toute reconnaissance ».


Romans

Les Papiers posthumes du Pickwick Club (The Posthumous Papers of the Pickwick Club), publication mensuelle d'avril 1836 à novembre 1837 (*).
Oliver Twist (The Adventures of Oliver Twist), publication mensuelle dans Bentley's Miscellany de février 1837 à avril 1839 (*)
Nicholas Nickleby (The Life and Adventures of Nicholas Nickleby, publication mensuelle d'avril 1838 à octobre 1839 (*)
Le Magasin d'antiquités (The Old Curiosity Shop), publication hebdomadaire dans Master Humphrey's Clock d'avril 1840 à février 1841 (*).
Barnaby Rudge (Barnaby Rudge: A Tale of the Riots of 'Eighty), publication mensuelle du 13 février 1841 au 27 novembre 1841 (*).
Livres sur le thème de Noël :
Martin Chuzzlewit (The Life and Adventures of Martin Chuzzlewit), publication mensuelle de janvier 1843 à juillet 1844 (*).
Un chant de Noël (A Christmas Carol) (1843) (*).
Les Carillons (The Chimes) (1844) (*).
Le Grillon du foyer (The Cricket on the Hearth) (1845) (*).
La Bataille de la vie (The Battle of Life) (1846) (*).
L'Homme hanté ou le Pacte du fantôme (The Haunted Man or the Ghost's Bargain) (1848) (*).
Dombey et Fils (Dombey and Son), publication mensuelle de mai 1849 à novembre 1850 (*).
David Copperfield (The Personal History, Adventures, Experience and Observation of David Copperfield the Younger of Blunderstone Rookery (Which He Never Meant to Publish on Any Account)), publication mensuelle de 1849 à 1850 (*).
La Maison d'Âpre-Vent (Bleak House), publication mensuelle de mars 1852 à septembre 1853 (*).
Les Temps difficiles (Hard Times), publication hebdomadaire dans Household Words, d'avril à août 1854 (*).
La Petite Dorrit (Little Dorrit), publication mensuelle de décembre 1855 à juin 1857 (*).
Le Conte de deux cités (A Tale of Two Cities), publication hebdomadaire dans All the Year Round d'avril 1859 à novembre 1859 (*).
Message venu de la mer (A Message from the Sea) (1860).
Les Grandes Espérances (Great Expectations), publication hebdomadaire dans All the Year Round de décembre 1860 à août 1861 (*).
L'Ami commun (Our Mutual Friend), publication mensuelle de mai 1864 à novembre 1865) (*).
Le Mystère d'Edwin Drood (The Mystery of Edwin Drood), publication mensuelle d'avril 1870 à septembre 1870. Le roman est resté inachevé, six seulement des douze numéros prévus ayant été terminés avant la mort de Dickens (*).
Recueils divers
Pour une liste complète des œuvres dites « courtes » écrites par Dickens, voir A Comprehensive List of Dickens's Short Fiction, 1833-1868. Consulté le 23 janvier 2013.
Esquisses sur Londres
Esquisses de Boz (Sketches by Boz, Illustrative of Every-day Life and Every-day People) (Sketches by Boz) (*) publié dans Bentley's Miscellany (1836)N 11,406.
Nouvelles indépendantes
The Mudfrog Papers publié dans Bentley's Miscellany (1837-1838).
La Vie d'un Clown, Mémoires de Grimaldi (Memoirs of Joseph Grimadi) (1838).
The Haunted Man (1858).
Reprinted Pieces (1858) (*).
Le Pauvre voyageur (The Uncommercial Traveller) (1860-1869) (*).
Nouvelles publiées dans L'Horloge de Maître Humphrey (Master Humphrey's Clock)
Aveux trouvés dans une prison à l'époque de Charles II
Nouvelles sur le thème de Noël publiées dans Paroles familiales (Household Words), hebdomadaire où Charles Dickens était directeur et rédacteur en chef à partir de 1850
L'Arbre de Noël (The Christmas Tree) (1850).
Noël quand nous vieillissons (What Christmas Is, as We Grow Older) (1851).
A Round of Stories by the Christmas Fire (1852).
Le Conte du parent pauvre (The Poor Relation's Story) (1852)
Another Round of Stories by the Christmas Fire (1853).
Le Conte de l'Écolier (The Schoolboy's Story) (1853)
Les Sept pauvres voyageurs (The Seven Poor Travellers) (1854).
(L'Auberge de)la Branche de houx (The Holly-Tree Inn) (1855).
Le Naufrage du «Golden Mary» (The Wreck of the Golden Mar) (1856).
Dangers courus par certains prisonniers anglais (The Perils of Certain English Prisoners) (1857).
Maison à louer (A House to Let) (1858).
Nouvelles sur le thème de Noël publiées dans Tout le Long de l'Année (All the Year Round), nouveau titre pour Paroles familiales à partir de 1859 au moment ou Charles Dickens se sépara de sa femme
La Maison hantée (The Haunted House) (1859).
Message venu de la mer (A Message from the Sea) (1860).
La Terre de Tom Tiddler (Tom Tiddler's Ground) (1861).
Les Bagages d'Un Tel (Somebody's Luggage) (1862).
La Pension Lirriper (Mrs Lirriper's Lodgings) (1863).
L'Héritage de Mme Lirriper (Mrs Lirriper's Legacy) (1864).
Le Docteur Marigold (Doctor Marigold's Prescriptions) (1865). C'est une série de contes écrits pour distraire une petite fille sourde et muette. On y trouve:
Un procès criminel
L'Embranchement de Mugby (Mugby Junction) (1866). C'est une série de contes écrits pour distraire une jeune femme malade. On y trouve:
Le SignaleurN 12,407.
L'Impasse (No Thoroughfare) (1867), écrit en collaboration avec Wilkie Collins
Autres œuvres : critique, poésie, théâtre
(Certaines de ces œuvres ont été écrites en collaboration, en particulier avec Wilkie Collins et, mais dans une moindre mesure, Elizabeth Gaskell).
The Village Coquettes (théâtre, 1836).
The Fine Old English Gentleman (poésie, 1841).
Memoirs of Joseph Grimaldi (1838).
Notes américaines (American Notes: For General Circulation) (1842) (*).
Pictures from Italy (1846) (*).
The Life of Our Lord: As written for his children (1849).
A Child's History of England (1853).
Les Abîmes glacés (The Frozen Deep) (théâtre, 1857).
L'Abîme (No Thoroughfare) (1867)N 13.
Correspondance
Plus de 14 000 lettres de Dickens à 2 500 correspondants connus, 450 formant The Selected Letters of Charles Dickens, British Academy Pilgrim Edition, Jenny Hartley, éd., Oxford, Oxford University Press, 2012.
Dickens sur scène, à l'écran et en littérature

Adaptations célèbres

Parmi les productions les plus remarquées, figurent trois adaptations de Un chant de Noël :
A Christmas Carol, d'Edwin L. Marin avec Reginald Owen en 1838,
Scrooge (Fantômes en fête), de Richard Donner avec Bill Murray et Karen Allen en 1988
A Christmas Carol (Le Drôle de Noël de Scrooge), de Robert Zemeckis avec Jim Carrey et Gary Oldman en 2008.
Oliver Twist a inspiré en particulier :
Oliver Twist, de David Lean avec Alec Guinness et John Howard Davies en 1948,
Oliver!, comédie musicale de Carol Reed avec Mark Lester et Oliver Reed en 1968,
Oliver Twist, de Roman Polanski avec Ben Kingsley et Barney Clark en 2005.
Quant à David Copperfield, il a été adapté dans David Copperfield, de George Cukor avec W. C. Fields et Lionel Barrymore en 1935, David Copperfield, de Simon Curtis avec Bob Hoskins et Maggie Smith en 1999.
La Petite Dorrit s'est vue portée à l'écran dans Little Dorrit, de Christine Edzard avec Derek Jacobi en 1988, et Les Grandes Espérances a, entre autres, notablement conduit à Great Expectations, d'Alfonso Cuarón avec Robert De Niro et Anne Bancroft en 1998.
Le mystère de Le Mystère d'Edwin Drood
Le Mystère d'Edwin Drood a, du fait que le roman est inachevé, reçu un traitement privilégié car, les mardi et mercredi 11 et 12 janvier 2012, BBC2 a retransmis une version en deux parties inédite et achevée de l'histoire. Le scénario original est de Gwyneth Hughes, auteur de la série anglaise Five Days, nominée aux Golden Globes. La scénariste a souhaité garder le secret quant au dénouement qu’elle a choisi de mettre en scène.
Le second épisode a réservé quelques surprises : Jasper (Matthew Rhys) s'évertue à monter un mauvais coup contre Neville et, bien qu'il n'y ait ni cadavre ni autre évocation du meurtre que celles, en flashback, des fantasmes de Jasper, la ville entière est convaincue que Drood a bel et bien été assassiné.
Mais le jeune homme réapparaît calmement quelque dix minutes avant la fin et explique qu'il a fait une brève excursion en Égypte : ainsi, Jasper n'a pas tué et tout n'était donc que rêve et fantasme…
Et pourtant si, Jasper a tué, pas Edwin cependant, mais son père, le vieux Drood ; et se démêle un écheveau qu'on eût cru moins compliqué : en réalité, le père de Drood est aussi celui de Jasper… et de Neville, si bien que Jasper et Edwin ne sont pas oncle et neveu, mais frères, et que Neville s'ajoute lui aussi à la fratrie. À contre-courant de l'histoire, semble-t-il, puisqu'il a passé ses derniers jours à comploter contre elle, la famille Drood célèbre dans la scène finale la mémoire de l'oncle/père décédé.

Dickens en personnage de roman

Du coup, Dickens est devenu le protagoniste d'un roman, Drood de Dan Simmons, paru en France en 2011.
Dans une chronique du Monde des livres, Hubert Prolongeau explore la fascination de l'auteur américain pour le roman inachevé de Dickens et explique qu'au leu de résoudre le mystère insoluble de sa fin, il a préféré en chercher la clef dans sa genèse. Partant de l'accident ferroviaire de 1855 à Staplehurst, il a imaginé que l'écrivain y a croisé un personnage étrange, nez et doigts coupés, nommé Drood. « Qui est ce Drood, qui va l'obséder au point qu'il consacre désormais toute son énergie à tenter de le retrouver, jouant dans cette quête à la fois sa santé et son salut ? ». Il y a plus cependant, en faisant de Wilkie Collins son narrateur, Simmons sonde aussi son propre mystère : que ce « ce tout petit maître du roman victorien, soit le véritable héros du livre n'est-il dû qu'au hasard ?
En le peignant à la fois admiratif et jaloux de Dickens, son génial collègue, pris entre l'envie et l'amitié, Salieri de ce Mozart des mots, Simmons révèle sans doute quelques-uns de ses doutes face à la création littéraire. On retrouve dans Drood son besoin d'associer en permanence à ses écrits ceux des grands maîtres du passé, leur rendant hommage et affirmant la nécessité d'une filiation »

Comme William Shakespeare, Charles Dickens fait l'objet de centaines, voire de milliers de publications annuelles. Chaque ouvrage spécialisé propose sa bibliographie dans laquelle reviennent certains titres qui, ayant en leur majorité servi à la mise au point de cet article, sont retenus ci-dessous.
Traductions en français


Du vivant de Charles Dickens, beaucoup de ses œuvres ont été, avec son accord et souvent une préface rédigée par ses soins, traduites en français.
Après sa mort, les traductions se sont succédé jusqu'à la fin du XIXe siècle.


Films
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Posté le : 09/06/2013 12:24
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Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
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