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André Leroi-Gourhan
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Le 25 Août 1911 à Paris naît André Leroi-Gourhan, ethnologue, archéologue, préhistorien,

membre de l'Institut, et historien français, spécialiste de la Préhistoire. C'est aussi un penseur de la technologie et de la culture, qui sait allier précision scientifique et concepts philosophiques.

André Leroi-Gourhan
... "l'homme préhistorique ne nous a laissé que des messages tronqués" ...


Enfance

André, Georges, Léandre, Adolphe Leroi voit le jour le 25 août 1911 à Paris. Son père décède dans les premiers jours de la guerre de 14, sa mère disparaît aussi assez rapidement, si bien qu’André et son frère cadet, pupilles de la nation, sont recueillis par leurs grands-parents maternels qui vont les élever complètement.
Quelques années plus tard André, reconnaissant, ajoutera leur nom à son patronyme.
Sa grand-mère le conduit fréquemment au Jardin des Plantes et au Muséum d’Histoire Naturelle où la Grande Galerie de l’Evolution exerce sur lui un attrait particulier. Les squelettes de grands animaux, les dinosaures le fascinent.
Le troisième étage recèle également des trésors, le crâne de l’homme de Cro-Magnon entre autres. A Moret-sur-Loing avec son grand-père paternel, trésorier de l’Association des naturalistes, il court les bois, observe la nature et rencontre même quelques préhistoriens prospectant dans la région de Nemours.
La scolarité est des plus médiocres, le futur A. Leroi-Gourhan se décrit lui-même comme un "cancre reconnu ", seuls le français et les sciences naturelles l’intéressent, il est totalement sourd aux mathématiques et il le restera.
Dès qu’il atteint l’âge de 14 ans son grand-père, quelque peu lassé, lui signifie qu’il est temps pour lui de gagner sa vie et le place comme apprenti dans la bonneterie.
Toujours apprenti il change de branche et entre dans l’édition puis la librairie.
Il fait à cette époque deux rencontres déterminantes : une femme qu’il désigne comme sa " marraine " et son chef du personnel.
Sa marraine le fait baptiser et lui offre "Les Hommes fossiles" de Marcellin Boule, qui vient de paraître ; son chef du personnel le fait travailler, en particulier sur ce livre.

Etudes

Incité par sa "marraine" et son chef du personnel, il reprend ses études et donc parallélement Leroi-Gourhan fréquente l’Ecole d’Anthropologie et prépare son bac.
En 1928 sa marraine le présente à Paul Boyer administrateur de l’Ecole des langues orientales qui le recrute comme secrétaire adjoint, puis en temps qu' aide-bibliothécaire.
Son bac en poche et toujours tout en travaillant il décide de poursuivre ses études.
Son souhait est d’apprendre le russe, Paul Boyer lui conseille le chinois, langue qui doit lui permettre de rentrer dans la diplomatie et de bien gagner sa vie tout en se consacrant à ce qui l’intéresse le plus : l’ethnologie.
Qu’à cela ne tienne il étudie les deux langues et en 1931, âgé de vingt ans il obtient son diplôme de russe.
Très tôt attiré par la diversité des cultures, il suit les cours de Paul Pelliot et d'André Mazon à l'École nationale des langues orientales vivantes où il obtient donc, un diplôme de russe à vingt ans et de chinois à vingt-trois ans.
Rien ne l’arrêtera plus, en 1933 il obtient en plus de son diplôme de chinois, et prépare une licence de lettres.
Parallèlement il suit à l'École pratique des hautes études les cours de Marcel Granet. Il participe ensuite à la transformation de l'ancien Musée d'ethnographie du Trocadéro en Musée de l'Homme où il travaille dès 1933, ainsi qu'au département d'ethnographie du British Museum.

L'aventure professionnelle


En 1933-34 il est pensionnaire de la Maison de l’Institut de France à Londres où il travaille au département d’ethnographie du British Museum et du Victoria Museum.
De retour à Paris son service militaire lui laisse de nombreux loisirs qu’il emploie au tout nouveau Musée de l’Homme en qualité "d'attaché bénévole".
En 1936 paraissent ses deux premiers livres : Bestiaire du bronze chinois et La civilisation du renne.
Il publie l'année suivante "Le Mammouth dans la zoologie des Esquimaux", et "Le Kayak et le Harpon des Esquimaux", enfin, en 1937, paraît "La Zoologie mythique des Esquimaux". Cet intérêt pour les civilisations du Grand Nord et pour l'évolution de l'art et des techniques annonçait peut-être déjà son cheminement dans l'univers de la préhistoire

En 1937, le Musée de l'Homme et les Musées nationaux l'envoient en mission au Japon d'où il ramènera, en 1939, les matériaux pour sa thèse de doctorat ès-lettres dirigée par Marcel Mauss et consacrée à L'Archéologie du Pacifique Nord; Cette mission ethnologique et archéologique le conduira jusque chez les Aïnous de Hokkaïdo
La même année André Leroi-Gourhan se marie, il épouse Arlette, fille de Paul Boyer.
En 1937-38 il est au Japon en qualité de "chargé de mission du Musée de l’Homme et des Musées Nationaux".
Dès son retour il est mobilisé comme simple soldat, puis, ses compétences ayant été reconnues, comme officier traducteur dans la marine.
Il sera ainsi démobilisé à Toulon sans avoir combattu ni avoir été fait prisonnier.
Le conservateur adjoint du Musée Guimet, Philipe Stern de religion juive, ayant été obligé de s’enfuir, le poste est proposé à André Leroi-Gourhan qui accepte et rentre à Paris.
A la même époque, il est nommé conservateur par intérim du Musée Guimet de 1940 à 1944, et exerce également comme chercheur au CNRS.
Cette année-là, il est envoyé au château de Valençay pour veiller sur certaines œuvres évacuées du Louvre, dont la Vénus de Milo et la Victoire de Samothrace.
Il participe aux activités de la Résistance, ce qui lui vaudra en 1945 la médaille de la résistance, la croix de Guerre et la croix de la Légion d'Honneur.

Il participe ensuite à la libération de Châteauroux et termine la guerre décoré.
A la Libération André Leroi-Gourhan devient sous-directeur du Musée de l'Homme.
En 1946 il est nommé maître de conférence en ethnologie coloniale à l'université de Lyon sur une chaire créée par le Ministère des colonies, il doit y assurer un cours "d’ethnologie coloniale".
Il y développe entre autres un enseignement de technologie comparée à partir de l’étude de collections d’objets ethnographiques de différents musées lyonnais. Ne concevant pas l’ethnologie sans une part de terrain, il sillonne le Mâconnais avec des étudiants qu’il initie à ce qu’il appellera plus tard l’ethnologie préhistorique.
Il n’en reste pas moins parisien, attaché en même temps, au Musée Cernuschi et en 1946 sous-directeur au Musée de l’ Homme, il ne cessera de faire des aller-retour entre les deux villes.
Faute de pouvoir offrir à ses étudiants une formation de terrain en Afrique ou ailleurs il les entraîne à un chantier de fouilles à la grotte des Fortins, à Berzé-la-Ville près de Mâcon.
Il y développe entre autres un enseignement de technologie comparée à partir de l’étude de collections d’objets ethnographiques de différents musées lyonnais.
Ne concevant pas l’ethnologie sans une part de terrain, il sillonne le Mâconnais avec des étudiants qu’il initie à ce qu’il appellera plus tard l’ethnologie préhistorique.

Thèses

C'est à cette période qu' il termine sa thèse de lettres : Archéologie du Pacifique nord et Documents pour l’art comparé de l’Eurasie septentrionale.
Chercheur au C.N.R.S en 1940 il soutient une thèse de troisième cycle puis en 1945, une thèse d'état, de doctorat ès lettres en Sorbonne : Archéologie du Pacifique nord, fruit de ses recherches en France et au Japon, consacrées à l'étude des témoins matériels des populations bordant les rives du Pacifique, depuis le Japon jusqu'à la Colombie britannique, et à un essai de synthèse sur les populations nord-sibériennes et esquimaudes.
Le domaine esthétique est abordé dans sa thèse complémentaire : Documents pour l'art comparé d'Eurasie septentrionale, suite de quatre études sur l'évolution morphologique et sémantique des thèmes populaires, de l'âge du bronze au XIXe siècle, études fondées sur l'analyse de vingt-cinq mille documents.
La même année en 1945, paraît "Milieu et Technique", second volume de l'ouvrage "Évolution et Techniques" dont le premier, "L'Homme et la Matière" de 1943, était une classification générale des techniques de fabrication.
Dans "Milieu et Technique", sont étudiées les techniques d'acquisition et de consommation. L'ouvrage se termine par une réflexion générale sur les contacts entre civilisations et sur les problèmes d'emprunts et de diffusion dans les sociétés préindustrielles.
"Évolution et Techniques" restera un ouvrage fondamental, tant par la nouveauté et l'efficacité de son analyse des techniques traditionnelles que par l'abondance de sa documentation ethnographique qui couvre l'ensemble des sociétés préindustrielles.
Il enseigne également à Paris à l’Institut d’ethnologie, à l’Ecole Normale de Saint-Cloud, à l’Ecole des langues orientales…. tout en complétant sa formation.

Maître de conférence

En 1954 il soutiendra une thèse de science : "Les tracés d’équilibre mécanique du crâne des vertébrés terrestres et Etude des restes humains fossiles provenant des grottes d’Arcy-sur-Cure. " où l'occupation humaine s'étend du Paléolithique moyen au Magdalénien récent, et du site de plein air de Pincevent en Seine-et-Marne, depuis 1964, où vécurent, il y a quelque douze à quinze mille ans, des chasseurs de rennes magdaléniens dont on retrouve les vestiges de campements protégés sous un épais dépôt de limons d'inondation.
Le "cancre reconnu" a bel et bien disparu.
En 1956 André Leroi-Gourhan rentre complètement à Paris pour succéder à Marcel Griaule à la Sorbonne, à la chaire d'Ethnologie générale et Préhistoire, puis est élu à la chaire de Préhistoire du Collège de France de 1969 à 1982 et membre de l'Institut de France.
Il développe une importante carrière d’enseignant et de chercheur qui lui vaudra rapidement une audience nationale, puis internationale, et en 1969 une nomination au Collège de France.
En 1973, il reçoit la médaille d'or du CNRS.
Parmi ses élèves, on dénombre le chanteur Nino Ferrer, passionné d'archéologie, et l'archéologue François Beaudouin.
Sa bibliothèque et ses manuscrits de travail sont conservés à la Bibliothèque municipale de Périgueux.
Énumérer les différentes étapes de cette carrière, les thèmes des enseignements, les groupes de recherche animés et chantiers de fouilles dirigés serait fastidieux, mieux vaut tenter de situer les grandes lignes d’une œuvre peu commune.
Deux axes principaux ont occupé l’esprit et le temps d’André Leroi-Gourhan tout au long de sa vie : les fouilles et l’art préhistorique.

La fouille.


Lorsque la Préhistoire balbutie encore la fouille se pratique avec une sorte de gros crochet, qui aujourd’hui paraît monstrueux, quand ce n’est pas à l’aide d’ouvriers munis de pelles et de pioches, le but et de découvrir un bel objet.
Dès ses débuts, en effet, la préhistoire s'est préoccupée d'établir un cadre chronologique en se fondant sur la stratigraphie des gisements, l'identification de la faune et la description des outils mis au jour dans chacun des niveaux et considérés comme des "fossiles directeurs".
Dans la période suivante la fouille devient verticale, il s’agit de dégager une tranche nette permettant de bien voir la succession des différentes couches et de définir une chronologie relative.
Si la chronologie reste importante l’idée se dégage peu à peu que l’emplacement d’une pièce est aussi, sinon plus importante que sa qualité.
alors, André Leroi-Gourhan développe alors, cette perspective en préconisant la conduite horizontale maxima des fouilles.
Il propose une approche radicalement nouvelle de l'interprétation de l'art pariétal paléolithique, basée sur un retour aux documents eux-mêmes, à l'analyse des relations de voisinage des œuvres et de leur position par rapport à la topographie des cavités.
Il procède à un traitement statistique des représentations et aboutit à une lecture symbolique des figurations, pictogrammes, mythogrammes interprétées comme des symboles masculins ou féminins.
Renonçant aux interprétations traditionnelles, magie, chamanisme, totémisme…, il conclut que les grottes ornées paléolithiques sont des sanctuaires religieux, emportant la conviction de la plupart des préhistoriens. Ses plus proches héritiers sont M. Lorblanchet, B. et G. Delluc.
Il participe au début de la "paléoethnologie" appelée aussi "palethnologie", l'étude des hommes préhistoriques dans leur milieu.
Avec Leroi-Gourhan, on voit que la fouille, a considérablement progressé depuis son origine dans ses résultats et ses moyens d'investigation : datations absolues à partir de radio-éléments, analyse des indices climatiques, etc.
Elle ne permet cependant pas, hormis la simple étude fonctionnelle des outils ainsi mis au jour, d'atteindre à la compréhension ethnologique de ces sociétés préhistoriques.
L'étude horizontale, microtopographique, des anciens sols d'occupation, grâce à un décapage et à un enregistrement méticuleux de tous les vestiges, même fugaces, et l'étude de leurs relations spatiales permettent, au contraire, de préciser non seulement la structure des anciens sites d'habitation mais également les activités qui s'y déroulaient, et d'élaborer une esquisse de l'organisation sociale.
Chaque pièce d’os, de silex, de pierre, de charbon, d’ocre… même la plus minuscule est repérée dans les trois dimensions, dessinée, photographiée en place avant d’être relevée, inventoriée, classée.
Viennent ensuite les analyses, les essais de remontages etc.…Les chantiers de fouilles deviennent ainsi des entreprises collectives importantes, André Leroi-Gourhan dit curieusement avoir pris goût à la vie collective dans la résistance, et pluridisciplinaires : spécialistes de l’os de la pierre, des pollens….
Cette perspective de fouille, issue de Russie, va être défendue, développée, appliquée et enseignée par André Leroi-Gourhan tout au long de sa carrière.
Au cours des fouilles qu'il a dirigées à la grotte des Furtins en 1945, dans les grottes d'Arcy-sur-Cure entre 1946 et 1963, mais surtout sur le site magdalénien de Pincevent à partir de 1964, André Leroi-Gourhan a contribué à renouveler les méthodes de fouilles archéologiques.
Le site exceptionnellement conservé de Pincevent lui a permis de développer une analyse spatiale des habitats préhistoriques, grâce à la fouille par décapages, à l'origine de l'ethnologie préhistorique française.
Après les grottes d’Arcy-sur-Cure le chantier de Pincevent, poursuivi pendant plus de vingt ans du vivant du "Patron" et toujours actif, lieu de toutes les expérimentations et de tous les enrichissements, est devenu une référence.
Ce travail a un but ultime : arriver, autant que faire se peut, à reconstituer le mode de vie de l’homme paléolithique, ou en d’autres termes faire accéder la fouille à une dimension ethnologique.

Le professeur/ le pédagogue


André Leroi-Gourhan fut un grand pédagogue tant en ethnologie qu'en archéologie.
Son œuvre fut donc poursuivie par de nombreux chercheurs, parmi eux : Robert Cresswell, Hélène Balfet, Christian Pelras, Pierre Lemonnier, Christian Bromberger, Giulio Angioni en Italie, Jean-Pierre Digard, Aliette Geistdoerfer, Bruno Martinelli, ce qui constitue une école française d'ethnologie des techniques plus reconnue comme telle dans les pays anglo-saxons et en Italie que dans l'hexagone.
Plusieurs équipes de recherche s'inscrivent dans la tradition de pensée d'André Leroi-Gourhan : le groupement de recherche "Matières et manières" successivement dirigé par Hélène Balfet, C. Pelras et Bruno Martinelli et l'équipe de "Technologie culturelle" longtemps dirigée par Robert Cresswell puis Aliette Geistdoerfer, connue aussi sous le nom de sa revue Techniques et culture, revue fondamentale pour la définition du champ disciplinaire.
André Leroi-Gourhan a aussi une influence importante dans le champ du travail, avec l'analyse pluridisciplinaire des situations de travail d'Y. Schwartz, la clinique de l'activité initiée par son élève Yves Clot, et la sociologie du travail qui va de Pierre Naville à François Vatin notamment.
En sociologie, il constitue plus largement une référence pour le renouveau des théories de l'action, chez Jean-Claude Kaufmann, Laurent Thévenot, Nicolas Dodier, Giulio Angioni, Albert Piette et, quoique sur un registre plus polémique, Bruno Latour.
Sa méthode de classification et ses concepts ont exercé une grande influence sur la philosophie des techniques de Gilbert Simondon.
Il est nommé professeur à la Sorbonne en 1956 dans la section "ethnologie générale et préhistoire", puis au Collège de France en 1968. Il y occupe la chaire de préhistoire créée pour l'abbé Breuil en 1929 et qui était restée vacante, au moins pour la préhistoire, depuis vingt ans.
Il est aujourd'hui peu d'ethnologues et de préhistoriens français, voire étrangers, chercheurs confirmés ou débutants, qui n'aient été formés à son école, dans les domaines théoriques comme sur le plan pratique.
André Leroi-Gourhan a consacré une partie de son œuvre à l'anthropologie des techniques, fournissant à la fois des principes théoriques, les concepts de tendances et de faits techniques, de milieu technique, de milieu favorable à l'invention et à l'emprunt, des cadres méthodologiques que sont les méthodes d'analyse des degrés du fait et de la chaîne opératoire et une classification générale de l'action technique.
Ces apports fondamentaux à l'épistémologie de ce champ disciplinaire sont réunis dans différents ouvrages d'André Leroi-Gourhan tels que
"L'Homme et la matière" 1943/1971,
"Milieu et techniques" 1945/1973 ou
"Le Geste et la parole" vol.1 :
"Technique et langage", 1965 ; vol. 2 :
"La mémoire et les rythmes", 1965.

Les bases de l'ethnologie

Cette ethnologie largement préoccupée du passé supposait aussi une approche anthropologique et paléontologique. Dès 1947, Leroi-Gourhan publie un premier essai, Esquisse d'une classification craniologique des Esquimaux, puis, en 1949, une analyse craniométrique des sujets burgondes et francs recueillis dans la basilique Saint-Laurent à Lyon et, en 1954, un premier travail sur l'équilibre mécanique de la face. Cela le conduit à présenter, la même année, une thèse de doctorat ès sciences sur Le Tracé d'équilibre mécanique du crâne des vertébrés terrestres, dont les résultats constituent l'une des charpentes d'un ouvrage en deux volumes, Le Geste et la Parole. Le premier volume, en effet, Technique et Langage (1964), repose d'abord sur une étude des processus de l' hominisation et de leurs antécédents évolutifs chez les diverses espèces animales ; cette hominisation conduit – par la station verticale, la libération de la main, le raccourcissement de la face et le développement corrélatif du cerveau – à la conscience, au progrès des techniques et à l'organisme social. L'analyse de ce développement technico-économique et social est suivie d'une étude de l'émergence et de l'évolution, propres à l'Homo sapiens, et des systèmes matériels de fixation de la pensée. Le second volume, La Mémoire et les Rythmes (1965), complète le précédent en présentant d'abord une théorie de l'évolution technique, conçue comme dépassant l'évolution biologique, et en développant l'analyse de l'évolution des symboles et des rythmes dans la maîtrise collective de l'espace et du temps. Cette analyse nouvelle – aussi dense que précise et aux approches multiples – de la spécificité humaine et de son évolution depuis les premiers Anthropiens jusqu'à l'homme moderne pose enfin le problème du devenir de l'Homo sapiens, après ses "libérations" successives des contraintes écologiques et biologiques, dans un monde aujourd'hui entièrement humanisé et largement démystifié.

L'art préhistorique

Dans "Le Geste et la Parole", André Leroi-Gourhan fait une large place à l'art préhistorique, à sa chronologie et à sa valeur sémantique, poursuivant ainsi, en la renouvelant, l'œuvre de l'abbé Breuil.
Ces recherches constituent une part importante de son enseignement et il y consacre par ailleurs, depuis 1958, de nombreux articles et communications à des congrès internationaux. En 1965, paraît sa Préhistoire de l'art occidental.
C'est d'abord le corpus illustré des œuvres d'art paléolithiques actuellement connues dans l'ensemble de l'Europe, étudiées du point de vue de leur évolution stylistique au cours des vingt millénaires qui séparent les premiers "griffonnages" du Chatelperronien de l'apogée de l'art figuratif magdalénien, jusqu'à son extinction à l'aube des temps post-glaciaires.
C'est aussi la synthèse d'une recherche méthodologique pour l'interprétation de cet art du Paléolithique supérieur. Celle-ci renouvelle entièrement les conceptions qu'on pouvait en avoir en un temps où le comparatisme ethnographique semblait pouvoir animer les silences de la préhistoire ; la connaissance, très superficielle encore, des sociétés primitives actuelles permettait en effet d'expliquer les comportements préhistoriques en général et les mobiles des manifestations artistiques, en particulier, qui relèvent de satisfactions naïves d'un instinct esthétique, ou de pratiques magico-religieuses.
La connaissance de ces sociétés contemporaines s'est depuis lors approfondie, révélant aussi bien la diversité que la complexité de leur organisation sociale et de leur pensée religieuse. Dans le même temps, nombre de documents paléolithiques, pariétaux ou mobiliers ont été découverts, qui offrent une plus ample matière à un essai d'interprétation moins aventureux. Délaissant la voie d'une reconstitution quasi impossible de la religion et des rites paléolithiques, Leroi-Gourhan s'est tourné vers l'étude statistique de la répartition topographique des figures pariétales et de leurs associations : images d'animaux et d'hommes (celles-ci très peu nombreuses) et signes abstraits. Il est ainsi apparu que ces compositions répondaient à une conception dualiste : figures et symboles féminins, d'une part (bisons et aurochs, triangles, ovales, rectangles et signes claviformes), et figures et symboles masculins, d'autre part (chevaux, bouquetins, cervidés et mammouths, points, bâtonnets et signes barbelés).
Il est également apparu que ces compositions pariétales obéissaient, quelles que soient les variantes spatio-temporelles de chacun de leurs éléments, à un schéma structural constant, les deux ensembles étant associés dans les zones centrales, alors que les symboles masculins occupent seuls les périphéries ainsi que les entrées, les passages difficiles et le fond des grottes où apparaissent des thèmes complémentaires : hommes, félins, rhinocéros.
On a pu critiquer cette interprétation sexuelle des figurations animales ou abstraites, bien qu'elle repose sur un inventaire statistique important dont fait également partie l'art mobilier.
L'essentiel est néanmoins d'avoir mis en lumière l'organisation structurale des sanctuaires paléolithiques, de leurs « mythogrammes », en sortant, par là même, de l'impasse des interprétations magico-religieuses des débuts de ce siècle. L'intérêt de la méthode est également qu'elle est toujours perfectible et qu'elle peut aussi aider à comprendre la réalité formelle d'ensembles rupestres et pariétaux plus proches de l'histoire mais muets quand à leur signification profonde, sociologique ou mythologique.

Les méthodes archéologiques

Cette étude des grottes ornées, André Leroi-Gourhan la mena sur le terrain depuis 1945, en France et en Espagne.
C'est également sur le terrain qu'il affina peu à peu les méthodes de fouilles, et leur donna une orientation nouvelle.
Dans un premier temps André Leroi-Gourhan se livre à une critique rigoureuse de la comparaison ethnographique.
Il constate ensuite l’absence de toute définition satisfaisante de la notion de religion et propose une définition partielle mais adaptée à l’objet de sa recherche : est considéré comme religieuse toute manifestation d’une préoccupation paraissant dépasser l’ordre matériel.
Après une critique méthodique des documents ayant conduit à la description de soi-disant religions paléolithiques, culte de l’ours etc.…. André Leroi-Gourhan retient quelques indices solides, mais en nombre limité, permettant de concevoir l’existence d’une pensée religieuse ou magique au Paléolithique: les inhumations attestées pour des Néandertaliens dès la fin du Paléolithique moyen, le crâne du Mont Circé de la même époque, et au Paléolithique supérieur, l’usage de l’ocre, l’existence même de l’art, sa localisation dans la profondeur des grottes et son caractère organisé, le crâne du Mas d’Azil.
Dès ses débuts, en effet, la préhistoire s'est préoccupée d'établir un cadre chronologique en se fondant sur la stratigraphie des gisements, l'identification de la faune et la description des outils mis au jour dans chacun des niveaux et considérés comme des "fossiles directeurs".
Cette préhistoire, que l'on peut qualifier de verticale, est naturellement indispensable pour différencier chaque culture matérielle et la localiser dans le temps. Elle a considérablement progressé depuis son origine dans ses résultats et ses moyens d'investigation : datations absolues à partir de radio-éléments, analyse des indices climatiques, etc. Elle ne permet cependant pas, hormis la simple étude fonctionnelle des outils ainsi mis au jour, d'atteindre à la compréhension ethnologique de ces sociétés préhistoriques.
L'étude horizontale, microtopographique, des anciens sols d'occupation, grâce à un décapage et à un enregistrement méticuleux de tous les vestiges, même fugaces, et l'étude de leurs relations spatiales permettent, au contraire, de préciser non seulement la structure des anciens sites d'habitation mais également les activités qui s'y déroulaient, et d'élaborer une esquisse de l'organisation sociale.
Les premiers résultats ainsi obtenus le furent dans la grotte du Renne à Arcy-sur-Cure, où Leroi-Gourhan et son équipe mirent au jour les témoins d'une hutte construite sous l'auvent de la grotte : une aire dallée et entourée de trous destinés à fixer au sol des défenses de mammouth qui en constituaient la charpente.
L'intérêt ethnologique d'une telle démarche méthodologique a trouvé sa confirmation la plus évidente dans l'étude de Pincevent, l'un des principaux sites magdaléniens d'Europe. Dans ce domaine encore, l'influence des travaux et de l'enseignement de Leroi-Gourhan aura été déterminante, non seulement pour les préhistoriens mais également pour les archéologues des périodes historiques, la mise au jour des anciens monuments, figurés ou non, et des objets les plus remarquables d'un point de vue chronologique ou esthétique n'étant plus leur seule préoccupation scientifique.

L'art Préhistorique

L’art préhistorique constitue l’autre préoccupation constante.
Dans ce domaine deux livres, très différents par leur taille, surnagent à une myriade d’articles devenus plus ou moins inaccessibles :
Ouvrages remarquables à lire :
-Les religions de la Préhistoire, PUF 1964, 153 pages format, 11,5x17,5.
Les religions de la Préhistoire.
-Préhistoire de l’art occidental, Mazenod 1965, 482 pages, format 32x26
-"Le geste et la parole" 1 et 2" 1964 1965 ce double ouvrage de réflexion, hors normes, ne semble pas avoir eu de retentissement exceptionnel si l’on en juge par l’absence de traduction
-Préhistoire de l’art occidental, communément appelé PAO est un monument en même temps qu’un évènement éditorial. La qualité des photos, pour la plus part dues à Jean Vertut, est à cette époque sans égal.
Le chemin parcouru depuis l’ouvrage de l’abbé Breuil : 400 Siècles d’art pariétal, paru en 1952, est saisissant.
Le texte est encore plus remarquable, André Leroi-Gourhan décrit méthodiquement la quasi totalité des grottes ornées alors connues et expose ses idées sur la chronologie et l’interprétation.
Après avoir réfuté l’évolution en deux phases soutenue par l’abbé Breuil il propose une évolution progressive du simple au complexe, en quatre styles, qui restera le modèle de référence jusqu’à la découverte de la grotte Chauvet et la mise en œuvre des datations directes en 1994.
Le point de vue d’André Leroi-Gourhan sur l’interprétation de l’art pariétal est encore plus novateur.
Pour lui le désordre des figures et des signes sur les parois n’est qu’apparent. L’enregistrement précis de chaque figure par rapport à la topographie de la grotte comme par rapport aux figures voisines fait apparaître un ordre grâce à une méthode statistique simple, au départ il s’agissait de cartes perforées.
Cette démarche lui permet de décrire des figures d’entrée et des figures de fond ainsi que dans chaque panneau des figures centrales et périphériques.
L’ensemble dessinerait une dualité bison aurochs/cheval avec une connotation mâle/femelle. André Leroi-Gourhan exploite cette perspective en même temps qu’une de ses élèves A. Laming-Emperaire.
Comme lui elle aboutira à une dualité bison/cheval à connotation sexuelle mais de polarité inverse.
Dans "Le Geste et la Parole", André Leroi-Gourhan fait une large place à l'art préhistorique, à sa chronologie et à sa valeur sémantique, poursuivant ainsi, en la renouvelant, l'œuvre de l'abbé Breuil.
Ces recherches constituent une part importante de son enseignement et il y consacre par ailleurs, depuis 1958, de nombreux articles et communications à des congrès internationaux. En 1965, paraît sa "Préhistoire de l'art occidental".
C'est d'abord le corpus illustré des œuvres d'art paléolithiques actuellement connues dans l'ensemble de l'Europe, étudiées du point de vue de leur évolution stylistique au cours des vingt millénaires qui séparent les premiers "griffonnages" du Chatelperronien de l'apogée de l'art figuratif magdalénien, jusqu'à son extinction à l'aube des temps post-glaciaires.
C'est aussi la synthèse d'une recherche méthodologique pour l'interprétation de cet art du Paléolithique supérieur.
Celle-ci renouvelle entièrement les conceptions qu'on pouvait en avoir en un temps où le comparatisme ethnographique semblait pouvoir animer les silences de la préhistoire ; la connaissance, très superficielle encore, des sociétés primitives actuelles permettait en effet d'expliquer les comportements préhistoriques en général et les mobiles des manifestations artistiques, en particulier, qui relèvent de satisfactions naïves d'un instinct esthétique, ou de pratiques magico-religieuses.
La connaissance de ces sociétés contemporaines s'est depuis lors approfondie, révélant aussi bien la diversité que la complexité de leur organisation sociale et de leur pensée religieuse. Dans le même temps, nombre de documents paléolithiques, pariétaux ou mobiliers ont été découverts, qui offrent une plus ample matière à un essai d'interprétation moins aventureux. Délaissant la voie d'une reconstitution quasi impossible de la religion et des rites paléolithiques, Leroi-Gourhan s'est tourné vers l'étude statistique de la répartition topographique des figures pariétales et de leurs associations : images d'animaux et d'hommes , celles-ci très peu nombreuses, et signes abstraits.
Nous avons vu que pour Leroi-Gourhan, il apparaît que ces compositions répondent à une conception dualiste : figures et symboles féminins, d'une part, bisons et aurochs, triangles, ovales, rectangles et signes claviformes, et figures et symboles masculins, d'autre part, chevaux, bouquetins, cervidés et mammouths, points, bâtonnets et signes barbelés.
Il est également apparu que ces compositions pariétales obéissaient, quelles que soient les variantes spatio-temporelles de chacun de leurs éléments, à un schéma structural constant, les deux ensembles étant associés dans les zones centrales, alors que les symboles masculins occupent seuls les périphéries ainsi que les entrées, les passages difficiles et le fond des grottes où apparaissent des thèmes complémentaires : hommes, félins, rhinocéros.
On a pu critiquer cette interprétation sexuelle des figurations animales ou abstraites, bien qu'elle repose sur un inventaire statistique important dont fait également partie l'art mobilier.
L'essentiel est néanmoins d'avoir mis en lumière l'organisation structurale des sanctuaires paléolithiques, de leurs " mythogrammes", en sortant, par là même, de l'impasse des interprétations magico-religieuses des débuts de ce siècle.
L'intérêt de la méthode est également qu'elle est toujours perfectible et qu'elle peut aussi aider à comprendre la réalité formelle d'ensembles rupestres et pariétaux plus proches de l'histoire mais muets quand à leur signification profonde, sociologique ou mythologique.

L'influence des travaux et de l'enseignement de Leroi-Gourhan aura été déterminante, non seulement pour les préhistoriens mais également pour les archéologues des périodes historiques, la mise au jour des anciens monuments, figurés ou non, et des objets les plus remarquables d'un point de vue chronologique ou esthétique n'étant plus leur seule préoccupation scientifique.


André Leroi-Gourhan s’éteint le 19 février 1986 à Paris après une brève retraite, de quatre années seulement, marquée par une maladie de Parkinson de plus en plus invalidante.


Liens

écouter regarder,

http://youtu.be/XVE4B6TxlfM Le geste et la parole
http://youtu.be/DU9TyP-rcTM Site Magdalénien "Pincevent"
http://youtu.be/3Qiwvy48-4s L'aventure humaine
http://youtu.be/JT4RXEAWHCo des bisons , des chevaux et des signes
http://youtu.be/ILBbCccxcYw de Pech Merle à Rouffignac en passant pas cougnac
http://youtu.be/k3VYpo4fi-o Les premiers pas de l'homme
http://youtu.be/b2l0znHJUKA l'homme de Néanderthal
http://youtu.be/goFvAA14JD4 Lascaux
http://youtu.be/ov4TldGaPhA Le Néandertal en nous



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Posté le : 25/08/2013 13:51
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Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
.

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