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Napoléon III 2ème partie
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La répression

Trente-deux départements sont mis en état de siège dès le 8 décembre : tout le pouvoir est localement donné aux autorités militaires qui, en quelques jours, maîtrisent rapidement les zones de résistance républicaine. Pendant 15 jours, celles-ci sont réprimées et, ponctuellement, des insurgés sont fusillés sommairement. Selon l'historien Louis Girard, commence alors contre les républicains une chasse à l'homme, avec son cortège de dénonciations et d'exécutions sommaires. Puis, jusqu'en janvier 1852, ce sont des arrestations massives non seulement dans les départements soulevés, mais sur tout le territoire. Selon Maurice Agulhon, le caractère massif et inique de la répression vint cependant de l'assimilation qui fut officiellement faite de l'insurrection effectivement accomplie à un complot républicain préparé de longue date. Tous les républicains, même ceux n'ayant pas pris les armes, sont alors assimilés à des insurgés en puissance, des complices ou des inspirateurs à l'insurrection. En conséquence, les forces de l'ordre, armée, gendarmerie et police raflent, de la mi-décembre à janvier, des milliers de suspects, qui encombrent les prisons. Les partisans de Louis-Napoléon sont aussi décidés à endiguer toute révolution sociale. C'est donc une répression massivement conservatrice tout imprégnée des rancœurs du parti de l'Ordre qui s'abat avant que les bonapartistes de gauche, à la fois progressistes et autoritaires, et certains républicains, comme George Sand, parviennent à obtenir, auprès de Louis-Napoléon, un adoucissement dans la répression et les sanctions.
Ainsi, dans un premier temps, 26 884 personnes sont arrêtées, essentiellement dans le Sud-Est, le Sud-Ouest et quelques départements du Centre, 15 000 sont condamnées dont 9 530 à la transportation en Algérie et 239 autres au bagne de Cayenne tandis que 66 députés, dont Hugo, Schœlcher, Raspail, Edgar Quinet sont frappés de proscription par un décret présidentiel. Toutefois, les mesures de répression prononcées par les 82 commissions mixtes inquiètent Louis-Napoléon et lui-même est affecté par le bilan humain d'un succès payé au prix fort. Dans un second temps, Louis-Napoléon délègue en mission extraordinaire trois conseillers d'État, afin de réviser les décisions prises et préparer des mesures de grâce. Si les généraux Espinasse et Canrobert, chargés du Sud-Ouest et du Languedoc, font preuve de peu d'indulgence envers les condamnés avec un millier de grâces accordées, le conseiller d'État Quentin-Bauchart, chargé du Sud-Est, accorde 3 400 grâces. Sollicité par toutes sortes d'influences, Louis-Napoléon Bonaparte use de son côté largement de son droit de grâce, souvent sur requête de tiers, à l'instar de ce que fit personnellement George Sand auprès du président. Le nombre des transportations en Algérie passe ainsi de 6 151 chiffre représentant les transportations réellement effectuées à 3 006 et, en fin de compte, le nombre des républicains remis en liberté passe de 5 857 libérés en janvier 1852 à 12 632 au 30 septembre 1853.
Pour le président, il n'est pas dans ses intentions que le nouveau régime prenne une tonalité autoritaire, antirépublicaine et conservatrice. De fait, le futur Napoléon III reste obsédé par le souvenir du serment violé, des morts de décembre, des brutalités de la répression portant le 2 décembre comme une tunique de Nessus selon les mots de l'impératrice Eugénie. Politiquement, il tire profit de l'ambigüité du mouvement de résistance qui, dans plusieurs départements, a revêtu le visage de la révolte anarchique contre les riches. Il parvient à présenter le coup d'État comme une opération préventive de sauvetage de la société et à rassembler autour de sa personne des courants d'opinions jusque-là divergents Flahaut, Falloux, Montalembert, Gousset, etc..
Les députés réfractaires, qui avaient voté un décret ordonnant la convocation de la haute cour de justice à la mairie du 10e arrondissement avant d'être arrêtés et incarcérés, sont rapidement libérés à l'exception des députés d'extrême-gauche et de quelques libéraux. Environ 70 personnalités de la gauche républicaine et quelques personnalités orléanistes sont condamnées à l'exil, rejoints par de nombreux intellectuels et par des membres de l'enseignement qui refusent de prêter le serment de fidélité au chef de l'État, exigé pour les fonctionnaires par le nouveau régime135 tandis que la nouvelle loi relative au régime de presse renforce les entraves à la liberté d'expression pour les titres politiques.

Le plébiscite

Conformément à sa proclamation au peuple, Louis-Napoléon rétablit le suffrage universel et convoque les électeurs hommes les 20-21 décembre, 10 jours seulement après l'élimination des derniers nids de résistance, afin de se prononcer par plébiscite sur les réformes du prince-président. Face à la légalité constitutionnelle dont se prévalaient les défenseurs de la République, les bonapartistes opposent le suffrage universel, placé au-dessus de la Constitution, et la confiance directe manifestée par le peuple comme seule source de légitimité. La propagande bonapartiste ne manque pas également d'agiter la hantise du péril rouge et le thème de sauveur de la Nation, appuyée par une administration zélée et une bonne partie du clergé catholique.
La consultation se déroule dans la terreur sur la partie du territoire encore en état de siège. Seuls les journaux favorables au plébiscite sont autorisés à paraître. Le président jouit cependant d'une réelle popularité auprès des paysans et la nature de la consultation ne laisse guère de choix entre l'état de fait accompli et le néant. Du coup, les civils sont autorisés à voter à bulletin secret alors que l'armée et la marine se prononcent à registres ouverts. Cependant, dans certaines régions, seuls les bulletins Oui sont imprimés, les Non devant être écrits à la main avant que le bulletin ne soit donné au président du bureau de vote pour qu'il le glisse lui-même dans l’urne.
À la suite du ralliement du clergé et de bon nombre des parlementaires de la majorité qui ont été arrêtés le 2 décembre et ont voté sa déchéance, le corps électoral se prononce favorablement sur la révision par 7 439 216 oui contre 640 737 non résultats provisoires du 31 décembre 1851 ou 7 481 231 oui contre 647 292 non , pour les résultats définitifs publiés par le décret du 14 janvier 1852 pour environ 10 millions d’inscrits et 8 165 630 votants dont 37 107 nuls. Si les principaux foyers d'opposition se trouvent dans les grandes villes, le seul canton rural à voter en majorité pour le non est celui de Vernoux, dans l'Ardèche.
Selon l'historien Jean-Yves Mollier, la décapitation et la terrorisation du camp démocrate furent immédiates. Il fallait tuer pour être compris, avait prévenu Morny, et l’on fit couler suffisamment de sang pour impressionner l’opinion. En conséquence, le nombre des suffrages non est remarquable tant il fallut de courage physique et mental, ce jour-là, pour oser exprimer ainsi sa réprobation du crime. Pour le président, plus de sept millions de suffrages venaient de l'absoudre en justifiant un acte qui n'avait d'autre but que d'épargner à la patrie et à l'Europe peut-être des années de trouble et de malheur. George Sand, d'opinion républicaine, constate qu'il y eut terreur et calomnie avec excès, mais le peuple eût voté sans cela comme il a voté. En 1852, ce 1852 rêvé par les républicains comme le terme de leurs désirs et le signal d'une révolution terrible, la déception eût bien été autrement épouvantable. Le peuple eût résisté à la loi du suffrage restreint et voté envers et contre tout, mais pour qui ? Pour Napoléon. Le philosophe et historien Hippolyte Taine témoigne de l'impopularité de l'Assemblée dissoute et du soutien des campagnes à Louis-Napoléon, estimant aussi que Bonaparte n'est pas pire que les autres. L'Assemblée haïssait la République plus que lui et, si elle avait pu, elle aurait violé son serment pour mettre au trône Henri V, ou les Orléans et au pouvoir M. Changarnier.
Finalement, comme le note l'historien Pierre Milza, une majorité des Français n'a pas désapprouvé Louis-Napoléon138 et en est même satisfaite140 comme le reconnaît aussi amèrement François Guizot : Le pays, il serait puéril de le dissimuler, le gros du pays s'est félicité du coup d'État du 2 décembre. Il s'est senti délivré dans le présent de l'impuissance à laquelle le président et l'assemblée se réduisaient mutuellement.Il s'est cru délivré pour 1852 de tous les périls et de tous les maux qu'il attendait à jour fixe. Il a baissé la tête, un peu honteux du coup ; mais en baissant la tête, il a respiré, content au fond, quoique humilié. Il ajoute cependant que le peuple a espéré du repos et un gouvernement mais qu'il ne les a pas.
Louis-Napoléon prend alors la responsabilité d'être le fossoyeur de la Deuxième République ce dont l'Histoire républicaine lui tient longtemps rigueur, oubliant souvent que l'assemblée a songé à plusieurs reprises à faire de même, en recourant à l'armée pour se débarrasser du président et pour rétablir la monarchie. Le coup d'État du 2 décembre a donné naissance à une légende noire fondée en partie sur la version donnée par Victor Hugo dans son livre Histoire d'un crime que l'historien Louis Girard caractérise cependant comme peu crédible dans l'ensemble mais qui apparaît, selon l'historien Pierre Milza, comme le récit le plus circonstancié à défaut d'être le plus exact du coup d'État.

La marche vers le Second Empire Constitution française de 1852.

La constitution française est donc modifiée. Le prince-président avait promis le retour à la légalité républicaine sans en donner de définition précise. La république qu'il conçoit a pour but d'œuvrer au bien commun et implique qu'elle soit dirigée d'une main ferme par un chef capable de trancher entre les intérêts divergents et d'imposer l'autorité de l'État à tous. Il avait ainsi exposé sa conception de la démocratie césarienne quelques années plus tôt dans Des Idées napoléoniennes où il écrivait que dans un gouvernement dont la base est démocratique, le chef seul a la puissance gouvernementale ; la force morale ne dérive que de lui, tout aussi remonte directement jusqu'à lui, soit haine, soit amour. Les éléments clefs du bonapartisme, alliant autorité et souveraineté du peuple, sont ainsi clairement exposés : le régime bonapartiste serait donc autoritaire tout en recherchant l'approbation des masses.
Une commission de 80 membres est chargée de préparer un texte constitutionnel. Celui-ci est principalement l'œuvre de Persigny, de Charles de Flahaut et des juristes Jacques-André Mesnard, Eugène Rouher et Raymond Trop long. Fondée au terme de son premier article sur les grands principes proclamés en 1789, la république consulaire, qui est ainsi instituée par la nouvelle constitution et promulguée le 14 janvier 1852, confie le pouvoir exécutif à un président élu pour dix ans, article 2 seul responsable devant le peuple français auquel il a toujours droit de faire appel, article 5. Le nouveau régime politique est donc plébiscitaire et non parlementaire. Le chef de l'État a seul l'initiative des lois qu'il sanctionne et promulgue alors que les ministres ne sont responsables de leurs actes que devant lui. Le président nomme par ailleurs à tous les emplois civils et militaires et la justice se rend en son nom. Il est aussi seul apte à déclarer la guerre et à conclure les traités de paix ou de commerce. La garde nationale est réorganisée en une armée de parade. Un serment de fidélité à sa personne ainsi qu'à la Constitution est institué pour les fonctionnaires et les élus.
De janvier jusqu'au 29 mars 1852, Louis-Napoléon Bonaparte est le seul des trois moyens de gouvernement alors en place. Il légifère durant cette période par des décrets dictatoriaux que l'on appellerait aujourd'hui des décrets-lois. Celui du 23 janvier 1852, reprenant une proposition de loi de Jules Favre déposée en 1848 et qui voulait déclarer acquis au domaine de l'État les biens de l'ancien roi des Français, interdit à la famille d'Orléans de posséder des biens en France et annule les dotations financières attribuées autrefois à ses enfants par Louis-Philippe Ier, le produit des séquestres étant réparti entre les sociétés de secours mutuel, les logements ouvriers, la caisse des desservants ecclésiastiques et la Légion d'honneur. Pour les royalistes orléanistes et les bourgeois nostalgiques de la Monarchie de Juillet, ces dispositions sont démagogiques et équivalentes à une spoliation. La partie bourgeoise de l'électorat y voit notamment un coup porté au droit de propriété. Cette affaire provoque d'ailleurs des tensions au sein même du camp bonapartiste. La princesse Mathilde, qui tente d'obtenir la grâce des princes d'Orléans, est désavouée alors que quatre membres importants du gouvernement Rouher, Fould, Magne et Morny démissionnent pour marquer leur désaccord. Commentant cette affaire, l'écrivain Alexandre Dumas, lui-même poursuivi par des créanciers après la faillite de son théâtre et qui doit se réfugier à Bruxelles, s'exclame l'oncle prenait des capitales, le neveu veut prendre nos capitaux

D'autres décrets réorganisent la Garde nationale alors que les associations ouvrières, en fait des coopératives de production, sont presque toutes dissoutes. En revanche, les sociétés de secours mutuelles, si elles acceptent le patronage des membres honoraires qui les subventionnent, du maire et du curé, sont favorisées. Il s'agit, dans l'esprit de Louis-Napoléon, de promouvoir le bien-être du peuple mais ne pas tolérer de sociétés de résistance sous couvert d'œuvres sociales. En même temps, c'est par un décret du prince-président que les congrégations de femmes sont autorisées. Le décret du 17 février sur la presse reprend en les aggravant les conditions antérieures exigées pour la diffusion, exige pour toute création une autorisation préalable de l'administration et inaugure la procédure des avertissements pour les journaux politiques Le journal des débats, Le Siècle. Le régime électoral est précisé par un décret dictatorial du 2 février qui fait d'un électeur tout homme de 21 ans comptant 6 mois de domicile. Le scrutin d'arrondissement à deux tours est adopté de préférence à celui du scrutin de liste en vigueur sous la deuxième république. Enfin, parmi les dispositions les plus innovatrices et remarquées depuis janvier 1852 figure celle qui établit les bureaux de vote dans chaque commune, et non plus au chef-lieu de canton, comme c'était le cas depuis 1848. L'historien Maurice Agulhon note que cette innovation, en facilitant et familiarisant ... la pratique du vote, ne pouvait que contribuer à l'éducation civique de l'électeur, ce qui se produira en effet peu à peu au long du Second Empire .
Parallèlement et concrètement, le statut du président évolue pour devenir celui d'un monarque : il signe Louis-Napoléon, se laisse appeler son altesse impériale ; ses amis et partisans sont récompensés pour leur fidélité ; une cour s'installe ; les aigles impériales sont rétablies sur les drapeaux, le code civil est rebaptisé code Napoléon, le 15 août célèbre la saint-Napoléon, premier modèle réussi en France de fête nationale populaire alors que l'effigie du prince-président fait son apparition sur les pièces de monnaie et les timbres-poste.
Pourtant Louis-Napoléon hésite à rétablir l'institution impériale, aspirant toujours à une réconciliation avec la gauche modérée. En février, il est procédé aux élections des membres du corps législatif. Pour ces premières élections de la nouvelle république consulaire, les préfets ont reçu les consignes de mettre l'administration au service des candidats officiels, depuis les juges de paix jusqu'aux gardes-champêtres et aux cantonniers. Celle-ci utilise alors tous les moyens possibles pour faciliter l'élection du candidat officiel, que ce soit par l'octroi de subventions, de faveurs, de décorations mais aussi de bourrage d'urnes, de menaces contre les candidats adverses et de pressions exercées par les notables sur leurs dépendants. Au soir des résultats, les candidats officiels ont obtenu 5 200 000 voix contre 800 000 aux divers candidats d'opposition. Les authentiques bonapartistes ne représentent pourtant qu'un tiers des députés élus dont une bonne moitié issue de l'orléanisme, les autres étant d'origines et d'allégeances diverses. Ainsi, dans le premier corps législatif de la république consulaire, on trouve aussi 35 députés légitimistes dont trois élus sur liste officielle, 17 orléanistes, 18 conservateurs indépendants, deux catholiques libéraux et trois républicains. Les opposants qui parviennent à se faire élire doivent néanmoins prêter serment de fidélité au chef de l'État et à la Constitution s'ils veulent siéger. En conséquence, les trois députés républicains élus, qui refusent de prêter serment, ne siègent pas à l'Assemblée.
Afin de tester la possibilité du rétablissement éventuel de l'institution impériale, Louis-Napoléon entreprend, à compter du 1er septembre 1852, un voyage dans l'hexagone dans la pure tradition de l'idéologie bonapartiste d'appel au peuple. Il doit se rendre notamment dans les régions qui avaient connu des troubles lors du coup d'État. Le périple est en fait balisé par son ministre de l'intérieur, Persigny, qui a la particularité d'être le plus favorable de ses ministres au rétablissement de l'Empire. Partout où il passe, d'Orléans à Marseille, le prince-président ne voit que des partisans réclamer l'Empire alors que sont distribués de l'argent et des cadeaux aux hauts fonctionnaires locaux.
Si, en Europe, le coup d'État a été accueilli favorablement par presque tous les gouvernements, les signes annonciateurs du rétablissement du régime impérial inquiètent, obligeant Louis-Napoléon à préciser ses intentions : Certaines personnes disent : l'Empire c'est la guerre. Moi, je dis, l'Empire, c'est la paix. C'est la paix, car la France le désire, et lorsque la France est satisfaite, le monde est tranquille. La gloire se lègue bien à titre d'héritage, mais non la guerre .... J'en conviens, cependant, j'ai, comme l'Empereur, bien des conquêtes à faire. Je veux, comme lui, conquérir à la conciliation les partis dissidents et ramener dans le courant du grand fleuve populaire les dérivations hostiles qui vont se perdre sans profit pour personne .... Nous avons d'immenses territoires incultes à défricher, des routes à ouvrir, des ports à creuser, des rivières à rendre navigables, des canaux à terminer, notre réseau de chemin de fer à compléter. Nous avons en face de Marseille un vaste royaume à assimiler à la France. Nous avons tous nos grands ports de l'Ouest à rapprocher du continent américain par la rapidité de ces communications qui nous manquent encore. Nous avons enfin partout des ruines à relever, de faux dieux à abattre, des vérités à faire triompher. Voilà comment je comprends l'Empire, si l'Empire doit se rétablir.
Le 16 octobre, le président est de retour à Paris où des arcs de triomphe gigantesques ont été dressés, couronnés de banderoles à Napoléon III, Empereur.
Le 7 novembre 1852, par 86 voix contre une seule, un sénatus-consulte rétablit la dignité impériale, approuvé deux semaines plus tard, lors d'un plébiscite, par 7 824 129 voix contre 253 149 et un demi million d'abstention. Pour Jules Ferry, l'authenticité du résultat du vote ne peut être mise en doute et démontre l'expression passionnée, sincère et libre de la classe paysanne telle que déjà exprimée lors de l'élection présidentielle de 1848 et en décembre 1851, tandis que le journaliste libéral Lucien-Anatole Prévost-Paradol se déclare guéri du suffrage universel et dénonce le monde paysan et campagnard comme une profonde couche d'imbécilité rurale et de bestialité provinciale.
La dignité impériale est ainsi rétablie au profit du prince-président Louis-Napoléon Bonaparte, élu par le peuple français, qui devient officiellement Napoléon III, Empereur des Français à compter du 2 décembre 1852, date anniversaire symbolique du coup d’État, du sacre de Napoléon Ier et de la victoire d’Austerlitz.

L'affaire du sacre de Napoléon III. Napoléon III, empereur des Français 1852-1870

Second Empire.La famille impériale

Le 2 décembre 1852, Louis-Napoléon Bonaparte devient l'empereur Napoléon III.

L'empereur étant célibataire et sans postérité légitime, la question de la succession dynastique n'est pas tranchée. Plusieurs membres des différentes familles régnantes européennes sont approchés pour un éventuel mariage impérial mais sans donner de résultats, notamment en raison des mœurs du prétendant, Napoléon III est déjà au moins le père de deux enfants naturels et vit avec une ancienne courtisane. En 1849, il a fait la connaissance de la jeune comtesse de Teba lors d'une réception à l'Élysée. De haut lignage espagnol, éduquée au couvent du Sacré-Cœur rue de Varenne à Paris, Eugénie de Montijo est une jeune femme instruite et cultivée de la noblesse, proche de Stendhal et de Prosper Mérimée. Dès leur rencontre, celui qui n'est alors que le prince-président est séduit. Le siège qu'il entreprend auprès d'Eugénie dure deux ans. Les familiers de l'empereur sont au début assez partagés envers la comtesse espagnole, certains souhaitant que l'Empereur se lie avec une famille régnante comme autrefois Napoléon avec Marie-Louise. Le 12 janvier 1853, un incident lors d'un bal aux Tuileries, où la jeune Espagnole se fait traiter d'aventurière par l'épouse d'un ministre, précipite la décision de Napoléon III de demander Eugénie en mariage alors qu'il vient de mettre un terme à sa relation avec Miss Howard.

Le 29 janvier 1853, le mariage civil de Napoléon III avec Eugénie de Montijo est célébré aux Tuileries puis, le 30 janvier, le mariage religieux a lieu à Notre-Dame. Pour cette occasion, l'empereur signe 3 000 ordres de grâce et fait savoir que toutes les dépenses du mariage seraient imputées sur le budget de sa liste civile alors qu'Eugénie refuse une parure de diamants offerte par la ville de Paris et demande que la somme correspondante soit consacrée à la construction d'un orphelinat. La lune de miel a lieu au parc de Villeneuve-l'Étang, à Marnes-la-Coquette au cœur du Domaine National de Saint-Cloud. Quelques semaines plus tard, l'impératrice est enceinte mais perd l'enfant après une chute de cheval. Une nouvelle grossesse impériale n'intervient que deux ans plus tard, au début de l'été 1855. Louis Napoléon, fils unique de Napoléon III et d’Eugénie, naît le 16 mars 1856. L’événement est encore l’occasion pour Napoléon III d’annoncer une nouvelle amnistie pour les proscrits du 2 décembre, alors que 600 000 habitants de Paris un Parisien sur deux se cotisent pour offrir un cadeau à l’impératrice.

Personnalité de Napoléon III

Napoléon III a été élevé dans le culte de Napoléon Ier et a pour la France un amour porté au paroxysme par l'interdiction qui lui est longtemps faite d'y résider. S'il est orgueilleux, croit en son destin et se voit comme un chef naturel et un homme providentiel, le personnage, bien que charmeur et séducteur, reste cependant secret et mystérieux. De son passé de conspirateur et de ses années de captivité, Napoléon III a ainsi conservé l'habitude de rester placide en public. Les témoignages relèvent le plus souvent son impassibilité, son flegme, sa patience, son indulgence, sa fidélité en amitié mais aussi sa timidité et sa générosité ainsi qu'une certaine obstination à poursuivre des projets dont l'accomplissement lui paraît aller de soi. Il est décrit dans la sphère privée comme un homme attachant, naturellement bon, courageux mais aussi sensible et émotif.
En présence d'interlocuteurs moins proches, Napoléon III, pourvu d'un fort accent suisse-allemand, a tendance à s'exprimer lentement, paraissant chercher ses mots, laissant s'établir de longs silences ou déviant la conversation par des propos insignifiants. Cette retenue verbale a toujours été mal interprétée par ses partenaires ou adversaires politiques qui ont tendance à le sous-estimer ou à le mépriser. Ainsi Thiers qui, en 1848, le décrit comme un crétin que nous mènerons, ou encore Victor Hugo qui invoque systématiquement la gloire de Napoléon Ier pour rabaisser Napoléon III, le dépeint dans ses ouvrages comme un vulgaire aventurier, médiocre, parjure et tyrannique. Néanmoins, certains de ses adversaires comme Rémusat finissent par reconnaître a posteriori l'habileté du personnage. Il n'en est pas moins vrai que Napoléon III n'est pas un grand orateur et peut nourrir à l'égard des hommes politiques, notamment ceux à l'aise dans la rhétorique parlementaire, un certain complexe d'infériorité, en partie dû à sa formation d'autodidacte. Homme nullement dénué d'intelligence politique ou diplomatique, même avec une formation intellectuelle qui peut paraître lacunaire pour les personnalités de son rang ou de sa fonction, il n'en est pas moins également multilingue et dispose d'amples connaissances techniques, économiques, agronomiques ou encore militaires.
Seul détenteur du pouvoir exécutif, l'empereur prend souvent ses décisions seul. Parfois entêté dans l'indécision, selon l'expression d'Émile Ollivier, il se montre tout au long de son règne de plus en plus souvent hésitant, maladroit ou empêtré dans ses contradictions ce qui, dans son régime de pouvoir personnel, pèse immanquablement sur l'évolution générale de la politique française. Ses contradictions sont aussi dues à la nature composite de ses idées et de son entourage. Le régime manque d'un véritable parti bonapartiste et d'une doctrine cohérente. Il repose principalement sur l'addition d'un grand nombre de ralliements dont les intérêts et motivations sont très divers, voire parfois contradictoires. Il y a ceux qui se réclament d'un bonapartisme de gauche populaire et anticlérical et ceux qui sont d'un bonapartisme de droite conservateur et clérical. L'empereur en est conscient, lequel déclare un jour : Quel gouvernement que le mien ! l'impératrice est légitimiste, Napoléon-Jérôme républicain, Charles de Morny, orléaniste ; je suis moi-même socialiste. Il n'y a de bonapartiste que Persigny : mais Persigny est fou ! . En plus de Morny et Persigny, il peut aussi compter sur Eugène Rouher, son homme de confiance de 1863 à 1869 qui fait figure de vice-empereur, comme le qualifia Émile Ollivier, c'est-à-dire un premier ministre sans le titre.
En pratique, Napoléon III gouverne avec l'aide de deux organes officiels dont les attributions sont distinctes : le cabinet particulier, sorte de secrétariat général du chef de l'État, et le gouvernement. Jusqu'en 1864, le cabinet particulier est dirigé par Jean-François Mocquard et composé de fidèles. Le gouvernement est composé d'une dizaine de commis, individuellement responsables devant le seul empereur et révocables tout autant selon sa seule volonté. Si les ministres ne peuvent s'opposer aux projets du chef de l'État, il en est autrement des conseillers d'État. Hauts magistrats nommés par l'empereur, ils sont pour la plupart issus de l'administration orléaniste et peu enclins à partager les préoccupations sociales de Napoléon III. Si leur rôle est essentiellement consultatif, ils n'hésitent pas à reprendre et discuter le travail des ministres et à amender en profondeur les textes sur lesquels ils se prononcent, y compris ceux en provenance directe du cabinet. Ainsi, la suppression du livret ouvrier, l'adoption d'un système d'assurance pour les travailleurs agricoles ou la fixation autoritaire du prix du pain se heurtent à l'opposition du Conseil d'État, sans que Napoléon III ne procède, durant tout son règne, à la moindre révocation de conseillers alors qu'il en a les pouvoirs.
Durant tout le Second Empire, Napoléon III est l'objet de complots et d'attentats, lesquels sont la plupart du temps arrêtés durant leur phase d'élaboration voire à peine leur mise en œuvre débutée. Napoléon III est fataliste sur ce sujet et se laisse difficilement protéger, refusant même de cesser ses bains de foules occasionnels où il est le plus vulnérable. Certains des complots destinés à renverser le régime étaient l'œuvre de sociétés secrètes nommées Solidarité révolutionnaire, Fraternité universelle, Marianne ou Jeune Montagne mais d'autres conspirations ont pour but de tuer l'empereur ou des membres de la famille impériale. Si près d'une vingtaine de ces conspirations sont déjouées entre 1851 et 1855, les plus sérieuses sont une tentative d'assassinat de l'empereur à l'Opéra-Comique 1853, la découverte d'une bombe sur une voie de chemin de fer que le train impérial allait emprunter 1854, les coups de feu tirés sur Napoléon III par l'Italien Giovanni Pianori sur les Champs-Élysées en 1855 et une autre tentative la même année alors qu'il se rend au Théâtre italien par un illuminé nommé Bellemare. Le plus important et le plus sanglant de ces attentats est néanmoins celui mené par Felice Orsini en 1858 qui fait 156 blessés dont 12 suivis de décès. Quelques années plus tard, Giovanni Passannante, auteur d'un attentat manqué contre le roi Humbert Ier, planifie, selon certains témoins, l'assassinat de Napoléon III, en l'accusant d'être un obstacle pour la République Universelle.

État de santé

À partir de 1863, victime d'une hématurie, l'empereur voit son état de santé se dégrader brusquement199. En décembre, il est pris de malaise lors d'une réception officielle aux Tuileries et fait une crise cardiaque en 1864 au cours d'une visite nocturne chez sa maîtresse, Marguerite Bellanger. En fait, depuis sa captivité à Ham, l'état de santé de Louis-Napoléon Bonaparte est fragile. Cumulant rhumatisme, poussées hémorroïdaires, troubles digestifs et crises de goutte, l'empereur se rend annuellement en cure d'abord à Plombières puis à Vichy, faisant la renommée de ces deux villes. En 1861, les médecins décèlent chez lui un calcul vésical, responsable de nombreuses et fortes douleurs dans le bas-ventre et de gêne urinaire. C'est une lithiase dont les crises, d'abord espacées et brèves, deviennent chaque année de plus en plus nombreuses et longues. En 1865, la détérioration de l'état de santé de l'empereur l'oblige à ajourner des déplacements et à renoncer à participer à un conseil des ministres. Les crises s'enchaînent, y compris lorsqu'il est en cure. Physiquement, l'empereur accuse le coup. Prématurément vieilli comme l'attestent notamment ses portraits de l'époque, il se tasse et prend de l'embonpoint alors que ses déplacements sont rendus plus difficiles.
Sa déchéance physique compromet sa capacité à gouverner, une grande partie de son énergie étant déployée à lutter contre la maladie et à cacher sa souffrance auprès de ses interlocuteurs. En dépit des périodes où la maladie est moins présente, durant les années 1867 et 1868, la santé de l'empereur continue de se dégrader et fait l'objet de rumeurs dans la capitale. Devenu un souverain intermittent, Napoléon III arrive à diriger normalement la France entre deux crises ou alors sous chloral, ce qui lui provoque néanmoins de fréquentes somnolences. L'impératrice, consciente de la situation et de la fragilité du régime, sait que le prince impérial est trop jeune pour succéder à son père. Aussi s'attache-t-elle à se constituer une clientèle de fidèles et à préparer une éventuelle régence alors que, à partir de 1866, l'empereur l'appelle à siéger à ses côtés au conseil des ministres afin de l'initier aux grandes affaires de l'État. Eugénie révèle plus tard qu'ils avaient pris la décision d'abdiquer en 1874, quand leur fils aurait 18 ans, pour se retirer à Pau et à Biarritz. Pendant la guerre franco-allemande de 1870, il a besoin d'uriner si souvent qu'il fait bourrer son pantalon de serviettes. Après la défaite, lors de son exil à Camden Place, le chirurgien anglais Henry Thomson choisit la lithotripsie et l'opère par deux fois par les voies naturelles. Napoléon III meurt alors qu'une troisième opération est prévue.

De l’Empire autoritaire à l’Empire libéral

Depuis L'Histoire de la France contemporaine d'Ernest Lavisse, le Second Empire est analysé en deux périodes par les historiens : la première, qualifiée d'Empire autoritaire et qui s'étend globalement de 1852 à 1860, s'oppose à la seconde, dite de l'Empire libéral, s'étalant globalement de 1860 à 1870. Jusqu'aux années 1860, Napoléon III s'appuie essentiellement sur la bourgeoisie d'affaires et le clergé catholique pour gouverner190. Il n'y a pas de parti bonapartiste pour le soutenir mais seulement des ralliements plus ou moins sincères ou opportunistes.

Les élections législatives de 1857

Les élections pour le renouvellement du corps législatif ont lieu le 22 juin 1857. Face aux candidats officiels, soutenus par les services du ministre de l'intérieur, l'opposition est morcelée. Les candidats officiels remportent 85 % des suffrages exprimés 5 500 000 voix. Il y a deux millions d'abstentionnistes. Dans l'opposition 665 000 suffrages, ce sont néanmoins les républicains qui engrangent des voix supplémentaires, notamment dans les grandes villes progression de 15 000 voix à Paris mais leurs députés refusent de prêter serment et ne peuvent en conséquence siéger. Toutefois, aux élections complémentaires d'avril 1858, les cinq députés républicains qui sont élus Jules Favre, Ernest Picard, Jacques-Louis Hénon, Louis Darimon et Émile Ollivier acceptent de prêter serment pour pouvoir siéger au parlement.

L'attentat d'Orsini

L'attentat manqué de Felice Orsini contre l'empereur et l'impératrice en 1858, qui fait de nombreuses victimes, a pour conséquence de durcir le régime. Le ministre de l'Intérieur, Adolphe Billault, est démis de ses fonctions et remplacé par le général Espinasse qui présente, le 1er février, un projet de loi de sûreté générale, devant le Corps législatif, permettant de punir de prison toute action ou complicité d'acte accompli dans le but d'exciter à la haine ou au mépris des citoyens les uns contre les autres. Ce projet de loi donne également pouvoir au gouvernement d'interner ou de faire expulser, après l'expiration de sa peine, tout individu condamné pour des délits relatifs à la sûreté de l'État ou pour offense contre la personne de l'empereur, mais également tout individu ayant été condamné, exilé ou transporté à la suite des événements de juin 1848, de juin 1849 et de décembre 1851. Une fois le projet approuvé facilement par le Corps législatif et par le Sénat mais de justesse par le Conseil d'État, Espinasse reçoit carte blanche pour agir. En un peu plus d'un mois, 450 personnes sont envoyées en prison ou transportées en Algérie avant que la loi ne soit mise en sommeil dès le 25 mars 1858 pour ne plus jamais être appliquée.
Le 15 août 1859, l'empereur promulgue une amnistie générale à l'occasion de sa victoire en Italie du Nord. Certains comme Victor Hugo refusent d'en profiter : quand la liberté rentrera, je rentrerai. Edgar Quinet, rappelant que Napoléon III avait violé la constitution par son coup d’État, déclare : Ceux qui ont besoin d'être amnistiés, ce ne sont pas les défenseurs des lois, ce sont ceux qui les renversent.
Au fil des années 1860, le Second Empire prend une tournure libérale. Il desserre ainsi progressivement la censure, libéralise le droit de réunion et les débats parlementaires. Sous l'influence notamment du duc de Morny, il se dirige lentement vers une pratique plus parlementaire du régime. Néanmoins, cette libéralisation parlementaire a réveillé l'opposition, qu'elle soit républicaine ou monarchiste, y compris la droite cléricale qui n'a pas apprécié la politique italienne de l'empereur.

La réforme constitutionnelle de 1862

Le décret du 24 novembre 1860 complété par les sénatus-consultes des 2 et 3 février et du 31 décembre 1861 réforme la constitution de 1852. Il s'agit pour Napoléon III de donner aux grands corps de l'État une participation plus directe à la politique générale du gouvernement. Ainsi, le droit d'adresse du Sénat et du Corps Législatif est rétabli, le droit d'amendement est élargi ainsi que les modalités de discussion des projets de loi et du budget. Un compte-rendu sténographique des débats est instauré et rendu public. Le fonctionnement de l'État tend alors à se rapprocher de celui d'une monarchie constitutionnelle. Le Second Empire est alors à son apogée. Pour Lord Newton, Si la carrière de Napoléon III s'était terminée en 1862, il aurait probablement laissé un grand nom dans l'Histoire et le souvenir de brillants succès.
Cette libéralisation parlementaire accompagnée de l'amnistie générale réveille l'opposition. Si les républicains et les libéraux ont approuvé la politique italienne de l'empereur ainsi que sa politique commerciale, celles-ci lui ont aliéné la sympathie des catholiques et des industriels, ce qui l'oblige à rechercher de nouveaux appuis dans le pays.

Les élections de 1863

Les élections du 31 mai 1863 interviennent dans un contexte économique et social difficile. Plus de 300 candidats d'opposition se présentent, les plus nombreux étant les républicains. Des alliances sont contractées entre monarchistes et républicains, notamment à Paris où l'orléaniste Adolphe Thiers se présente sur une liste unique comprenant une majorité de candidats républicains. Finalement, avec 5 308 000 suffrages, les candidats gouvernementaux perdent des suffrages tandis que l'opposition obtient 1 954 000 votes et 32 sièges 17 républicains et 15 indépendants dont Thiers alors que le taux d'abstention recule fortement 27 %. Si par leur vote les campagnes et les villes inférieures à 40 000 habitants ont soutenu les candidats officiels, les suffrages des grandes villes sont allés majoritairement à l'opposition.
Les élections sont suivies d'un important remaniement ministériel qui bénéficie aux réformistes proches de Morny, tels Paul Boudet et Armand Béhic mais aussi Victor Duruy, un historien libéral nommé au ministère de l'Instruction publique. Au Corps législatif, les républicains ralliés à l'Empire forment avec les bonapartistes libéraux, le Tiers-Parti.

Le temps des réformes utiles

En janvier 1867, Napoléon III annonce ce qu'il appelle des réformes utiles et une extension nouvelle des libertés publiques. Un décret du 31 janvier 1867 remplace le droit d'adresse par le droit d'interpellation. La loi du 11 mai 1868 sur la presse abolit toutes les mesures préventives : la procédure de l'autorisation est remplacée par celle de la déclaration et celle de l'avertissement est supprimée. De nombreux journaux d'opposition apparaissent, notamment ceux favorables aux républicains qui s'enhardissent dans leurs critiques et leurs sarcasmes contre le régime L'électeur libre de Jules Ferry, Le Réveil de Charles Delescluze, La Lanterne d'Henri Rochefort. La loi du 6 juin 1868 sur les réunions publiques supprime les autorisations préalables, sauf celles où sont traitées les questions religieuses ou politiques. Néanmoins, la liberté des réunions électorales est reconnue.
Toutes ces concessions, si elles divisent le camp bonapartiste, restent insuffisantes pour les opposants au Second Empire.

L'échec de la loi Niel

La succession de revers internationaux durant la période 1866-1867 et les craintes d'un conflit armé ont convaincu Napoléon III de procéder à une refonte de l'organisation militaire. La loi de réforme militaire que l'empereur propose en 1866 après la victoire des Prussiens à Sadowa est destinée à modifier le recrutement militaire en supprimant ses aspects inégalitaires et injustes le tirage au sort, par exemple et à renforcer l'instruction. La loi Niel telle qu'elle s'appelle est néanmoins considérablement dénaturée par les parlementaires, en majorité hostiles, et est finalement adoptée avec tant de modifications maintien du tirage au sort qu'elle en devient inefficace.

Les élections législatives de 1869

Les élections législatives de mai 1869 donnent lieu à des combats de rue, ce qui ne s'était pas vu depuis plus de 15 ans. Si les candidats favorables à l'Empire l'emportent avec 4 600 000 voix, l'opposition, majoritairement républicaine, rafle 3 300 000 voix et la majorité dans les grandes villes. Au Corps législatif, ces élections marquent le recul important des bonapartistes autoritaires 97 sièges face au grand vainqueur, le Tiers-Parti 125 sièges, et face aux orléanistes de Thiers 41 sièges et aux républicains 30 sièges.
À la suite de ces élections, Napoléon III accepte de nouvelles concessions tandis que les violences républicaines inquiètent les modérés. Par un sénatus-consulte du 8 septembre 1869, le Corps législatif reçoit l'initiative des lois et le droit d'interpellation sans restriction. Le Sénat achève sa mue pour devenir une seconde chambre législative tandis que les ministres forment un cabinet responsable devant l'empereur. En janvier 1870, Napoléon III nomme Émile Ollivier, issu des bancs de l'opposition républicaine et l'un des chefs du tiers-parti, pour diriger de fait son gouvernement. C'est la reconnaissance du principe parlementaire. Ollivier constitue alors un gouvernement d'hommes nouveaux en associant bonapartistes libéraux centre droit et orléanistes ralliés à l'Empire libéral centre gauche, mais en excluant les bonapartistes autoritaires droite et les républicains gauche. Il prend lui-même le ministère de la Justice et des Cultes, le premier dans l'ordre protocolaire, et apparaît comme le véritable chef du ministère sans en avoir le titre.

Le plébiscite de l'Empire libéral.

Cherchant à concilier ordre et liberté, Ollivier convainc l'Empereur de procéder à une révision constitutionnelle d'ensemble pour mettre sur pied un système semi-parlementaire. Les procédés de candidature officielle sont abandonnés. Un sénatus-consulte proposant un régime plus libéral est soumis à l'approbation du peuple lors d'un plébiscite le troisième depuis 1851 : le 8 mai 1870, les réformes sont approuvées avec plus de sept millions de oui en dépit de l'opposition des monarchistes légitimistes et des républicains qui ont appelé à voter non ou à s'abstenir. C'est ainsi que se met en place la constitution du 21 mai 1870. Napoléon III se serait exclamé à cette occasion : J'ai mon chiffre !. Émile Ollivier croit pouvoir dire de l'empereur : Nous lui ferons une vieillesse heureuse.

Politique intérieure Situation sociale sous le Second Empire.

Sous l'Empire, la France connaît des années de progrès économiques création d'un système bancaire, développement du chemin de fer, transformation des grandes villes.

Développement économique et financier

Voiture privée de Napoléon III, qu'il utilise lors de ses déplacements sur le chemin de fer français alors en plein essor.
Le Second Empire coïncide quasi-exactement, entre deux dépressions économiques celle de 1817-1847 et celle de 1873-1896 au quart de siècle de prospérité économique internationale qu'a connu la France au XIXe siècle. D'inspiration saint-simonienne, la politique économique fortement étatiste menée au lendemain du coup d'État a pour objectif la relance de la croissance et la modernisation des structures. En 20 ans, le pays a rattrapé une partie de son retard sur le Royaume-Uni en matières d'infrastructures et de système financier bancaire, aidé par la politique volontariste de l'empereur et à son choix du libre-échange.
Si les campagnes connaissent une certaine prospérité et que la production industrielle connaît une forte croissance, le taux moyen de croissance annuelle se stabilise autour de 2 % par an, à la suite de plusieurs crises ponctuelles intervenues notamment en 1856, 1861, 1864 et 1870. Dans l'ensemble, ce sont les secteurs industriels liés en particulier aux chemins de fer qui réussissent leur modernisation quand d'autres industries, incapables d'évoluer ou de se moderniser, disparaissent. C'est l'aussi le second souffle des mines de charbon françaises, confiées aux grandes familles lilloises.
L'époque est aussi marquée par l'émergence des Grands Magasins comme le Bon Marché, le Bazar de l'Hôtel de Ville, le Printemps et la Samaritaine.

Le développement des voies de communication

Le règne de Napoléon III est d'abord marqué par l'achèvement de la construction du réseau ferroviaire français supervisée par l'État. En 1851, le pays ne compte que 3 500 km de voies ferrées contre plus de 10 000 km en Grande-Bretagne. Sous l'impulsion de Napoléon III et de son ministre des travaux publics, Pierre Magne, dont la politique est caractérisée par un engagement financier partiel de l'État dans les entreprises ferroviaires, le pays réduit une partie son retard sur sa rivale d'outre-Manche pour atteindre 15 600 km de voies ferrées en 1870, sur lesquelles circulent annuellement plus de 110 000 000 voyageurs et 45 000 000 tonnes de marchandises, contre 24 900 pour l'Angleterre. La France est alors troisième en Europe, derrière l'Allemagne, qui compte vers 1870 près de vingt mille kilomètres de voies. Le chemin de fer dessert désormais toutes les grandes villes françaises. Les incidences sont considérables sur de nombreux secteurs industriels, que ce soient ceux des mines, de la sidérurgie, des constructions mécaniques et des travaux publics. Parallèlement, le gouvernement porte également ses efforts sur la construction et l'entretien des routes ainsi que sur les ouvrages d'arts puis, à partir de 1860, sous l'impulsion de l'empereur, sur le développement des voies navigables avec la construction de nouveaux canaux. Enfin, l'État bonapartiste favorise le développement du télégraphe électrique mais aussi les fusions et la création de grandes compagnies maritimes de navigation, les messageries maritimes, la compagnie générale transatlantique, etc. ainsi que la modernisation de la flotte et l'essor du commerce maritime par l'équipement des grands ports, notamment celui de Marseille.

Le développement des sources de crédit

Inspiré de la doctrine saint-simonienne, Napoléon III multiplie également les sources de crédit et d'argent à bon marché en réformant le système bancaire dans le but de mieux faire circuler l'argent, de drainer l'épargne afin de favoriser le décollage industriel du pays. Avec la création de grandes banques de dépôt, le système bancaire est démocratisé avec l'entrée en vigueur du décret du 28 février 1852 favorisant l'établissement d'instituts de crédit foncier comme le Crédit foncier de France pour le monde agricole et le Crédit mobilier, une banque d'affaires dirigée par les frères Pereire jusqu'en 1867 et destinée à financer les sociétés industrielles, notamment celles du chemin de fer mais aussi l'omnibus parisien ou l'éclairage du gaz. De nombreuses grandes banques de dépôt sont créées tels le comptoir d'escompte de Paris, le Crédit industriel et commercial décret impérial de 1859 et le Crédit lyonnais. Par ailleurs, le rôle de la Banque de France évolue et, poussée par l'empereur, elle s'engage dans le soutien au développement économique tandis que la loi du 24 juin 1865 importe en France le chèque comme moyen de paiement.
Parallèlement, le droit des sociétés est adapté aux exigences du capitalisme financier. Ainsi la loi du 17 juillet 1856 crée la société en commandite par actions, celle du 23 mai 1863 fonde la société à responsabilité limitée SARL et celle du 24 juillet 1867 libéralise les formalités de création de sociétés commerciales dont les sociétés anonymes.

La remise en cause du protectionnisme

L'influence des saint-simoniens sur la politique économique se manifeste enfin par la politique mise en œuvre par l'empereur pour mettre fin au protectionnisme économique face à la concurrence étrangère, et ce en dépit de l'opposition des industriels français. Ainsi, le 15 janvier 1860, la conclusion d'un traité de commerce avec l'Angleterre, négocié secrètement entre Michel Chevalier et Richard Cobden, fait alors figure de coup d'État douanier. Ce traité, abolissant non seulement les droits de douane sur les matières premières et la majorité des produits alimentaires entre les deux pays mais supprimant également la plupart des prohibitions sur les textiles étrangers et sur divers produits métallurgiques, est suivi par une série d'accords commerciaux négociés avec d'autres nations européennes, la Belgique, le Zollverein, l’Italie, et l’Autriche. Cette ouverture économique des frontières stimule alors la modernisation du tissu industriel français et de ses modes de production.

Les expositions universelles

Capitale de l'Europe au même titre que la Londres victorienne, Paris accueille de grandes réunions internationales telles que l'exposition universelle de 1855 et celle de 1867 qui lui permettent de mettre en avant l'intérêt de la France pour les progrès techniques et économiques. Intéressé personnellement par tout ce qui relève du progrès technique, l'empereur finance lui-même les travaux d'Alphonse Beau de Rochas sur le moteur thermique à quatre temps.

Le Paris saint-simonien de Napoléon III Transformations

de Paris sous le Second Empire.


Napoléon III remet au baron Haussmann le décret d'annexion à Paris des communes suburbaines 1860.
Commanditaire des travaux du baron Haussmann à Paris, l'objectif de Napoléon III est de transformer cette ville réputée au milieu du XIXe siècle pour sa surpopulation, son insalubrité et sa sensibilité aux épidémies en un modèle d'urbanisme et d'hygiène comme l'est déjà Londres.
Saint-simonien convaincu, inspiré notamment par son proche conseiller Michel Chevalier, Louis-Napoléon rêve d'une ville organisée et saine, avec de larges boulevards et avenues reliant facilement les pôles d'attraction, où le commerce et l'industrie puissent se développer et les plus démunis vivre dans des conditions décentes. Le Paris transformé par le Baron Haussmann est ainsi d'abord le Paris saint-simonien imaginé par le prince-président dont beaucoup d'aspects figurent dans les phalanstères de Charles Fourier et dans l'Icarie d'Étienne Cabet. Suivant ces principes fouriéristes, Louis-Napoléon est à l'origine de la construction des 86 premiers logements sociaux de Paris à la cité Rochechouart en 1851 qu'il fait financer par le sous-comptoir du commerce et de l'industrie pour le bâtiment afin de pallier la défaillance du conseil municipal de Paris. Il fait lui-même un don de 50 000 francs pour aider à la construction de cités ouvrières destinées au remplacement des logements insalubres de la capitale et fait traduire et publier Des habitations des classes ouvrières, de l'architecte anglais, Henry Roberts. Par décrets présidentiels, en 1852, il affecte 10 000 000 francs, issus de la confiscation des biens des Orléans, à l'amélioration des logements ouvriers dans toutes les villes de France.
Quand le 22 juin 1853, Georges Eugène Haussmann est nommé préfet de la Seine par Napoléon III, il est chargé de réaliser le Paris rêvé de l’empereur dont la mission peut se résumer à aérer, unifier et embellir la ville. La capitale, pour la première fois considérée dans son ensemble, est ainsi transformée en profondeur et modernisée avec la création d’un tissu cohérent de voies de communication. De nouvelles voies et axes reliant notamment les grandes gares entre elles sont percées, des perspectives et des places sont ouvertes tandis que de nombreux squares, espaces verts et jardins sont créés Montsouris, Buttes-Chaumont, bois de Vincennes et de Boulogne, Boucicaut…. Plusieurs îlots misérables comme celui dit de la petite Pologne sont rasés. L’empereur lui-même veille de près sur les travaux et dessine le plan d’un ensemble de 41 pavillons destinés à l’usage des classes ouvrières situés avenue Daumesnil et qui sont présentés à l’Exposition Universelle de 1876.
Par décret impérial du 1er janvier 1860 repoussant les limites de la capitale aux fortifications de Thiers, la superficie de Paris passe de 3 300 à 7 100 hectares tandis que sa population gagne 400 000 habitants pour s'établir à 1 600 000 Parisiens. La ville absorbe 11 communes Auteuil, Passy, Montmartre, Batignolles-Monceau, La Villette, La Chapelle, Belleville, Bercy, Grenelle, Charonne, et Vaugirard et 13 portions de communes. Paris est désormais réorganisé en vingt arrondissements et 80 quartiers. En 1870, la ville atteint 2 000 000 d'habitants.
Vue d’oiseau en 1863 des Halles centrales de Paris conçues par Victor Baltard.
Entre 1852 et 1870, plus de 300 km de voies nouvelles et éclairées sont réalisées dans Paris, accompagnées de plantations, 600 000 arbres plantés + 20 000 hectares de bois et jardins, de trottoirs plus de 600 km, de mobiliers urbains, de caniveaux et de 600 km d’égouts. Plus de 19 000 immeubles insalubres comprenant 120 000 logements ont été abattus et remplacés par 30 000 bâtiments nouveaux fournissant 215 300 logements auxquels s’ajoutent de nombreux nouveaux monuments publics et édifices comme l'Opéra Garnier, le nouveau Palais de justice, le nouvel Hôtel-Dieu, des théâtres le Châtelet, des lycées, les halles de Baltard ou de nombreux lieux de culte église Saint-Augustin, église Saint-François-Xavier, etc.. Pour la première fois de son histoire, un plan général de la ville est dressé ainsi que son relevé topographique.
Au palais des Tuileries, en 1853, l'architecte Louis Visconti, au côté de Hector-Martin Lefuel, présente au couple impérial et à ses proches les comtesses de Rayneval et de Lourmel, le comte d'Arjuson, le sénateur Ney et Achille Fould les plans de son projet d'achèvement du palais du Louvre et de réunion à celui des Tuileries.
Peinture par Ange Tissier.
Ces travaux du Second Empire modèlent le visage du Paris du XXe siècle. Ils ont cependant un coût non négligeable. Les opposants aux travaux conduits par Haussmann dénoncent notamment leur coût financier, les travaux coutent 2,5 milliards de francs en dix-sept ans pour un budget initial de 1,1 milliard de francs, obligeant Haussmann à recourir à des bons de délégation émis par la Caisse des travaux de Paris, à creuser la dette de la ville et à se justifier par la théorie des dépenses productives. À ces critiques financières s'ajoutent celles sur la vague de spéculation immobilière, les loyers augmentent de 300 % sur toute la période et leur coût social refoulement des plus pauvres hors du centre de Paris. Enfin, une autre vague de critiques porte sur le coût culturel de ces travaux, comme la destruction de nombreux vestiges du passé, notamment sur l'île de la Cité.
Si nombre de ces critiques peuvent être justifiées, il s'avère qu'il n'y a finalement pas d'accroissement du déséquilibre social dans la capitale par rapport à la période antérieure et qu'en 1865, 42 % des Parisiens restent classés dans la catégorie des plus défavorisés car non imposables et qu'à la fin de l'administration haussmannienne en 1870, 65 % des logements parisiens sont occupés par des indigents, des ouvriers et par les représentants les plus modestes de la petite bourgeoisie. Enfin, l'état d'insalubrité, le délabrement des édifices et les difficultés de circulation exigent une nouvelle politique urbanistique.
Les opposants aux travaux dénoncent également les grands boulevards très larges et droits permettant de mieux contrecarrer les éventuelles révoltes en empêchant la formation de barricades. Haussmann n'a jamais nié ce rôle quasi-militaire de la percée de certaines des voies parisiennes, formant des brèches au milieu de quartiers constituant de véritables citadelles d'insurrections tels que ceux de l'Hôtel de ville, du faubourg Saint-Antoine et des deux versants de la Montagne Sainte-Geneviève. Cependant, il a répondu que la majorité de grandes artères percées consistaient surtout à améliorer la circulation entre les gares, entre celles-ci et le centre-ville et aussi à aérer la ville pour éviter les foyers infectieux.
Parallèlement, Napoléon III encourage cette politique dans les autres grandes et moyennes villes de France, de Lyon à Biarritz en passant par Dieppe les nombreuses rues impériales alors tracées sont souvent par la suite rebaptisées « rue de la République. L'empereur multiplie les séjours personnels dans les villes d'eau telles que Vichy, Plombières-les-Bains, Biarritz, ce qui contribue beaucoup à leur lancement et à leur fortune durable. Une politique de grands travaux et d'assainissement permet de mettre en valeur des régions comme la Dombes, les Landes, la Champagne, la Provence ainsi que la Sologne, région chère à Napoléon III en raison de ses attaches familiales du côté de la maison de Beauharnais et qui s'investit personnellement dans la bonification de celle-ci en participant au financement des travaux.

Politique sociale

Privé du soutien des catholiques, que sa politique italienne inquiète, et de celui du patronat et des industriels, ulcérés par son traité de libre-échange conclu en 1860 avec la Grande-Bretagne, Napoléon III, ainsi déçu par les élites, recherche l'appui de nouveaux soutiens dans les masses populaires, notamment les ouvriers.
À partir de 1862, sa politique sociale se montre plus audacieuse et novatrice que durant la décennie écoulée. En mai 1862, il fonde la Société du prince impérial, destinée à prêter de l'argent aux ouvriers et à aider les familles temporairement dans le besoin. Son projet de loi visant à créer une inspection générale du travail, pour faire respecter la loi de 1841 sur le travail des enfants, est cependant révoqué par le Conseil d'État. La même année, sous les encouragements des parlementaires réformistes et de l'élite ouvrière, il subventionne l'envoi d'une délégation ouvrière conduite par Henri Tolain à l'exposition universelle de Londres. Pour l'économiste et homme politique socialiste Albert Thomas, si la classe ouvrière se ralliait à lui Napoléon III, c'était la réalisation du socialisme césarien, la voie barrée à la République. Jamais le danger ne fut aussi grand qu'en 1862.De retour de Londres, la délégation ouvrière demande l'application en France d'une loi permettant aux travailleurs de se coaliser sur le modèle de ce qui se faisait en Grande-Bretagne et, dans le contexte des élections de 1863 et de celles complémentaires de 1864, Tolain et les militants ouvriers rédigent le manifeste des Soixante, un programme de revendications sociales qui affirme son indépendance vis-à-vis des partis politiques, notamment les républicains, et présente des candidats qui sont finalement battus. L'empereur appuie néanmoins leur vœu sur le droit de coalition. Malgré les réticences du Conseil d'État, un projet de loi préparé par Émile Ollivier est adopté par le Corps Législatif et par le Sénat. Ratifiée et promulguée par Napoléon III, la loi du 25 mai 1864 reconnaît pour la première fois le droit de grève en France du moment qu'il ne porte pas atteinte à la liberté du travail et s'exerce paisiblement. De nombreux ouvriers sont alors séduits par la politique sociale de l'empereur mais leur ralliement au régime n'est cependant pas massif. Les contacts pris à Londres avec les représentants ouvriers de divers pays ont abouti à la création, en 1864, de l'Association internationale des travailleurs AIT qui ouvre un bureau en France en 1865, dirigé par Henri Tolain.

Le droit d’organisation des salariés

En dépit de la reconnaissance de ce droit de grève, les syndicats proprement dit demeurent prohibés. Une circulaire impériale du 23 février 1866 demande d'abord aux préfets de laisser se tenir les rassemblements ayant des revendications purement économiques. Puis, le droit d'organisation des salariés dans des associations à caractère syndical est reconnu dans une lettre du 21 mars 1866 et par un décret du 5 août 1866 portant création d'une caisse impériale des associations coopératives.
En septembre 1867, lors du congrès de Lausanne, l'AIT proclame que l'émancipation sociale des travailleurs devait s'accompagner d'une émancipation politique et ce en complète rupture avec l'esprit du mutuellisme proudhonien et avec le manifeste des Soixante. Deux jours plus tard, lors du congrès de la paix et de la liberté à Genève, l'Internationale s'en prend vivement aux armées permanentes et aux gouvernements autoritaires, visant notamment Napoléon III. La section parisienne est finalement dissoute pour avoir participé à des manifestations à caractère politique comme des protestations contre l'envoi à Rome de troupes françaises. Le 30 mars 1868, les chambres syndicales sont officiellement tolérées par le gouvernement. Mais si le gouvernement envisage la légalisation des syndicats avec, pour corollaire, leur ralliement au socialisme césarien, il ne peut tolérer un ralliement au socialisme international marxiste qui semble se profiler au travers de l'AIT. Le ralliement, pour la première fois, de la majorité des ouvriers aux candidats républicains lors des élections législatives de 1869 confirme alors l'échec de la politique d'ouverture sociale de Napoléon III.
En dépit de toutes ses déconvenues pour se rapprocher des ouvriers, Napoléon III décide de maintenir ce qu'il considère être son œuvre sociale. Des soupes populaires sont organisées pour les pauvres alors que se mettent en place les premiers systèmes de retraites et qu'une loi fonde une caisse d’assurance décès et une caisse d’assurance contre les accidents du travail 1868. Le 2 août 1868, une loi abroge un article du code civil qui donnait primauté, en cas de contentieux, à la parole du maître sur celle de l’ouvrier. Le 23 mars 1869, le Conseil d’État refuse de valider le projet de suppression du livret d'ouvrier, une demande récurrente de Napoléon III.
Sur la période, si la grande misère recule et que le niveau de vie des ouvriers reste précaire, leur pouvoir d'achat a cependant réellement augmenté alors que les périodes de sous-emploi se font plus brèves.

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Posté le : 18/04/2014 18:04
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Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
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