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Mikhaïl Cholokhov
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Le 24 mai (11 mai) 1905 naît Mikhaïl Aleksandrovitch Cholokhov

en russe : Михаил Александрович Шолохов, à Kroujlinine, près de Vechenskaïa, Empire russe, mort, à 78 ans,à Vechenskaïa Union soviétique le 21 février 1984, écrivain, romancier, nouvelliste soviétique. Il a reçu le prix Nobel de littérature en 1965. il reçoit les distinctions du prix Nobel de littérature en 1965, du prix Staline en 1941, prix Lénine en 1960. Il appartient au mouvement réalistme socialisme, sa langue d’écriture est le russe. Le Don paisible est notamment l'auteur du roman Le Don paisible 1928-1940, fresque épique sur l'évolution du monde cosaque, de 1912 à 1922, de Terres défrichées 1932-1960, évoquant la collectivisation dans les campagnes, et de Destinée humaine 1957, dont émane une leçon de lucidité et d'humanisme.

En bref

Écrivain lauréat, comblé d'honneurs, Mikhail Alexandrovitch Cholokhov se prétendait avant tout communiste et ensuite écrivain : de fait, il apparaît bien comme l'homme d'un peuple et d'un régime au service desquels il a mis toute sa vie et toute son œuvre. Membre éminent de l'Union des écrivains et grand maître des lettres soviétiques, il a soutenu par ses déclarations et par ses livres la ligne définie lors des différents congrès dans les domaines tant économique que politique : ainsi Terres défrichées, le roman de la collectivisation des terres en 1930, a pu être considéré dans son pays comme une sorte de manuel d'études sur les problèmes agraires.
Mikhail Cholokhov est né en 1905 à Kroujilino près du Don d'une mère analphabète, descendante de ces serfs fugitifs qui ont peuplé la région. Son père est alors gérant de diverses maisons de commerce. Cholokhov partage la vie des Cosaques dépeinte dans la première partie du Don paisible. La guerre civile l'empêche de terminer ses études au gymnase, et à quinze ans il doit travailler. Successivement commis, expéditionnaire, il participe en même temps à la lutte armée avec les Rouges contre les Cosaques révoltés en 1919-1920. Il compose des pièces de théâtre et il en interprète les rôles comiques avec brio sur la scène du théâtre de son village. Après son mariage en 1924, il connaît son premier succès littéraire avec les Récits du Don 1925, recueil de nouvelles publiées d'abord dans les revues et qui le rapprochent des écrivains cosaques Séraphimovitch et Trenev. Un séjour à Moscou de 1922 à 1925 le détourne définitivement des cercles littéraires qu'il juge artificiels et dont il se fera le critique mordant.
De retour dans sa province, il ne la quittera que pour de brefs séjours à l'étranger en 1930, invité par Gorki à Sorrente, il est retenu par les autorités à Berlin, voyage en France, en Scandinavie, en Italie et – l'épisode est célèbre – aux États-Unis avec Khrouchtchev et à Moscou. Il commence la grande épopée du Don à laquelle il travaille près de quinze ans, premier volume publié en 1928, dernier volume en 1940, et en 1930 Terres défrichées, œuvre de longue haleine vol. I, 1932 ; vol. II, 1959.
La guerre de 1940 le déracine comme tant de millions de Soviétiques brassés par de gigantesques mouvements de population. Correspondant de presse, il est envoyé sur tous les fronts, et il compose une série d'articles, œuvres de publiciste, de 1941 à 1949 : Sur le Don, La Science de la haine, 1942 cette haine que les envahisseurs inculquent au mécanicien Guérassimov, porte-parole de Cholokhov dont la mère a été tuée au cours d'un bombardement, Le Dit de la patrie 1948, Lumières et ténèbres 1949. Il décrit les souffrances et les vertus du peuple soviétique, la barbarie des Allemands. Ces articles préparent naturellement l'œuvre finale, Le Destin d'un homme 1956 et Ils ont combattu pour la patrie vol. I, 1959 ; vol. II, 1967 qui témoigne d'un univers élargi et d'un humanisme plus lucide. Ces derniers ouvrages occupent une position éminente dans un courant littéraire extrêmement fécond en U.R.S.S, celui du roman soviétique de guerre mais ne parviennent pourtant pas toujours à éviter le cliché et la banalité dans le tragique.

Sa vie

Mikhaïl Cholokhov est né au village de Kroujlinine, près de Vechenskaïa, dans la région du Don, en 1905. Son père est issu d'une famille de commerçants1 et sa mère est d'origine ukrainienne, illettrée et veuve d’un Cosaque. Il doit interrompre ses études en 1918 en raison de la Guerre civile qui a atteint la région du Don. Il s'engage dans l'Armée rouge et participe aux combats contre les dernières bandes de partisans de l'Armée blanche. Cette expérience aura une grande influence sur son œuvre littéraire.
En 1922, une fois la situation redevenue calme, il s'installe à Moscou, où il exerce divers petits métiers : débardeur, maçon et comptable. Il assiste également à des ateliers de formation des écrivains et publie ses premières nouvelles dans différents journaux, dont Molodoï Leninets, Ogonyok, Projektor, Smena et la Revue de la jeunesse paysanne, dont il fera partie du comité de rédaction à partir de 1927. Il fréquente également les cercles littéraires du Komsomol et les poètes du mouvement de la Nouvelle garde Novaya gvardiya. En 1924, il retourne s'installer à Vechenskaïa, où il se marie et se consacre à plein temps à la littérature.
Il publie son premier ouvrage en 1925, un recueil de nouvelles intitulé Nouvelles du Don Donskie Rasskazy. Il y raconte la vie des villages de la région du Don pendant la Guerre civile russe et les conflits entre paysans qui se retrouvent des deux côtés de la fracture idéologique.

Le Don paisible

En 1928, Mikhaïl Cholokhov publie le premier tome de ce qui sera son œuvre majeure, Le Don paisible. Il s'agit d’un roman sous forme d'épopée qui dépeint la vie dans la région du Don au cours de la période de la Première Guerre mondiale et de la Guerre civile. Le roman, qui comprend quatre tomes, est centré sur le personnage de Grigori Melekhov, jeune officier cosaque. L'action commence en 1912, alors que la région est encore paisible et prospère, se poursuit avec la mobilisation de Grigori et ses proches au déclenchement de la Première Guerre mondiale à l'été 1914. Il décrit les premières escarmouches contre l'armée allemande, et la détérioration progressive de la situation à mesure que le conflit s'enlise. Avec la Révolution d’octobre 1917 et le retrait des troupes russes du conflit, Melekhov est démobilisé et cherche à reprendre la vie agricole, mais il est rapidement rattrapé par la Guerre civile. Il changera de camp à quelques reprises, assistera et participera à de nombreux combats et massacres, avant de finir dans le camp des perdants en 1922.
Le roman a été longtemps présenté comme l'archétype du réalisme socialiste soviétique appliqué au roman. Cependant, cette description pose problème à plusieurs niveaux : Grigori Melekhov n'a rien du héros socialiste, étant plutôt un personnage tragique, ballotté par les forces de l'histoire sans trop savoir où il s'en va. La description du Don d'avant-guerre est plutôt idyllique, et il n'est pas évident de croire, à la fin du roman, que l'on se dirige vers un quelconque « avenir radieux ». De plus, les deux côtés du conflit civil sont montrés avec sympathie, et le blâme pour les atrocités et massacres est bien réparti entre les partis. En fait, la comparaison avec Guerre et Paix de Léon Tolstoï est plus appropriée : les deux romans ont une dimension épique et essaient d'englober la totalité du conflit qui a secoué la Russie au début de leur siècle respectif, la différence étant que Tolstoï choisit ses protagonistes dans l'aristocratie francophile de Moscou, et Cholokhov chez les Cosaques du Don. En raison des problèmes évoqués ci-dessus, la publication du roman subira des ratés à partir du troisième tome, qui traite en détail de la Guerre civile. La revue Oktiabr en suspend la publication en 1929, et il ne sortira en volume qu’en 1933, après l'intervention de Joseph Staline en personne qui devient un des soutiens de l'auteur. Le quatrième tome devra attendre 1940 pour voir le jour, mais à partir de cette date, le destin de l'œuvre change rapidement.

La polémique

Encensé par la critique officielle, le roman est traduit en de nombreuses langues et diffusé massivement avec l'aide des presses de l'État. Il est présenté comme la première grande œuvre de la nouvelle littérature soviétique. Ceci causera une réaction à partir des années 1960, et en particulier à la suite de l'attribution du prix Nobel de littérature à Cholokhov en 1965, mais la question du plagiat s'est posée dès 1929.
Plusieurs critiques, dont Alexandre Soljenitsyne et Roy Medvedev, expriment leurs doutes quant à l'identité de l'auteur véritable du roman. Leurs arguments sont fondés sur le fait que Cholokhov est trop jeune pour avoir été témoin des événements décrits ; qu'il n'a pas le niveau d'éducation requis pour avoir produit un tel chef-d'œuvre ; et que les positions officielles de l'écrivain et la qualité du reste de sa production littéraire ne s'accordent pas avec le traitement sympathique et objectif réservé aux Cosaques dans le roman. Ils avancent la thèse que le véritable auteur en serait Fiodor Krioukov, écrivain cosaque et anti-bolchévique décédé de fièvre typhoïde en 1920. Cette controverse a longtemps fait rage, mais semble avoir trouvé aujourd'hui sa conclusion définitive.
En 1991, en effet, le journaliste russe Lev Kolodny Лев Ефимович Колодный a retrouvé le manuscrit original du Don paisible ainsi que d'autres papiers de travail, qui ont ensuite été formellement authentifiés par un groupe d'experts graphologues comme étant bien de la main de Cholokhov.

Manuscrit original retrouvé

Longtemps considéré comme perdu, le manuscrit du Don paisible était en fait entre les mains d'une parente de l'écrivain russe, aujourd'hui décédé, Vassili Kudachov Васили Кудашов, ami de Cholokhov. La propriétaire de ce manuscrit, qui est restée anonyme, a vainement tenté de vendre celui-ci aux enchères, via la maison Sotheby's en 1994, pour la somme de 500 000 dollars. Un tel montant n'ayant pas pu être trouvé à l'intérieur du pays cette parente ne voulait pas que le manuscrit soit vendu à l'étranger, le manuscrit a finalement été acquis par le gouvernement russe pour une somme demeurée inconnue. Ce sont des experts de l'Institut de littérature russe de l'Académie des Sciences de Moscou Института русской литературы РАН qui ont, depuis, confirmé la paternité de Cholokhov, comme l'a annoncé très officiellement Nikolaï Skatov, directeur de l'Institut, à l'agence ITAR-TASS en 1999.

L’écrivain soviétique

En 1932, Mikhaïl Cholokhov adhère au Parti communiste de l'Union soviétique4, et à partir de cette date sera comblé d'honneurs et présenté comme l'écrivain officiel du régime. Il est élu au Soviet suprême en 1937, sera membre du Comité central du PCUS, membre de l'Académie des sciences de l'URSS, Président de l'Union des écrivains soviétiques, et lauréat de nombreux prix. Il défend sans états d'âme les prises de position du régime et bénéficie du privilège d'effectuer plusieurs voyages à l'étranger, dont en 1959 alors qu'il accompagne le Secrétaire-général Nikita Khrouchtchev en visite officielle aux États-Unis. Cependant, sa production littéraire n'est plus à la hauteur de son statut officiel.
Il entame la publication de son second grand cycle romanesque en 1932. Intitulé Terres défrichées Podnyataya tselina, il raconte la collectivisation des terres agricoles du Don à partir de 1930. Or, un problème survient peu après la publication du premier volume, soit la famine majeure de l’hiver 1932-1933 qui résulte de la collectivisation forcée et causera des millions de morts. Cholokhov écrit une lettre à Staline en 1933 pour dénoncer les violences commises contre les paysans et pour demander l'envoi de nourriture dans sa région pour contrer les pires effets de la famine. En 1937, il proteste contre les arrestations massives qui ont lieu dans sa région. Ces prises de position lui valent contre lui l'ouverture d'une enquête par le NKVD qui ne prend fin que par l'intervention de Staline en personne. Par la suite, Cholokhov sera toujours des plus dociles, suivant tous les oukases du régime. La seconde partie de Terres défrichées ne verra le jour qu’en 1960, et sera remarquable par ce qu'elle tait : la résistance des paysans à la collectivisation, la terreur imposée contre eux, et la famine qui s'ensuit. Quelques semaines après sa sortie, le roman vaut à son auteur le Prix Lénine, la plus haute distinction littéraire soviétique, et le livre devient une lecture quasi-obligatoire pour les dirigeants de sovkhozes et kolkhozes.
Le reste de l'œuvre de Cholokhov est bien pâle par rapport à la considération officielle dont il jouit. À l'entrée de l'Union soviétique dans la Seconde Guerre mondiale, il entame ce qui devrait être un nouveau cycle romanesque devant rivaliser avec les deux déjà en train, intitulé Ils se sont battus pour la patrie Oni srajalis za rodinu. La matière première ne lui manque pas, puisqu'il est correspondant de guerre pour les journaux soviétiques Pravda et Krasnaya Zvezda, couvrant le front à Smolensk, Stalingrad et en Biélorussie. Pourtant, après la publication d'un premier volume en 1942, le roman sera laissé en plan. Par la suite, il n'écrit que quelques nouvelles. L'une d'elles, Le Destin d'un homme Sudba tchiloveka, 1957 devient un film à succès, mais ce n'est pas nécessairement un gage de sa valeur littéraire. It is among the least impressive works produced by a Nobel writer, along with Hemingway's posthumously published book True at First Light 1999. Il s'agit d’une des œuvres les moins impressionnantes produites par un lauréat du Prix Nobel, avec le livre posthume d'Hemingway True at First Light 1999

Avec la fin de la période de Détente dans les relations est-ouest après le déclenchement de la Guerre d'Afghanistan 1979-1989, l'intérêt pour Cholokhov en Occident baisse rapidement, et il est pratiquement oublié lorsqu'il décède à Vechenskaïa en 1984, étant considéré comme le simple apparatchik d'un régime discrédité. Par exemple, l'écrivain roumain exilé Virgil Gheorghiu présente un romancier inspiré par une certaine image de Cholokhov dans son roman Dieu ne reçoit que le dimanche 1975, en la personne d’un ancien garde de camp de prisonniers sans la moindre culture qui publie sous son nom les œuvres écrites par un des détenus dont il a la garde, et en retire tous les honneurs que le régime peut lui attribuer. C'est malheureux, car Le Don paisible, quel que soit son auteur réel ou la contribution effective de Cholohov lui-même à sa rédaction, constitue un des chefs-d'œuvre de la littérature russe du XXe siècle. Il est triste que l'œuvre ait pâti de son association abusive avec un régime politique et une théorie littéraire qu'elle transcende facilement. Son épouse est décédée en 1992.

L'écrivain et le peuple

À propos des affaires Pasternak, Daniel-Siniavski, Cholokhov s'est fait remarquer par son rigorisme, et il est l'un des rares intellectuels à approuver, en termes modérés il est vrai, l'intervention en Tchécoslovaquie. Homme public et politique, Cholokhov l'est aussi par son appartenance au Soviet suprême depuis l'année critique de 1937 et par son activité de communiste dans la région du Don. Son œuvre littéraire, saluée dès le début par Gorki, père spirituel des lettres soviétiques, est, par son importance, à la mesure du peuple auquel il appartient et dont il nous retrace la gigantesque et tragique épopée pendant plus d'un demi-siècle. Elle lui a valu le prix Staline, le prix Lénine de littérature et l'ordre de Lénine, récompense civique suprême. En 1965 enfin, l'acceptation du prix Nobel de littérature a apporté à Cholokhov la consécration internationale définitive.
Longtemps dans son pays, Cholokhov a incarné l'idéal nouveau de l'écrivain soviétique : son œuvre monumentale naît en symbiose et collaboration étroite avec le peuple dont elle se veut la voix. Ses livres, annoncés, critiqués, corrigés dans les usines et les kolkhoz, ont été à la fois des événements publics – un peu à la manière des feuilletons de Dickens – et des textes de référence pour les jeunes écrivains désireux d'assimiler les canons du réalisme socialiste. Cette œuvre, diffusée par millions d'exemplaires, plus de 5 millions en U.R.S.S. pour Le Don paisible, traduit en 50 langues, a été élargie et prolongée par la scène en 1935-1936, le compositeur Dzerjinski présente son opéra Le Don paisible et, en 1937, Terres défrichées, par le cinéma films de Guérassimov, en 1956, Le Don paisible et de Bondartchouk, Le Destin d'un homme, 1959, tiré de la nouvelle qui porte ce titre, etc.. Ainsi s'établit un nouveau type de relations entre le public et l'écrivain, retiré dans son village de Viochenskaïa,nom aussi prestigieux pour le Soviétique moyen que le fut Yasnaïa Poliana au temps de Tolstoï, mais disposant des puissants porte-voix que sont la radio, la presse et la tribune du palais du Kremlin.

La ligne et le réalisme socialiste

L'œuvre de Cholokhov appartient à une littérature d'affirmation du socialisme, une littérature combative ; de guerre, alors que Soljénitsyne et Tvardovski marqueront le tournant vers des écrits de contestation. L'écrivain de l'époque de Cholokhov a un devoir : susciter la foi dans la révolution et le parti ; le grand critère de l'art est la représentation réaliste de la vie à partir des positions du parti. Cholokhov, disciple de Gorki, aborde donc les problèmes brûlants de son temps dont il a une connaissance particulière et vécue. Je ne rassemblais pas les documents, je les ratissais et les mettais en tas. Vivez un mois dans un kolkhoz et vous saurez ! déclaration aux écrivains bulgares. Les premiers récits du Don nous présentent les images pittoresques et sanglantes, la cruauté est le trait dominant de l'œuvre de la vie des Cosaques dans les premières années de la guerre civile et surtout les luttes qui déchirent les familles divisées en Rouges et Blancs. Dans la nouvelle Le Grain de beauté, par exemple, le père, un Cosaque révolté, reconnaît son fils dans le garde rouge qu'il vient de tuer et se suicide de désespoir. Ces nouvelles restent teintées d'un manichéisme primaire et d'un optimisme résolu. L'auteur ne s'est pas encore assez abstrait du bain de réalité et ne parvient pas à brosser un tableau complet de la réalité dans toute sa variété et complexité – tel est le but de la littérature, dit Cholokhov à Sofia en 1951.
C'est dans Le Don paisible que Cholokhov réussit la grande synthèse de l'époque en images, la synthèse de l'élément historique et de l'élément humain : il n'est plus question de familles ni de héros isolés, mais de la terrifiante épopée de la paysannerie russe. Le récit est centré sur la vie de Grégoire Mélékhov un paysan moyen. Fidèle aux théories de Staline, Cholokhov montre ses hésitations devant la révolution. Grégoire prend part à la révolte des Cosaques contre le pouvoir soviétique, puis, gagné à la cause socialiste, passe dans l'Armée rouge. Il est finalement rejeté pour sa vie passée et se retire dans son village. Il représente l'homme qui n'a pas trouvé sa voie pendant la révolution. Le Don paisible révèle aussi l'aspect inhumain de la guerre, la fin d'un mode de vie patriarcal et l'espoir d'une société nouvelle illustré par l'apparition de la famille de Dounia. Si la première grande œuvre de Cholokhov est engagée, le héros central n'est pas un héros positif ; il apparaît plutôt comme le point de rencontre tragique de deux conceptions de la vie et se distingue par là des personnages schématiques des premières nouvelles.
Plus didactique, le roman Terres défrichées oppose de façon systématique les bons communistes, Yagoulnov, Davidov, Razmetov aux mauvais contre-révolutionnaires et koulaks Polovtsev, etc.. L'œuvre décrit les luttes, les résistances des paysans et le triomphe final de la ligne. Pourtant, le héros comique, le vieux Choukar, qui rachète le roman par sa verve, son personnage haut en couleur, ne parvient pas à nous faire oublier les erreurs de la collectivisation, les millions de koulaks exterminés à cette époque et que l'auteur passe sous silence. Cholokhov sacrifie trop clairement aux nécessités de la politique cette vérité parfois rude mais toujours courageuse qu'il exige de l'écrivain. Dans les dernières œuvres, toutes militantes, Cholokhov met en évidence l'anéantissement féroce du monde socialiste par les troupes de Hitler, la destruction de la famille dont le bonheur précaire a coûté tant de peines et de courage. Le recours au mythe du soldat russe et le messianisme humanitaire sont certainement très orientés. Mais dans la dénonciation du fascisme, l'écrivain dans la ligne parvient à servir le peuple sans toutefois parfaitement l'éclairer.

La tradition et son renouvellement

L'art de Cholokhov se distingue d'abord par un instinct et une science extraordinaires du langage : nous reconnaissons en lui l'héritier de Gogol avec qui il partage le même goût du terme savoureux, de la métaphore suggestive. Les déformations de mots, dues à la prononciation et aux particularités dialectales, rappellent au lecteur étranger les tours de force de Joyce par leur bizarrerie, mais intégrés au milieu vivant de la conversation. Cholokhov conduit de main de maître le dialogue à plusieurs voix, et les discours des Choukar, des Christonia, par leur bonne humeur toute méridionale proche de la verve d'un Sean O'Casey, se terminent le plus souvent en éclats de rire assez puissants pour faire tomber les glaçons du toit et effrayer les moineaux. Le chœur de l'épopée antique est remplacé ici par les commérages du village cosaque.
Cette intensité du style découle du relief des personnages extrêmement nombreux et variés, plus de cent dans Le Don paisible. Et, en ce sens, Choukar nous semble le plus typique des héros de Cholokhov : bavard, menteur, mais doté d'un solide bon sens populaire, il atteint dans la solitude de la vieillesse la dimension tragique d'un Falstaff. Pourtant, si la peinture des caractères tourne souvent à la charge caricaturale à la manière d'un Gogol, ou à l'exagération féroce d'un Norris, le grossissement naturaliste n'exclut pas une grande finesse de l'analyse psychologique.
Par la minutie des détails, Cholokhov demeure l'élève de Tolstoï, dont l'exemple lui a donné aussi le sens de l'architecture : dans Le Don paisible – le Guerre et Paix soviétique –, profondeur et analyse ne le cèdent en rien aux beautés de la composition. Le personnage de Grégoire Mélékhov, écartelé entre deux femmes et deux mondes, a une faille comme les héros de Shakespeare. Le dénouement pourtant ne vouera pas cet Antoine à la mort, mais à la terre où les vertus du travail pourront lui conserver quelque grandeur.
Car c'est dans le registre pathétique que Cholokhov crée ses personnages les plus fascinants, les femmes surtout, Aksinia, Nathalie, puis quelques ouvriers, Guérassimov, le mécanicien de La Science de la haine, et Sokolov, avec qui l'auteur évoque la guerre dans Le Destin d'un homme, livre où la conversation s'épure au point de devenir le monologue intérieur de toute une humanité sortie de la guerre.
Mais le pathétique n'évite pas non plus l'écueil du pathos, de même que le lyrisme romantique qui triomphe dans la description somptueuse de la nature verse parfois dans un symbolisme facile des éléments. Cholokhov ne cherche pas vraiment à rénover la technique littéraire – il s'est associé d'ailleurs à la critique des formalistes des années trente –, il a plutôt recours à l'utilisation astucieuse des grands maîtres du passé comme le voulait Gorki. Cholokhov n'adresse pas son œuvre aux happy few, mais au citoyen moyen. C'est donc moins par l'originalité de ses recherches esthétiques que par l'humanité profonde des thèmes, la fraîcheur des sensations et de la vision, la truculence de sa langue et le souffle épique de son inspiration qu'il s'impose à nous comme écrivain.
Depuis une vingtaine d'années, toutefois, si le succès évident de l'œuvre ne faisait que se confirmer dans les anciens pays socialistes, le scandale qui couvait et alimentait toutes les conversations dissidentes a éclaté au grand jour en Occident : coup sur coup, en 1975, deux ouvrages, le premier anonyme de D... avec une Préface d'Alexandre Soljénitsyne et le second de R. A. Medvédev, ont spéculé sur l'authenticité du premier volume du Don paisible : ce tome, si différent des autres par son ton et sa coloration, doit-il être vraiment attribué à Cholokhov ou ne serait-il qu'un emprunt inavoué que l'écrivain a fait à un officier russe blanc tué pendant la révolution ? Médisance ou vérité, la nouvelle a été accueillie comme un fait de propagande antisoviétique à Moscou, si imposante est devenue la stature d'un homme qui a sut s'identifier à celle du régime...Jean Perrot

Œuvres Romans

Tikhii Don, 4 vol., 1928-1940 - Le Don paisible
Podnyataya tselina, 2 vol. 1932-1960 - Terres défrichées
Oni srajalis za rodinu, 1942 - Ils se sont battus pour la patrie inachevé

Nouvelles

Donskie rasskazy, 1925 - Nouvelles du Don
Lazorevaya Step', 1926 - La Steppe de Lazorevy
Nauka Nenavisti, 1942 - La Science de la haine
Slovo o Rodine, 1951 - Gloire à la Patrie
Sudba Tcheloveka, 1956-1957 - Le Destin d'un homme

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Posté le : 16/05/2015 11:01
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Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
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