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Charles-Louis Havas
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Le 5 juillet 1783 naît Charles-Louis Havas à Rouen

mort, à 74 ans, le 21 mai 1858 à Bougival, fut le fondateur de l'Agence Havas en 1835, à l'âge de 52 ans.
Ancien négociant international puis banquier, devenu journaliste et traducteur à la quarantaine, Charles-Louis Havas invente le concept d’agence de presse mondiale et généraliste, copié par Reuters et l'Associated Press, dont héritera l'Agence France-Presse en 1944, en récupérant les clients et l'immeuble de l'entreprise.
En 1825, il a fondé son propre bureau de traduction d’informations venues de l’étranger, pour la presse française. L’intérêt croissant pour l'actualité internationale l'amène à le transformer en 1835 en l’Agence Havas, qui fournit aussi des dépêches de France aux pays étrangers. Il a travaillé avec Paul Julius Reuter, fondateur en 1851 à Londres de l'agence Reuters, et Bernhard Wolff qui créé en 1849 à Berlin le Wolff’s Telegraphisches Bureau allemand, ancêtre de l'Agence Continentale allemande et de la DPA. Après sa retraite en 1852, ses deux héritiers, Auguste Havas et Charles-Guillaume Havas, bâtiront en cinq ans un monopole dans la publicité, la Société générale des annonces, devenue Havas à la Libération.


En bref

En 1832, il créa un bureau de traductions de dépêches étrangères, qui devint en 1835 l'Agence Havas. Tandis que la branche information, acquise par l'État en 1940, allait donner naissance en 1944 à l'Agence France-Presse, le groupe Havas se diversifiait dans la publicité, le tourisme, l'édition et l'audiovisuel. Recentré sur l'édition et le multimédia, Havas, partie du groupe Vivendi Universal, fut renommé en 2001 Vivendi Universal Publishing.
Né en Normandie d'une famille normande, mais d'une origine lointaine portugaise ou hongroise ou peut-être les deux.... Homme d'affaires comme ses ancêtres, Charles Henri Havas semble tout d'abord réussir assez mal dans ce domaine.
C'est en végétant comme traducteur de presse qu'il trouvera sa voie. Cette fonction de traducteur de journal prend de plus en plus d'importance dans une presse française qui, bien plus que l'anglaise, demeure une presse d'opinion, mais que la curiosité du public et les besoins des milieux du commerce et de l'industrie naissante contraignent à accorder plus de place aux nouvelles de l'étranger. Havas ouvre donc, en 1825, un Bureau qui fournit aux journaux des informations reprises et traduites de la presse étrangère et sert à des abonnés ce qu'on appellerait aujourd'hui un bulletin confidentiel très riche. Après dix ans d'efforts, la réussite est assurée ; Havas absorbe même des bulletins concurrents, telle la Correspondance Garnier. Lorsqu'il se met à expédier des nouvelles françaises vers l'étranger, le Bureau devient l'Agence Havas et acquiert certaines correspondances étrangères installées à Paris, telle la Correspondance allemande. Dernière étape : la conquête des journaux de province, qui n'est possible que par la création d'un service de publicité et le contrôle de la Société générale de publicité, qui sera absorbée en 1920.
On a dit que l'agence de presse est le produit du télégraphe. Havas a, en fait, devancé les découvertes techniques qui accéléreront la transmission des nouvelles. Il a utilisé tour à tour la lettre, avec le hors-sac diligence, chemin de fer ou bateau, le pigeon voyageur et le télégraphe Chappe. Ce qui est sûr, en revanche, c'est que les innovations d'Havas ont précipité le passage de la presse d'opinion à la presse d'information, le recours à la publicité faisant le reste. Balzac, qui le regrettait, ne s'y est pas trompé ; qualifiant Havas de Maître Jacques de la presse, il ajoutait : Chacun teint en blanc, en vert, en rouge ou en bleu la nouvelle que lui envoie M. Havas... Il n'y a qu'un journal, fait par lui, et à sa source puisent tous les journaux.
Havas a fort bien répondu à un besoin essentiel des temps nouveaux et son initiative sera rapidement imitée : en Angleterre 1851, par un de ses anciens employés, Julius Reuter ; en Allemagne 1849, par Bernhard Wolff ; en Amérique, par des groupes de journaux associés. L'affaire se révèle si bonne que lors de la succession des enfants Havas elle devient la propriété d'un banquier, le baron d'Erlanger. Les bouleversements de la Seconde Guerre mondiale devaient enfin entraîner la séparation des activités publicitaires qui en étaient venues à constituer un véritable monopole et auxquelles le nom d'Havas reste aujourd'hui accolé et des activités d'information reprises par l'Agence France-Presse. Cette dernière, établissement public à gestion paritaire profession, État, représentée dans le monde entier, reste bien dans le droit fil de l'intuition originelle de Charles Havas. Pierre Albin Martel

Sa vie Havas, négociant et banquier L'origine familiale

Son grand-père Thomas-Guillaume-François Avas 1717-1795 avait épousé Marie-Elisabeth Eude, née et morte comme lui à Pont-Audemer, en Normandie. Le cadet des fils du couple devient vicaire de la paroisse Saint-Étienne à Rouen, et l'aîné, diplômé en droit, inspecteur royal de la Librairie de Rouen, chargé du contrôle des ballots de livres étrangers et des travaux donnés aux imprimeurs. Nommé Charles Louis Havas, comme le sera son fils, il gère la fortune foncière des grandes familles de la noblesse normande. En 1780 à Rouen, il épouse Marie Anne Belard, fille d’un raffineur de sucre de la ville, qui lui donne six enfants.
Havas père jouit à Rouen d'une réputation de probité exemplaire. Il change d’activité après la Révolution française, se lance dans le négoce du coton et fait fortune en rachetant des Biens nationaux à Lyons-la-Forêt et en Pays d’Auge. Mais l'approvisionnement en coton de Saint-Domingue est stoppé par la révolution haïtienne et le Traité de Whitehall signé par les grands planteurs avec l'Angleterre en 1794: Havas père prend alors langue avec les négociants internationaux pour s'approvisionner au Brésil. Sous Bonaparte, lorsque deux comptoirs d’escomptes sont créés à Rouen et Lyon par le décret impérial du 24 juin 1808, Havas père figure dans liste des administrateurs pressentis, sans même avoir fait acte de candidature. Il s'en étonne dans une lettre adressée à un proche de l’Empereur Bonaparte. Certains administrateurs estiment "son âge très avancé" 55 ans et ses infirmités "nuisibles au bien de l’établissement". D’autres jugent qu’il "ne sollicite cette place que pour une retraite honorable".
Le métier de négociant international, à 22 ans, dans les ports de Nantes et Lisbonne

Son fils Charles-Louis Havas, âgé de 22 ans, rencontre en 1805 un ami de la famille, Gabriel-Julien Ouvrard. Ce prestigieux négociant lui propose de venir travailler à Nantes, où il a lui-même débuté à l'âge de à 18 ans en 1788, associé aux armateurs bordelais Baour et Balguerie, chez un négociant en denrées coloniales, avant de s’y établir comme fournisseur de l'armée. Nanti de cette puissante protection, Charles-Louis Havas exploite à Nantes des licences d'importation. Devenu très vite fournisseur des armées impériales, il apprend le grand négoce, achetant et revendant blé, coton et denrées coloniales, sucre, café et cacao.
Le 21 novembre 1806, c’est le blocus continental: un décret napoléonien qui prétend interdire le continent européen à tout navire ayant touché un port anglais. Le Portugal, pays neutre, sert de recours à l'économie française, en lui permettant de se procurer des matières premières. Le commerce du coton brésilien, qui transite par le Portugal ou l'Espagne, attire de nombreux négociants français. Charles-Louis Havas est envoyé à Lisbonne travailler pour un correspondant de Gabriel-Julien Ouvrard: Durand-Guillaume de Roure, originaire du Massif central et installé au Portugal depuis 25 ans, où il est propriétaire d'une grosse maison de commerce française.

La formidable plus-value de 1807 sur le coton brésilien

Moins d'un an plus tard, la donne est rebattue. Les portugais sont courtisés avec assiduité par l'ennemi britannique. Bonaparte s'inquiète, veut couper court à cette sérénade. Il lance sur le Portugal une partie de la Grande armée. Le 18 octobre 1807, le général Jean-Andoche Junot passe les Pyrénées à la tête de 25000 soldats français. Sa mission, foncer sur Lisbonne, pour y emprisonner la famille royale portugaise. Près de 500 kilomètres sont parcourus le long du Tage en 25 jours. Junot reçoit l'ordre de presser le pas. Chaque jour qui passe semble augmenter le risque de voir la Royal Navy lui couper la route, et permettre à la résistance de s'organiser au Portugal contre la France. Le Traité de Fontainebleau, signé le 29 octobre 1807 pour faciliter sa marche à travers l'Espagne, ne suffit pas. Arrivé trop tard à Lisbonne, le 30 novembre au petit matin, le général Jean-Andoche Junot aperçoit au loin les navires emportant l'émigration au Brésil de la famille royale portugaise, qui proteste ainsi contre l'invasion du Portugal par la France.
Gloire nationale : Jean-Andoche Junot, s'empare de Lisbonne le 30 novembre 1807
Au Brésil, le roi du Portugal ordonnera aux exportateurs de fermer le robinet du coton aux industriels textiles français. La formidable croissance des Premiers entrepreneurs du coton britannique suffira à les remplacer.
Résultat, les cours du coton flambent dans l'hexagone. C'est la pénurie et la panique dans les nombreuses usines de coton dont Bonaparte avait encouragé l'installation dans les Biens nationaux, comme la Manufacture de coton d'Annecy, qui doit aller chercher du coton en Égypte, où il est encore rare, cher, et inadapté. Le coton Jumel ne verra le jour que des années plus tard. Le Brésil représentait en 1807 plus du tiers des 126 000 balles de coton importées en France, à égalité avec les États-Unis. Le coton de Saint-Domingue a disparu depuis la Révolution haïtienne.
Les premiers à avoir anticipé la pénurie de coton sont les négociants de Lisbonne. Grâce à l'entourage de Gabriel-Julien Ouvrard, Charles-Louis Havas avait appris que le général Jean-Andoche Junot pressait le pas vers Lisbonne.
Le jeune négociant avait alors décidé une opération de grand commerce des plus audacieuses: acheter plusieurs cargaisons de coton brésilien, pour les revendre à prix d’or quelques semaines plus tard aux filatures françaises. L'aller et retour se fait à crédit, car il y en a pour 3 000 tonnes de coton: le tiers de la consommation annuelle de tout l’hexagone ! Havas la revend avec une énorme plus-value à Rouen. Ses navires traversent l'Atlantique pour toucher le Brésil et charger la précieuse matière première avant l'émigration au Brésil de la famille royale portugaise, qui déclenche l'envolée des cours du coton.
Charles-Louis Havas, désormais riche et admiré, devint l’associé de Durand-Guillaume de Roure. Il épouse sa fille Jeanne, le 4 février 1808 à Lisbonne. Plusieurs historiens estiment que c'est Gabriel-Julien Ouvrard qui a glissé à Charles IV d'Espagne l'idée que la monarchie portugaise parte au Brésil, pour se venger de Bonaparte qui l'a ruiné délibérément.

Retour en France, pour devenir banquier sur les emprunts publics

L'année d'après, la Guerre d’Espagne entraîne l’occupation du Portugal par les Anglais. Expulsée de Lisbonne manu militari, la famille "de Roure-Havas" doit se réfugier à Rouen. Charles-Louis y exerce à nouveau dans le négoce, grâce à l’appui de deux oncles, Prosper Tranquille Havas, et Charles Constant Havas, adjoint du Ministre de l’intérieur Joseph Fouché. Mais son mentor Gabriel-Julien Ouvrard est emprisonné à Sainte-Pélagie en 1809. C'est l'année où sa femme donne naissance à Jeanne Caroline, sa fille aînée, puis à Charles-Guillaume Havas et Auguste Havas, respectivement en 1811 et 1814. Les deux fils prendront sa succession en 1852.
La famille s’installe alors à Paris en 1811. Banquier jeune et opulent, Charles-Louis Havas est spécialiste du négoce des emprunts publics. Justement, les guerres napoléoniennes creusent le déficit de l'État. Charles-Louis connaît d'autant mieux ce marché que son ami Ouvrard y a innové cinq ans plus tôt, en inventant un système où les bons du Trésor sont remplacés, en quelque sorte, par un emprunt occulte et permanent.
Gabriel-Julien Ouvrard financier né en 1770 à Cugand, décècede à 76 ans en 1867 à Londres
À l'époque, Napoléon professait une peur panique des emprunts publics, mais jouait sur tous les leviers. La loi du 22 avril 1806 a prolongé le privilège d'émission monétaire de la Banque de France pour 25 ans. C'est un "instrument politique" dans les mains de l'Empereur, qui doubla son capital pour le porter à 90 millions de francs10. Tout en accumulant les dettes, Bonaparte expliquait ne pas arriver à comprendre comment l'Angleterre n'avait pas été acculée à la ruine par les emprunts contractés au cours de la guerre. La chute de l’Empire après Waterloo entraîne la déchéance des emprunts publics français, alors que Nathan Mayer Rothschild 1777-1836 a lui gagné 600 millions de livres à la Bourse de Londres, selon l'historien Niall Ferguson. La France devra désormais emprunter à Londres.

Chute de l'Empire, Havas devient informateur

En 1815, Charles-Louis Havas a 32 ans et redémarre de zéro. Pas question pour lui encore de se lancer dans le journalisme: la censure napoléonienne a décimé la presse, en rétablissant l’autorisation préalable de publication par le décret du 17 janvier 1800. En 1818, il n'y a plus que 250 journaux en France. On en comptera 600, deux fois plus, en 1835. Les années du jeune banquier ruiné seront difficiles jusqu’aux Trois Glorieuses de 1830 et l’avènement du roi Charles X, qui abolira la censure pour rétablir la Liberté de la presse.
À la chute de l'Empire, son ami bonapartiste Gabriel-Julien Ouvrard s'est à nouveau lancé dans la spéculation financière, tous azimuths. Toujours entre Paris et Londres, il a besoin d'un correspondant à Paris pour transmettre les dernières nouvelles. Quelqu'un capable de lui traduire et résumer le contenu des principaux journaux du monde, avec rapidité et fiabilité. Charles Havas parle anglais et allemand. Son épouse, née à Lisbonne, maîtrise l'espagnol et le portugais. Le couple se retrouve dans les années 1820, à la tête d'un bureau de renseignements économiques et financiers au service exclusif du banquier Gabriel-Julien Ouvrard. Mais ce dernier sera à nouveau ruiné, perdant définitivement tout crédit lorsqu'un appel d'offres organisé à Bayonne en 1825, pour fournir les armées de la Restauration lors de l'Expédition d'Espagne, débouche sur le Scandale des marchés d'Espagne. La Crise boursière de 1825 achève de ruiner Charles Havas.

Havas, traducteur et journaliste
L'ouverture d'un bureau de traducteur en face de l'hôtel des Postes

Ruiné par la Crise boursière de 1825, Havas constitue en 1825 le Bureau de traduction des journaux étrangers, qui deviendra sept ans après le Bureau de nouvelles, en 1832. Logé Hôtel Bullion, au 4 rue Jean-Jacques Rousseau à Paris, juste à côté de l'Hôtel des ventes, Charles-Louis n'a qu'à traverser la rue chaque matin pour aller chercher lettres et journaux à l'Hôtel des Postes, future Poste centrale du Louvre.
Sa mission, lire tout ce qui touche aux activités des banques concurrentes: les guerres, le négoce, les cours des matières premières ou les naufrages. Le navigation à vapeur balbutie, transportant le coton sur le Mississippi, puis s'aventurant en mer. L'empire colonial espagnol a éclaté, les nouvelles républiques se multiplient.
Charles-Louis se charge de la presse anglaise et allemande. L'espagnol et le portugais sont pour Jeanne, née à Lisbonne. Brésil, Louisiane, Égypte, ils décortiquent l'actualité mondiale, de la politique à la Bourse.
À la fin des années 1820, leur activité végète toujours, car la Bourse de Paris est encore à la veille de connaître son formidable essor : 44 valeurs seulement y sont cotées en 1830. Ce sera 223 six ans après, en décembre 1836, soit cinq fois plus. La nouvelle Liberté de la presse a fait du secteur des médias l'un des mieux représentés, avec 34 valeurs. Le journal La Bourse d'août 1837, recensera déjà 260 sociétés française cotées, dont 38 journaux, parmi lesquels une foule de publications économiques. Même effervescence à la Bourse de Londres après le Bank Charter Act de 1833, mais dans un autre secteur capital pour l'économie: on compte 30 introductions en bourse de banques anglaises dans les trois années qui suivent, puis 59 l'année suivante, en 1836. La Panique de 1837 sanctionnera cet engouement spéculatif. Les premières sociétés étrangères, Banca Romana en 1834 et Banque de Belgique en 1835, sont rejointes dans les années 1840, par les Mines de charbon de Belgique, premières entreprises industrielles.

Le rachat de "correspondances" pour passer en 1832 au "Bureau des nouvelles"

Charles-Louis Havas écrit en même temps des articles pour le quotidien Le Constitutionnel, fondé en 1815 par Joseph Fouché, un de ses protecteurs. Il traduit des articles pour deux autres journaux. Lors de la Protestation des 44 journalistes du 26 juillet 1830, à la veille des Trois Glorieuses, il est rue de Valois, dans les locaux du quotidien Le Constitutionnel, où la colère gronde avant de finir en émeute Place du Palais-Royal.
Germanophone, Havas collabore aussi à la Correspondance Garnier, relancée fin 1831 pour succéder au Bureau Bornsteïn, fondé en 1811 par un réfugié politique allemand. La publication a une précieuse clientèle de plusieurs centaines de lecteurs outre-Rhin. Il la rachète dès 1832, l'année où il crée le Bureau de nouvelles. L'acquisition d'autres publications concurrentes, la Correspondance Degouve-Denainques et la Correspondance de Paris, permet de constituer un réseau de collecte d'informations, central et complet, donnant de la crédibilité aux nouvelles diffusées. Le concept d'agence de presse mondiale est né.
Une traversée de l'Europe lui a permis de recruter des correspondants, qui s'intègrent à l'Agence des Feuilles Politiques-Correspondance Générale, créée le 22 octobre 1835 et expédiée dès 1838 en Hollande, Belgique, Allemagne, Angleterre et "à quelques organes de l'opinion légitimiste dans les départements". Cette nouvelle activité, qui a pour gérant J. Delaire, complète le Bureau de traduction. La nouvelle Agence Delaire-Havas communique avec ses correspondants par le télégraphe de Chappe.
L'année 1838 fut décisive : l'Agence Delaire-Havas persuade le ministre de l'Intérieur Camille de Montalivet de relancer la Correspondance ministérielle, destinée à la presse de province. Le 15 avril 1838, elle supplante la Correspondance des journaux ministériels des départements, appelée aussi Correspondance Lejollivet. Delaire reçoit alors deux subventions, dont une qui varie de 1 100 à 1 700 francs, versée tous les trimestres. Au total, sur la période 1840-1841, l'Agence Delaire-Havas aurait reçu 200 000 francs de l'État.
La Correspondance Lejollivet s'appelait auparavant la Correspondance spéciale pour les feuilles ministérielles des départements. Dirigée par M.Labot, avocat auprès de la Cour d'appel, fondateur de la Sentinelle du Peuple, ses "tartines" d'information bureaucratique apparaissent soudain indigestes et moralisatrices. Havas et Delaire ringardisent aussi l'Office correspondance, édité par le duo Lepelletier et Bourgoin, à qui s'était associé entre 1830 à 1834 Jacques Bresson, avant de créer son journal boursier. Vers 1840, Havas et Delaire diffusent quatre services : une Correspondance politique destinée aux préfets et aux sous-préfets, une autre pour la presse départementale, et un petit bulletin aux membres du gouvernement, résumant les nouvelles de la veille et de la nuit. Pour les banquiers et hommes d'affaire, une petite feuille synthétique résume des extraits de journaux, quelques faits boursiers et la cote des obligations.

Balzac dénonce le "monopole" Havas, Julius Reuters rêve de le copier

Le monopole patiemment tissé par Havas dans la diffusion de dépêches de l'international vers les quotidiens français indispose nombre de journalistes, d'autant que la liberté de la presse reste extrêmement restreinte, sous la Monarchie de Juillet du roi Louis-Philippe Ier.

Honoré de Balzac sonne la charge dès le 25 août 1840.

«Le public peut croire qu'il existe plusieurs journaux,mais il n'y a en définitif, qu'un seul journal... Monsieur Havas.

L'écrivain a mené son enquête et révèle qu'Havas a été coactionnaire de La Gazette de France, tristement célèbre car c'est l'un des 4 seuls journaux parisiens autorisés paraître par Bonaparte lors du décret du 17 septembre 1811, avec Le Moniteur, le Journal de Paris et le Journal de l’Empire, chacun de ces 4 journaux ayant été étatisé. Havas a de plus été "coassocié d'une entreprise pour des licences accordées par Napoléon pendant le blocus continental", observe Honoré de Balzac.
Havas, qu'il traite de "prête-nom du ministère" reçoit "6000 francs par mois du ministère" contre "4000 francs des journaux", dénonce-t-il25. Résultat "les journaux à leur insu, n'ont que ce que le premier ministre leur laisse publier", martèle-t-il26.
Balzac critique plus généralement la presse de l'époque, devenue selon lui, “Un quatrième pouvoir dans l’État”. "Nous expliquerons plus tard quels sont les cuisiniers chargés d'épicer les plats, et vous verrez que le peuple que l'on dit le plus spirituel du monde est celui qu'on dupe avec le plus de grossièreté", s'emporte-t-il. En 1842, il renouvelle ces critiques des journaux dans "La monographie de la Presse Parisienne".
Havas se défend: il ne fait que présenter les informations comme une matière brute, non-transformée, en particulier dans le domaine de l’économie, grâce aux différents journalistes qui travaillent pour son compte dans les différentes capitales de l’Europe. Havas a dès 1845 un correspondant dans la capitale d'une Russie en plein éveil économique, à Saint-Pétersbourg. La répression qui suit, en 1848, la Révolution de Mars en Allemagne lui permet de recruter trois des meilleurs journalistes de la nouvelle génération, Bernhard Wolff, Paul Julius Reuter et Sigismund Englander 1823-1902, . Le premier revient peu après à Berlin pour fonder le "Wolff’s Telegraphisches Bureau", les deux autres créent Reuters, après avoir travaillé ensemble dans le même journal politique à Berlin avant 1848. Paul Julius Reuter et Bernhard Wolff se sont aussi connus à Berlin, émigrant ensemble à Paris.

Havas, entrepreneur de télécommunications
En 1840, l'ère des pigeons voyageurs pour les spéculateurs

Pigeon voyageur

À partir de 1840, les nouvelles en provenance des journaux et des marchés boursiers à l'étranger transitent par pigeon voyageur. Les bateaux de commerce s'en servent depuis longtemps pour annoncer le contenu de leur cargaison, lors de l'approche du port. Dans les médias, les premiers pigeons voyageurs sont utilisés dès 1836 par l'américain Daniel H. Craig, futur patron de l'Associated Press. À la demande d'Arunah S. Abell, l'exigeant patron du New York Sun, quotidien qui révolutionne la presse new-yorlaise, Daniel H. Craig accélère la circulation des nouvelles entre les ports de New York, Boston29et Baltimore, où vient d'être fondé en 1837 le Baltimore Sun autre quotidien à succès. Les principaux clients sont les spéculateurs de Wall Street.
Partis de Londres à 8 heures, les pigeons d'Havas arrivent à Paris à 14 heures. Enroulées autour de leurs pattes, des mini-feuilles de papier listent les cours de l’ouverture à la Bourse de Londres, dans chaque secteur industriel. Ceux de Bruxelles arrivent dès midi, avec les mines de charbon belges, également cotées à Paris et particulièrement recherchées car le professeur André Hubert Dumont 1809-1857 vient de recevoir la médaille Wollaston 1840 pour sa carte géologique des critères lithologiques et stratigraphiques, qui permet d'identifier la taille de leurs gisements.
Havas gagne du temps car ses locaux sont installés non loin de la Place de la Bourse, où le Palais Brongniart de Paris est achevé en 1825 et saisi par la fièvre spéculative lors de la croissance économique mondiale des années 1830. Les deux races de pigeons les plus rapides et les plus fiables sont celles d'Anvers et Liège, selon Félix Guillaume Marie Bogaerts. Charles-Louis Havas aura jusqu’à 25000 pigeons à sa disposition dans le port d’Anvers, qui compte une trentaine de sociétés de colombophilie en 1847, contre à peine sept ou huit avant 1828. Félix Guillaume Marie Bogaerts a évoqué les succès légendaires des "pigeons boursicoteurs" dès la bataille de Waterloo, au service du banquier Nathan Mayer Rothschild 1777-1836, puis lors des spéculations de 1828 sur les obligations espagnoles, "exploitées par un agiotage astucieux et déhonté". Sur le trajet d'Anvers à Paris, les "coulonneux" de la région Nord-Pas-de-Calais se prennent de passion pour les précieux volatiles. Plus tard, ils mobiliseront leurs Pigeons de la guerre de 1870 lors du siège de Paris.

Le boom de la presse en 1848 puis du télégraphe à partir de 1851

En France, la Révolution de 1848 se traduit par la liberté de la presse et celle de réunion. L'adoption du suffrage universel, réservé cependant aux hommes, fait de chacun un électeur, appelé à s'informer. Les journaux se multiplient : deux cents créations en quatre mois, mille pour les trois années suivantes. Leur prix diminue. La Liberté, nouveau quotidien lancé par Armand Dutacq se vend à un sou, soit seulement 5 centimes. Il préfigure le futur raz-de-marée de la Petite presse, populaire, accessible, agréablement écrite, illustrée et informée, qui fera peu à peu une forte consommation de nouvelles, y compris de l'étranger.
Grâce aux relations d'affaires et de confiance tissées avec les administrations, l'Agence Havas se trouve indirectement branchée sur le réseau du télégraphe de Chappe, qui compte en 1844 en France 534 stations et 5 000 km de lignes. Elle bénéficie d'avantages tarifaires et de priorités d'envoi. La loi de 1837 sur le monopole télégraphique a placé l'État au cœur du jeu pour quatre décennies, jusqu'aux Lois sur le télégraphe de 1878. L'Administration des postes freine cependant le changement de technologie et rechigne à partager son réseau. Les premières lignes françaises de télégraphe électrique datent de 1845 pour Paris-Rouen, 1847 pour Paris-Orléans et 1848 pour Paris-Lille. Il faut attendre 1850 pour que toutes les préfectures soient reliées au ministère de l'Intérieur. Mais ce n'est qu'à partir de mars 1851 qu'Havas utilisera aussi le télégraphe électrique pour la collecte de l'information, mais lentement, sur des fils encombrés, qu'il réserve parfois pour les louer à des clients.

Télégraphe de Chappe

Autre inconvénient, le transcripteur Hugues ne peut passer que 1000 mots à l'heure en 1860, un toutes les 3,5 secondes. Ce sera six fois plus en en 1874, 6000 mots à l'heure avec le transcripteur Baudot. Pour Havas, l'enjeu immédiat c'est d'abord la première liaison entre la Bourse de Paris et le London Stock Exchange, opérationnelle à partir de fin 1851 grâce à un câble entre Calais et Douvres.

Dernier coup de génie, l'entrée au capital du Bulletin de Paris

Le 2 novembre 1852, Charles-Louis Havas prend sa retraite. Juste avant, il réalise un dernier coup de génie: l'entrée dans l'activité publicitaire, par une prise de participation au capital du remuant Bulletin de Paris, fondé en 1845 par Charles Duveyrier 1803-1866 pour servir La Presse d'Émile de Girardin. Repris dès 1850 par Mathieu Laffite, ce dernier invente la régie publicitaire, donnant aux journaux de province à petit budget l'accès à des publicités nationales. Très souvent, le Bulletin de Paris cède ses abonnements aux nouvelles en échange d'espace publicitaire standard sur la quatrième et dernière page des abonnés.
Ses deux fils, Auguste Havas et Charles-Guillaume Havas36, pourront offrir aux clients une offre à deux pattes: dépêches d'actualité et gestion de leurs annonces. C'est la clé du succès, concrétisé par le lancement dès 1853, d'une nouvelle rubrique dépêches télégraphique dans les quotidiens français, qui permet de gagner de nouveaux abonnés. En seulement cinq ans, de 1852 à 1857, les deux héritiers vont bâtir un monopole dans la publicité française, à coups d'acquisitions et d'alliances, par la constitution de la Société générale des annonces. Cet empire repose sur les mêmes fondement que celui assemblé par leur père entre 1831 et 1838 dans l'information. Il s'exposera aux mêmes critiques, parfois devant les tribunaux, comme lors de l'action menée en 1866 par Jules Jaluzot, qui a fondé le Printemps Haussmann l'année précédente.


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Posté le : 03/07/2015 17:17
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Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
.

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