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Défi du 8 mai
Plume d'Or
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Bonjour à toutes et à tous,

Le défi de cette semaine m'incombe et comme je viens juste d'être relâché par des clients un tantinet obstinés, je garde au fond de moi une âme de prisonnier. Mon psychothérapeute, spécialisé dans les Hurlus et les consultants, me conseille de briser le signe indien par le biais de l'écriture.

Comme il n'est pas plus bête qu'un autre et que je suis ses conseils, je propose de baser le défi de la semaine sur le thème de l'emprisonnement. Que vous soyez prisonniers de votre belle-mère, de vos enfants, de votre patron, des impôts ou d'une terrible addiction pour les chansons de Florent Pagny, vous êtes toutes et tous les bienvenus pour exorciser cette désagréable sensation.

En vers, en pieds, en croches ou en bémols, en nouvelle ou en conte pour enfants, bref dans tous les styles qu'il vous plaira, sentez vous libres et lâchez les chevaux.

Eeh Aah !

Donald


Posté le : 06/05/2016 23:33
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Re: Défi du 8 mai
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Qui aime trop les femmes en devient prisonnier !!!’’
Ainsi Kjtiti l’aède, faisait part,
Dans son œuvre complète: ‘Confidences d’un niais’’
Des lâches fourberies des femmes à notre égard.

Car l’homme est innocent, puéril, presqu’ingénu,
En ayant pour l’Aimée, le regard de Chimène,
L’hère de type mâle alors est dévolu
A l’asservissement, vers lequel elle le mène.

La gente féminine, sous couvert de douceur,
En usant de son corps, sait poindre les faiblesses,
Du Macho qui sommeille en chacun, c’est un leurre,
Il est foncièrement un monstre de tendresse.

Je sais aborder là, un sujet interdit,
De ceux que l’on aborde, en comité restreint,
Entre gens de raison, de bonne compagnie,
D’où sont exclues ces Dames, sujet trop sibyllin.

Mais pourquoi cette hargne et ce soudain dédain,
Se disent les lecteurs du barde Tourangeau,
D’habitude avenant et même un peu câlin,
D’où viennent sa colère et son verbe si haut ???

C’est que j’en assez d’être un homme exploité,
Par les femmes affamées, au vu de mon physique,
Avantageux, sportif et faisant miroiter
Un amant remarquable, de grande qualité.

Dans cett’ réputation, nullement outrancière…… !!!,
Mettant à mal mon tact et ma grande décence,
Je suis embastillé, arborant la bannière
Du Don Juan de la prose, Casanova des sens !!!!

Et je crie au secours, à moi les poétesses,
Aphrodites du verbe, princesses de la rime,
Ici git un forçat, un galérien du sexe,
En manque de caresses, au bord de la déprime.

Voulant tout d’abord sur un site de rencontre,
Déposer mon dossier pour trouver l’âme sœur,
Le défi de Donald, lancé ce jour, ci-contre,
M’a fournit l’occasion de chercher mon bonheur.

Oui !!! je sais et j’entends déjà vos commentaires :
‘’Mais ce n’est pas le lieu, L’ORée est site honnête,
Aucunement Meetic, endroit pour solitaire,
En mal d’aventure à faire des galipettes !!!’
’’

Seulement, voyez-vous, je n’ai pas fait l’ENA,
Ne jouissant, de ce fait, point d’aura suffisant,
Pour poser en ma couche, starlettes de cinéma,
Idée dont s’exonèrent, de moult présidents ….

Mes excuses à Donald pour avoir détourné ce joli défi, mais l’arrivée du printemps ……… !!!

Mon repentir pour les femmes poétesses OReénnes choquées par mes propos macho: je regrette ces vers…….................... et je m’en verse un autre pour arroser cet écrit !!!


Posté le : 07/05/2016 16:22
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Titi
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Re: Défi du 8 mai
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Cher Donald,
Chères Loréennes et chers Loréens,

Je me suis encore fait coiffer au poteau. Décidément devant notre ami Serge, l'humilité est de rigueur.
J'arrive avec un modeste sonnet qui est venu tout seul, mais un peu dans les traces de Joachim du Bellay, poète que j'admire.

J'ai appelé mon sonnet "ma prison enchantée" :

Oh douce prison de l’Orée où je demeure.
J’y vois beaucoup de bienveillance et d’amitié.
A son carcan serein j’ai été initié,
Au point que très loin de ses barreaux je me meure.

Que ma mort n’arrive surement qu’à son heure.
En l’attendant, au plaisir, je me suis dédié
De lire les mots de mes ami(e)s appréciés.
Leur musique douce sonne dans ma demeure.

Il est mon paradis au milieu des défis.
Pour beaucoup de textes je vibre et c’est ainsi.
Alors je veux que dans ses cachots on m’y laisse.

Mes amis, je suis un prisonnier sans soucis
A cette prison je veux lui dire merci.
Laissez moi m’y attacher avec une laisse.

Voilà tout simplement!

Amitiés de Dijon.

Jacques


Posté le : 07/05/2016 16:59
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Re: Défi du 8 mai
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Sacré Kjtiti,

J'aurais été déçu si tu n'avais pas détourné ce défi pour montrer tes dons de canaille et de fieffé poète. En plus, comme le fait remarquer notre bourguignon favori, tu as frappé le premier, d'un coup d'estoc magistral, coupant l'herbe sous le pied à d'autres interprétations certainement plus orthodoxes. Quoique, je ne sais pas si nos défis fleurent bon l'orthodoxie.

Bravo !

Donald

Posté le : 07/05/2016 17:53
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Re: Défi du 8 mai
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Eh bien, Istenozot,

Que de douceur et d'amour dans ce poème. Nous fais-tu un petit syndrôme de Stockholm ? Bah, je ne t'en voudrais pas, vu que j'adore les Suédoises, et surtout cette Birgit aux longues jambes et aux yeux en amande. Ciel, je m'égare. J'ai du mal à me remettre de la petite fumette au muguet de la semaine dernière qui m'a donné une tête à la Bernard Cazeneuve.

Merci de ta contribution. Porte toi bien. J'effectuerai une petite danse de mon cru pour conjurer le sort.

Donald

Posté le : 07/05/2016 18:49
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Re: Défi du 8 mai
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Belle déclaration d'amour, Isté, envers ''notre'' cher site ou l'amitié n'est pas galvaudée, avec entre autre la tienne qui passe si bien au travers de la barrière du Web!!!

Émettons le souhait qu'elle demeure en cet endroit béni, dans ce monde ou l'individu prend le pas sur la collectivité ou ''le chacun pour soi'' devient la règle au détriment du partage.

Et pourtant comme le dit le poète (le vrai!!!) l'amitié est une chose trop précieuse pour là garder si rare'' .

Amitiés Isté,

......... et tu as remarqué comme sur les sprints je suis toujours aussi bon!!!.....sur les longues distances, par contre, avec mon age avancé .....!!

Bonne journée.

Serge.

Posté le : 08/05/2016 09:09
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Re: Défi du 8 mai
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Voici un texte que j'ai écrit sur ce thème il y a longtemps. Mais une nouvelle idée germe dans mon cerveau...

Prisonnier

Je ne sais plus depuis combien de temps je suis ici dans cette pièce illuminée uniquement par un néon et une fenêtre. Elle ne possède qu’une unique porte que je ne peux passer seul.
Mes proches viennent heureusement me voir, uniquement aux heures prévues par cet établissement qui est devenu ma résidence obligatoire, mon toit temporaire, tout en espérant que ce temporaire ne devienne pas définitif ! Seul le temps me le dira et ce n’est pas moi qui décide. Mon sort est entre les mains d’universitaires, ceux qui ont potassé des tonnes de bouquins pendant que je vivais une jeunesse insouciante. Je n’ai d’autre choix que de leur faire confiance. Ici, plus personne n’est maître de son destin, la faute aux coups du sort ou d’une volonté délibérée.
L’attente est longue mais dès qu’une présence se faufile auprès de moi, c’est comme si le sablier du temps était retourné et que les grains pouvaient à nouveau s’écouler pour retrouver le rythme d’une vie normale. Mais puis-je encore prétendre à retrouver une quelconque existence normale ? M’accordera-t-on une seconde chance ? Certaines erreurs sont parfois irréparables même avec la meilleure volonté du monde. Pas de télécommande avec la touche « REW » ni de baguette magique à la Harry Potter qu’il suffit d’agiter avec sagesse en prononçant la formule « reparo ». Non ! Il faut garder les pieds sur terre.
J’aimerais tant avoir mes proches plus souvent à mes côtés. Ils me rassurent par leurs voix familières et douces. Ma mère me dit qu’untel est passé par là et s’en est sorti, qu’il faut que je garde espoir, que je m’accroche, qu’elle m’aime. Moi aussi je l’aime même si je ne lui ai jamais dit. Je n’ai jamais été un enfant très démonstratif. Je faisais partie de ceux qui se frottaient énergiquement la joue pour effacer la trace du baiser maternel dès qu’elle tournait le dos. Je suis un peu Julien Clerc dans sa chanson « Cœur de rocker ». Maman me ressasse « Tu vas t’en sortir. Prends patience. Encore une semaine, un mois ou deux. ». Je ne veux plus de délai incertain. De toute façon, le calendrier que j’ai échafaudé dans ma tête n’est pas très précis et m’est d’ailleurs inutile. Peut-être aurais-je dû graver des petits bâtons pour chaque jour passé ici.
Les heures de « parloir » me rappellent aussi ma vie d’avant. L’ironie du sort veut que, jusqu’à ce jour fatidique, je trouvais mon existence morne, insignifiante, terne et j’ai plusieurs fois pensé à y mettre un terme sans en avoir les tripes. Comme elle me semble si belle maintenant et comme je la regrette. On ne connaît réellement notre richesse que le jour où elle disparaît.
Heureusement, il y a les périodes d’inconscience où mes rêves m’emmènent derrière ses murs. Dans mes songes, je suis libre, je cours, j’aime, je bosse et je deviens enfin quelqu’un, un homme dont sa mère est fière. Mais il y a aussi les cauchemars où je m’entends condamné à passer le reste de mes jours dans cette prison. La sentence tombe comme le couperet d’une guillotine en face de la Bastille. Mon réveil est alors encore plus douloureux que les autres jours et je me languis que le soleil se couche pour m’offrir un autre sommeil que je souhaite calme et réparateur.
Que faire maintenant ? À part attendre. J’ai perdu les clés de ma destinée qui se dessine désormais dans un brouillard artistique, fait d’obstacles et de murs qui me semblent infranchissables, comme ceux qui m’entourent et me retiennent prisonnier. Mon lit est devenu mon unique espace personnel. C’est mon territoire, le seul qui me reste à défendre mais avec quelles armes ?
Nombreux autres avant moi ont baissé les bras et se sont rendus. Mais je ne veux pas faire partie de ceux-là. Je n’ai pas envie que le prêtre qui officiera à mes obsèques doivent dire à mes proches : « Le courage lui a manqué et il a préféré nous quitter. ». C’est inconcevable. Malgré les apparences, je suis devenu plus fort. Cette épreuve m’a forgé l’Esprit et l’a affûté comme une épée. Voilà mon arme ! La bataille en vaut-elle la chandelle ? Peu importe ! Je suis prêt à en découdre avec le premier venu. J’ai eu le temps du repos et j’épargne mon énergie pour le jour où le gant sera jeté.
Les autres combattants mettent en place des plans d’évasion à coups de cogitations profondes, observations minutieuses des habitudes de la maison, de matériel bidouillé et de complices. Je n’ai rien de tout cela mais je ne perds pas espoir. C’est tout ce qui me reste et me tient vivant ! L’espoir, celui qui s’est échappé de la boîte de Pandore après que tous les maux de la Terre se soient répandus sur les humains, jouissant d’une existence trop parfaite jusqu’alors. Il est symbolisé par un petit papillon blanc. Je l’imagine chaque jour se posant sur mon épaule à mon réveil. Ses petits coups d’aile apaisent ma douleur et sèchent mes larmes qui ne parviennent plus à couler.
Pour passer le temps, je tente aussi de me rappeler ce qui s’est passé ce jour-là, ce qui m’a amené à arriver ici, dans cet enfer de solitude. Des brides de souvenirs tentent de remonter comme des hauts-le-cœurs, douloureux mais imprécis. C’est mon entourage qui me raconte : une voiture qui fonce, un choc terrible et une fuite.
Fuir n’est pas la solution dans la vie. Il faut apprendre à faire face à ses succès mais aussi ses erreurs, ses fautes, celles qui causent du tort à autrui, jusqu’à la mort de ce dernier parfois. La fuite est un geste vil, lâche, infantile. Celui qui fuit est deux fois plus coupable que celui qui assume devant ses juges. De toute façon, il est trop tard maintenant pour fuir.
Et voilà pourquoi je suis ici, prisonnier, impuissant, enchaîné, inerte à l’extérieur mais bouillonnant à l’intérieur. Des milliers de questions m’assaillent jour et nuit.
Qui viendra me libérer de ces chaînes qui m’étreignent ? Sont-ce les recherches de ce spécialiste allemand sur les traumatismes crâniens ? Est-ce ce nouveau médicament provenant des Etats-Unis ? Ou alors est-ce le temps qui passe et la capacité que possède notre corps de se reconstruire ? Ou encore est-ce uniquement mon Esprit qui pourra me faire à nouveau ouvrir les yeux et adresser la parole à mes proches ?
Je ne sais pas alors j’attends comme un condamné à mort attend la grâce présidentielle. Ma prison, c’est mon corps. Mes murs, mes paupières fermées. Mon espoir, la guérison ! Condamné pour n’avoir commis aucun crime. J’étais un piéton et un chauffard m’a renversé avant de s’enfuir lâchement. Mais le destin a voulu qu’il soit rattrapé et enfermé. Même dans une cellule miteuse, il a plus de libertés que moi. Son corps répond toujours à ses sollicitations. Ses jambes le portent, ses mains peuvent encore caresser, sa voix lui permet d’exprimer sa peur, son amour. Si les progrès de la science avaient été suffisants, il faudrait juste échanger nos deux âmes afin que le coupable connaisse la prison, la vraie ! Que Justice soit faite !

Posté le : 08/05/2016 09:21
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Re: Défi du 8 mai
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Ma petite Sibérie


Je ne sais plus depuis combien de temps je suis dans ce camp d’internement. Les journées se suivent et se ressemblent malheureusement trop, entre promenades dans la cour froide et inhumaine, longues séances de prière silencieuse et travaux manuels à l’atelier de confection.

Personne ne sait réellement où nous sommes. Nos gardiens parlent le français avec un petit accent indéfinissable. D’aucuns les supposent allemands, venus de la Prusse Orientale, d’autres les déclarent russes, toutes les théories convergeant vers une origine européenne. « Qu’est-ce que ça change ? » leur ai-je dit un jour, énervé par ces conjectures incessantes. Il y avait de quoi sortir de ses gonds, à force d’entendre des experts autoproclamés, des cadors de la linguistique, détecter des intonations moscovites, des notes berlinoises ou des formules viennoises à des ordres saccadés émis par des brutes épaisses. Des gardiens restent des tueurs de libertés, quelle que soit leur lieu de naissance, la couleur des prés où ils ont couru enfant et le nom de leur divinité locale.

Mes compagnons de chaîne ont dénommé cet endroit « la Sibérie mentale ». Nous avons tous en commun d’avoir désobéi, transgressé les règles de communauté décidée par une caste de hauts fonctionnaires. Parfois je regrette mon attitude passée, quand je défilais dans la rue pour une école ambitieuse, contre le nivellement de l’éducation et l’uniformisation de la pensée. Qui étais-je pour remettre en question des décisions prises au sommet de la pyramide, soumises au vote des parlementaires et orchestrées par un gouvernement d’union nationale ? Je croyais naïvement en la désobéissance civile, une forme pacifique de résistance, dans le but d’infléchir des politiques de masse, de montrer au pouvoir en place une voie alternative, de donner au peuple un semblant de responsabilités. Les autorités avaient alors vite remédié au problème, en créant des commissions de salubrité publique où siégeaient les bons citoyens pour juger de l’iniquité des mauvais. « Dura lex sed lex ! » m’avait ainsi déclamé un juré, boucher de son état devenu latiniste en cinq minutes grâce à la magie des formules prémâchées fournies par le Ministère de la Citoyenneté.

Je me souviens de mon arrivée ici. Un comité lambda m’avait condamné à une peine de redressement d’une durée de cinq ans incompressibles. J’avais à peine pu dire au-revoir à mes parents, à mes amis et à ma fiancée avant de recevoir la piqure d’incarcération, le sésame pour un sommeil profond, une stase préalable à l’internement. A mon réveil, j’avais maigri d’une dizaine de kilos, perdu mes beaux cheveux blonds et une partie de mes illusions. Les autres infortunés du cru n’affichaient pas une meilleure mine. Certains d’entre-eux ressemblaient même à des zombies, des morts-vivants en sursis. Pourtant, je sentais déjà une formidable solidarité entre tous, comme si les réfractaires au système officiel étaient devenus frères dès leur premier pavé jeté à la face de l’autorité. Du grand bourgeois élitiste comme moi au militant anticapitaliste en passant par l’écologiste engagé, ils formaient une confrérie hétéroclite mais efficace. Il fallait les mater.

Aujourd’hui, le constat est sans appel : tous préfèrent mourir à se soumettre. Même moi. Pourtant, révolutionnaire de pacotille, penseur de salon, j’ai eu du mal au début. Oublier mon petit confort du passé, mon statut de cadre supérieur, mes avantages sociaux, n’a pas été facile. Néanmoins, je m’y suis fait. Manger des navets, dormir dans un lit de bois, coudre des morceaux de tissu et marcher dans le froid sont devenus mon nouveau style de vie. La sobriété a remplacé le superflu. En cela, le camp d’internement a réussi, aux yeux des moralistes: nous vivons comme le reste de la population, heureux de notre statut de survivant. Du moins sur le papier. Parce que dans les faits, nous restons des combattants, des insoumis, des réfractaires à la rigueur imposée par l’Etat et au « ça me suffit » accepté par la majorité silencieuse. Nous ne sommes pas des cerveaux disponibles à des messages consuméristes, à une morale de bénitier, à des valeurs rabougries. Nos discussions sont riches de réflexion, chacun apportant ses acquis à l’autre, une véritable école entre des barreaux métalliques et des murs infranchissables.

C’est l’heure de la prière. Je ne sais pas d’où vient cette tradition. Un détenu l’a une fois définie comme la première concession des socialistes aux conservateurs lors de leurs fiançailles obligées pour l’union nationale. Ils étaient censés combattre la menace fasciste, les cohortes d’extrémistes et les opposants à la propriété. Les roses ne voulaient pas lâcher leurs principes d’égalité, quitte à l’obtenir par le bas, tandis que les bleus s’accrochaient à leur goupillon. « Dieu n’a ni odeur ni couleur » me disait ma grand-mère quand j’étais petit. Les roses et les bleus avaient du entendre ce principe avant de décider d’une prière silencieuse, entre douze heures trente et quatorze heures, pour quatre-vingt millions de Français, sous toutes les latitudes, sept jours sur sept. Nul ne pouvait déroger à la règle, une pure obligation. Même et surtout pas nous, les iniques, les galeux, la peste sociale contingentée dans une éprouvette carcérale à des fins de rééducation.

« Mon Père qui êtes aux cieux, faites que je survive à cette merde, que je revienne dans un monde sans les bleus et les roses, les jurés et les délateurs. » dis-je silencieusement en guise d’incantation à l’exercice journalier de génuflexion religieuse. C’est un vœu pieux je le sais mais si je ne peux pas rêver d’un futur en couleurs, je ne vois pas pourquoi je m’éreinte chaque jour à garder entière ma carcasse et à veiller sur mes voisins de dortoir. Même mentale, ma Sibérie n’est pas illimitée. Seule ma volonté peut en briser les limites, en outrepasser les frontières. C’est ce que j’ai décidé. Comme les autres condamnés, envers et contre nos gardiens.

Posté le : 08/05/2016 11:15
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Re: Défi du 8 mai
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Quel témoignage de ces gens murés dans leur solitude physique par le fait de l’inconscience d'un autre.

La lecture est émouvante et rappelle le prix, dont on n'a que rarement conscience, dune bonne santé.


Il est dit que la santé est l'unité qui fait valoir tous les zéros de la vie. Ton remarquable texte le démontre, oh combien.

merci Delphine, pour ce généreux instant de réflexion, dans ce défi proposé,

Bonne journée

Serge.

Posté le : 08/05/2016 11:32
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Titi
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Re: Défi du 8 mai
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Mon Titi,

Tu es tout pardonné. Il est vrai qu'il est difficile de repousser les belles qui se pâment devant la beauté de ton corps et rêvent de partager ta couche. Point besoin de Meetic, tes vers ont suffi à me conquérir... le coeur et l'âme.


Mon beau Serge je t'embrasse et jalouse Mme Titi qui j'espère te lit !

Couscous

Posté le : 08/05/2016 15:30
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Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
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Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
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