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La Malibran (cantatrice, Diva)
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Le 24 Mars 1808 naît à Paris, La Malibran


La Malibran … un nom mythique, peut-être même la première Diva.
Une personnalité hors du commun, une mort prématurée, une vie romanesque…
et par dessus tout une voix adulée par les plus grands compositeurs de son temps !
Sublime voix de légende, La Malibran aura aussi marqué son temps par sa liberté. Sportive, cultivée, ardente contemptrice de la censure, elle est avec La Pasta, de dix ans son aînée, la première Diva, personnage mythique dont le rayonnement dépasse largement le cercle fermé de l’opéra.

Sa vie
María-Felicia García, plus connue sous le nom de Maria Malibran, du nom de son premier mari, surnommée la Malibran, est une célèbre mezzo-soprano d'origine espagnole.
María de la Felicídad García, future Maria Malibran, naquit la nuit du 24 mars 1808 à Paris, au numéro 3 de la rue Condé.
Elle était la fille du ténor espagnol Manuel Garcia, né à Séville en 1775, et de l’espagnole Maria Joaquina Sitches, née à Barcelone en 1780.
Elle a pour sœur Pauline, future Pauline Viardot, de 13 ans sa cadette.
Son père lui impose un enseignement terrifiant, tant par son rythme que par son exigence : Maria ne doit manger que ce qui est bon pour sa voix, il lui interdit de se promener, de faire la grasse matinée, d'aller rire et s'amuser avec d'autres filles de son âge -elle se doit déjà corps et âme au chant-1, et la pousse sur scène dès l'âge de six ans.
Les trois premières années de Maria se déroulent paisiblement dans un foyer "uni et aisé" ; son père rayonne autant sur scène, au Théâtre des Italiens, que dans les salons mondains, tandis que Maria fait ses premiers pas au jardin du Luxembourg et qu’un peu plus tard, sa mère lui apprend à lire, écrire, et compter.
En 1811, la famille Garcia déménage à Naples, où le père de Maria a été appelé par le roi Joachim Murat qui vient de le nommer maître de sa chapelle privée après l’avoir écouté au San Carlo. Avant le départ, Manuel remporte un dernier succès dans la capitale française, à l’occasion des festivités données en l’honneur de la naissance de l’Aiglon, fils de Napoléon et de Marie-Louise d’Autriche.
La famille Garcia passe quatre années à Naples, "totalement rythmées par la musique" ; Manuel Garcia et sa femme Maria se produisent régulièrement au San Carlo, tandis que leurs deux premiers enfants, Manuel Garcia fils ainsi que Maria, apprennent le solfège et la musique avec le pianiste Hérold et le compositeur Panseron.
Maria impressionne beaucoup Hérold qui écrit dans ses Mémoires : "Depuis Mozart, on n'a jamais vu de vocation si énergiquement prononcée pour la musique."
En 1813, Maria, alors âgée de cinq ans, fait ses premiers pas sur scène en jouant un rôle secondaire dans L’Agnese (Agnès), de Ferdinando Paër, qui consiste à apporter une lettre à son père lorsqu’il chante avec la soprano.
Mais, lors d’une représentation, la chanteuse est indisposée au moment même où elle doit chanter son grand air. Maria est alors appelée pour la remplacer.
Lorsqu’elle a fini sa prestation, elle annonce : "Ho cantato come un cane, non voglio cantare più ! " " J’ai chanté comme un chien, je ne veux pas chanter davantage !"
À Naples, Manuel Garcia fait également la connaissance de personnages importants, dont le ténor âgé Giovanni Ansani, avec lequel Manuel perfectionne son chant, et Rossini, alors à ses débuts, et avec qui Manuel Garcia et Maria resteront amis à vie.
En 1815, c’est la chute de l’Empire français, suivie de celle des Murat.
Les Bourbons reprennent possession du trône de Naples.
Les Murat détrônés, l’engagement de Garcia ne tient plus. Il s’en va donc avec sa famille et Rossini à Rome.
L’hiver de cette même année, à la demande du duc de Sforza-Cesarini, Rossini compose Le Barbier de Séville.
Le rôle du comte Almaviva est attribué à Manuel Garcia tandis que celui de Figaro est confié à Zamboni, les deux chanteurs vont marquer leurs rôles de leur empreinte, mais Rossini fut surtout impressionné par Garcia dont il écrit : "C'est le meilleur ténor que je connaisse, je le préfère à tous les ténors italiens. "
À cause d’une cabale, la première est un échec, mais les représentations suivantes deviennent vite des triomphes.
En 1816, la famille Garcia revient à Paris, où Manuel ouvre une école de chant au Palais-Royal. Sa notoriété et sa technique infaillible lui attirent de nombreux élèves qui feront de grandes carrières, tels la haute-contre Adolphe Nourrit, la soprano Méric-Lalande, Rimbault ainsi que Favelli.
Il fait également la formation vocale de Maria, mais la voix de sa fille est rebelle. Le père et la fille ont tous les deux un caractère fort, aussi les leçons tournent-elles la plupart du temps au conflit.
En 1824, les Garcia partent pour Londres, où le père de Maria a été engagé pour chanter les opéras de Rossini au King’s Theater, engagement qu’il prend avec d’autant plus d’intérêt, que deux nouveaux ténors, Donzelli et Rubini, commencent à lui faire de l’ombre à Paris.
Dans la capitale britannique, Garcia connait à nouveau le triomphe et brille dans les salons de l’aristocratie anglaise, dont il devient la coqueluche, et où il en profite pour introduire Maria, à laquelle, le 28 juillet 1824, il fait chanter le rondo final de Cendrillon, un duo de Mathilde de Brabant, et, aux côtés de Giuditta Pasta, Isabella Colbran, et lui-même, une cantate composée en l’honneur de Lord Byron, qui vient de décéder.
Ce n’est pas un grand début, certes, mais le public est enthousiasmé par la voix, le charme, et la beauté de Maria, qui n'est pas encore Malibran.
Le grand lancement de Maria Garcia a lieu en 1825.
Le 7 juin de cette année-là, Giambattista Velluti, le dernier des grands castrats, se produit au King’s Theater.
Parmi les œuvres interprétées, figure le duo de Roméo et Juliette, de Zingarelli ; mais aucune soprano ne veut se mesurer à la voix et la ligne vocale sans failles du chanteur. Le directeur du théâtre, John Ebers, cherche alors une voix capable de relever le défi, et demande l’aide de Garcia, qui propose sa fille de dix-sept ans.
Le directeur accepte. Le soir de la représentation arrive, et Velluti lance son fameux "canto fiorito" - art d‘enjoliver la partition en ajoutant plus de nuances, de modulations, de vocalises et d’effets de rythme que Velluti possédait à un très haut degré, et qui a fait sa célébrité.
Lorsque vient le tour de Maria pour chanter, celle-ci ajoute encore plus de fioritures que le chanteur. Le public lui fait une telle ovation qu’en sortant de scène, Velluti, jaloux, lui pince le bras avec véhémence, en l’insultant de bricona ("coquine ").
Voyant le grand succès de Maria, John Ebers l’engage pour chanter Rosine du Barbier de Séville.
Ce rôle, dans lequel elle débute à partir du 25 juin de cette même année, et qu’elle chante pendant six semaines, lui permet de connaître un grand succès qui s’amplifie au fur et à mesure des représentations. Il croît encore plus lorsque Maria chante, avec la troupe de son père, Il Crociato en Egitto (Le Croisé en Égypte) de Meyerbeer dans le rôle de Felicia à Londres, Manchester, et Liverpool.
Installation à New York et mariage avec Eugène Malibran[modifier]
À Liverpool, le 1er octobre 1825, la famille Garcia et sa troupe embarquent dans un brick de la Black Ball Company en partance pour New York, désirant faire découvrir l‘opéra aux Américains. Ils y arrivent le 6 novembre et s‘installent dans un hôtel qui leur a été réservé par le directeur du Park Theater, Stephen Price, qui, avec le librettiste de Mozart, Lorenzo Da Ponte, et le milliardaire Dominick Lynch, grand amateur d’opéra et importateur de vins français, est à l’origine de ce voyage.
Le 29 novembre 1825, la troupe représente "Le Barbier de Séville".
C’est un triomphe. La troupe amasse une recette de trois mille dollars. Somme très élevée pour l’époque. Les mois suivants la troupe joue successivement à New York : Tancrède, Othello, Cendrillon et Le Turc en Italie de Rossini, Roméo et Juliette de Zingarelli, ainsi que deux opéras de Garcia, L’Amante Têtue, et La Fille de l’air, et pour finir Don Giovanni de Mozart, le 23 mai 1826. Tous furent accueillis avec enthousiasme.
Ils attirent tant de monde que la municipalité de New York doit adopter la réglementation du stationnement, comme en témoigne cette information publiée dans la presse lorsque Garcia choisit le City Hotel pour ses représentations :
"Toutes les voitures qui viendront au City Hotel devront se ranger avec la tête des chevaux tournées vers Broadway, et quand elles viendront chercher leurs occupants, elles devront se placer du côté de la rue opposée à l’hôtel. Il sera interdit à tout véhicule de s’approcher de la porte avant d’avoir été appelé par les personnes qui l’attendent. Une police efficace sera engagée pour respecter ces dispositions."
La beauté de Maria séduit beaucoup à New York. Le premier homme à la courtiser est le poète Fit-Greene Halleck, qui avec son ami l’écrivain Fenimore Cooper, faisait partie du public de la première du Barbier de Séville. Mais le père de Maria ne l’apprécie pas et voyant que Maria n’est pas insensible au charme du poète, le somme d’arrêter ses avances.
Puis vient Eugène Malibran. Il fait sa cour avec respect, et n’oublie jamais, à chacune de ses visites, " d’apporter des fleurs, des chocolats, et autres friandises. "
Au bout de quatre mois, Maria est conquise, et veut se marier avec lui. Au début ses parents refusent, puis, après quelques disputes, son père finit par accepter. Il est d’autant plus d'accord que Malibran offre de lui verser en deux fois la somme de cent mille francs pour épouser sa fille.
On ne sait si Maria eu vent de cette " transaction". Le mariage est célébré le jeudi 26 mars 1826.
Avec son époux, Maria s’initie au sport. Il lui apprend à nager, et à monter à cheval. L’équitation va d’ailleurs devenir sa seconde passion après le chant.
Le couple se promène à la campagne, ou galope au bord de l’océan. Mais très vite, cette vie commence à lasser Maria.
La scène lui manque. De plus, les affaires de son mari vont très mal, il est au bord de la faillite. Maria tente de remonter ses finances en créant une troupe qui se produit sur la scène du Bowery Theater.
Cette fois, elle abandonne le répertoire italien et choisit de jouer les comédies légères françaises et anglaises, plus faciles à monter. Le succès est immense. Maria l’entretient en chantant dans les églises le dimanche. Maria est bientôt engagée à Philadelphie. Malheureusement, son mari est à nouveau en faillite.
Le couple finit par se séparer, et Maria revient en Europe au début du mois de novembre. La traversée se révélera très mouvementée, une forte tempête se déchaînera et elle souffrira du mal de mer.
On rapporte que le navire perdit son mât. Maria débarquera au Havre le 28 novembre.

Retour à Paris

Elle fait son retour sur la scène parisienne durant l’hiver 1828, lors d’un concert de charité, à la salle du conservatoire de la rue Bleue. C'est un succès. Elle s’installe, au numéro 23 de la rue Neuve-Saint-Eustache, chez ses deux belles-sœurs, avec lesquelles elle devient amie. Mais celles-ci la surveillent pour le compte de leur frère, le mari de Maria. Le découvrant, elle écrira à son mari : " Si j’avais des dispositions à être mauvaise ou à me laisser entraîner par la séduction, tu serais là, le Père éternel y serait aussi que cela ne ferait rien ! Je ne veux que ce qui est bien. Quand bien même les anges du ciel viendraient me tenter, je résisterais comme saint Antoine."
Avec l’aide du comédien Nicolas Bouilly, relation de son père grâce auquel elle a pu chanter au conservatoire de la rue Bleue, elle donne des concerts de charité qui la font connaître, et où elle connaît continuellement le succès.
Par la suite, elle se produit au salon de son amie Mercedes, désormais comtesse Merlin, puisque mariée au général comte Christophe Merlin. Le salon, situé rue de Bondy, est alors un des plus renommés de Paris.
Il est fréquenté par des artistes tels que George Sand, Balzac, Mérimée, ou Rossini. Elle est ensuite invitée à chanter chez la duchesse de Berry, aux Tuileries.
Le 14 janvier 1828, elle chante à l’Opéra, pour le bénéfice du chanteur Galli. Elle y interprète un acte de Sémiramis, en duo avec la contralto Benedetta Pisaroni, puis un acte de Roméo et Juliette, avec Hariett Smithson, et finit avec la soprano allemande Henriette Sontag.
Le public l’ovationne, et l’Opéra lui propose un autre engagement, qu’elle refuse, parce qu’elle n’aime pas le grand opéra français, et le Théâtre Italien lui fait une autre proposition qu‘elle acceptera, avec un cachet de soixante-quinze mille francs pour sa nouvelle saison. Son frère Manuel rejoint lui aussi la troupe du Théâtre Italien, ce qui leur permet de chanter ensemble. Elle débute la saison dans le rôle-titre de Sémiramis.
C’est un grand succès populaire. Elle rencontre le même succès dans Othello, La Cenerentola, et Roméo et Juliette. Elle prend ensuite trois mois de vacances chez son amie, la comtesse de Sparre au château de Brizay, en Touraine. La comtesse lui conseille de ne plus loger chez ses belles-sœurs.
En effet, après l’avoir bien accueillie, elles lui lancent souvent des piques. Dès son retour à Paris, elle va loger rue d’Artois, chez Madame Nardi, qui, bientôt, gère ses contrats. Maria revient au Théâtre des Italiens.
En 1829, elle fait une tournée à Londres, puis à Bruxelles. Le 20 août, au château de Chimay, elle rencontre Charles-Auguste de Bériot, premier violoniste du roi de Hollande.
Immédiatement, elle éprouve pour lui un amour qui est réciproque.
Le 2 juin 1832, le père de Maria meurt.
Toute l'année, elle est en tournée à Rome et à Naples.
Le 12 février 1833, à Paris, elle donne naissance à Charles-Wilfrid de Bériot. En juin, elle est en tournée à Londres, où elle se lie d’amitié avec Vincenzo Bellini. En 1834, la Malibran fait un tour de chant dans les grandes villes d'Italie : Bologne, Milan et Florence. L'année suivante, elle fait une autre tournée italienne, à Venise et Naples, où elle apprend l'annulation de son mariage avec Eugène Malibran.
Elle poursuit sa tournée par Londres, avant de revenir à Milan.
En 1836, elle fait un séjour parisien durant lequel elle épouse le 29 mars Charles-Auguste de Bériot, le père de son fils, Charles Wilfrid de Bériot, puis fait une tournée en Angleterre.
À nouveau enceinte de quelques mois pendant l'été 1836, elle monte à cheval, comme chaque matin, fait une chute, mais refuse de se soigner et tente encore d'honorer son public sur scène.

Mort

Le 23 Septembre 1836 , après quelques jours de coma, elle meurt à Manchester des suites de cet accident, qui avait provoqué la formation d'un caillot de sang au cerveau.
Bériot fait rapatrier son corps à Bruxelles et lui fait construire un imposant mausolée dans le cimetière de Laeken.
Fantasque mais géniale et généreuse, elle illustre un dévouement héroïque à son public, allant jusqu'au sacrifice suprême.
Elle laisse un souvenir ébloui à tous ses admirateurs.

Alfred de Musset lui a dédié des stances bouleversées dont celle-ci :
« O Ninette ! où sont-ils, belle muse adorée,
Ces accents pleins d'amour, de charme et de terreur,
Qui voltigeaient le soir sur ta lèvre inspirée,
Comme un parfum léger sur l'aubépine en fleur ?
Où vibre maintenant cette voix éplorée,
Cette harpe vivante attachée à ton cœur ? »
Sur sa tombe, on peut lire ce quatrain de Lamartine :
Beauté, génie, amour furent son nom de femme,
Écrit dans son regard, dans son cœur, dans sa voix.
Sous trois formes au ciel appartenait cette âme.
Pleurez, terre ! Et vous, cieux, accueillez-la trois fois !

Voix

La voix de la Malibran est décrite à la fois "ample, avec des variations dynamiques importantes , "sombre, chaude, et ronde".
Castil-Blaze ajoute qu'elle est "vibrante, pleine d'éclat et de vigueur".
S'il revendique qu'elle ne perd " jamais ce timbre flatteur, ce velouté qui lui donnaient tant de séduction dans les morceaux tendres ou passionnés ", d'autres ont évoqué des sons "durs" et “effondrés”, " quelques notes creuses" dans le médium et un aigu instable dans ses notes les plus hautes, et" un peu voilé ".
Sa maîtrise de la colorature est réputée " époustouflante ".
Elle était d'un si haut niveau qu'elle a exécuté un trille sur "la note extrême du registre de soprano ".
Castil-Blaze témoigne : "Vivacité, justesse, audace dans l'attaque, gammes chromatiques ascendantes, de quinzième, arpèges, traits éblouissants de force, de grâce ou de coquetterie, tout ce que l'art peut faire acquérir, elle le possédait".
Sa perfection technique, la cantatrice l'obtint grâce à la formation que lui prodigua son père.
Parlant de sa voix au début de cette formation, sa sœur Pauline Viardot, la décrit : "faible, d'un registre étroit, dont les tons aigus étaient durs et le médium voilé".
Elle ajoute : "la lutte constante qu'elle avait à soutenir contre son organe imparfait et rebelle était tellement pénible que, parfois, le découragement l'envahissait. Et c'est ainsi qu'elle acquit le don assez rare de savoir pleurer en chantant".
Elle maintenait sa voix dans les meilleures conditions possibles grâce à une volonté de fer et un travail vocal sans relâche. Ernest Legouvé, son premier biographe, raconte à ce sujet : "Je l'ai entendue, à Rome, un jour où elle devait jouer le Barbier de Séville, travailler pendant plusieurs heures les traits de sa cavatine, et de temps en temps, elle s'interrompait pour interpeller sa voix en lui disant : “Je te forcerai bien à m'obéir !” La lutte était donc chez elle un besoin, une habitude qui prêtait un caractère puissant et original à son talent".
La tessiture de Maria Malibran s'étendait du sol au contre-mi, et son étendue extrême partait du ré, ce qui lui a permis d'interpréter le rôle-titre d'Othello et monter la gamme jusqu'au fa en altissimo – atteint lors d'échauffements vocaux et une interprétation privée de Exsultate, Jubilate de Mozart.


Spectacle

En effet, Maria Malibran possédait d’extraordinaires dons dramatiques, une gestuelle d’une hardiesse inouïe et un chant presque « expressionniste » pour l’époque. C’est dans le rôle de Desdemona qu’elle obtint ses plus grands succès grâce à une interprétation spontanée et extravertie du personnage. La critique décrit une version inédite de l’héroïne, extrêmement émouvante dans ce rôle passionné de jeune femme désespérée. Sa fougue, sa passion, ses élans de génie remuèrent les cœurs et mirent les auditeurs du Théâtre-Italien en pleurs. Elle avait ainsi profondément marqué les esprits dans ce rôle où, selon Alfred de Musset, « elle s’abandonnait à tous les mouvements, à tous les gestes, à tous les moyens possibles de rendre sa pensée : elle riait, elle pleurait, se frappait le front, se décoiffait ; tout cela sans songer au parterre ; mais, du moins, elle était vraie. Ces pleurs, ces rires, ces cheveux déroulés, étaient à elle, et ce n’était pas pour imiter telle ou telle actrice qu’elle se jetait par terre dans Otello ».

Interprétation


Maria Malibran incarne l’essence de la diva romantique. C’est sous la Restauration puis la monarchie de Juillet, dans une atmosphère de spectacles fiévreuse et enthousiaste, que se situe la source de ce mythe qui, en l’espace de dix ans, se développera et connaîtra même un véritable apogée. Les Parisiens d’alors eurent en effet la chance d’en vivre les prémices, la naissance et déjà l’apothéose. Ce qui n’était que perfection auparavant allait devenir sublimation avec la nouvelle génération d’artistes que le Théâtre-Italien devait offrir aux Parisiens autour de 1830. C’est avec ces nouvelles cantatrices, et en particulier Maria Malibran, que s’affirmera le terme italien diva, composante du nouveau lexique importé de la mère patrie du bel canto, l’Italie. Le culte de la diva impose des critères de charisme et de beauté auxquels les artistes précédentes n’avaient pas eu à répondre. Le public parisien découvre à cette époque un nouveau genre de cantatrice, dotée d’un physique agréable, de ressources vocales exceptionnelles et d’un talent de tragédienne affirmé. On retrouve dans le personnage de Consuelo, du roman de George Sand (1854), une large part de l’imaginaire romantique de la diva.

Les circonstances dans lesquelles Maria Malibran mourut ont également nourri le mythe de cette cantatrice fascinante, premier modèle de l’artiste romantique qui s’est sacrifiée sur les planches. En 1836 – elle avait alors vingt-huit ans –, elle tomba de cheval, mais, occultant sa douleur, elle réussit à chanter le soir de sa terrible chute. Engagée au festival de Manchester, elle s’y rendit malgré ses souffrances et agonisa pendant neuf jours tout en continuant à se produire en concert avant d’expirer. Cette mort plongea le monde des mélomanes dans la consternation et inspira à Musset ses célèbres Stances à la Malibran.

Le modèle interprétatif de la Malibran, sur le plan théâtral comme vocal, a pleinement contribué à une vraie réforme de l’opéra. Elle substitua au néoclassicisme impérial des premiers chanteurs du XIXe siècle une esthétique neuve, adhérant au sentiment enflammé du temps. De par l’ampleur de son répertoire et l’impact qu’elle eut sur sa génération, on peut dire qu’elle fut l’une des premières divas de l’histoire de la musique.


Films


Le réalisateur Michel Jakar lui a consacré un film en 1984 : Maria Malibran
le réalisateur Werner Schroeter a tourné La Mort de Maria Malibran
Le réalisateur Sacha Guitry lui a consacré un film en 1943 : La Malibran
Spectacles et enregistrement.

La cantatrice Cécilia Bartoli lui a consacré un spectacle en 2008 pour le bicentenaire de sa naissance
: Maria (cf. le DVD Maria : the Barcelona Concert ; Malibran rediscovered, the romantic revolution, Michael Sturminger, réal. - Decca, 2008).

Généalogie
Manuel Garcia (Manuel del POPOLO RODRIGUEZ dit GARCIA) (1775-1832)
Chanteur - Compositeur - Chef d'orchestre
x Maria Joachina SITCHES dit BRIONES (1780-1864)


├──> Manuel Garcia Junior (1805-1906)
│ Chanteur - Compositeur - Professeur de chant
│ x Cécile Maria "Eugénie" MAYER (1814-1880)
│ dont postérité



├──> Maria Malibran (Maria Félicita GARCIA dite) (1808-1836)
│ x 1 Eugène MALIBRAN (1765- )
│ x 2 Charles-Auguste de Bériot (1802-1870)
│ │ Compositeur - Violoniste
│ │
│ ├──> Charles Wilfrid de Bériot (1833-1914)
│ Pianiste - Compositeur
│ Professeur à l'école Niedermeyer

├──> Pauline Viardot ( Pauline Michèle Ferdinande GARCIA dite) (1821-1910)
Cantatrice
x Louis Viardot (1800-1883)

├──> Louise Héritte-Viardot (1843-1918)
│ Compositrice - Pianiste - Cantatrice
│ x Ernest HERITTE


├──> Paul Viardot (1857- ) http://en.wikipedia.org/wiki/Paul_Viardot
│ Violoniste - Musicologue

├──> Marianne VIARDOT (1859- )
│ Peintre
│ se fiance avec Gabriel Fauré
│ x Victor Alphonse Duvernoy
│ Pianiste - Compositeur

├──> Claudie VIARDOT ( - )
x Georges Chamerot
Éditeur
dont postérité


Cecilia Bartoli a fait revivre La Malibran pour les Parisiens

(Pault Delort/Le Figaro)


La capitale a vécu hier une exceptionnelle journée musicale consacrée à la cantatrice décédée le 24 mars 1808, il y a tout juste deux cents ans.

Il y en avait hier à Paris pour toutes les bourses et pour tous les goûts. La Salle Pleyel offrait un film, trois concerts, une conférence et une étape gastronomique. Le parvis de l'Hôtel de ville permettait aux recalés, impécunieux ou refoulés, d'assister sur grand écran à la retransmission du concert donné par Cecilia Bartoli à Barcelone en novembre 2007 et qui vient de paraître en DVD chez Decca. Les amateurs de commémoration solennelle ont même eu droit à un rassemblement devant le 3 rue de Condé où la Malibran est née il y a deux siècles.

Un marathon comme on n'a en jamais connu de mémoire de mélomane, dû à l'opiniâtreté de Cecilia Bartoli dont l'hommage à la grande cantatrice était le projet personnel le plus abouti après la série de CD et de concerts qu'elle a consacrée depuis 1999 à Vivaldi, Gluck et Salieri, sans oublier sa séduisante évocation de la Rome du XVIIIe siècle, apogée des castrats en raison de l'interdiction faite aux femmes de chanter l'opéra.

Surprises et bonheurs

Ouverte à 9 heures Salle Pleyel, la journée aura réservé son lot de surprises et de bonheurs.
D'abord celui de revoir le film de Sacha Guitry, bien oublié, où la chanteuse est interprétée par Geori Boué. Cette œuvre a été tournée pendant la guerre et Jean Cocteau y joue Alfred de Musset, et Jacques Castelot, Lamartine.
Une curiosité qui montrait en tout cas l'intérêt que la chanteuse, décédée à 28 ans des suites d'une chute de cheval, a suscité à travers les époques.

On entrait dans le vif du sujet musical avec l'évocation du salon romantique de la Malibran.
Certes, il fallait un peu d'imagination pour ramener la scène de la Salle Pleyel aux dimensions d'un salon mondain. Vêtue d'une robe à traîne ornée de trois énormes fleurs, les bras nus dans un bustier lacé dans le dos, Cecilia Bartoli n'a pas ménagé sa peine malgré la longue journée qui l'attendait.
À ses côtés, le jeune pianiste chinois Lang Lang, nouvelle idole des salles de concert, montrait un délicat talent d'accompagnateur même si, livré à lui-même, il interprétait Liebestraum de Liszt avec une belle maîtrise technique et une non moins grande absence d'émotion.

En revanche Vadim Repin faisait étalage de toute sa science du violon, époustouflant virtuose dans les Variations de Paganini tirées d'un thème de Paisiello dans lesquelles il accompagnait la chanteuse. Les trois artistes se retrouvaient pour rendre hommage au violoniste Charles de Bériot compagnon de la Malibran et père de son enfant pour enchanter le public dans un air délicat et vocalement complexe. Un récital dans lequel Cecilia Bartoli faisait preuve de son habituelle générosité malgré l'heure matinale peu propice aux chanteurs.

Dans l'après-midi, entourée de ses complices de l'orchestre de l'Opéra de Zurich, elle donnait une version de concert de l'opéra de Rossini La Cenerentola où elle a pu faire admirer sa virtuosité vocale dans ce rôle qui contribua à la renommée de la Malibran.
Enfin, dans la soirée, Cecilia Bartoli devait retrouver Lang Lang et Vadim Repin et l'Orchestre philharmonique de Radio France sous la direction de Myung-Whun Chung pour un concert en forme d'apothéose dédiée à Mozart et Rossini, les deux compositeurs du début de sa carrière. Ses deux complices montraient leur talent et leur virtuosité dans deux morceaux de Chopin, Grande Polonaise brillante et de Paganini oncerto pour violon n° 2, faits pour enflammer le public.

Cecilia Bartoli raconte qu’elle a découvert La Malibran alors qu’elle commençait à chanter et s’est prise de passion pour cette femme hors du commun, que George Sand admirait. Elle s’est mise à collectionner des partitions et objets ayant appartenu à la diva.
C’est cette passion qui permet aujourd’hui au grand public de redécouvrir La Malibran, avec de nombreux évènements :


Le film "La Malibran"

La Malibran est un film français écrit et réalisé par Sacha Guitry en 1943, sorti en 1944.

Apprenant la mort prématurée de la célèbre cantatrice Maria Malibran (Geori Boué, de l'Opéra), son amie la comtesse Merlin (Suzy Prim) entreprend d'en retracer le fulgurant destin auprès de quelques intimes.
Sont ainsi évoqués la naissance de Marie, sa longue brouille avec son père, le ténor Garcia (Mario Podesta), son bref mariage avec le banquier Malibran (Sacha Guitry), ses amitiés avec La Fayette (Jacques Varennes), Lamartine (Jacques Castelot) et Alfred de Musset (Jean Cocteau), sa rencontre - prélude à une longue histoire d'amour - avec le virtuose Charles-Auguste de Bériot (Jacques Jansen), son enlèvement éclair par un vieil admirateur (Marcel Lévesque), sa réception à Naples, la chute de cheval qui lui fut fatale, son ultime récital à Manchester et la masterclass improvisée qu'elle devait trouver la force d'improviser pour une jeune voisine (Geneviève Guitry) avant de rendre elle-même sa dernière note.

Technique

Les crédits techniques et artistiques ci-dessous ont été établis après visionnage du film sur copie et dépouillement des archives de production :
Réalisation, scénario et dialogues : Sacha Guitry
Images : Fédote Bourgassof
Assistant-réalisateur : René Delacroix
Son : René Lécuyer
Musique : Louis Beydts
Montage : Alice Dumas
Décors : René Renoux et Henri Ménessier
Année de production : 1943

Distribution

Sacha Guitry : Eugène Malibran
Geori Boué : Marie Malibran
Suzy Prim : la comtesse Merlin
Mona Goya : Madame Garcia
Jacques Jansen : Charles de Bériot
Denis d'Inès : Berryer
Geneviève Guitry : la jeune voisine
Marcel Lévesque : le vieux mélomane
Jean Cocteau : Alfred de Musset
La petite Sylvie : Marie Malibran (enfant)
Mario Podesta : Manuel Garcia
Jean Weber : le roi de Naples
Jean Debucourt : l'ami de la comtesse Merlin
Jacques Varennes : le général de La Fayette
Jacques Castelot : Lamartine
Louis Arnoult : Vellutti
Madeleine Sibille : la cantatrice
Jeanne Fusier-Gir : la concierge
Renée Thorel : Mme de La Bouillerie
Henry Houry : Rossini
Jean Chaduc : Victor Hugo
Louis Beydts : le pianiste
Georges Spanelly : le directeur
Robert Favart : le ravisseur
André Carnège : le médecin
Géo Forster : un monsieur en coulisses
Jacques Butin
Henri Chauvet
Pierre Dux (rôle coupé au montage ?)
Hélène Flouest
Michel Marsay
Madame de Mazarin
Solange Varennes
Léon Walther


Alfred de MUSSET (1810-1857)
Stances A la Malibran


I

Sans doute il est trop tard pour parler encor d'elle ;
Depuis qu'elle n'est plus quinze jours sont passés,
Et dans ce pays-ci quinze jours, je le sais,
Font d'une mort récente une vieille nouvelle.
De quelque nom d'ailleurs que le regret s'appelle,
L'homme, par tout pays, en a bien vite assez.

II

Ô Maria-Felicia ! le peintre et le poète
Laissent, en expirant, d'immortels héritiers ;
Jamais l'affreuse nuit ne les prend tout entiers.
À défaut d'action, leur grande âme inquiète
De la mort et du temps entreprend la conquête,
Et, frappés dans la lutte, ils tombent en guerriers.

III

Celui-là sur l'airain a gravé sa pensée ;
Dans un rythme doré l'autre l'a cadencée ;
Du moment qu'on l'écoute, on lui devient ami.
Sur sa toile, en mourant, Raphaël l'a laissée,
Et, pour que le néant ne touche point à lui,
C'est assez d'un enfant sur sa mère endormi.

IV

Comme dans une lampe une flamme fidèle,
Au fond du Parthénon le marbre inhabité
Garde de Phidias la mémoire éternelle,
Et la jeune Vénus, fille de Praxitèle,
Sourit encor, debout dans sa divinité,
Aux siècles impuissants qu'a vaincus sa beauté.

V

Recevant d'âge en âge une nouvelle vie,
Ainsi s'en vont à Dieu les gloires d'autrefois ;
Ainsi le vaste écho de la voix du génie
Devient du genre humain l'universelle voix...
Et de toi, morte hier, de toi, pauvre Marie,
Au fond d'une chapelle il nous reste une croix !

VI

Une croix ! et l'oubli, la nuit et le silence !
Écoutez ! c'est le vent, c'est l'Océan immense ;
C'est un pêcheur qui chante au bord du grand chemin.
Et de tant de beauté, de gloire et d'espérance,
De tant d'accords si doux d'un instrument divin,
Pas un faible soupir, pas un écho lointain !

VII

Une croix ! et ton nom écrit sur une pierre,
Non pas même le tien, mais celui d'un époux,
Voilà ce qu'après toi tu laisses sur la terre ;
Et ceux qui t'iront voir à ta maison dernière,
N'y trouvant pas ce nom qui fut aimé de nous,
Ne sauront pour prier où poser les genoux.

VIII

Ô Ninette ! où sont-ils, belle muse adorée,
Ces accents pleins d'amour, de charme et de terreur,
Qui voltigeaient le soir sur ta lèvre inspirée,
Comme un parfum léger sur l'aubépine en fleur ?
Où vibre maintenant cette voix éplorée,
Cette harpe vivante attachée à ton coeur ?

IX

N'était-ce pas hier, fille joyeuse et folle,
Que ta verve railleuse animait Corilla,
Et que tu nous lançais avec la Rosina
La roulade amoureuse et l'oeillade espagnole ?
Ces pleurs sur tes bras nus, quand tu chantais le Saule,
N'était-ce pas hier, pâle Desdemona ?

X

N'était-ce pas hier qu'à la fleur de ton âge
Tu traversais l'Europe, une lyre à la main ;
Dans la mer, en riant, te jetant à la nage,
Chantant la tarentelle au ciel napolitain,
Coeur d'ange et de lion, libre oiseau de passage,
Espiègle enfant ce soir, sainte artiste demain ?

XI

N'était-ce pas hier qu'enivrée et bénie
Tu traînais à ton char un peuple transporté,
Et que Londre et Madrid, la France et l'Italie,
Apportaient à tes pieds cet or tant convoité,
Cet or deux fois sacré qui payait ton génie,
Et qu'à tes pieds souvent laissa ta charité ?

XII

Qu'as-tu fait pour mourir, ô noble créature,
Belle image de Dieu, qui donnais en chemin
Au riche un peu de joie, au malheureux du pain ?
Ah ! qui donc frappe ainsi dans la mère nature,
Et quel faucheur aveugle, affamé de pâture,
Sur les meilleurs de nous ose porter la main ?

XIII

Ne suffit-il donc pas à l'ange de ténèbres
Qu'à peine de ce temps il nous reste un grand nom ?
Que Géricault, Cuvier, Schiller, Goethe et Byron
Soient endormis d'hier sous les dalles funèbres,
Et que nous ayons vu tant d'autres morts célèbres
Dans l'abîme entr'ouvert suivre Napoléon ?

XIV

Nous faut-il perdre encor nos têtes les plus chères,
Et venir en pleurant leur fermer les paupières,
Dès qu'un rayon d'espoir a brillé dans leurs yeux ?
Le ciel de ses élus devient-il envieux ?
Ou faut-il croire, hélas ! ce que disaient nos pères,
Que lorsqu'on meurt si jeune on est aimé des dieux ?

XV

Ah ! combien, depuis peu, sont partis pleins de vie !
Sous les cyprès anciens que de saules nouveaux !
La cendre de Robert à peine refroidie,
Bellini tombe et meurt ! - Une lente agonie
Traîne Carrel sanglant à l'éternel repos.
Le seuil de notre siècle est pavé de tombeaux.

XVI

Que nous restera-t-il si l'ombre insatiable,
Dès que nous bâtissons, vient tout ensevelir ?
Nous qui sentons déjà le sol si variable,
Et, sur tant de débris, marchons vers l'avenir,
Si le vent, sous nos pas, balaye ainsi le sable,
De quel deuil le Seigneur veut-il donc nous vêtir ?

XVII

Hélas ! Marietta, tu nous restais encore.
Lorsque, sur le sillon, l'oiseau chante à l'aurore,
Le laboureur s'arrête, et, le front en sueur,
Aspire dans l'air pur un souffle de bonheur.
Ainsi nous consolait ta voix fraîche et sonore,
Et tes chants dans les cieux emportaient la douleur.

XVIII

Ce qu'il nous faut pleurer sur ta tombe hâtive,
Ce n'est pas l'art divin, ni ses savants secrets :
Quelque autre étudiera cet art que tu créais ;
C'est ton âme, Ninette, et ta grandeur naïve,
C'est cette voix du coeur qui seule au coeur arrive,
Que nul autre, après toi, ne nous rendra jamais.

XIX

Ah ! tu vivrais encor sans cette âme indomptable.
Ce fut là ton seul mal, et le secret fardeau
Sous lequel ton beau corps plia comme un roseau.
Il en soutint longtemps la lutte inexorable.
C'est le Dieu tout-puissant, c'est la Muse implacable
Qui dans ses bras en feu t'a portée au tombeau.

XX

Que ne l'étouffais-tu, cette flamme brûlante
Que ton sein palpitant ne pouvait contenir !
Tu vivrais, tu verrais te suivre et t'applaudir
De ce public blasé la foule indifférente,
Qui prodigue aujourd'hui sa faveur inconstante
À des gens dont pas un, certes, n'en doit mourir.

XXI

Connaissais-tu si peu l'ingratitude humaine ?
Quel rêve as-tu donc fait de te tuer pour eux ?
Quelques bouquets de fleurs te rendaient-ils si vaine,
Pour venir nous verser de vrais pleurs sur la scène,
Lorsque tant d'histrions et d'artistes fameux,
Couronnés mille fois, n'en ont pas dans les yeux ?

XXII

Que ne détournais-tu la tête pour sourire,
Comme on en use ici quand on feint d'être ému ?
Hélas ! on t'aimait tant, qu'on n'en aurait rien vu.
Quand tu chantais le Saule, au lieu de ce délire,
Que ne t'occupais-tu de bien porter ta lyre ?
La Pasta fait ainsi : que ne l'imitais-tu ?

XXIII

Ne savais-tu donc pas, comédienne imprudente,
Que ces cris insensés qui te sortaient du coeur
De ta joue amaigrie augmentaient la pâleur ?
Ne savais-tu donc pas que, sur ta tempe ardente,
Ta main de jour en jour se posait plus tremblante,
Et que c'est tenter Dieu que d'aimer la douleur ?

XXIV

Ne sentais-tu donc pas que ta belle jeunesse
De tes yeux fatigués s'écoulait en ruisseaux,
Et de ton noble coeur s'exhalait en sanglots ?
Quand de ceux qui t'aimaient tu voyais la tristesse,
Ne sentais-tu donc pas qu'une fatale ivresse
Berçait ta vie errante à ses derniers rameaux ?

XXV

Oui, oui, tu le savais, qu'au sortir du théâtre,
Un soir dans ton linceul il faudrait te coucher.
Lorsqu'on te rapportait plus froide que l'albâtre,
Lorsque le médecin, de ta veine bleuâtre,
Regardait goutte à goutte un sang noir s'épancher,
Tu savais quelle main venait de te toucher.

XXVI

Oui, oui, tu le savais, et que, dans cette vie,
Rien n'est bon que d'aimer, n'est vrai que de souffrir.
Chaque soir dans tes chants tu te sentais pâlir.
Tu connaissais le monde, et la foule, et l'envie,
Et, dans ce corps brisé concentrant ton génie,
Tu regardais aussi la Malibran mourir.

XXVII

Meurs donc ! ta mort est douce, et ta tâche est remplie.
Ce que l'homme ici-bas appelle le génie,
C'est le besoin d'aimer, hors de là tout est vain.
Et puisque tôt tard l'amour humain s'oublie,
Il est d'une grande âme et d'u heureux destin
D'expirer comme toi pour un amour divin !



A écouter

http://www.youtube.com/watch?v=0coO2I ... e&list=PL28F9DC697C33523C Hommage à la Malibran
http://youtu.be/EkUA5-Gs3uY Géori Boué la Malibran de Sacha Guitry
http://youtu.be/azrXuzjo2H8 musique de La Malibran


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Posté le : 24/03/2013 13:25
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Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
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