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Jorge Luis Borgès
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Le 24 Aout 1899 à Buenos-Aires en Argentine naît Jorge Luis Borges,

de son nom complet Jorge Francisco Isidoro Luis Borges Acevedo, écrivain argentin de langue espagnol, de prose et de poésie à Buenos Aires. Il reçoit le prix Cervantes en 1979 Ces Œuvres principales sont, Fictions 1944,, L'Aleph 1949, L'auteur et autres textes 1960, Le Livre de sable. Il meurt, à 86 ans à Genève en suisse le 14 juin 1986.
Ses travaux dans les champs de l'essai et de la nouvelle sont considérés comme des classiques de la littérature du XXe siècle.

En bref

Vagabond lettré, Borges se veut le flâneur qui s'adonne aux plus vastes déambulations livresques, dont « La Bibliothèque de Babel » est comme l'allégorie. Son œuvre suppose un prolifique mais jamais profus théâtre de variétés où le vernaculaire côtoie l'exotique, où les espions s'allient aux sinologues Le Jardin aux sentiers qui bifurquent et où les gangsters ourdissent des pièges cabalistiques La Mort et la boussole. Parce qu'il suppose les plus étranges ententes, le monde borgésien est fatalement basé sur le mélange. Dans cet érudit bric-à-brac, le va-et-vient entre culte du gaucho, théologie et orientalisme est de règle. L'œuvre de Borges est, comme toute facture littéraire, tractation et transmutation : une transaction géniale entre des textes disparates. Compromis basé sur l'hybridation, elle fait montre d'une exceptionnelle capacité additive. Alexandrine, elle présuppose la bibliothèque totale. Elle pâtit et elle profite d'une universalité périphérique, celle de l'« autre rivage » occidental constitué par Buenos Aires. Correspondant à une culture multicentrique, elle pratique le syncrétisme des sources hétéroclites et sous-entend la transculture babélique, faite de promiscuité migrante et polyglotte. Borges invente ainsi une appropriation unique de cette vaste et distincte matière transculturelle, un amalgame particulier de diverses sources, rehaussé par une composition si équilibrée et rigoureuse que tous les composants deviennent nécessaires, inéluctables.
Très tôt, Borges définit ces penchants, son modus operandi, qu'il précise dès le début dans ses écrits réflexifs et programmatiques. On trouve une déclaration prémonitoire, applicable à toute son œuvre, dans un essai de 1921 intitulé Apuntaciones criticas : la metáfora, Notes critiques : la métaphore où il affirme l'origine métaphorique – autrement dit, mythologique – de toute connaissance. Celle-ci devient métaphorique parce que tout système symbolique provient de la métaphore et peut donc s'imputer à la sphère mythique. Considérant l'intellection comme aussi fictive que l'imagination, Borges opte pour un traitement obstinément esthétique de tout savoir et fait de la théologie une branche de la littérature fantastique. Il dévie toute connaissance vers le littéraire, manipule librement les gnoses en les incorporant dans le récit, pour concevoir ses fictions déconcertantes.

Sa vie

Jorge Luis Borges est le fils de Jorge Guillermo Borges, avocat et professeur de psychologie féru de littérature et de Leonor Acevedo Suárez, à qui son époux a appris l'anglais et qui travaille comme traductrice. La famille de son père était pour partie espagnole, portugaise et anglaise ; celle de sa mère espagnole et vraisemblablement portugaise aussi. Chez lui, on parle aussi bien l'espagnol que l'anglais, et depuis sa plus tendre enfance. Borges est donc bilingue, même s'il dira toute sa vie qu'il ne maîtrise pas parfaitement l'anglais.
Dans son Essai d'autobiographie 1970, Borges remonte la généalogie de sa famille, jusqu'à un très lointain XVIe s. : Les Irala, les Garay, les Cabrera et tous ces autres conquistadors espagnols qui ont fondé villes et nations. Jamais je n'y ai songé… Je suis très ignorant de leur vie. D'ailleurs, c'étaient des personnes très peu intelligentes, des militaires espagnols et de l'Espagne d'alors.
Il compte même parmi ses ancêtres un tyran authentique, Juan Manuel de Rosas, et bon nombre de héros des guerres d'indépendance du XIX., dont le colonel Isidoro Suárez Il fit planer sa valeur sur les Andes… Il est à présent un peu de cendre et de gloire, lit-on dans un poème de Ferveur de Buenos Aires : J'ai donc des deux côtés de ma famille des ancêtres guerriers ; cela peut expliquer mes rêves de destinée épique que les dieux m'ont refusée, sagement sans doute.
Son père très intelligent, et, comme tous les gens intelligents, très bon est avocat, d'ascendance anglaise par sa mère Bien qu'il fût très fier de son ascendance anglaise, il avait coutume d'en plaisanter et disait d'un air faussement perplexe : Après tout, les Anglais, qu'est-ce que c'est ? Un groupe de travailleurs agricoles allemands. , et s'intéresse avant tout à la littérature – Shelley, Keats, Swinburne pour la poésie, Hume, William James ou Berkeley pour la philosophie, Burton pour l'ethnologie et le dépaysement, entre autres. Il est son premier maître de littérature : C'est lui qui me révéla le sens et la portée de la poésie – le fait que les mots ne sont pas seulement un moyen de communication mais aussi un symbole magique – et de la musique. Quand je récite maintenant des poèmes en anglais, ma mère me dit que j'ai ses mêmes intonations.Quant au nom de Borges, il vient d'ancêtres portugais l'Auteur et autres textes, 1960, et signifie bourgeois. Ses premiers souvenirs sont le lent et boueux fleuve de la Plata, à Montevideo où il est en vacances.
En 1901, peu après la naissance de sa sœur Norah, compagne et caudillo de ses jeux d'enfance et d'adolescence, Borges part avec les siens pour le quartier de Palermo, à Buenos Aires, peuplé de truands souvent d'origine italienne, les compadritos, fameux par leurs rixes au couteau » :« Palermo était d'une misère insouciante Evaristo Carriego, 1930. Mais ce Palermo pittoresque ne frappe guère le regard de l'enfant :On faisait tout à la maison pour que nous l'ignorions et l'on y parvenait fort bien … En ce qui me concerne, je soupçonnais à peine l'existence des compadritos parce que je ne sortais pratiquement jamais de la maison.

L'homme-bibliothèque

Que fait Borges enfant ? Il lit. Et d'énumérer tous les grands classiques anglo-saxons de l'évasion, dévorés derrière les grands murs clos : Mark Twain, Stevenson, Wells, Hawthorne, Dickens, Jack London, Poe, Lewis Carroll, les Mille et une nuits dans la traduction provocatrice de Burton en cachette sur le toit , et Don Quichotte – en anglais. À six ans, il déclare solennellement à sa famille : Je veux devenir écrivain. Il précisera plus tard :Je me suis toujours considéré comme un écrivain avant même d'écrire. Il confiera à Jean de Milleret :Quand je lisais, je m'identifiais avec l'auteur, ou l'un de ses personnages ; par exemple, quand j'avais onze ans, j'étais Lesage ou Cervantès. Il vit, il n'existe que dans la bibliothèque – le lieu magique qui régit toute sa vie et son imaginaire :J'ai grandi dans un jardin, derrière une grille à fers de lance, et dans une bibliothèque aux livres anglais illimités Evaristo Carriego. Si on me demandait ce qui a compté le plus dans ma vie, je répondrais : la bibliothèque de mon père. Il m'arrive de penser qu'en fait je ne suis jamais sorti de cette bibliothèque. Plus tard, la Bibliothèque de Babel , l'un des récits les plus célèbres de Fictions, commencera par ces mots : L'univers que d'autres nomment la Bibliothèque se compose d'un nombre indéfini, et peut-être infini, de galeries hexagonales, avec au centre de vastes puits d'aération bordés par des balustrades très basses. Borges plus tard sera bibliothécaire – conservateur aveugle de livres connus par cœur :
Lent dans l'obscur, j'explore la pénombre
Creuse avec une canne incertaine
Moi qui m'imaginais le Paradis
Sous l'espèce d'une bibliothèque

Poème des dons

Sa bibliothèque rêvée est d'ailleurs une métaphore des circuits neuronaux ; sa biographe Alicia Jurado affirme que Borges est un labyrinthe le Jardin aux sentiers qui bifurquent , dans Fictions ; interviewé en 1969 par André Camp, Borges précise qu'il pensait aux Carceri d'invenzione de Piranèse, à De Quincey, à Kafka – à un poème de Baudelaire, Rêve parisien : Le labyrinthe est le symbole évident, inévitable, de la perplexité. Toute ma vie, je n'ai cessé d'être perplexe devant l'univers, perplexe devant le problème philosophique pour moi essentiel : le problème du temps et de l'identité. Homme-labyrinthe, homme-bibliothèque, on voit tout ce que l'Umberto Eco du Nom de la rose lui doit.
Le très jeune Borges, si myope que l'on craint déjà pour lui les affres de la cécité, malédiction familiale, compose – en anglais, puisque sa gouvernante l'a élevé dans cette langue – un manuel de mythologie et, en espagnol archaïsant, une histoire assez farfelue, écrite à la manière de Cervantès – un roman de chevalerie démodé, intitulé la Visière fatale. Il a sept ans et souffre de savoir qu'il ne sera jamais soldat, à cause de sa vue :« j'ai de très bonne heure eu honte d'être quelqu'un n'aimant que les livres au lieu d'être un homme d'action. Pendant toute mon adolescence, j'ai pensé que c'était une injustice que l'on m'aimât. Je ne méritais pas que l'on m'aimât, d'aucune façon, et je me souviens que le jour de mon anniversaire me remplissait de confusion, parce que tout le monde me comblait de cadeaux et que je pensais n'avoir rien fait pour les mériter et être une sorte d'imposteur. Ce n'est qu'à trente ans passés que j'ai surmonté cette impression Essai d'autobiographie.
Ce n'est qu'à partir de 1908 qu'il va en classe – sans enthousiasme : Comme je portais des lunettes, un col dur et une cravate, j'étais en butte aux railleries et brimades de la plupart de mes camarades qui étaient tous de la graine de voyous.Cette même année, il traduit le Prince heureux, d'Oscar Wilde – une traduction si belle que le journal El País la publie et que tout le monde l'attribue à Borges père, qui se prénomme également Jorge.
La famille va passer ses vacances à Adrogué ce labyrinthe perdu et tranquille de propriétés, de places et de rues qui convergeaient et divergeaient, dans une grande propriété de style néocolonial, et Borges découvre la Pampa, les gauchos, le fleuve, l'odeur des eucalyptus.
Premier séjour en Europe
Au début de 1914, peut-être pour que Borges père puisse faire soigner sa vue déclinante par de vrais spécialistes, toute la famille a la bonne et malencontreuse idée de partir pour l'Europe – Londres, Cambridge, Paris, Genève enfin, où, coincée par les événements, elle séjourne jusqu'à la fin des hostilités, sans grandes difficultés le peso argentin est alors une monnaie plus forte que les monnaies européennes. Borges apprend le français – par la littérature Daudet, Hugo, Gyp, Rémy de Gourmont et Zola et cultive la nostalgie argentine à travers les livres de la bibliothèque familiale. À seize ans, la seule réalité qui le touche est celle des livres. Lisant Crime et Châtiment, il note : Ce roman dont les héros étaient une prostituée et un assassin me semblait bien plus redoutable encore que la guerre qui nous environnait. » Il découvre Carlyle et Chesterton, Rimbaud et les Leaves of grass de Walt Whitman – « pendant un temps je considérai Whitman non seulement comme un grand poète mais comme le seul poète. Et De Quincey, « un écrivain très suggestif, doué d'une curiosité et d'une érudition presque inépuisables » – on croirait un autoportrait. Il apprend seul l'allemand en lisant les poèmes de Heine et le Golem, le roman fantastique de Meyrink, qui lui inspirera plus tard un poème.
La vie continue, cependant, en Argentine. Mi noche triste, premier tango-canción (tango-chanson sentimentale) fait fureur : Borges aura toute sa vie horreur du tango, « pensée triste qui se danse, auquel il préfère les milongas, chansons populaires de caractère réaliste, pleines de sang et de fureur : À travers ces milongas je me souviens du nom des vieux assassins de Palermo et d'ailleurs.
Pour améliorer encore son allemand, il lit Richter, qu'il n'aime pas, les expressionnistes, qu'il pense supérieurs à tous les -ismes de l'époque, et Schopenhauer, le plus grand des philosophes, pour lui. L'histoire de Borges, c'est d'abord l'histoire de ses lectures : Ma mémoire est décidément trop bonne pour que je sois un penseur personnel, plaisantait-il.
Voilà Borges bachelier, qui demande pour cadeau d'anniversaire une encyclopédie allemande. Longtemps il sera un grand lecteur d'encyclopédies, lues avec méthode. Il a déjà écrit des sonnets en anglais et en français, avant de réaliser qu'il était « voué à l'espagnol, irrémédiablement ». La famille Borges séjourne à Lugano, puis en Espagne, à Barcelone et à Palma – parce qu'il n'y a pas de touristes… Il écrit à Jacobo Sureda :« Je ne m'adonne à la littérature que la plume à la main et j'espère ne jamais en venir à littératuriser ; mais sait-on jamais. » Installé à Séville, il rejoint les « ultraïstes » de la revue Grecia qui « se proposait de renouveler la littérature, une branche des arts dont ils n'avaient pas la moindre idée ». Il y publie un « Hymne à la mer ». C'est à Madrid en 1920 qu'il rencontre le fondateur de l'ultraïsme, Rafael Cansinos Asséns, auteur du Candélabre à sept branches, « un livre de psaumes, dit Borges, très érotique ». Les réunions du Café colonial sont le prétexte à des joutes rhétoriques débridées. Borges collabore alors à la plupart des revues d'avant-garde espagnoles, Grecia, Cervantes, Reflector, Baleares, Ultra, Tableros, Cosmópolis. Sa sœur Norah illustre brillamment cette épopée ultraïste, qui s'ouvre alors à l'Europe et multiplie les contacts avec Tzara et le dadaïsme. En mars 1921, Borges rentre en Argentine,« la Terre des Présidents avariés, des cités géométriques et des poètes qui n'ont pas encore accueilli dans leurs hangars l'avion biscornu de l'Ultra ». Avant de partir, il détruit un recueil de poèmes, Rythmes rouges (dont certains toutefois sont parus en revues) et un livre inédit d'essais, les Cartes du tricheur. Installé à Buenos Aires, qu'il redécouvre (il commence à écrire les poèmes de Ferveur de Buenos Aires, qui paraîtront en 1923 à compte d'auteur), il a pour la première fois l'idée d'écrire un roman fantastique en collaboration (avec Macedonio Fernández, sur la tombe duquel il dira, en 1952 :« L'un des grands bonheurs de ma vie, c'est d'avoir été l'ami de Macedonio et de l'avoir vu vivre »). Il lance la revue murale Prisma, qui n'aura que deux numéros, puis Proa, qui en aura trois.

Borges poète

Ferveur de Buenos Aires paraît alors que Borges est de retour en Europe (selon un parcours déjà éprouvé, Angleterre, France, Suisse, Espagne), et lui vaut d'être cité l'année suivante dans la revue de Marinetti, Futurisme. Préfaçant son recueil en 1969, Borges écrit, après avoir noté que le jeune homme de 1923 et le « correcteur » de 1969 étaient un seul homme :« En ce temps-là je cherchais les soirs, les banlieues et le malheur ; je cherche maintenant les matins, le centre et la sérénité » :
Si les choses sont vides de substance
et si l'innombrable Buenos Aires
n'est qu'un rêve
qu'érigent les âmes par une commune magie, Il y a un instant où son être est démesurément menacé, et c'est l'instant frémissant de l'aube, lorsque sont rares les rêveurs du monde et que seuls quelques noctambules conservent, cendreuse et à peine ébauchée, l'image des rues qu'ils définiront ensuite avec les autres
Point du jour
La critique est divisée : Pour les uns je suis un classique rusé et pour les autres un vertigineux ultraïste… .
De retour en Argentine, Borges se rend chaque soir à la Bibliothèque nationale et y explore l'Encyclopaedia Britannica avec méthode, apprenant tout sur tout. « Les encyclopédies, note son biographe, Emir Rodriguez Monegal Borges par lui-même, Seuil, 1970, en tant que structures littéraires et prototypes d'un certain style d'écriture, servent de modèles non seulement pour les essais de Borges mais aussi pour bon nombre de ses contes les plus fameux
Il partage son activité littéraire entre Proa, réactivée, et Martin Fierro, plus politique. Il y publie nombre d'articles de critique littéraire (repris dans Inquisitions, 1925) qui sont autant de prises de position. Sa sœur illustre un nouveau recueil de poèmes, Lune d'en face, plein d'« argentinismes » :
Pampa,
Je t'entends aux tenaces guitares sentencieuses,
Et dans tes hauts oiseaux et dans la plaine lasse
Des charrettes de foin qui viennent de l'été
À l'horizon d'une banlieue
Le « guitariste des couchants », comme il se définit par autodérision, reniera plus tard ce fatras de fausse couleur locale . Borges collabore activement au journal La Prensa, et prépare son étude sur la Langue des Argentins 1928, où il analyse particulièrement le lunfardo, l'argot de la rue. Suit en 1929 le premier recueil dont Borges mature sauvera quelque chose, le Cahier San Martín :
La mort de quelqu'un
– mystère dont je possède le nom vacant, dont nous ne saisissons pas la réalité –
maintient vers le Sud une maison ouverte jusqu'à l'aube,
une maison ignorée que je ne suis pas destiné à revoir,
mais qui m'attend cette nuit,
dans la haute insomnie de ses lampes attardées,
émaciée de mauvaises nuits, différente,
minutieuse de réalité
Cette nuit-là on veillait quelqu'un dans le Sud

Borges prosateur

Borges reçoit le premier des nombreux prix qui jalonnèrent sa carrière, et, avec son montant, s'offre l'Encyclopaedia Universalis … Il publie Evaristo Carriego, l'homme qui découvrit les faubourgs délabrés et miséreux de la ville – le Palermo de ma jeunesse . L'année suivante, Victoria Ocampo fonde la revue Sur, dont Borges sera l'un des principaux collaborateurs. Il y rencontre le tout jeune Adolfo Bioy Casares. Il publie en 1932 Discussion, réunion d'essais, écrit dans le supplément littéraire de Crítica des récits qui sont les premières moutures des futurs contes de l'Histoire universelle de l'infamie (publiée en 1935 – biographies déformées de personnages réels, gangsters et autres. Mais, pudeur ou dédoublement, il signe son premier conte, Hommes des faubourgs, plus tard l'Homme au coin du mur rose du nom, emprunté à sa parentèle, de Francisco Bustos. Il fréquente Drieu la Rochelle, de passage à Buenos Aires, qui trouve pour qualifier la Pampa le mot parfait, que tous les poètes argentins ont vainement cherché : vertige horizontal. Drieu de retour en France fait sur Borges un long article élogieux dans l'Intransigeant.
En 1936 paraît Histoire de l'éternité, recueil d'articles. Borges est aussi traducteur – de Gide Perséphone, de Virginia Woolf (Orlando), de Michaux (Un barbare en Asie), de Kafka, la Métamorphose. Pour la première fois, en 1937, il exerce une activité rémunérée comme assistant dans une bibliothèque d'un quartier pauvre de Buenos Aires :« Par une ironie du sort, j'étais alors un écrivain assez connu – sauf à la bibliothèque. Je me souviens qu'un de mes collègues releva un jour dans une encyclopédie le nom de Jorge Luis Borges, ce qui le fit s'étonner de l'identité de nos noms et de nos dates de naissance. » Dans le tramway qui l'amène au travail, Borges lit la Divine Comédie et le Roland furieux.
1938 est l'année de la mort de son père, et d'un accident qui dégénère en septicémie et le fait délirer trois semaines : Durant les jours et les nuits qui suivirent l'opération, il put comprendre qu'il n'avait été jusqu'alors que dans la banlieue de l'enfer, le Sud , in Fictions. Tapir blessé , il craint d'avoir des facultés intellectuelles amoindries et, pour se rassurer, écrit Pierre Ménard, auteur du Quichotte. C'est l'histoire très borgesienne d'un auteur qui recopie minutieusement le roman de Cervantès, ce qui en fait un autre texte : Ménard choisit comme réalité le pays de Carmen – c'est dire que notre lecture est fatalement contaminée par notre culture, que les connotations d'un texte le style archaïsant de Ménard – tout compte fait étranger – pêche par quelque affectation. Il n'en est pas de même pour son précurseur, qui manie avec aisance l'espagnol courant de son époque ne sont pas les mêmes, non en raison des intentions de l'auteur, mais du regard du lecteur. Le même type de paradoxe plein de sens, quelques années plus tard, amènera Borges à disserter sur l'influence de Kafka au XIXe s. Zénon, Han Yu, Kierkegaard, Robert Browning, Léon Bloy, lord Dunsany :
Si je ne me trompe pas, les textes disparates que je viens d'énumérer ressemblent à Kafka, mais ils ne se ressemblent pas tous entre eux. Ce dernier fait est le plus significatif. Dans chacun de ces morceaux se trouve, à quelque degré, la singularité de Kafka, mais si Kafka n'avait pas écrit, personne ne pourrait s'en apercevoir. À vrai dire, elle n'existerait pas. Le poème Fears and scruples de Robert Browning annonce prophétiquement l'œuvre de Kafka, mais notre lecture de Kafka enrichit et gauchit sensiblement notre lecture du poème. … Le fait est que chaque écrivain crée ses précurseurs. Son apport modifie notre conception du passé aussi bien que du futur. Dans cette corrélation, l'identité ou la pluralité des hommes n'importe en rien. Le premier Kafka, celui de Contemplation Betrachtung, 1913, est moins précurseur du Kafka des mythes sinistres et des institutions atroces que ne le furent Browning et lord Dunsany. Kafka et ses précurseurs, Autres Inquisitions, 1952.
La démarche purement borgesienne nous amène en fait immédiatement à chercher l'influence de Borges dans les littératures des siècles antérieurs… Raymond Roussel certainement, par exemple, mais aussi bien De Quincey, par un injuste retour des choses, ou Macpherson inventant Ossian.
Pour la première fois en 1939, un texte de Borges l'Approche du caché est traduit en français – au moment où la vue de Borges baisse considérablement.
Contre les dictatures

La guerre éclate, la position de Borges est dénuée d'ambiguïté : Il est possible qu'une déroute allemande soit la ruine de l'Allemagne ; il est indiscutable que sa victoire serait la ruine et l'avilissement de l'univers. Avec Silvina Ocampo et Bioy Casares (Borges a été leur témoin de mariage, et lui vient de publier sa célébrissime Invention de Morel), Borges publie une Anthologie de la littérature fantastique (1940), puis une Anthologie de la poésie argentine (1942) – et, seul, le Jardin aux sentiers qui bifurquent, première partie de Fictions. Avec Bioy Casares, il crée l'auteur-personnage Bustos Domecq, héros-narrateur de parodies policières, Six Problèmes pour Don Isidro Parodi, les Douze Signes du zodiaque, etc.« Honorio Bustos Domecq ne tarda pas à nous gouverner d'une poigne de fer et, pour notre plus grande joie d'abord puis à notre consternation, il devint complètement différent de nous, ayant ses propres fantaisies, ses propres sous-entendus, son propre style apprêté. » Borges rassemble, en les remaniant, ses Poèmes (1943), traduit Melville (Bartleby) et publie Fictions (1944). L'année suivante, à l'enquête de la revue Latitud « Pourquoi écrivez-vous ? », il répond : « Il n'est pas pour moi d'autre destin. »
Avec la même logique qui lui faisait haïr Hitler, Borges devient l'ennemi déclaré du péronisme : « La situation en Argentine est très grave, écrit-il en 1945, si grave qu'un grand nombre d'Argentins sont en train de devenir nazis sans s'en rendre compte. » Perón (que Borges appelle l'Innommable) arrive au pouvoir (24 février 1946). Les dictateurs ont bonne mémoire : il destitue Borges de son emploi de bibliothécaire et le nomme, par dérision, inspecteur des volailles et des lapins au marché public de la rue Córdoba. Réaction immédiate :« Les dictatures fomentent l'oppression, les dictatures fomentent la servilité, les dictatures fomentent la cruauté ; encore plus abominable est le fait qu'elles fomentent la stupidité » (1946). Dans la déferlante péroniste, Borges sera, pour les dix ans à venir, l'adversaire décidé du totalitarisme.
Avec Bioy Casares, les identités de substitution alternent et se cumulent : sous le pseudonyme de B. Suarez Lynch, ils publient Un modèle pour la mort et, sous la signature de Bustos Domecq, Deux Fantaisies mémorables. Borges fonde une nouvelle revue, Anales de Buenos Aires. Il publie Nouvelle Réfutation du temps (1947), puis son second recueil de contes, l'Aleph (1948), où une nouvelle, « la Demeure d'Astérion », reprend le thème quasi autobiographique du labyrinthe – et du Minotaure :
Je sais qu'on m'accuse d'orgueil, de misanthropie, peut-être de démence. Ces accusations (que je punirai le moment venu) sont dérisoires. Il est exact que je ne sors pas de ma maison ; mais il est moins exact que les portes de celle-ci, dont le nombre est infini, sont ouvertes jour et nuit aux hommes comme aux bêtes […] Je suis unique ; c'est un fait. Ce qu'un homme peut communiquer à d'autres hommes ne m'intéresse pas. Comme le philosophe, je pense que l'art d'écrire ne peut rien transmettre. ».
Borges est élu président de la Société argentine des écrivains, l'un des rares îlots de résistance à Perón (1950), et, grand amateur de sagas, il travaille sur les Anciennes Littératures germaniques 1951. Il devient progressivement aveugle :« Ma cécité avait progressé graduellement depuis mon enfance. C'était comme un lent crépuscule d'été. Il n'y avait rien là de particulièrement dramatique. » Sa mère, avec laquelle il vit, lui sert de plus en plus de lectrice et de secrétaire. À la chute de Perón septembre 1955, il est nommé à la direction de la Bibliothèque nationale – aveugle comme ses deux prédécesseurs à ce poste.
L'aveugle le plus célèbre depuis Homère

Les distinctions pleuvent sur la tête de Borges. Membre de l'Académie argentine des lettres, prix national de littérature (1956), prix Formentor (1961), commandeur des Arts et des Lettres en France 1962, chevalier de l'Empire britannique (1965) et de l'ordre du Soleil, docteur honoris causa de plusieurs universités prestigieuses Columbia, Oxford, Michigan, Sorbonne… Il ne cesse d'écrire : avec Luisa Mercedes Levinson, la Sœur Héloïse (1955) ; avec Margarita Guerrero, le Manuel de zoologie fantastique 1957 ; seul, l'Auteur 1960. Professeur de littérature anglaise, il séjourne aux États-Unis (1962) puis en Europe (1963). Il se marie finalement avec une amie d'enfance, Elsa Astete Millian, en 1967, et part enseigner aux États-Unis, en Israël (1969). En 1969 paraît le recueil de poèmes Éloge de l'ombre : « Le temps m'a appris quelques ruses, écrit-il en préface. J'évite à présent les synonymes, qui ont le désavantage de suggérer des différences imaginaires ; j'évite les hispanismes, les argentinismes, les archaïsmes et les néologismes ; je préfère les mots habituels aux mots surprenants. Suivent les nouvelles du Rapport de Brodie. En octobre 1970, les époux Borges se séparent – l'écrivain part seul en Islande, la terre de ses sagas bien-aimées. En 1972 paraît l'Or des tigres : La parabole succède à la confidence, le vers libre ou blanc au sonnet. .
Les honneurs se succèdent : Buenos Aires le déclare citoyen illustre, il reçoit le prix Alfonso Reyes à Mexico (1973), il est au Chili grand-croix de l'ordre d'O'Higgins, l'Espagne lui décerne le prix Cervantès (1980), la France le prix Cino del Duca, l'Italie le prix Balzan, le Mexique le prix Ollin Yolitzli, aux États-Unis le prix de la Fondation Ingersoll ; la France le fait commandeur de la Légion d'honneur. Franco Maria Ricci édite luxueusement le Congrès, un conte tout à la fois autobiographique et fantastique. En 1974, avec son vieux complice Bioy Casares, Borges écrit le scénario des Autres, le film énigmatique de Hugo Santiago : Borges n'a cessé de s'intéresser au cinéma. En juillet de la même année paraissent ses Œuvres complètes – subterfuge commode pour éliminer définitivement des œuvres qu'il renie :« Je crois que j'ai trop écrit. Mais si écrire beaucoup est une condition nécessaire pour laisser finalement quelques lignes décisives, je ne me repens pas. L'œuvre d'un auteur est une suite de brouillons pour arriver à quelques pages définitives. Il faut travailler une vie entière pour laisser un vers, une fable, un conte, une fiction. Et puis, les erreurs que j'ai commises en noircissant tant de papier m'ont permis d'accéder à la sérénité », déclare-t-il en 1980. Parmi ces pages « définitives », peut-être faut-il compter les nouvelles du Livre de sable (1975), que Borges semble particulièrement aimer. Au mois d'août de la même année, la Rose profonde, où la cécité occupe à son goût trop de place :« La cécité est une clôture, mais c'est aussi une libération, une solitude propice aux inventions, une clef et une algèbre. » Le 8 juillet 1975, sa mère meurt, à 99 ans. Le voilà désormais avec Maria Kodama, guide, secrétaire, compagne de chaque heure :« Voici le labyrinthe de Crète dont le centre fut le Minotaure que Dante imagina comme un taureau à tête d'homme et dans le réseau de pierre duquel s'égarèrent tant de générations, comme Maria Kodama et moi nous nous égarâmes ce matin-là et continuons égarés dans le temps, cet autre labyrinthe » (Atlas). En 1976 paraissent les poèmes de la Monnaie de fer :
J'ai commis le plus grand des péchés que l'on puisse
commettre : le péché de n'avoir pas été
Heureux…
À Maria Kodama il dédie les poèmes d'Histoire de la nuit – le plus intime puisqu'il prodigue les références littéraires 1977, et en 1981 ceux du Chiffre.
1986. Hospitalisé début janvier à Genève, il se marie par procuration, au Paraguay, avec Maria Kodama, à qui il dédie son dernier recueil de poèmes, les Conjurés (« Nous ne pouvons donner que ce qui, déjà, appartient aux autres . Il emménage dans une maison du vieux Genève lorsqu'il meurt, le 14 juin, d'un emphysème ou d'un cancer du foie, selon des rumeurs diverses, veillé par sa femme et par l'écrivain argentin de langue française Hector Bianciotti. « Une mort très douce », écrit ce dernier. Borges avait déjà écrit d'Evaristo Carriego, ce poète des rues qui venait, le dimanche, lorsqu'il était enfant, dans la maison de Palermo :« Je pense que l'homme est poreux devant la mort et que son imminence le sillonne de lassitudes et de lumière, de vigilances miraculeuses et de prémonitions. » Et, dans une interview plus récente :Il serait triste pour moi, après ma mort, de penser que sur terre je m'appelais Borges, que j'ai publié quelques bouquins, que je venais d'une famille de militaires… Je préfère oublier tout cela, de même que je préfère oublier l'époque où j'étais dans le ventre de ma mère. Je suis un peu fatigué d'être Borges, et après ma mort je serai peut-être quelqu'un, peut-être personne, mais j'espère n'être plus Borges..
Jorge Luis Borges est, par propension et par invétéré dessein, un homme de lettres. Cette condition constitue l'axe de sa biographie, elle la résume. De ce fait, il identifie son destin au littéraire et se figure le paradis comme une bibliothèque où les textes les plus hétérogènes circulent : Dante, la mystique arabe et Les Mille et Une Nuits, mais aussi Berkeley, Coleridge, De Quincey, Chesterton, Stevenson, Cervantès et Quevedo. Sans oublier Homère, le roman policier, les kenningan, les bestiaires du Moyen Âge, la Bible et la kabbale – et l'Encyclopædia Britannica. À part ce jeu spéculaire de la lecture et de l'écriture, peu de choses, selon Borges, lui sont arrivées qui soient dignes d'être remémorées. Nonobstant, certains événements de sa vie le conditionnèrent de façon décisive : sa naissance à Buenos Aires, nouvelle cosmopole, à l'orée du XXe siècle ; son origine à la fois patricienne et saxonne ; l'acquisition de l'anglais comme langue maternelle ; le penchant littéraire de Jorge Guillermo Borges, son père ; son enfance dans la quartier de Palermo ; son séjour en Europe de 1915 à 1921 ; son baccalauréat à Genève, ville qui lui révèle sa vocation d'écrivain et où il s'en va mourir, en conclusion voulue d'une vie et d'une œuvre circulaires ; son militantisme d'avant-garde en tant que fondateur des mouvements Ultra et Martin Fierro ; sa collaboration à la revue Sur, fondée par Victoria Ocampo, et son amitié pour Adolfo Bioy Casares, qui donnera lieu à une fructueuse collaboration ; son accident de 1938, une chute qui occasionna une progressive cécité, et dont il évoque le souvenir dans la nouvelle essentielle qu'est « Le Sud ; son opposition au péronisme, qui le convertira en conférencier puis, une fois le régime démis, en directeur de la Bibliothèque nationale et en professeur de littérature anglaise ; enfin, l'évidence de son extraordinaire renommée internationale.

Poésie et mémoire

À l'origine et au terme de l'œuvre de Borges prime le poème. Dans cette musique verbale, dans cette forme du temps, qui figure les mystères de la mémoire et les agonies du désir, dans cette émotive fabrique, qui est une des configurations du rêve, réside peut-être l'intime continuité qui cimente l'œuvre de Borges, et qui est la clé de sa circonvolution. De même que toute littérature commence par le vers, Borges débute par la poésie, pour s'approcher graduellement de la narration au moyen de ces singulières mixtures que constituent ses essais nouvellistes La Muraille et les livres, Formes d'une légende, Nouvelle Réfutation du temps ou de ses nouvelles essayistes Histoire du guerrier et de la captive , Examen de l'œuvre d'Herbert Quain , de ses comptes rendus narrativisés L'Approche d'Almotasium , de ses fictions bibliographiques ou apologétiques Tlön Uqbar Orbis Tertius. Autant sur le plan narratif Borges se singularise par le caractère latéral ou limitrophe de ses inventions, par la transgression ou l'hybridation des genres, par l'excentricité revendiquée au regard des pôles littéraires traditionnels, autant sa poésie, après une phase où ultraïsme et couleur locale faisaient bon ménage, observe de plus en plus étroitement la prosodie classique. Elle s'en remet à un jeu simplifié, à la sûreté de l'ancien, pour forger des vers adamantins qui résistent à l'usure du temps et qui, devenus un jour de provenance inconnue, pourront retourner à leur source : la mémoire impersonnelle de la langue que la poésie perpétue. Ou peut-être Borges choisit-il la simplicité rhétorique pour indiquer qu'elle seule peut conduire à la grandeur intrinsèque. Selon lui, la maximale valeur littéraire consiste à représenter avec pureté un type générique.
Borges expérimente ainsi, au fil des années, un passage graduel de l'expressionnisme initial au néoclassicisme, patent à partir d'El Hacedor L'Auteur, 1960, en passant par L'Autre, le Même 1965, Éloge de l'ombre, La Rose profonde ou Histoire de la nuit jusqu'à La Cifra Le Chiffre, 1981. Tandis que dans sa poésie empreinte d'ultraïsme, celle des trois premiers livres – Fervor de Buenos Aires 1923, Luna de enfrente 1925 et Cuaderno San Martín 1929 –, il met en valeur son goût de la modernité conçue comme esprit d'innovation, mobilité et mutabilité formelles et focales, dynamisme intensificateur de rapprochements surprenants, bientôt il se modère, censure tout excès avant-gardiste, qualifie son premier style de « vaniteusement baroque » et recourt ouvertement aux conventions prosodiques, rhétoriques et symboliques. Il abandonne peu à peu le vers libre et les formes ouvertes, renonce presque à la psalmodie d'origine whitmanienne, si fréquente à partir de Luna de enfrente, pour adopter les mètres plus traditionnels : l'alexandrin, l'hendécasyllabe, l'heptasyllabe. Dès lors que la cécité l'empêche d'écrire, la métrique participe de cette mnémotechnique subordonnée à la mnémonique rhétorique qui lui permet de composer mentalement ses poèmes, dans lesquels il réitère en des formes usuelles son répertoire caractéristique de motifs : labyrinthe, miroir, songe, sable, tigre, épée, bibliothèque. À ceux-ci s'ajoutent, sur la fin, la vieillesse, l'éthique et aussi cette cécité limitative, valorisée par son ascendance mythique Tirésias, Œdipe et littéraire Homère, Milton, Paul Groussac.

Parallèlement, Borges troque les heurts de l'invention pour les bonheurs de l'ordre, sachant que, une fois brisée la solidarité qui rattachait le divin au monde, il ne peut que contrefaire ses modèles et commercer avec des fantasmagories. Sur le plan du vocabulaire, il abandonne la singularisation, la localisation et la diversification idiomatiques. Il tempère les dénivellements de sa poésie initiale qui, comme ses premiers essais, ostentatrice de richesse lexicale, surabonde de cultismes, archaïsmes, néologismes et argentinismes et tend volontiers vers la pléthore expressionniste et baroque. Préférant les mots habituels à ceux qui étonnent, il parvient à un style qui paraît nécessaire, exempt des anciennes torsions et raretés, dépouillé de toute vaine éloquence. Quant aux images, on note chez Borges le même passage du particulier au général, de l'individuel au générique, de la substance sensuellement perçue dans sa singularité qualitative à l'essence qui transmute les attributs multiformes de la réalité en modèles idéaux.
Également, dans l'ordre des métaphores s'opère la reconversion des surprenantes aux topiques, le rejet des métaphores ultraïstes et des analogies débordant tout cadre habituel de référence. Puis, une fois banni tout outrepassement imaginaire, Borges opte pour les métaphores primordiales, enracinées dans la mémoire ancestrale la vie comme fleuve, tissu, fil, songe, reflet du miroir ou mirage. Tout se passe comme si la cécité avait soustrait Borges au monde bigarré et confus, le dispensant de nouveauté et le réduisant au savoir réflexif et réminiscent où lieux, visages, choses et livres demeurent figés par une mémoire sans avenir. Le temps, qui inéluctablement ajoute et ôte la vie, est alors pour lui un retour par lequel tout converge vers son centre secret, un mouvement centripète se déplaçant vers la propre, obscure et insaisissable essence.
À travers un jeu habile d'anachronismes, Borges s'acharne ainsi à sauvegarder les vertus primordiales du poème, à le ramener à sa source et origine : la mémoire rhétorique et la mémoire mythique. Il cultive les effets classiques de la distanciation qui détachent le texte du présent circonstanciel et du monde environnant ou qui subliment et stylisent l'immédiat, qui le suspendent moyennant l'artifice d'une harmonieuse configuration esthétique. Il atténue son empreinte personnelle, réprime la marque directe de sa subjectivité. Borges dit préférer, en lieu et place du lyrique et de l'élégiaque, l'épique et le spéculatif. La présence culturelle prédomine sur celle du sujet psychologique, qui n'en sous-tend pas moins la raisonnée, la pondérée architecture de cette poésie orbiculaire. Comme sa prose, la poésie de Borges est collectrice. Recueil de diverses lectures, elle abonde en reflets et interpolations. Elle est faite de citations, d'emprunts, d'imitation, autrement dit de remémoration. Comme toute littérature, elle est substantiellement apocryphe. Artificieux assemblage de figures et de modes préexistants, ingénieux montage d'autres textes, comme toute littérature elle est un astucieux plagiat, un captivant simulacre qui évoque tour à tour Spinoza, Gracián et la villa d'Adrogué, le tigre, le tango et la pluie.

Une esthétique de l'apocryphe

Autre trait distinctif, le scepticisme qu'il affiche dès 1926 dans El Tamaño de mi esperanza Taille de mon espoir, où il revendique une incrédulité égale à celles de Swift, Sterne et Shaw : parce qu'elle est une sorte de foi retournée, elle devient, par son intensité, source d'œuvre. De ce scepticisme empreint d'une certaine impersonnalité, il découle une distance ironique, un détachement qui sépare l'énonciateur de ses énoncés. Cette posture sceptique est de nouveau soulignée dans l'épilogue d'Otras inquisiciones, 1952 Autres Inquisitions, où l'auteur témoigne de sa tendance « à estimer les idées religieuses ou philosophiques par leurs valeurs esthétiques, pour ce qu'elles contiennent de singulier ou de merveilleux ». Et de conclure : « C'est là, sans doute, l'indice d'un scepticisme essentiel. » Le troisième trait décisif se définit lui aussi prématurément : son antipsychologisme, son rejet de l'opiniâtreté subjective, de l'anecdotique sentimental, de la révélation intime. Sa réprobation de tout registre excessivement personnel apparaît avec insistance dans les manifestes de la période avant-gardiste. Dans le roman, Borges dédaigne le réalisme psychologique, et dans la poésie le « psychologisme confessionnel ». Il considère dès le départ que le moi, en tant qu'épicentre stable de la personnalité ou invariant individuel, est un mirage qui sert à dénommer la mobile pluralité des états de conscience. Ceux qui reprochent à Borges la faible densité psychique de ses personnages, l'absence d'individuation intériorisée font en réalité l'impasse sur son projet littéraire, sa philosophie et sa poétique.
Dans la représentation des personnages, Borges ne particularise pas ; il relativise, il annule l'identité individuelle par dédoublement, multiplication ou réversibilité. Dans Le Mort, un être aux allures de primate se révèle être Homère. Exercé à la mésestime de lui-même, Borges considère l'ego comme illusoire jeu de reflets, jugeant les différences personnelles triviales et fortuites. Tout homme est autre – tout homme en lisant Borges est Borges ; tout homme est tous les hommes, autant dire aucun. Ou bien tout homme est unique, et, dans son absolue singularité, insondable et impensable. Devant l'impossibilité de connaître le singulier, Borges opte pour le générique dépourvu de réalité ; ses traits distinctifs, les affects, les mobiles, les procédés, émanent de quelqu'un qui est à la fois tous et personne. Il réduit les possibilités empiriques aux conduites fondamentales de l'homme sujettes à l'infinie répétition.

Discours sur le peu de réalité

Pour Borges, le fantastique est consubstantiel à la notion de littérature, conçue avant tout comme une fabulation, un artifice fait de chimères et de cauchemars, gouverné par l'algèbre prodigieuse du songe, mais un songe dirigé et délibéré. Les fantaisies borgésiennes nous projettent vers la frontière de l'expérience, et la gnose du réel raisonnable vers les limites de la conscience possible, vers les dehors du domaine établi par l'homme dans un univers cryptique, rétif aux faillibles stratégies de la connaissance. Borges ne poursuit aucun désir de naturaliser le récit, il évite par conséquent toute prétention au réalisme, toute confusion entre littérature et réalité. De même, il se garde de qualifier ses narrations de nouvelles pour ne pas les confondre avec ces simulacres naturalistes et psychologiques qui présupposent une continuité factuelle entre texte et hors-texte. Tout, chez Borges, renvoie à l'invalidation de nos clés cognitives, de notre univocité protectrice, de nos significations rassurantes. Il ébranle les assises de toute intellection réaliste, bouleverse le système de coordonnées permettant de formuler les postulats du réel, déjoue les catégories classificatrices, subvertit la causalité convenue. En se faisant paradoxe, le style relativise les procédés du savoir.
Pour Borges, langage et monde ne sont pas équivalents, ni interchangeables. Le monde, cet écrasant non-sens, ce comble chaotique, est définitivement inintelligible ; cette totalité infinie et indivise demeure allégoriquement ou symboliquement indicible, même si « La Loterie à Babylone » tente l'impossible pari de proposer une « image » du monde. Borges se sait ourdisseur d'images sans portée réelle, incapables de franchir le fossé qui les sépare des corps. Pour lui, l'histoire n'existe pas dans le monde effectif ; nullement prescrite dans le réel, elle est un effet de lecture qui, en inscrivant le discordant, le tisse par une exigence inhérente au textuel. Si toute histoire est supposée, si toute histoire est figurée, il n'est d'autre consolation que de fabuler des fictions qui se reconnaissent comme telles, et donc qui ne se prétendent pas corrélatives du réel. Par le biais des savants anachronismes ou de la mise à distance que permet la légende, Borges place ses fantaisies dans un état pré- ou paléopsychologique, qui donne lieu à un commerce direct avec le fabuleux et le prodigieux et qui lui permet de s'approprier tout le flux de la littérature sacrée, tout le trésor d'inspiration mythique ou mystique. Le riche répertoire symbolique de la théologie et de la métaphysique est détourné de l'ordre transcendantal vers l'immanence littéraire pour composer des labyrinthes progressifs, rétrospectifs, circulaires, des labyrinthes mentaux qui sont la pâle réplique des naturels, métaphore de cet autre labyrinthe qui les contient tous : l'inembrassable univers.
Adepte des arcanes, Borges trame dans ses récits une étrange symbiose entre énigmes textuelles et énigmes factuelles en relation spéculaire. D'où chez lui cet amalgame de l'essai et du narratif, d'où le caractère métalittéraire que Borges prête à ses fictions. Y est omniprésente la condition interdépendante et interchangeable d'un auteur à la fois lecteur, ourdisseur et déchiffreur de cryptographies. Borges nie l'originalité, considérant que toute écriture coexiste au sein d'une textualité qui la rend possible, la conditionne et l'implique. Il a coutume d'indiquer, dans le cours de ses fictions, les sources qui les suscitent, mettant ainsi en relief ses mécanismes constitutifs. Il contrevient ainsi à la tendance centripète du récit, à sa feinte d'autogénération, et récuse les pouvoirs démiurgiques du narrateur.
Chez Borges, le récit se donne sous une configuration hautement stylisée, traduite en une parole proverbiale. Le gnomique affleure à la superficie du texte et occupe une telle place qu'il le fait osciller entre l'événementiel et le théorique. Délibérement archaïsant, Borges se reporte aux modèles canoniques, aux universaux fantastiques. Simultanément, il manipule des plus lointaines aux plus récentes gnoses pour inventer ses ingénieuses, ses impressionnantes confrontations, intersections, imbrications. Le fantastique résulte alors du croisement des mythomachies avec les logomachies. Un art combinatoire accouple cosmogonies mémorables et philosophies illustres pour instaurer cette étrangeté, ce vide provoqué par des manifestations qui renvoient à une présence indiscernable et ignorée.

Å’uvre

Borges en 1963,
photo de Alicia D'Amico
Borges privilégie l'aspect fantastique du texte poétique, rejetant une écriture rationnelle, qu'il juge insuffisante et limitée. Certains[Qui ?] considèrent Borges comme l'une des influences majeures du réalisme magique latino-américain. D'autres[Qui ?] y voient au contraire un écrivain universel dans lequel peut se reconnaître toute l'humanité.

Son travail est érudit, et à l'occasion délibérément trompeur Tlön, Uqbar, Orbis Tertius. Il traite souvent de la nature de l'infini La Bibliothèque de Babel, Le Livre de sable, de miroirs, de labyrinthes et de dérive Le Jardin aux sentiers qui bifurquent, de la réalité, de l'identité ou encore de l'ubiquité des choses La Loterie à Babylone.

" Jorge Luis Borges est l'un des dix, peut être des cinq, auteurs modernes qu'il est essentiel d'avoir lus. Après l'avoir approché, nous ne sommes plus les mêmes. Notre vision des êtres et des choses a changé. Nous sommes plus intelligents. "a dit à son propos Claude Mauriac.
Des ouvrages comme Fictions ou L'Aleph contiennent des textes souvent courts et particulièrement révélateurs du talent de Borges pour l'évocation d'univers ou de situations étranges qui lui sont propres. Dans Le Miracle secret, un écrivain, face au peloton d'exécution, dans la seconde qui précède sa fin, se voit accorder la grâce de terminer l'œuvre de sa vie. Le temps se ralentit infiniment. Il peaufine mentalement son texte. Il retouche inlassablement certains détails… Il fait évoluer le caractère d'un personnage à la suite de l'observation d'un des soldats qui lui font face… Dans un autre récit, "histoire d'Emma Zunz" (Fuera de Emma Zunz), une jeune fille trouve un moyen inattendu, cruel et infaillible de venger son honneur et celui de sa famille…
Homère surgit peu à peu d’un autre texte, L’immortel, après un extraordinaire voyage dans l'espace et le temps. Dans Pierre Ménard, auteur du Quichotte, Borges nous dévoile son goût pour l'imposture, et un certain humour littéraire souvent rare, mais qui dans l'ouvrage Chroniques de Bustos Domecq, écrit en collaboration avec Adolfo Bioy Casares, s'épanouira dans l'évocation d'une étonnante galerie de personnages artistes dérisoires et imposteurs.

La concision, les paradoxes, les associations fulgurantes de mots comme « perplexes couloirs » sont typiques de son style unique.
Borges est devenu aveugle assez jeune mais de façon progressive, ce qui eut une forte influence sur ses écrits. Dans une de ses nouvelles, L’Autre, il se rencontre lui-même plus jeune, sur un banc, et se livre à quelques prédictions : « Tu deviendras aveugle. Mais ne crains rien, c'est comme la longue fin d'un très beau soir d'été ». À ce sujet, il raconte dans l’Essai autobiographique que cette cécité était probablement d'origine héréditaire et que certains de ses ascendants avaient connu la même infirmité. N'ayant jamais appris le braille, il dut compter sur sa mère pour l'aider, puis sur son assistante Maria Kodama. Il se faisait lire journaux et livres et dictait ses textes.
Outre les fictions, son œuvre comprend poèmes, essais, critiques de films et de livres. On y trouve une sorte de réhabilitation du roman policier, plus digne héritier de la littérature classique à ses yeux, que le nouveau roman. Ce genre littéraire demeure seul, selon lui, à préserver le plan de la construction littéraire classique, avec une introduction, une intrigue et une conclusion.
On trouve également parmi ses écrits de courtes biographies et de plus longues réflexions philosophiques sur des sujets tels que la nature du dialogue, du langage, de la pensée, ainsi que de leurs relations. Il explore aussi empiriquement ou rationnellement nombre des thèmes que l'on trouve dans ses fictions, par exemple l'identité du peuple argentin. Dans des articles tels que L’histoire du Tango et Les traducteurs des Mille et Une Nuits, il écrit avec lucidité sur des éléments qui eurent sûrement une place importante dans sa vie.
Il existe de même un livre qui réunit sept conférences dans diverses universités, qu'on peut considérer comme sept essais, clairs, ordonnés, d'une simplicité dérivant de leur caractère oratoire. Dans ce petit recueil de savoir, Les Sept Nuits (Siete Noches), on trouve un texte sur les cauchemars, sur les Mille et une nuits, sur la Divine Comédie de Dante, sur le bouddhisme et d'autres thèmes que Borges exploite et nous fait partager avec l'autorité didactique et la simplicité pédagogique d'un véritable professeur, érudit de la littérature.
Écrits entre 1923 et 1977, ses poèmes retrouvent les thèmes philosophiques sur lesquels repose la pluralité de l'œuvre de Borges. Des poèmes comme El Reloj de Arena (Le Sablier) ou El Ajedrez (Les Échecs) reconstruisent les concepts borgesiens par excellence, comme le temps, instable et inéluctablement destructeur du monde, ou le labyrinthe comme principe de l'existence humaine, mais d'un point de vue poétique, condensé dans des images surprenantes. Ces poèmes sont réunis dans Antologia Poética 1923-1977 (Recueil Poétique).
Sous le pseudonyme de H. Bustos Domecq, il écrit en collaboration avec Adolfo Bioy Casares Six problèmes pour Don Isidro Parodi, série d'énigmes mi-mondaines mi-policières. Le héros, Don Isidro Parodi, joue les détectives depuis la prison où il est enfermé et dans laquelle il est sollicité par une étrange galerie de personnages. L’isolement forcé semble stimuler sa clairvoyance car, sans quitter sa cellule, il résout chaque énigme aussi facilement que les autres détectives de la littérature, tels Auguste Dupin, Sherlock Holmes ou Hercule Poirot.

Histoire de l'éternité Historia de la eternidad 1936
Six problèmes pour Don Isidro Parodi (1942)
Fictions (Ficciones) (1944) (recueil contenant La Bibliothèque de Babel
L'Aleph (El Aleph) (1949)
Enquêtes puis Autres inquisitions (Otras inquisiciones 1952
L'Auteur puis L'auteur et autres textes (El hacedor 1960
L'Autre, le Même (El otro, el mismo) (1964)
Pour les six cordes (Para las seis cuerdas) (1965
Le Livre des êtres imaginaires (El libro de los seres imaginarios) (1967) collab. Margarita Guerrero (rééd. augm. du Manuel de zoologie fantastique, 1965, trad. de Manual de zoologiá fantástica, 1957)
Éloge de l'ombre (Elogio de la sombra) (1969)
Le Rapport de Brodie (El informe de Brodie) (1970)
Essai d'autobiographie (An autobiographica essay (1970 traduit en 1980 avec Livre de préfaces
L'Or des tigres (El oro de los tigres) (1972)
Introduction à la littérature nord-américaine (Introducción a la literatura norteamericana) (L'âge d'homme, 1973), en collaboration avec Esther Zemborain de Torres
Livre de préfaces puis Préfaces avec une préface aux préfaces (Prólogos con un prólogo de prólogos) (1975)
Le Livre de sable (El libro de arena) 1975
La Rose profonde La rosa profunda 1975
La Monnaie de fer La moneda de hierro 1976
Libro de sueños non traduit 1976.
Qu'est-ce que le bouddhisme? Qué es el budismo?
Histoire de la nuit Historia de la noche 1977
Sept nuits Siete noches 1980
Livre de préfaces, suivi de Essai d'autobiographie 1980
Le Chiffre La cifra 1981
Neuf essais sur Dante Nueve ensayos dantescos 1982
Atlas (1984)
Les Conjurés (Los conjurados) (1985
Le Martin Fierro (1985) trad. Bernard Lesfargues - Éditions Curandera, : , 1985
Conversations à Buenos Aires (Dialogos de Jorge Luis Borges y Ernesto Sábato) (1996) Jorge Luis Borges - Ernesto Sábato
Ultimes dialogues (1996) Jorge Luis Borges - Osvaldo Ferrari
La proximité de la mer, anthologie (2010) (ISBN 978-2-07-012842-6)
La Sœur d'Eloisa avec Luisa Mercedes Levinson, traduction française de Christian Garcia
"Dialogue", entretien, textes rares, lettres inédites, Jorge Luis Borges, Victoria Ocampo, préface de Maria Kodama, introduction d'Odile Felgine, traduction d'André Gabastou, Bartillat/SUR, Paris, 2014
Par ailleurs, Borges a publié un grand nombre de chroniques, notamment dans Proa 1924-1926, La Prensa 1926-1929, Sur et El Hogar 1936-1939.

Dans une entrevue, à l'automne 2010, María Kodama suggère, à qui veut s'initier à l'œuvre de Borges, de commencer par Le livre de sable 1975, Les Conjurés 1985 et Le rapport de Brodie 1970, avant d'aborder Fictions 1944 et L'Aleph (1949).

Adaptations cinématographiques

Invasion, film réalisé par Hugo Santiago en 1968, en collaboration avec Jorge-Luis Borges, sur une idée de Jorge-Luis Borges et Adolfo Bioy Casares;
La Strategia del Ragno (La Stratégie de l'araignée), film réalisé par Bernardo Bertolucci en 1970, d'après Thème du traître et du héros (Fictions);
El Sur (le Sud), film réalisé par Carlos Saura en 1992;

Adaptations musicales

Les ruines circulaires, mélodrame pour piano et un acteur de Michèle Reverdy, 1999

Références littéraires

Dans le roman d'Umberto Eco Le Nom de la rose, adapté au cinéma par Jean-Jacques Annaud en 1986, le bibliothécaire aveugle Jorge de Burgos est une évocation peu voilée de Jorge Luis Borges, la bibliothèque labyrinthique faisant référence à la Bibliothèque de Babel, la célèbre nouvelle de Borges. Umberto Eco, qui vénère indubitablement l'art de Borges s'est sans doute amusé à créer un personnage qui, par son étroitesse d'esprit et son absence totale de curiosité, est un peu le contraire de Borges, même s'il partage avec lui la cécité et la familiarité des livres. La préface du Nom de la Rose est d'ailleurs un clair hommage à Borges et pourrait avoir été écrite par lui. Umberto Eco nous y raconte le mystère compliqué d'un ouvrage de l'abbé Vallet, mystère qui par miracle se dénoue… à Buenos Aires, quand notre romancier, fouinant sur les étagères d'un petit libraire antiquaire dans la Corrientes découvre la version castillane d'un opuscule de Milo Temesvar, De l'utilisation des miroirs dans le jeu des échecs, etc.

Hommages

Le 24 août 2011, Google lui consacra son logo.

liens

http://youtu.be/qT_i9tNbnjE Entretien 1
http://youtu.be/mwcsVdfxCCw Entretien2
http://youtu.be/bVbcroIR0yY entretien 3
http://youtu.be/l_8H1xzcgtM Entretien 4
http://youtu.be/whNgoxPZC00entretien5
http://youtu.be/PCZYdvhSZXI entretien6
http://youtu.be/wQaUk3QAjEk entretien7


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Posté le : 23/08/2014 18:55

Edité par Loriane sur 24-08-2014 15:59:49
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Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
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