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Giovanni Boccacio
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Le 21 décembre 1375 à Certaldo meurt Giovanni Boccaccio

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en français Jean Boccace, mais le plus souvent simplement Boccacio ou Boccace, né en 1313 à Certaldo en Italie écrivain italien.Humaniste sont oeuvre principale est le Décaméron
Son œuvre en toscan, notamment son recueil de nouvelles le Décaméron, qui eut un énorme succès, le fait considérer comme l'un des créateurs de la littérature italienne en prose.
Avec Dante et Pétrarque, qu'il considérait comme ses maîtres, Boccace est l'écrivain le plus célèbre du Moyen Âge italien. Le plus méconnu aussi, du moins en France où les Contes de La Fontaine ont popularisé l'image d'un auteur gaillard, sans dimension philosophique, et où la critique, ignorant le débat ouvert par les travaux de Vittorio Branca sur « Boccace médiéval », le classe volontiers parmi les écrivains de la Renaissance. Il est vrai que le Décaméron occupe une place à part, tant dans la littérature européenne que dans l'abondante production de son auteur : livre d'avant-garde en plein milieu du XIVe siècle et recueil fondateur de la nouvelle occidentale, c'est aussi une œuvre ambiguë qui exprime les positions contradictoires de Boccace sur la société de son temps, ainsi que ses doutes devant une entreprise littéraire vouée par avance à la condamnation des lettrés.

L'inspirateur de la culture humaniste et de la tradition littéraire italienne
Avec Dante et Pétrarque, ses aînés l'un d'une cinquantaine, l'autre d'une dizaine d'années, Boccace est le fondateur à la fois de la plus illustre tradition littéraire italienne et de la culture humaniste, dont s'inspira toute la Renaissance européenne. Et bien avant que la critique du xvie s. en fasse un dogme, si l'œuvre des trois grands Toscans put s'imposer comme une trilogie, c'est à la médiation historique de Boccace qu'elle le doit : Boccace, d'une part disciple de Dante et premier « lecteur » public officiel de sa Divine Comédie, d'autre part condisciple ès humanae litterae et ami de Pétrarque, lequel ne se départit jamais à l'égard d'Alighieri d'une certaine réserve. Et si Pétrarque se tint volontairement isolé dans un univers rhétorique et conceptuel, si l'introspection qui caractérise son œuvre élude toute définition historique précise, en revanche non seulement Dante et Boccace eurent une claire conscience de l'essor de la bourgeoisie qui accompagna l'avènement des communes, mais leur œuvre est fondée pour l'essentiel sur la représentation critique d'une telle conscience : c'est ce qu'en d'autres termes on a parfois appelé leur réalisme. Or, tandis que Dante, au nom des idéaux de l'aristocratie, dont il est issu, jette l'opprobre sur la société communale, qu'il rend responsable de la décadence de l'Italie, Boccace se fait l'interprète des aspirations de la nouvelle bourgeoisie intellectuelle et commerçante, à laquelle il appartient : aspirations non pas à la suprématie politique (sur l'aristocratie, en grande partie assimilée, ou sur le peuple), mais au libre épanouissement de l'individu, par le libre jeu de l'intelligence et des sens. Ainsi, l'amour peut-il apparaître, dans l'œuvre de Boccace, à la fois comme le symbole et le moteur de toute émancipation sociale.
Vie et Å“uvre

En bref

Fils illégitime de Boccaccio di Chellino, qui exerçait l'art mercantile auprès de la puissante compagnie florentine des Bardi, c'est pour le compte de celle-ci qu'il est envoyé s'initier aux affaires à Naples, vers 1328. En 1340, la faillite des Bardi l'oblige à revenir à Florence, où il connaît de sérieuses difficultés financières. La rencontre de Pétrarque en 1350, l'amitié et la collaboration qui s'ensuivirent font coïncider désormais la carrière de Boccace avec l'essor de l'humanisme. Il consacra ses dernières années à transcrire et à commenter les œuvres de Dante (Petit Traité en l'honneur de Dante, 1357-1362), ainsi qu'à revoir le texte de son chef-d'œuvre, le Décaméron (1348-1353). Du séjour napolitain de Boccace datent la Chasse de Diane (1334-1335), où sont célébrées les plus belles dames de Naples, le roman les Travaux d'amour (1336), le poème le Prostré d'amour (vers 1338) et le Téséide pour le mariage d'Émilie (1339-1340), premier poème épique de la littérature italienne de langue vulgaire. Que ce soit en prose (Fiammette, 1343-1344), en vers (Vision Amoureuse, 1342-1343 ; la Comédie des nymphes de Fiesole, 1344-1346) ou dans un savant mélange des deux (Comédies des nymphes florentines, Ameto, 1341-1342), les œuvres suivantes annoncent, au-delà de l'affabulation allégorique, le réalisme historique et stylistique du Décaméron. Ainsi a-t-on pu parler d'Ameto comme d'un « petit Décaméron ». Au-delà de son érudition mythologique et historique, la structure de cette composition allégorique préfigure en effet l'œuvre majeure par l'alternance de véritables nouvelles et d'intermèdes décoratifs, et les sept nymphes qui y racontent leurs amours au jeune berger Ameto ont une liberté de ton digne des futures amantes du chef-d'œuvre. Fiammette en particulier, en dépit de constantes références à la littérature érotique latine, est un véritable « roman psychologique », le premier de la littérature italienne. L'héroïne y fait part, à la première personne, des inquiétudes et des espoirs que lui cause l'éloignement de son amant, Panfilo, dans un style tissé de réminiscences et d'allusions littéraires, qui fait de l'œuvre un des modèles du « roman humaniste ».
Le Décaméron : Fuyant la peste qui s'était abattue en 1348 sur Florence, dix jeunes gens (sept femmes et trois hommes) appartenant à la société la plus aisée de la ville se retirent à la campagne, où ils se récréent dix jours durant (sur les quatorze que durent leurs vacances, le vendredi et le samedi étant consacrés aux oraisons et à l'hygiène) au récit de dix fois dix nouvelles, dont le thème est imposé successivement par le « roi » ou la « reine » de la journée. Telle est la structure des Dix Journées ou Décaméron, où le cadre extérieur de la narration (la célèbre description de la peste, qui ouvre le livre, celle des divertissements – chants et danses – de la compagnie, la psychologie des différents narrateurs et narratrices) est en harmonieux équilibre avec la tonalité des nouvelles qui s'enchaînent les unes aux autres selon les principes les plus raffinés de la rhétorique du temps. L'amour est le motif central de ces récits : amour conjugal ou adultère, sensualité et fidélité, idylle ou tragédie (les amants de Boccace sont capables de mourir d'amour), jusqu'à la représentation emblématique de l'amour comme forme pure de la libéralité et de la magnanimité (Xe journée). Le goût de l'aventure et le triomphe de l'esprit (au double sens de raison et d'ironie, voire d'habileté à duper) sur l'obscurantisme et la niaiserie sont les autres thèmes de prédilection de Boccace et, à travers lui, de la nouvelle bourgeoisie intellectuelle et commerçante. Le monde chevaleresque et courtois est également évoqué dans le Décaméron : non point sur le mode de la nostalgie, mais dans sa dimension poétique de fable.
À l'exception du Corbaccio (1354-1355 ou 1365-1366), violente et énigmatique satire misogyne, et des églogues des Poèmes bucoliques (1351-1366), toutes les œuvres, latines ou vulgaires, postérieures au Décaméron sont de caractère doctrinal ou érudit : Des faits extraordinaires des hommes illustres (1355-1375), Des femmes illustres (1360-1375), Généalogie des dieux païens (1350-1375), des Livres sur les mots, les forêts, les sources, les lacs, les fleuves, les étangs ou marais et sur les noms de mer (1355-1374). Le Petit Traité en l'honneur de Dante jette les bases de la critique humaniste moderne. On peut enfin trouver un précieux témoignage sur l'évolution littéraire et morale de Boccace dans ses épîtres (Lettres, au nombre de vingt-quatre) et dans ses Poésies, qui jalonnent les principales étapes de sa carrière.

[size=SIZE]Sa vie
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Boccace est le fils naturel d’un important homme d’affaires, Boccaccino di Chelino, originaire de Certaldo et résidant à Florence et qui, lié à la compagnie des Bardi, particulièrement puissante à Naples, a effectué plusieurs voyages à Paris. Boccace le suit en 1327 dans cette ville pour des études de droit canonique. Bien que le droit et le commerce l'intéressent peu, il s'intègre facilement à la cour du roi Robert de Naples où il a l'occasion de se lier avec des nobles de la cour de la Maison d'Anjou. Là, il commence également à cultiver ses connaissances littéraires, il lit les classiques latins, la littérature chevaleresque française, Dante et Pétrarque. Il commence également à rédiger ses premiers textes d'inspiration courtoise, en prose, comme le Filocolo, ou en vers, comme le Teseida. Il compose également un poème épique sur la guerre de Troie : le Filostrato. Enfin, c'est à Naples qu'il vit sa première passion amoureuse pour une dame qu'il surnomme Fiammetta.

À la fin de l'année 1340, il rentre à Florence en raison de la faillite des Bardi. Le retour est douloureux : Boccace est triste de quitter Naples et se retrouve dans une situation économique difficile. Cependant, il rencontre Pétrarque avec qui il se lie d'amitié. Dès sa jeunesse, il s'est occupé de poésie ; son admiration pour Dante ne lui permettant pas d'aspirer au premier rang parmi les poètes, il s'est flatté d'obtenir le second mais dès qu'il connait les poésies italiennes de Pétrarque, il perd tout espoir et jette au feu la plus grande partie de ses vers lyriques, sonnets, chants et autres poésies amoureuses. Il continue cependant d'écrire : La commedia delle Ninfe relate les amours d'une nymphe et de son berger, d'autres œuvres, l'Amorosa visione, le Ninfale d'Ameto et le Ninfale fiesolano plus allégoriques, l'Elégie de dame Fiammetta est le récit de style autobiographique d'une jeune Napolitaine trahie par son amant.
En 1348, Boccace assiste aux ravages que la peste noire provoque dans toute l'Europe. C'est peut-être cette pandémie qui le décide à rédiger son chef-d'œuvre : le Décaméron. L'œuvre est un succès et se propage très largement après 1353. Elle lui vaut la reconnaissance de ses pairs et l'offre de nouvelles missions intéressantes par le gouvernement communal de Florence. Dans cette ville, il va occuper la chaire qui vient d'être créée pour l'explication de Dante.
En 1362, à la suite de la malédiction d'un moine chartreux, Boccace vit une profonde crise religieuse et se retire en solitaire dans le domaine paternel de Certaldo. Il va jusqu'à faire le projet de détruire tous ses manuscrits, mais Pétrarque l'en dissuade en le convainquant qu'il doit faire pour la prose ce que lui-même a fait pour la poésie. Bientôt, par ses ouvrages, Boccace va se placer au-dessus de tous les prosateurs italiens, dont il restera longtemps le modèle. La même année, il est accueilli par Niccolò Acciaiuoli au castello di Montegufoni.
Entre 1365 et 1366, Boccace rédige le Corbaccio, œuvre qui reprend la tradition de la satire misogyne de façon moraliste. C'est son dernier ouvrage en toscan. Encouragé par Pétrarque, avec lequel il entretient une correspondance suivie, il revient au latin et compose divers traités, des biographies, des églogues et des épîtres. Il vénère Dante et lui consacre un Trattatello in laude di Dante et des Esposizioni sopra la Commedia di Dante.
Retiré à Certaldo, il vit la fin de sa vie dans la misère. Enfin, en 1373-1374, il est invité par la ville de Florence à faire la lecture publique de la Divine Comédie de Dante dans l'église Santo Stefano di Badia. Mais sa mauvaise santé le contraint d'arrêter et il meurt à Certaldo en 1375, un an après la disparition de Pétrarque.
Si Dante est considéré comme le fondateur de la poésie italienne, Boccace est généralement admis comme le créateur de la prose italienne.
Une stèle en marbre, qui le représente sur l'allée centrale de l'église de Certaldo Alto, lui rend hommage bien que ses écrits l'aient voué aux récriminations de la population en son temps.
En 2011, le nom de Boccace, l'un des précurseurs du genre littéraire de la nouvelle2, a été donné à un prix littéraire français, le prix Boccace, qui récompense un recueil de nouvelles publié en langue française au cours de l'année écoulée3.

Érudition et narration

En 1341-1342, Boccace écrit la Comedia delle ninfe fiorentine, œuvre en vers et en prose qui par bien des aspects (notamment le système des récits encadrés) préfigure le Décaméron. Le poème Amorosa Visione (1342), variante terrestre de la vision de Dante, est plus proche des « triomphes » de Pétrarque et de la Renaissance que de son modèle. Le Ninfale fiesolano (1344-1346), également en vers, apparaît comme un mythe « étrusque », dans lequel l'érudition se convertit en un divertissement élégamment champêtre : Boccace se « florentinise » peu à peu. On retiendra surtout l'Elegia di Madonna Fiammetta (1343-1344 ?). Nouveauté audacieuse, ce roman en prose se présente comme la confession d'une femme, destinée à sa propre consolation ainsi qu'à l'instruction des autres femmes. L'autobiographie amoureuse s'y engage dans une voie résolument psychologique, et même sociologique : ainsi la topique du secret amoureux, transposée de la poésie lyrique dans un espace narratif où intervient la société urbaine, avec ses usages et ses contraintes, acquiert une densité nouvelle, pour ne pas dire un « réalisme » inattendu.

1348 : c'est l'année où la peste ravage toute l'Europe et décime les deux tiers de la population de Florence. Le père de Boccace meurt en 1349, le laissant tuteur de ses trois demi-frères. À ces soucis domestiques s'ajoutent nombre de charges et de missions diplomatiques au service de la commune. Entre 1349 et 1351, Boccace compose le Décaméron, puis rédige la première version du Trattatello in laude di Dante, hommage au grand poète exilé. C'est sans doute vers 1359 qu'il entre dans les ordres, élisant comme Pétrarque une carrière ecclésiastique qui lui assurera des revenus modestes mais stables, sans exclure des fonctions occasionnelles au service de Florence. À partir de 1360, Boccace sera cependant éloigné pour quelques années de toute charge officielle, à la suite d'une conjuration manquée dans laquelle sont impliqués certains de ses amis. À l'un d'eux, Pino dei Rossi, exilé, il adresse en 1361 une longue Épître consolatoire qui traite (avec force exemples tirés de l'Antiquité) de la fortune adverse, mais qui contient aussi de sévères jugements sur les institutions de Florence, perverties par l'« abominable avarice » de ses gouvernants. Retiré à Certaldo, Boccace entreprend la rédaction de plusieurs ouvrages en latin : le De casibus virorum illustrium (narration de destins tragiques) et le De mulieribus claris (biographies de femmes illustres) connurent une diffusion européenne sans précédent.
C'est pendant cette période qu'apparaissent chez Boccace les signes d'une évolution morale qui l'amène à se réfugier dans des valeurs traditionnelles. Ainsi le Corbaccio (1365), pamphlet misogyne d'une rare violence, est comme l'envers caricatural du Décaméron ; selon l'auteur, la vocation de l'intellectuel et du créateur ne peut se réaliser que s'il se tient éloigné des affaires de la cité comme de l'amour des femmes. Cette palinodie, qui contredit le message essentiel des nouvelles, n'est pas sans rapport avec un phénomène plus vaste, qui concerne la civilisation florentine de cette fin de siècle, et qui se caractérise par un repli sur un piétisme frileux, une incertitude craintive devant l'avenir. Il est toutefois un engagement que Boccace ne reniera jamais : la défense de la « poésie », c'est-à-dire de l'activité littéraire, contre les pratiques des mercenaires de la culture et contre la pression des éléments les plus rétrogrades de l'Église. Les Genealogia deorum gentilium, grand traité de mythologie commencé en 1363, et qui deviendra l'ouvrage de référence des érudits aux siècles suivants, sont le témoignage de cette fidélité, et le résultat d'une méditation jamais interrompue sur les problèmes de la création littéraire.
En 1365, Boccace est appelé de nouveau à remplir diverses missions, dont une ambassade à Avignon auprès du pape. Il compile un recueil de ses poésies latines, achève les traités entrepris, recopie de sa propre main son Décaméron... De graves soucis de santé le contraignent à se retirer à Certaldo d'où il reviendra pour tenir à Florence une série de « lectures » publiques de La Divine Comédie : sa fidélité à Dante, elle non plus, ne s'est jamais démentie. Il meurt à Certaldo le 21 décembre 1375, un an après Pétrarque.

Le « Décaméron »

Comme l'écrit l'auteur dans sa Préface, il s'agit de « cent nouvelles, ou fables, ou paraboles, ou histoires, comme il vous plaira de les appeler, racontées en dix jours par une honnête compagnie de sept dames et de trois jeunes hommes pendant le temps de la peste... ». Le récit de l'épidémie, de la rencontre des dix jeunes gens, de leur départ et de leur séjour à la campagne, d'où ils rentreront ensuite à Florence, constitue donc le cadre du recueil. Cette construction par enchâssement n'est pas une invention de Boccace (lui-même l'a déjà expérimentée dans d'autres œuvres), mais sa nouveauté tient aux fonctions multiples qu'elle remplit. La peste, par exemple, constitue l'horizon des nouvelles. Certes, le séjour extra muros est réglé par des lois spécifiques : une royauté provisoire donne à chacun des jeunes gens le pouvoir pendant une journée, et leurs occupations quotidiennes sont régies par une économie du plaisir très raffinée. Mais cette expérience utopique n'est qu'une parenthèse, à l'extérieur de laquelle règnent la mort, le désordre social, la décomposition morale longuement décrits dans l'introduction, et il n'est guère de récit, si joyeux soit-il, qui ne porte la trace même fugitive d'une réflexion sur ces trois aspects de la réalité présente. Inversement, cette même réalité sert de justification morale à la constitution d'un groupe jeune... et mixte, ainsi qu'à la liberté de certains de leurs propos.

La stratégie du narrateur

Ce cadre – qui n'est pas sans présenter certains aspects romanesques – produit également un effet de distanciation, grâce à la « mise en scène » des récits, que soulignent discrètement les réactions ou les commentaires de l'auditoire. Il permet surtout à Boccace d'insérer entre lui-même, auteur, et le public de ses dédicataires (les femmes amoureuses) une succession d'écrans. Ainsi, dans la Préface, où il dédie son livre à celles que leur condition féminine empêche de se livrer aux divertissements sportifs ou aux occupations sérieuses qui offrent aux hommes un dérivatif à leurs peines d'amour, Boccace se présente comme le chroniqueur de l'aventure des dix jeunes gens et le « scripteur » de récits qu'il n'a ni « inventés » (c'est-à-dire choisis) ni racontés lui-même. Dans la Conclusion, il reprendra la même fiction. Grâce à cette délégation de pouvoir, les dix jeunes gens se trouvent investis tour à tour de la fonction de narrateur. Mais, en même temps, ils représentent le public : un public plus diversifié que celui des dames auquel s'adresse la dédicace, et aussi un public idéal de lecteurs instruits, intelligents, sans préjugés comme sans vices, qui savent consommer les nouvelles comme elles sont racontées, avec un esprit large, le sens de l'humour, et beaucoup de sagesse pratique.

Toutefois, ce dispositif ne résiste pas à l'épreuve du réel. Dans l'introduction à la IVe journée, Boccace, s'adressant à ses dédicataires, se livre à une défense et apologie de ses contes en réponse aux attaques dont il est l'objet (signe que les textes devaient circuler bien avant l'achèvement du recueil). Ses détracteurs l'accusent pêle-mêle d'inconvenance, d'inexactitude ; ils lui reprochent surtout de se consacrer à un ouvrage indigne d'un savant et d'un lettré. L'enjeu est d'importance : il y va de l'avenir d'une littérature de divertissement, destinée à un large public et, pour Boccace lui-même, de son image et de sa notoriété d'intellectuel. Ses réponses sont courageuses : il revendique la liberté de l'art, le respect d'un public supposé adulte, le droit à l'existence de récits qui ne sont destinés ni aux étudiants ni aux philosophes. Mais il s'abrite aussi, il faut bien le reconnaître, derrière la notion de genre mineur (« des nouvelettes... écrites en langue vulgaire florentine et en prose... et dans un style très humble et simple »), lors même qu'il emploie tout son art à l'ennoblir.
L'audace de Boccace réside donc dans son projet même et non dans les quelques licences qu'il se permet ici ou là. Le soin qu'il apporte à la disposition de son œuvre en est un autre témoignage.

Un inventaire des valeurs morales

L'ambition de l'auteur se révèle dans l'architecture thématique du recueil. Dès la IIe journée, les conteurs décident en effet de fixer un thème général aux nouvellet de la journée suivante. Seule la dernière nouvelle de chaque journée (réservée par privilège au jeune Dioneo) échappera à la règle, et il en ira de même pour la IXe journée tout entière, espace de liberté à l'intérieur d'une coutume désormais établie. La classification qui en découle fait apparaître en premier lieu les grandes forces qui régissent l'existence humaine : la Fortune (IIe journée), les ressources de l'intelligence individuelle (III), l'amour, dont l'histoire peut connaître un dénouement tragique (IV) ou heureux (V). Cependant, l'exploration des situations particulières prévaut déjà, dans ces journées, sur l'exemplarité des grands thèmes. Cela devient encore plus vrai dans la journée des mots d'esprit (VI), qui célèbre l'art de la parole concise en la considérant comme arme de défense et comme moyen de se tirer de situations périlleuses. De même, les beffe (mauvais tours) des VIIe et VIIIe journées, si elles comportent un aspect ludique, représentent souvent aussi la solution pratique de conflits ou de complications imprévues. Ces trois journées impliquent donc une sanction négative de comportements individuels et sociaux, tels la jalousie morbide, l'hypocrisie bigote, l'avarice, et tous les abus de pouvoir qui en découlent. Quant à la Xe journée, consacrée aux exemples de libéralité et de magnificence, elle célèbre la courtoisie comme la plus haute vertu sociale, accessible à tous ceux que la noblesse de cœur prédispose à l'exercer.

Loin d'être rigide, ce cadre thématique constitue plutôt une orientation préalable, dans laquelle vient s'inscrire une enquête sur le monde : un monde où les valeurs de l'intelligence pratique, de l'esprit d'entreprise, de l'audace et de la prudence, incarnées par les marchands, coexistent – ou devraient pouvoir coexister – avec les valeurs chevaleresques et courtoises appelées à devenir le patrimoine d'une nouvelle élite. Bien entendu, cette hypothèse généreuse ne va pas de soi, elle se heurte aux tares des nouveaux riches, à celles des nobles d'ancien lignage, à la dictature morale exercée par des ordres mendiants à la fois triomphants et dégénérés, à l'appétit insatiable de richesse : autant d'entraves à l'essor d'une civilisation dont la ville (foyer d'échanges et de culture où s'élabore l'urbanité), et Florence plus que tout autre, devrait être le lieu privilégié.

Au-delà de cette enquête, on peut discerner, à défaut d'un système, une « lecture » philosophique du monde, et tout d'abord l'absence, troublante chez un fervent admirateur de La Divine Comédie, de la Providence comme principe d'explication des événements terrestres. Les desseins de Dieu sont « insondables », répète Boccace, et les choses de ce monde « n'ont aucune stabilité ». Ce qui pourrait n'être qu'une pieuse banalité est en fait une loi dans le Décaméron, où les aléas de la fortune ne sont jamais rapportés à quelque intervention divine, si ce n'est d'une manière hypothétique. Ainsi le naufragé Landolfo (II, 4) est-il poussé vers les rivages de Corfou « soit par la volonté de Dieu soit par la force du vent »... La sanction que ces aléas peuvent représenter est moins un châtiment ou une récompense de Dieu qu'un avertissement moral du narrateur : Landolfo a manqué de sagesse en voulant s'enrichir toujours davantage. De plus, contre la Fortune, l'homme dispose d'armes qui sont l'intelligence et le courage.

En l'absence de la Providence, les conduites humaines ne peuvent se régler que sur des forces plus concrètes, dont la principale est la nature. Reconnaître sa puissance est la première vertu de l'homme raisonnable, et la bestialità consiste précisément à refuser les lois de la nature : perversion initiale d'où naissent tous les « appétits corrompus ». Aussi le premier exemple de bestialité est-il l'ascétisme, comme Boccace le démontre dans la « cent unième » nouvelle du Décaméron, cet « apologue des oies » qu'il raconte dans l'introduction à la IVe journée afin de ridiculiser ses détracteurs, qui l'ont accusé de chercher à plaire à son public féminin.
Rares sont les nouvelles où l'on ne rencontre pas cette affirmation des droits sacrés de la nature, qui permet de condamner aussi bien la jalousie d'un marchand toujours absent, la sottise d'un vieux mari, que les excès du pouvoir paternel et fraternel qui s'exerce sur les jeunes filles. Le thème de l'amour s'inscrit évidemment dans ce cadre philosophique, qui justifie en de nombreux cas l'adultère féminin (toujours condamné par la loi), jusqu'à le sublimer en de tragiques exemples de fidélité amoureuse. L'éventail des situations est très ouvert. Le discours de la servante Licisca, dans l'introduction à la VIe journée, donne le ton de certaines nouvelles comiques (en particulier celles qui racontent les mauvais tours joués par les femmes à leurs maris). La nouvelle VI, 7 (dont les personnages appartiennent à la noblesse, mais dont le ton est indubitablement « bourgeois ») présente le cas exemplaire d'une dame adultère que les lois de Prato, particulièrement cruelles, condamnent par avance à la peine de mort. Madonna Filippa réussit lors de son procès à convaincre ses juges de l'acquitter et même, dans l'enthousiasme général, de réviser la loi. Pour sa défense, elle allègue les forces de la nature : elle n'a fait qu'accorder à un noble gentilhomme (qui l'aime à la folie) le « reliquat » de faveurs qu'elle n'a par ailleurs jamais refusées à son mari. Mais cette défense a été précédée par une argumentation juridique : « Les lois doivent être communes et faites avec le consentement de ceux qu'elles regardent. » Or les femmes n'ont jamais été consultées. Ce récit, à le bien lire, est d'une audace extrême, et montre combien la réflexion de Boccace peut avoir d'incidences sur la société, jusque dans ses institutions.
La nouvelle IV, 1 conte, dans un registre tragique, les amours malheureuses de Ghismonda, fille du prince Tancrède, avec un serviteur obscur – mais plein de mérites – que Tancrède fait exécuter, ce qui amène la jeune femme à choisir le suicide. Ici, le motif de la noblesse de cœur, distincte du lignage, entre dans l'argumentation du personnage, et, de façon plus souterraine, la puissance paternelle est associée à un amour incestueux. Ce sont cependant les exigences de la nature qui motivent pour l'essentiel l'éloquent plaidoyer de Ghismonda – trop long, trop éloquent, trop fleuri aussi pour n'être pas l'effet d'un choix médité : l'auteur fait parler Ghismonda comme elle aurait pu parler si elle avait disposé de toutes les ressources de la rhétorique. La gravité du propos s'impose, pour une fois, au détriment de la mimesis.
Nature est raison et, à partir de ce postulat, l'amour est théoriquement un facteur non seulement d'ennoblissement moral (comme le répétait depuis un siècle et demi la poésie lyrique italienne) mais d'enrichissement intellectuel et de civilisation. Ainsi, dans la nouvelle V, 1, Cimone, né faible d'esprit, et menant à la campagne une existence toute animale, devient, une fois touché par l'amour, un modèle d'intelligence, de culture, et de vertus civiles et guerrières.
Dans cette perspective « naturaliste », la femme est nécessairement un personnage central. La civilisation à laquelle aspire Boccace ne peut s'instaurer sans une participation plus grande des femmes à la vie sociale (cela à l'intérieur de cadres qui, on s'en doute, demeurent tout de même assez rigides). On peut donc voir, chez Madonna Filippa comme chez bien d'autres personnages féminins du Décaméron, l'intelligence, l'esprit d'initiative et même l'audace s'allier aux traditionnelles vertus de modestie, de réserve, d'élégance physique et morale requises par les bons auteurs. Une seule catégorie de femmes est condamnée sans appel : celle des femmes vénales, prostituées, ou même telle bourgeoise (VIII, 1), telle paysanne cupide (VIII, 1) qui monnayent leurs faveurs.
La liberté amoureuse (et par suite le féminisme de Boccace) comporte pourtant quelques limites. Il est fermement recommandé de n'être point cruelle envers un amant de haut mérite, même au nom de la fidélité conjugale (car telle est la leçon que les conteurs dégagent de la célèbre nouvelle du faucon, V, 9), et fût-ce au prix d'une mésalliance (V, 8), surtout si cet amant joint, à la noblesse de sang ou de cœur, la qualité d'intellectuel (VIII, 7). L'enseignement de ces trois nouvelles est limpide : si la conversion ne peut s'obtenir, comme dans la nouvelle du faucon, par une longue patience, elle peut être fortement accélérée par la perspective d'un châtiment terrifiant (la « chasse infernale » de V, 8). Et une résistance obstinée, alliée à d'indignes traitements, attire une terrible punition assortie d'explications détaillées sur le danger qu'il y a à se moquer des hommes de science (la nouvelle VIII, 7 annonce l'âcre misogynie du Corbaccio). La « philosophie » de Boccace est faite aussi de ces contradictions dont la part négative, dans le Décaméron, n'apparaît guère qu'en filigrane.

L'encyclopédie des récits

Le Décaméron est aussi un extraordinaire inventaire des formes narratives, « nouvelles, ou fables, ou paraboles, ou histoires ». Les sources de ces récits, orales ou écrites, sont très diverses et V. Branca les a recensées dans son édition. Boccace a souvent puisé dans des répertoires d'exempla à l'usage des prédicateurs, comme la Disciplina clericalis de Pierre Alphonse, ou dans des recueils d'anecdotes historiques comme le Speculum historiale de Vincent de Beauvais. Ces recueils eux-mêmes rassemblent souvent des contes de provenance très ancienne, parfois orientale. Il faudrait citer aussi la Légende dorée de Jacques de Voragine, les comédies de Plaute et de Térence, certaines vidas de troubadours, des fabliaux français... La liste serait fort longue. Il faut remarquer cependant que les cas de dérivation directe sont bien rares (ainsi, les Métamorphoses d'Apulée fournissent la trame intégrale de deux nouvelles : V, 10 et VII, 2). En général, Boccace se contente de reprendre un motif, une situation (souvent topiques), qu'il traite ensuite d'une manière toute personnelle. Nombre de nouvelles, enfin, relèvent des « choses vues », de la chronique municipale, et sont donc marquées par une « florentinité » à laquelle répond la complicité des conteurs.
Dans les Genealogia deorum, Boccace classe les récits selon leur degré de vérité. Tout à fait véridiques, ils portent le nom d'« histoires » (et les anecdotes du De casibus et du De mulieribus entreraient dans cette catégorie) ; l'auteur du Décaméron revendique parfois cette véracité (IX, 5, par exemple) bien que par ailleurs il défende vigoureusement le droit du « poète » à créer de la fiction. Imaginaires, la fable ésopique ou la parabole évangélique sont au service d'une vérité cachée. Il existe enfin des formes mixtes (les mythes, les « figures » de la Bible, la poésie épique) parmi lesquelles Boccace inclut la comédie latine, dont le vraisemblable a pour fonction de décrire les mœurs afin d'instruire le public. En ce sens, les nouvelles du Décaméron appartiennent aux formes mixtes.
Mais là ne s'arrête pas sa réflexion sur les formes de la narration. Traducteur de Quintilien, Boccace a eu l'occasion de méditer sur le problème de l'imitation de la vérité (de la « narration crédible »), sur celui du comique, sur la stylistique du récit (dont les deux pôles sont la concision et la magnificence, et l'idéal constant l'urbanitas). L'écriture de Boccace est nourrie de cette réflexion théorique et présente une extraordinaire diversité de solutions narratives. L'analyse de Mario Baratto montre que le conte linéaire, calqué sur la chronologie des événements, coexiste dans le Décaméron avec le récit romanesque (centré sur l'histoire intérieure d'un personnage), tandis qu'une forme intermédiaire (appelons-la... nouvelle) peut se développer sur la base d'un épisode, nettement délimité, du récit romanesque. On rencontre aussi des nouvelles-débats, construites sur le conflit entre deux individus, et des récits à forte composante théâtrale, qui influenceront d'ailleurs la comédie italienne de la Renaissance. Une telle diversité s'allie nécessairement à la ductilité du style, à la capacité de distinguer des niveaux de langage et même des tempi : dialogue de comédie, parlé et scandé sur un rythme rapide, discours solennel, introductions amples et précises, accélérations ou ralentissements – tout ce qui, dans le Décaméron, consacre la primauté du style sur le schéma de l'intrigue. Le « réalisme » de Boccace est l'effet de ces choix artistiques, qui lui permettront entre autres de faire accéder à l'existence des acteurs qui, s'ils ne sont pas encore les personnages « pleins » du roman moderne, sont déjà à mille lieues des simples « actants » des anecdotes exemplaires. Cette stratégie le distingue aussi d'un auteur comme celui, anonyme, du Novellino (recueil de la fin du XIIIe siècle), dont il s'est parfois inspiré et qui, lui, choisit délibérément la brièveté, la linéarité, inaugurant ainsi une technique que l'on retrouve un siècle plus tard chez Franco Sacchetti.
C'est ainsi que Boccace parvient à libérer dans sa comédie toute la diversité du monde humain, un monde désordonné et souvent périlleux, dans lequel n'intervient plus jamais la divine Providence, et qu'il appartient désormais à ses seuls citoyens de rendre habitable.

Å’uvres

Écrit à Naples vers 1334, La caccia di Diana est un bref poème érotique composé de dix-huit chants formés en tercets. La trame peut se résumer ainsi : Tandis que le poète est submergé par ses peines amoureuses, un esprit envoyé par la déesse Diane convoque celles de Naples, les plus belles, à la Cour «dell'alta idea», les appelant par leur nom, prénom et même leur nom hypocoristique. Guidées par l’inconnue aimée du poète, les dames arrivent dans une vallée et se baignent dans la rivière. Ensuite, Diane forme quatre groupes et la chasse commence. Les proies réunies sur un pré, la déesse invite les dames à faire un sacrifice à Jupiter et à se dédier au culte de la chasteté. L’aimée de Boccace se rebelle et, au nom de toutes, déclare que son inclination est bien différente. Diane disparaît dans les cieux, la donna gentile (l’aimée du poète) déclame une prière à Vénus. Celle-ci apparaît et transforme les animaux capturés — dont, parmi eux, le poète sous forme de cerf — en de fascinants jeunes hommes. Le poème se termine en exaltant l’image du pouvoir rédempteur de l’amour (leitmotiv dans l’œuvre de Boccace).
Ce poème constitue une louange de la beauté des femmes de la ville, ce qui le rapproche de la Vita nuova de Dante. Cependant, il comporte de claires influences de la poésie alexandrine et le thème abordé reprend les topiques des joyeuses galanteries des littératures courtoises françaises et provençales.

Filocolo

Filocolo est un roman en prose, long et embrouillé, qui raconte la légende de Floire et Blancheflor, de tradition française et très diffusée en diverses versions au Moyen Âge. Il est très possible que Boccace se soit inspiré de l’œuvre toscane Il Cantare di Fiorio e Biancofiore, celle-ci étant basée sur un poème français du xiie siècle.
L’œuvre a probablement été composée entre 1336 et 1338, à la demande de Fiammetta, comme l’affirme Boccace dans le prologue. Le titre, inventé par l’auteur, signifie quelque chose comme « fatigue d’amour », en mauvais grec.
L’histoire se forme autour des malheurs de deux jeunes amoureux. Fiorio, fils du roi Félix d’Espagne, et Biancofiore, orpheline accueillie à la cour par piété, qui est en réalité la fille d’une famille de nobles romains, décédés lors de leur pèlerinage à Saint-Jacques-de-Compostelle. Les deux jeunes gens ont été élevés ensemble et sont tombés amoureux à l’adolescence. Le roi, pour empêcher leur union, vend Biancofiore comme esclave à des marchands qui la cèdent à l’amiral d’Alexandrie. Florio, désespéré, prend le nom de Filocolo et part à la recherche de son aimée ; lorsqu’il la retrouve, son identité est découverte et il est réduit en captivité. L’amiral condamne les deux jeunes gens à mort. Juste avant leur exécution cependant, l’amiral reconnaît son neveu en Florio et découvre l’origine noble de Biancofiore. Les deux amants peuvent alors retourner en Italie et s’unir.
Dans le prologue de l’œuvre, après une description des origines du royaume de Naples utilisant de nombreuses allusions mythologiques, Boccace relate sa rencontre avec Fiammetta et comment est né son amour pour elle, l’apercevant un Samedi Saint dans l’église d’un couvent. C’est elle qui lui a demandé d’écrire un poème en « vulgaire », c'est-à-dire un roman. On peut classifier le Filocolo dans le genre littéraire du roman byzantin.

Filostrato

Filostrato est un poème narratif formé autour de la thématique classique. Il est divisé en huit chants écrits en ottava rima. Le titre, formé par un mot grec et un mot latin, peut se traduire approximativement par « Abattu par l’amour ».
La thématique du poème est tirée de la mythologie grecque : Boccace raconte l’amour de Troïlos, fils de Priam, envers Cressida, fille de Calchas, le devin grec aide d’Agamemnon. Troïlos gagne l’amour de Cressida avec l’aide de son ami Pandare. Cependant, lors d’un échange de prisonniers, Cressida est envoyée dans le campement grec. Là, le héros grec Diomède tombe amoureux d’elle et la jeune femme s'éprend également de lui. Troïlos se rend compte de la trahison de son aimée lorsque le troyen Déiphobe lui amène un vêtement de Diomède pris lors d’une bataille, orné d’une broche appartenant à Cressida. Furieux, Troïlos se lance dans la bataille afin d’affronter son rival ; il inflige des pertes aux troupes grecques, mais est abattu par Achille avant qu’il n'ait pu trouver Diomède.
L’histoire n’est pas directement inspirée du mythe, mais du Roman de Troie, élaboration médiévale française de la légende troyenne écrite par Benoît de Sainte-Maure (xiie siècle) dont Boccace a lu la version italienne de Guido delle Colonne. Le poème de Boccace a ensuite trouvé écho dans Troïlus et Criseyde de Geoffrey Chaucer.
L’histoire de Filostrato peut se lire comme la transcription littéraire de ses amours avec Fiammetta. L’ambiance du poème rappelle la cour de Naples, et la psychologie des personnages est décrite par de subtiles notes. Il n’existe pas d’accord sur la date de la composition : certains pensent que le texte a été écrit en 1335, d’autres considèrent qu’il date de 1340.

Teseida

Selon certains auteurs, la Teseida (de son nom complet Teseida delle nozze di Emilia – « Teseida des noces d’Emilia ») est le premier poème épique composé en italien. Tout comme dans Filostrato, la rime utilisée est la « ottava rima ». Boccace raconte les guerres que le héros grec Thésée mena contre les Amazones et contre la cité de Thèbes. Le poème est divisé en douze chants, imitant l’Énéide de Virgile et la Thébaïde de Stace.
L’épopée constitue le sujet principal mais Boccace ne délaisse pas complètement le thème amoureux. La Teseida fait le récit de l’affrontement entre deux jeunes habitants de Thèbes, Palemon et Arcita, afin de conquérir l’amour d’Emilia, sœur de Hippolyte (la reine des Amazones). L’œuvre contient une longue et alambiquée lettre à Fiammetta, ainsi que douze sonnets qui résument les douze chants du poème.

Comedia delle ninfe fiorentine

Le Triomphe de Vénus, Angelo Bronzino
La Comedia delle ninfe fiorentine (Comédie des nymphes florentines), également connue sous le nom de Ninfale d'Ameto ou simplement Ameto, d’après le nom du personnage principal, fut probablement composée entre 1341 et 1342. Il s’agit d’une fable idyllique allégorique, écrite en prose, alternant des fragments en tercets enchaînés. Cette forme n’est pas nouvelle, on la retrouve dans de nombreuses œuvres médiévales, comme la Vita nuova de Dante ou De nuptiis Philologiae et Mercurii (Noces de Mercure et la Philologie), de Martianus Capella. Encore une fois, le thème de Boccace réside dans le pouvoir rédempteur de l’amour qui permet à l’humain de passer de l’ignorance à la connaissance et à la compréhension du mystère divin.
L’œuvre commence avec le berger Ameto qui erre dans les bois d’Etrurie où il aperçoit un groupe de magnifiques nymphes se baignant au son du chant de Lia. Ameto, fasciné par le chant de la nymphe, s’éprend d'elle et se dévoile aux nymphes. Le jour consacré à Vénus, sept nymphes se réunissent autour de Ameto et lui content leurs histoires amoureuses. Après avoir écouté leurs récits, Ameto, sur ordre de la déesse, prend un bain purificateur lui permettant de comprendre la signification allégorique des nymphes (qui représentent les vertus théologales et cardinales), celle de sa rencontre avec Lia (qui implique sa propre transformation de l’état animal à humain, ouvrant la possibilité de connaître Dieu).
Thème et ambiance sont cependant très différents ; la structure de cette œuvre annonce déjà celle de son œuvre principale le Décaméron.

Amorosa visione

L’Amorosa visione est un poème allégorique en tercets enchaînés composé, comme l’Ameto, au début des années 1340, lorsque l’auteur réside à Florence. Il se divise en cinquante chants brefs. Suivant la structure de la visio in somnis (« vision en songes »), il relate comment une très belle femme, envoyée par Cupidon au poète, l’invite à abandonner les « vains plaisirs » pour trouver la vraie félicité. La femme guide le poète vers l’étroite porte (représentant la vertu) d'un château dont il refuse de franchir le seuil préférant y accéder par la grande (symbole de la richesse et des plaisirs mondains). Deux salles du château sont ornées par des fresques dignes de Giotto : celles de la première salle représentent les triomphes de la Sagesse – entourée par des allégories des sciences du trivium (grammaire, dialectique et rhétorique) et du quadrivium (géométrie, arithmétique, astronomie et musique) —, de la Gloire, de la Richesse et de l’Amour. La deuxième salle représente la triomphe de la Fortune. Sur les fresques, de nombreux personnages historiques, bibliques et mythologiques côtoient de célèbres hommes de lettres. À la suite de la contemplation des peintures, le poète sort dans le jardin où il rencontre d’autres femmes : la « belle Lombarde » et la « Nymphe sicule » (qui pourrait être Fiammetta). Le poème se termine abruptement peu après.
L’Amorosa visione présente plusieurs similitudes avec la Divine Comédie. La critique l’a également comparé à une autre œuvre de caractère allégorique, les Triomphes de Pétrarque. Selon certains auteurs, le modèle de ce château allégorique est Castelnuovo di Napoli, dont les salles furent décorées de fresques de Giotto durant l’époque de Robert d’Anjou.

Elegia di Madonna Fiammetta

Elegia di Madonna Fiammetta, probablement écrit entre 1343 et 1344, a été qualifié par la critique de « roman psychologique ». En prose, il se présente comme une longue lettre. La protagoniste, Fiammetta, relate son amour juvénile pour Pamphile, dans le décor dans la ville de Naples. Cette relation se termine lorsque Pamphile doit partir à Florence. Se sentant abandonnée, Fiammetta tente de se suicider. Vers la fin de l’œuvre, la protagoniste reprend espoir lorsqu’elle apprend que Pamphile est de retour à Naples, mais découvre avec amertume qu’il s’agit d’une personne portant le même nom. L’auteur dédicace l’œuvre aux « femmes amoureuses ».
Malgré la forte composante autobiographique – la relation de l’auteur avec l’énigmatique Fiammetta, qui se déroula d’une manière relativement différente -, son traitement de la passion amoureuse trouve des réminiscences dans des œuvres littéraires comme les Héroïdes d’Ovide, Pamphilus de amore d’un auteur anonyme, ou De Amore d’Andreas Capellanus.

Ninfale fiesolano

Ninfale fiesolano, écrit entre 1344 et 1346, est une fable étiologique destinée à expliquer les noms de deux fleuves de Toscane : Africo et Mensola. D’inspiration pastorale – comme l’Ameto —, elle est écrite en ottava rima, et raconte l’histoire des amours entre Africo et la nymphe Mensola ainsi que la naissance de leur enfant, Proneo.
Selon cette œuvre, les collines de Fiesole étaient habitées par les nymphes dédiées au culte de Diane et à la chasse. Le berger Africo s’éprit de l’une d’elles, Mensola, mais, à chaque fois qu’il s’approchait, les nymphes s’enfuyaient apeurées. Le père d’Africo, Girafone, essaya de le dissuader, lui contant l’histoire de Mugnone, transformé en fleuve pour avoir osé aimer une nymphe. Africo, cependant, persévèra et, aidé par Vénus, s’unit à son aimée. Mensola, enceinte, fuit la compagnie d'Africo. Pensant être méprisé par son aimée, celui-ci se suicida en plongeant dans la rivière qui porte ensuite son nom. Diane découvrit l’accouchement de Mensola et la maudit ; la jeune femme se suicida dans le cours d'eau qui prit son nom. Son fils, élevé par les parents d’Africo, devint l'un des premiers habitants de la ville de Fiesole.
L’œuvre a une grande influence sur les œuvres pastorales des siècles suivants, comme Stanze de Angelo Poliziano, ou Nencia da Barberino de Laurent le Magnifique.

Œuvres de maturité, Décaméron

Durant la peste qui frappe la ville de Florence en 1348 et dont l’auteur a été témoin, trois jeunes hommes et sept jeunes femmes se réunissent à l’église Santa Maria Novella et prennent la décision de s’isoler dans une villa lointaine pour échapper à la peste.
Dans ce lieu, pour éviter de repenser aux horreurs vues, les jeunes gens se racontent des contes les uns aux autres. Ils restent durant quatorze jours dans la villa mais sans raconter d'histoire les vendredis et samedis. Le titre vient donc de ces dix journées de contes. Chaque jour, un participant tient le rôle de « roi » et décide du thème des contes. Cependant, le premier et le neuvième jours, cette règle n'est pas appliquée. Au total, l'œuvre se compose de cent récits de longueur inégale.
Les sources qu’utilise Boccace sont variées : des classiques gréco-romains aux fabliaux français médiévaux.

Corbaccio

Corbaccio a été écrit entre 1354 et 1355. Il s’agit d’un récit dont la trame, fine et artificieuse, n’est qu’un prétexte pour agencer un débat moral et satyrique. Par son ton et sa finalité, l’œuvre s’inscrit dans la tradition de la littérature misogyne. Le titre fait certainement référence au corbeau, considéré comme symbole de mauvais présage et de passion sans contrôle ; pour d’autres critiques, on le doit à l’espagnol corbacho (la verge qu’utilisait le contremaître pour fustiger les galériens). Le sous-titre de l’œuvre est Laberinto d'Amore, labyrinthe d’amour. La première édition fut réalisée à Florence en 1487.
Le ton misogyne du Corbaccio est probablement une conséquence de la crise que provoque la relation de l’auteur avec un moine siennois[Qui ?]. Il existe de nombreuses œuvres littéraires dans la tradition occidentale de caractère misogyne, depuis Juvénal à Jérôme de Stridon.
La composition trouve sa source dans les amours infructueuses de Boccace. Entré dans la quarantaine, il s’est épris d’une belle veuve et lui a adressé des lettres exprimant son désir et son amour. La dame a montré ces lettres à ses proches, se moquant de lui à cause de ses origines modestes et de son âge. Ce livre est la vengeance de l’auteur, dirigée non seulement contre la veuve, mais contre toute la gent féminine.
L’auteur rêve qu’il se déplace dans des lieux enchanteurs (les flatteries de l’amour), lorsqu’il se retrouve soudain dans une jungle inextricable (le Labyrinthe de L’Amour qu’il appelle également la Porcherie de Vénus). Là, transformés en animaux, expient leurs péchés les malheureux trompés par l’amour des femmes. Le défunt mari de la veuve apparaît sous forme de spectre, et lui conte en détail les innombrables vices et défauts de son épouse. Comme pénitence, Boccace doit révéler ce qu’il a vu et entendu.

Autres Å“uvres marquantes

Boccace est également l’auteur d’une des premières biographies de Dante Alighieri, le Trattatello in laude di Dante, ainsi que d’une paraphrase en tercets enchaînés, la structure de strophes utilisée par Dante dans la Divine Comédie (Argomenti in terza rima alla Divina Commedia).
Citons aussi ses Rimes, recueil de poésies de thème amoureux, et sa traduction en italien des décades III et IV de Tite Live.

Å’uvres en latin

Genealogia deorum gentilium (« Généalogie des dieux des païens »), divisé en quinze livres, est une des anthologies les plus complètes de légendes de la mythologie grecque, auxquelles Boccace donne une interprétation allégorique et philosophique. Il commence cette œuvre avant 1350, à la demande de Hugo de Lusignan, roi de Chypre, à qui est dédicacé le livre. Il continue de le corriger jusqu‘à sa mort. Ce livre de référence a été l'un des plus consultés par les écrivains jusque bien tard dans le xixe siècle.

De casibus virorum illustrium

De casibus virorum illustrium (que l’on peut traduire autant par « Des cas d’illustres hommes » tout comme par « des chutes d’illustres hommes ») tente de démontrer la caducité des biens de ce monde et le caractère arbitraire de la fortune. L’auteur illustre son propos par une série d’histoires où apparaissent des personnages de toutes les époques : depuis Adam jusqu'à ses contemporains, les récits se structurent en neuf livres. L’œuvre est dédicacée à Mainardo Cavalcanti. Boccace en a certainement commencé l'écriture vers 1355, mais n'a pas complété l'ouvrage avant 1373–1374.

De claris mulieribus

Imitant la collection de biographies De viris illustribus de Pétrarque, Boccace compose entre 1361 et 1362 une série de biographies de femmes célèbres. Elle est dédicacée à Andrea Acciaiuoli, comtesse d’Altavilla. Elle a servi de base à de nombreux écrivains dont Geoffrey Chaucer, auteur des Contes de Canterbury. Cet ouvrage a été traduit du latin en italien par le "Signeur Luc-Antonio Ridolfi, puis de l'italien en françoys par Guillaume Rouville, qui était aussi imprimeur à Lyon. La traduction française a été publiée le 12 septembre 1551 (à Lyon chez Guill. Rouville à l'Escu de Venise) sous le titre de:"Des Dames de Renom".

Autres Å“uvres en latin

Dans la même lignée de la Genealogia deorum gentilium, Boccace écrit un répertoire alphabétique des toponymes apparaissant dans les œuvres classiques de la littérature latine qu’il intitule De montibus, silvis, fontibus, lacubus, fluminibus, stagnis seu paludis, et de nominibus maris liber ; ce répertoire est publié en 1360. L’écrivain compose également seize églogues suivant les modèles de Virgile et de Pétrarque, Bucolicum carmen, publiés en 1367, et vingt quatre épîtres, dont ne sont conservées que deux traductions en italien.

Publications au XIXe siècle

Les œuvres diverses de Boccace ont été publiées à Florence ou plutôt à Naples en 1723 et 1724, en 6 volumes in-8 ; il faut y joindre le Décameron, dont un in-folio est l'édition la plus ancienne (Venise, 1471), , et dont un in-4 constitue la plus précise (Florence, 1597).
On peut se contenter de l'édition de Paris, 1768, 3 volumes in-12, ou de Milan, 1803, le volume in-8. On recherche encore l'ancienne traduction française de Jean Martin, réimprimée à Paris en 1757 (5 volumes in-8) ; l'abbé Sabatier de Castres en a rajeuni le style en 1779 (40 volumes in-18, réimprimés en 1804). Une traduction publiée sous le nom de Mirabeau, (Paris, 1802, 4 volumes in-8) n'a pas eu de succès.


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Posté le : 21/12/2014 13:45
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Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
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