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Elisabeth de France, soeur de Louis XVI
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Le 10 mai 1794 à Paris est guillotinée Élisabeth de France

Philippine Marie Hélène de France, dite Madame Élisabeth, ("Babet" ) princesse de sang de la maison de Bourbon, elle est tuée à 30 ans, née le 3 mai 1764 à Versailles, elle est enterrée au cimetière des Errancis, soeur fidèle de Louis XVI, huitième et dernier enfant du dauphin Louis Ferdinand et de Marie-Josèphe de Saxe, elle était la sœur du roi Louis XVI à qui elle apporta un soutien indéfectible.
Dévouée à son frère, elle se refusa à émigrer et partagea son sort. Emprisonnée au Temple en 1792, puis à la Conciergerie en 1793, elle fut guillotinée le 10 mai 1794.
Emprisonnée avec lui en 1792, elle fut appelée à comparaître devant le Tribunal révolutionnaire sous la Terreur, fut condamnée à mort et exécutée.

En bref

Le 3 mai 1764, la dauphine Marie-Josèphe de Saxe met au monde son neuvième enfant : une petite fille. On baptise la nouvelle princesse Elisabeth-Philippine-Marie-Hélène. Couramment, elle se nommera Elisabeth. Alors qu’elle est encore un bébé, son père le dauphin Louis-Ferdinand, meurt le 20 décembre 1765. Elle ne connaitra pas davantage sa mère qui décède le 13 mars 1767. Elisabeth sera toujours très proche de sa sœur Marie-Clotilde et de son frère aîné le duc de Berry (futur Louis XVI). Elisabeth demeurera la seule personne qui aimera vraiment Louis-Auguste pour ce qui était. Durant sa petite enfance, la princesse aimera passer beaucoup de temps avec sa tante Madame Louise qui quittera la cour en 1771 pour devenir religieuse. Mmes de Guéménéé et de Marsan sont chargées de s’occuper de l’enfant et de son éducation. Autant sa sœur Marie-Clotilde est appliquée, sage et disciplinée, autant Elisabeth est têtue et distraite. Les deux princesses sortent parfois rendre visite aux pensionnaires de Saint-Cyr. Bientôt, Elisabeth s’y trouve une amie en la personne d’Angélique de Marckau, future marquise de Bombelles (dont le fils deviendra l’époux de l’Impératrice Marie-Louise). Sur la demande de Mme de Marsan, Mme de Marckau, mère d’Angélique, accepte de la seconder dans l’éducation d’Elisabeth. La petite princesse trouvera en elle l’esprit maternelle que Mme de Marsan n’a pas. On remarque très vite dans les études d’Elisabeth qu’elle est passionnée par les mathématiques comme son frère Louis-Auguste qui joue toujours le grand frère protecteur. La princesse possède une bibliothèque très fournie de 2075 volumes sur l’histoire antique, la politique…elle partage le gout de Louis XVI pour la lecture. Elle est devenue une élève docile et attentive autant que brillante. Madame Elisabeth se trouve également être une excellente cavalière et adore suivre ses frères à la chasse. Elisabeth se montrera fort attristée par la départ de sa sœur Marie-Clotilde en 1775 qui part épouser Charles-Emmanuel de Savoie, futur roi de Sardaigne. La petite princesse se rapproche de Marie-Antoinette avec qui elle monte quelques pièces de théâtre. Elisabeth se rapproche également de sa cousine Louise-Adélaïde de Bourbon-Condé. En grandissant, Madame Elisabeth est devenue une superbe jeune femme et on penserait bien à la marier. On envisage un moment l’Infant du Portugal, Charles-Philippe de Savoie et même l’empereur Joseph II. Mais aucunes négociations n’aboutie. Certains sont d’ailleurs persuadé qu’Elisabeth entrera en religion comme sa tante Madame Louise. Mais bien que très croyante, la sœur de Louis XVI n’a pas de vocation religieuse. Un jour, la princesse déclarera « Je ne puis épouser que le fils d’un roi, et le fils d’un roi doit régner sur les Etats de son père. Je ne serais plus française, et je ne veux pas cesser de l’être. Mieux vaut rester ici, au pied du trône de mon frère, que de monter sur un autre ». En 1782, Louis XVI fait don à sa sœur d’une grande demeure à Montreuil où Madame Elisabeth régnera comme la reine tient sa cour à Trianon. Elisabeth y reçoit ses amies, plus particulièrement sa chère Angélique de Bombelles qu’elle surnomme « Bombe ». La princesse est aussi la bienfaitrice des habitants de Montreuil : elle distribue le lait, les œufs et les légumes de sa maison aux enfants et aux personnes dans le besoin, rend visite aux personnes malades accompagnée d’un médecin. Bien qu’intelligente, Madame Elisabeth ne s’engage pas trop en politique et évoque à peine dans sa correspondance l’affaire du collier qui éclabousse la reine. Le 9 juillet 1786, Marie-Antoinette met au monde une petite fille prénomée Sophie-Béatrice dont Elisabeth sera la marraine. Hélas, la petite Sophie meurt le 19 juin 1787, victime de convulsions. Bien qu’elle ne prenne pas part aux débats politiques, Madame Elisabeth comprend bien que son monde est en train de s’effondrer. Elle s’est fait parvenir des journaux et des libelles qui en disent long sur la fin de la monarchie. Après la chute de la Bastille, Elisabeth hâte le départ de sa chère Angélique de Bombelles le 1er aout. Les deux amies sont néanmoins bien loin de se douter que c’est la dernière fois qu’elles se voient. Elles échangeront encore les lettres espérant toujours pouvoir se retrouver. Louis XVI envoi quant à lui ses frères en exil étant sûr qu’il ne s’agit que « d’une affaire de trois mois ». Le comte d’Artois encourage Elisabeth à partir avec lui mais la princesse refuse, préférant rester auprès de son « auguste frère » Louis XVI. Quelques jours plus tard, la princesse suit la famille royale aux Tuileries. Là bas, elle va s’ennuyer à mourir, regrettant ses longues promenades à pieds et Montreuil. Parfois, Elisabeth aimerait aller quelques jours à Fontainebleau ou à Saint-Cloud. A chaque fois, c’est un refus. La famille du roi ne doit pas sortir de Paris. Durant son long séjour aux Tuileries, Elisabeth correspond beaucoup avec Mme de Bombelles. Le 20 juin 1791, Madame Elisabeth est mise au courant du projet d’évasion qui doit avoir lieu la nuit même. Mais pour le roi de France, la fuite s’arrête, comme chacun le sait, à Varennes. Le voyage du retour vers la Capitale est un supplice pour Elisabeth qui voit son frère et Marie-Antoinette hués par la foule. Elle avait senti la fin de la monarchie dés 1788 ; le non respect du peuple vis-à-vis des souverains lui fait comprendre qu’elle ne s’était pas trompée. De retour aux Tuileries, Elisabeth reprend ses correspondances avec Angélique de Bombelles et avec son frère le comte d’Artois. Souvent, les lettres sont codées. La princesse fait preuve de calme, voit dans les malheurs de sa famille la volonté de dieu, prie beaucoup, a toujours de gentilles paroles pour ses proches et réconforte souvent Louis XVI. Le 20 juin 1792, une foule envahi le palais pour tuer la reine. Alors que le roi tente de calmer les fous furieux et que Marie-Antoinette est mise en sécurité auprès de ses enfants, Madame Elisabeth porte assistance à son frère manquant de se faire assassiner, des forcenés l’ayant prise pour la reine. Le 10 aout, la famille royale est contrainte de quitter les Tuileries pour trouver refuge auprès de l’Assemblée qui siège au Manège. Le 13 aout, Louis XVI et ses proches prennent la direction du Temple, palais du duc d’Angoulême (fils du comte d’Artois), vide depuis l’exil du frère du roi. La famille royale est logée dans la tour. Le 21 septembre, la monarchie est abolie. Dés lors, Madame Elisabeth n’est plus qu’Elisabeth-Marie Capet. La vie devient plus difficile pour Elisabeth qui subi les humiliations des gardes. Pourtant, si Marie-Antoinette juge que les français doivent être punis, Madame Elisabeth espère qu’ils seront pardonnés par dieu. Au Temple, elle donne des cours de mathématiques au dauphin et initie sa nièce Madame Royale à des travaux de coutures. Après un procès qui semblait déjà joué, Louis XVI est condamné à mort. Le 20 janvier 1793, Elisabeth voit son frère pour la dernière fois. Le roi est guillotiné le lendemain matin. Dés lors, le petit dauphin devient Louis XVII. La vie se durcie de jour en jour pour les prisonniers. Le 3 juillet, le jeune « Louis-Charles Capet » est arraché à Marie-Antoinette. Le 2 aout, c’est la reine que l’on emmène. Avant de quitter le Temple, Marie-Antoinette confie sa fille à Madame Elisabeth. Voici que le 6 octobre, Elisabeth est confrontée à son neveu qui l’accuse d’attouchements et d’inceste. La princesse ne reconnaît plus l’enfant. Après s’être exclamée « Oh ! Le monstre » elle dira avec tristesse « cela ne peut être lui…ils l’ont rendu fou ». Elisabeth reporte maintenant toute son affection sur la seule parente qu’il lui reste en ces lieux : sa nièce Marie-Thérèse. La princesse apprendra à la jeune Madame Royale à se débrouiller seule, à ne pas rester inactive et à se méfier des geôliers. Au soir du 9 mai 1794, on vient la chercher. Après des ultimes recommandations à Marie-Thérèse, Elisabeth est conduite à la conciergerie. Après Louis XVI et Marie-Antoinette, s’ouvre le « procès » de la sœur du roi. Madame Elisabeth est humiliée par ses juges, mise plus bas que terres. On l’accusera surtout d’avoir fait parvenir des diamants à son frère le comte d’Artois pour organiser la contre-révolution et rétablir la monarchie. Mais tout est joué d’avance pour Elisabeth. En écoutant la sentence de mort, la princesse reste digne. Elle doit être exécutée le lendemain, elle n’a que 30 ans à peine. Ce jour là elle apprend seulement la mort de sa belle-sœur survenu le 16 octobre précédent. Elle réconforte les condamnés qui doivent eux aussi passer sous le couperet de la guillotine, leur disant qu’ils doivent être bienheureux de quitter « cette terre où il n’y a aujourd’hui que tourments et douleurs ». Elisabeth sera la dernière appelée ce 10 mai sur l’échafaud. La princesse monte courageusement les marches, arrivée en haut, son fichu de mousseline glisse. Elisabeth demanda alors à son bourreau « Au nom de la pudeur, couvrez-moi monsieur ». Le bourreau lui rajuste son vêtement, Elisabeth vient de prononcer ses derniers mots. Plusieurs témoins affirment qu’à l’instant où Madame Elisabeth fut guillotinée, une odeur de rose se répandit. Ce fut un choc pour les comtes de Provence et d’Artois ainsi que pour Marie-Clotilde d’apprendre la mort de leur sœur. Beaucoup ne comprennent pas pourquoi fallait-il faire mourir cette femme pieuse qui jamais ne causa de tort autour d’elle. Napoléon Ier lui-même ne comprendra jamais pourquoi Elisabeth fut envoyé à l’échafaud car « elle ne le méritait pas ». En 1795, Madame Royale apprit la mort de sa tante et déclara qu’elle espérait qu’un jour elle serait mise au rang ses saintes. Angélique de Bombelle reçu la nouvelle comme un coup de couteau. Elle ne se remit jamais de l’assassinat de la princesse. Elisabeth aurait dit un jour « je vivrai jusqu'à 80 ans, à moins qu'on ne m'assassine !.

Sa vie

Née le jeudi 3 mai 1764 vers une heure du matin, au Château de Versailles, dernière enfant du dauphin Louis-Ferdinand et de son épouse Marie-Josèphe de Saxe, elle est baptisée le jour de sa naissance dans la chapelle du château de Versailles par l'archevêque de Reims Charles Antoine de La Roche-Aymon dans la chapelle royale du château de Versailles, en présence de son grand-père le roi Louis XV de France - qui pleure encore la mort de sa favorite, la marquise de Pompadour décédée deux semaines plus tôt, de sa grand-mère la reine Marie Lesczynska et de la famille royale. Jean-François Allart, curé de l'église Notre-Dame de Versailles, paroisse où est situé le château rédige l'acte de baptême qui occupe une demi-page du registre et fait signer ses "très hauts et très illustres" paroissiens. Ironie du sort, l'acte suivant mentionne le baptême d'une pauvre enfant naturelle.
Le parrain de la princesse est son oncle par alliance Philippe Ier, infant d'Espagne, duc de Parme, Plaisance et Guastalla, représenté par le futur Louis XVI Louis Auguste de France, et sa marraine est sa grand-tante Élisabeth Farnèse, princesse de Parme, reine douairière d'Espagne, qui lui donne son prénom et est représentée par Marie-Adélaïde de France, fille de Louis XV1.

Une orpheline royale

Son père, le dauphin, mourut de tuberculose l'année suivante et la dauphine le suivit deux ans plus tard dans la tombe. Tous deux n'avaient que 36 ans lors de leur décès. Le couple delphinal laissait cinq enfants survivants dont l'aîné, le futur Louis XVI, avait 13 ans.
L'arrière grand-père de Madame Élisabeth, Stanislas Leszczynski, roi de Pologne détrôné placé sur le trône de Lorraine par son gendre Français mourut en février 1766. La Lorraine perdit alors son indépendance et devint une province Française.
La reine Marie Leszczyńska, grand-mère de Madame Élisabeth, mourut en juin 1768. Le roi, qui venait de faire acheter la Corse à la république de Gênes pour affermir la présence française en Méditerranée, trouva également une nouvelle et somptueuse favorite, la comtesse du Barry.
Élisabeth de France fit donc ses premiers pas au sein d'une famille divisée et en deuil. Sa première compagne de jeu fut sa sœur de six ans son aînée Clotilde de France, que son embonpoint avait fait méchamment surnommée par la cour "gros-Madame", comportement indigne et indélicat de l'élite française qui se voulait disciple de Rousseau et de Voltaire, qui vivaient leurs dernières années envers une enfant de 9 ans.

Une éducation princière

Confiée avec sa sœur Madame Clotilde aux soins de la comtesse de Marsan, Madame Élisabeth reçut une excellente éducation. Elle se passionnait pour les sciences.
Madame Élisabeth avec son carlin, peinte vers 1770 par Drouais à l'époque du mariage de son frère le dauphin et de l'archduchesse Marie-Antoinette d'Autriche
Sous l’égide de son maître de mathématiques Antoine-René Mauduit, elle mettra au point une table préparatoire à l’étude des logarithmes dont la précision fut telle qu'elle sera utilisée par les astronomes et les navigateurs.
Pour l’art, en particulier le dessin et alors qu’elle était encore enfant, sa gouvernante, la comtesse de Marsan, l’emmenait avec sa sœur aînée, Madame Clotilde, aux salons de peinture officiels. Par la suite, la princesse montra de réelles dispositions pour le dessin et le musée de Versailles conserve quelques-unes de ses œuvres.
La princesse apprit à jouer de la harpe mais il faut avouer qu'elle chantait extrêmement faux.
Connue pour sa grande piété, Madame Élisabeth avait subi l’influence de ses Mesdames tantes, filles de Louis XV, qui lui avaient inculqué une grande dévotion, sans altérer en elle une certaine liberté d'esprit, y compris à l'occasion dans le domaine de la religion, ce dont témoigne sa correspondance.
Elle a six ans lorsque son frère Louis-Auguste devenu dauphin épouse l'archiduchesse d'Autriche Marie-Antoinette, jeune fille pleine de charme mais superficielle.
La même année sa tante "Madame Louise" entre au Carmel de Saint-Denis afin de prier pour le salut de son père. Proche de sa jeune nièce sur laquelle elle aura une certaine influence, elle y mourra en 1787.
Le 10 mai 1774, Louis XV meurt et Louis-Auguste à l'âge de 19 ans, devient roi sous le nom de Louis XVI.
L'éducation de "Madame Élisabeth" fut alors confiée à la baronne de Mackau, 1723-1801 qui sut conquérir l'affection de la princesse et dont la fille Marie-Angélique de Mackau devint l'amie la plus proche.

La sœur du roi

Quelques mois plus tard, tandis que la princesse assiste au sacre de son frère, le jeune Louis XVI, en la cathédrale de Reims, sa sœur "Madame Clotilde" est mariée au prince de Piémont. La jeune Élisabeth, à peine âgée de 11 ans, voit avec peine sa sœur dont elle était très proche, quitter Versailles pour Turin.
L'âge du mariage ou d'un établissement conforme à son rang approche également pour Élisabeth.
Pressentie en 1777 pour épouser le frère de Marie-Antoinette, l’empereur Joseph II, deux fois veuf mais sans enfant et de 23 ans son aîné, elle obtint de Louis XVI de pouvoir rester à Versailles.
Faute de prince à lui faire épouser, le roi lui proposa la charge de coadjutrice de la prestigieuse abbaye de Remiremont en succession de leur tante Christine de Saxe mais elle se désintéressera de devenir abbesse, préférant les joies de la Cour et la compagnie de son médecin et ami de cœur, le docteur Dacy avec qui elle aurait vécu un amour platonique.
En 1779, la princesse qui a 15 ans obtient l'autorisation d'avoir sa propre maison et des revenus en propre. Avec l'accord du roi, elle nomme immédiatement Angélique de Mackau première dame d'honneur.

Montreuil

En 1783, le roi lui offrit le domaine de Montreuil, acheté aux Rohan-Guéméné et situé dans le village de Montreuil non loin du château de Versailles.
De 1784 à la Révolution, d'importants travaux de reconstruction et d'aménagement furent entrepris par Jean-Jacques Huvé, inspecteur des Bâtiments du Roi, et attaché au département des Dehors du château de Versailles, Grande Écurie, Petite Écurie, Grand Commun, Hôtels du Grand Maître de France, du Chancelier, Louveterie, Chenil, etc.. Les bâtiments furent reconstruits dans le goût néo-classique et les jardins dans le goût anglo-chinois alors en vogue, grotte factice, cours d'eau, cascade, etc.. Sous la direction d'Huvé, le château fut meublé avec des pièces commandées à l'ébéniste Jean-Baptiste-Claude Sené, exposées aujourd'hui au Musée du Louvre et au Musée Nissim-de-Camondo.
Madame Élisabeth ne sera jamais proche de sa belle-sœur la reine Marie-Antoinette.
À Montreuil, la princesse fit venir de Suisse la promise de son vacher qui se morfondait et fit célébrer leur mariage en l'église Saint-Symphorien. C'est l'origine de la fameuse comptine "Pauvre Jacques".
Favorable à la Variolisation qui permettait de se prémunir contre la petite vérole, maladie contagieuse mortelle et fréquente qui touchait indifféremment toutes les couches de la population laissant au mieux d'horribles cicatrices sur le visage, elle fit appeler son médecin. Celui-ci fut surpris de la trouver entourée de ses dames mais aussi des paysans de ses terres qui purent ainsi bénéficier gracieusement des progrès de la médecine.
Elle se priva également pendant quatre ans des étrennes que le roi lui donnait afin qu'une de ses dames pour accompagner, mademoiselle de Causans, puisse constituer la dot nécessaire à son mariage avec le marquis de Raigecourt, gentilhomme Lorrain dont elle était éprise.

La Révolution

Le 3 mai 1789, "Madame Élisabeth" atteint l'âge de la majorité légale.
Elle ne profitera guère de cette liberté : le lendemain, elle assiste en l'église Saint Louis de Versailles à l'ouverture des États Généraux.

Auprès du Roi

Le 4 juin 1789, le dauphin, s'éteint à l'âge de 7 ans au Château de Meudon. Le roi ayant demandé à reculer la date de réception des députés pour se remettre de son deuil, se voit opposer une fin de non-recevoir. "Madame Élisabeth" se rapproche de la reine, sa belle-sœur, pour soutenir le roi.
Madame Élisabeth peinte par Mme Vigée-Lebrun en 1790
Le 6 octobre 1789, la famille royale est ramenée de force par le peuple à Paris.
Alors qu’elle aurait pu se retirer avec ses tantes au château de Bellevue près de Meudon, elle choisit de partager le sort de son frère. Elle disposa désormais d’un appartement aux Tuileries à Paris.
Malgré les apparences, la princesse tenait parfois tête à son frère ou à sa belle-sœur Marie-Antoinette. Leurs affrontements portaient sur des choix de stratégie politique, la princesse adoptant une position ultra, sans la moindre concession aux partisans d’une monarchie constitutionnelle.
Dès 1790, elle soutenait le principe d’une alliance des émigrés avec les puissances étrangères dont elle attendait le salut. Par l’intermédiaire du comte de Virieu, entre autres personnes, elle correspondait régulièrement avec le comte d’Artois, son frère, émigré à Turin puis à Coblence dont elle partageait les idées.
Une de ses lettres au comte d’Artois fut découverte un jour sur un officier qui la transportait, et la missive fut remise pour examen à l’Assemblée Nationale. La princesse Élisabeth disait du roi qu’il se laissait mener par ses ministres vendus à l’assemblée, et qu’il n’y avait rien à espérer sans aide extérieure. Elle recommandait au comte d’Artois d’agir par lui-même, l’engageant à mettre les autres souverains d’Europe dans leurs intérêts, car, disait-elle, Louis XVI est si faible qu’il signerait sa propre condamnation si on l’exigeait de lui.
Elle s’opposa également à la constitution civile du clergé et à toute mesure qui diminuait les prérogatives royales ou celles de l'Eglise.

Refus d'émigrer

"Mesdames tantes" quittèrent la France pour les États du pape en 1791 et proposèrent à leur nièce de les accompagner. "Madame Élisabeth" choisit encore une fois de rester avec le couple royal.
Elle suivit son frère et sa belle-sœur lors de la fuite déjouée vers Montmédy, le 20 juin 1791.
Un an plus tard exactement, les révolutionnaires forçaient les portes du palais des Tuileries pour intimider Louis XVI et l’inciter à suspendre son veto maintenu sur diverses mesures préconisées par l’assemblée. Confondue avec la reine, Élisabeth fit face aux émeutiers déchaînés sans les détromper sur son identité.

Incarcération

Quand le roi fut suspendu par l’Assemblée législative le 10 août 1792 et détrôné un mois après, l’Assemblée décréta que« Louis Capet, son épouse et leurs enfants, Louis-Charles et Marie-Thérèse, ainsi qu’Élisabeth, seraient détenus jusqu’à nouvel ordre à la Prison du Temple.
Minée par des nuits sans sommeil depuis les événements d’août et les Massacres de septembre 1792, elle se métamorphosa physiquement.
Un chirurgien du comte d’Artois qui la visita en décembre 1792 - à l’époque du procès de Louis XVI - dit qu’elle était devenue méconnaissable .
Une lettre de la marquise de Bombelles – informée par sa fille Mme Alissan de Chazet qui communiquait en secret avec les prisonniers – donnait ces nouvelles au marquis de Raigecourt, époux de sa meilleure amie :
"J’ai eu comme vous les mêmes informations sur notre malheureuse princesse, sa maigreur est, dit-on, effrayante, mais la religion la soutient, et elle est l’ange consolateur de la reine, de ses enfants ; espérons qu’elle ni les siens ne succomberont à tant de maux. Comment pourrait-on se plaindre en ayant l’imagination remplie du douloureux tableau des habitants du Temple ?"
À la Prison du Temple, Élisabeth continua à communiquer avec l’extérieur, par l’intermédiaire de Mmes Thibault, Saint-Brice et de Jarjayes.
Le peintre Alexandre Kucharski, de l’aveu de Marie-Antoinette à son procès, parvint lui aussi jusqu’aux prisonnières dont il a laissé des effigies.

Le roi fut exécuté le 21 janvier 1793.

Début juillet, pour parer à toute tentative d’évasion, le jeune Louis-Charles, 8 ans, fut séparé de sa mère et de sa tante, puis Marie-Antoinette, sur décret de Barère, rapporteur du Comité de salut public, fut renvoyée au Tribunal révolutionnaire et envoyée le 1er août à la Conciergerie.
À l'hiver 1793, l'ex-"Madame Élisabeth" , ignorant l'exécution de sa belle-sœur, partageait sa cellule avec sa nièce de 15 ans sur laquelle elle veilla après l’exécution de ses parents et la séparation de son frère le petit "Louis XVII". On semblait l’avoir oubliée.

Exécution

La Convention avait d’abord prévu qu’Élisabeth "Capet" serait expulsée de France. Mais des documents cités en octobre 1793 lors de l’instruction du procès de Marie-Antoinette, devaient entraîner un décret de renvoi de la prisonnière devant le Tribunal révolutionnaire.
Pour un certain nombre de députés dont Robespierre, Madame Élisabeth ne présentait pas un grand risque pour l’avenir de la République, mais avec la guerre souterraine que se livraient les membres des comités, la répression se montrait de moins en moins sélective dans le choix de ses victimes. La " soeur du tyran " donna l’occasion à la police politique d'organiser un procès au terme duquel Élisabeth fut condamnée à la peine de mort.
À l’accusateur public qui la traitait de sœur d’un tyran, elle aurait répliqué : Si mon frère eût été ce que vous dites, vous ne seriez pas là où vous êtes, ni moi, là où je suis ! »…
Le 10 mai 1794 20 floréal an II, elle fut conduite en charrette à la place de la Révolution, la dernière d’une fournée de vingt-cinq personnes. C'est à ce moment qu'elle apprend de ses compagnons d'infortune le sort de Marie-Antoinette. Avant son exécution, elle réclamera sans succès les secours d'un prêtre que Fouquier-Tinville refusera avec dérision.

Derniers instants

Après qu'on eut procédé à sa toilette funèbre, elle continua à réconforter ses compagnes et compagnons d'infortune. Elle sauvera la vie d'une d'entre-elles, Madame de Sérilly, en la convaincant de révéler un possible début de grossesse.
Un gardien, nommé Geoffroy a relaté que tous, comme attirés par une force surnaturelle, venaient se grouper autour d'Élisabeth
À chacun elle disait un mot, une phrase, qui venaient du plus profond de son cœur

L'échafaud

Son rang de princesse du sang fit que Fouquier-Tinville la désigna pour monter la dernière sur l’échafaud. Son fichu ayant glissé de ses épaules, elle se serait ainsi adressée au bourreau : Au nom de la pudeur ou selon les versions : au nom de votre mère, couvrez-moi monsieur ! Elle ignorait que son corps sans vie serait dévêtu et exposé aux regards des fossoyeurs qui récupéraient les vêtements et plaçaient les corps dénudés dans les fosses communes.

Les Errancis

Son corps tronqué et dénudé fut jeté dans une des fosses communes du cimetière des Errancis. Après la Révolution, la dépouille ne put être identifiée malgré le témoignage d'un fossoyeur qui avait localisé la fosse commune. Les ossements exhumés lors des travaux de percement d'avenues furent placés aux catacombes de Paris avec ceux des autres condamnés. On ne put identifier ses restes.

Un médaillon la représente à Saint-Denis.

Acte de décès de Madame Élisabeth

L'acte de décès de Madame Élisabeth est rédigé le 20 mai 1794. L'original de l'acte a disparu lors de la destruction des archives de Paris en 1871 mais il avait été plusieurs fois recopié. Voici ce que dit le texte :
« Du premier prairial de l'an deuxième de la République.
Acte de décès de Élisabeth-Philippine-Marie-Hélène Capet du vingt-et-un floréal, sœur de Louis Capet, âgée de 30 ans, native de Versailles, département de Seine-et-Oise.
Vu l'extrait du jugement du tribunal criminel révolutionnaire et du procès-verbal d'exécution, en date du vingt-et-un floréal.
Signé Deltroit, écrivain greffier

Armes de Madame Élisabeth

En tant que fille de France non mariée, madame Élisabeth portait les armes de France, d'azur à trois fleurs-de-lys d'or sur un écu en losange

Le supplice de Mme Elisabeth soeur du roi par G.Gautherot.

par G.Gautherot

Madame Elisabeth, Philippine-Marie-Hélène de France
(3 mai 1764, Versailles- 10 mai 1794, Paris)

Le 9 mai 1794, au Temple, vers 8 heures du soir, au moment où Madame Elisabeth, soeur de Louis XVI, et sa nièce, Madame Royale, allaient se coucher, on poussa leurs verrous et on heurta à leur porte.
Ma tante, raconte la fille de Louis XVI, dit qu’elle passait sa robe; on lui répondit que cela ne pouvait pas être si long, et on frappa si fort qu’on pensa enfoncer la porte (sic). Elle ouvrit quand elle fut habillée.
On lui dit:
- Citoyenne, veux-tu bien descendre ?
– Et ma nièce ?
– On s’en occupera après.
Ma tante m’embrassa et me dit de me calmer, qu’elle allait remonter.
– Non, citoyenne, tu ne remonteras pas, lui dit-on; prends ton bonnet et descends.
On l’accabla alors de grossièretés et d’injures; elle les souffrit avec patience, prit son bonnet, m’embrassa encore et me dit d’avoir du courage et de la fermeté, d’ésperer toujours en Dieu, de me servir des bons principes de religion que mes parents m’avaient donnés, et de ne point manquer aux dernières recommandations de mon père et de ma mère. Elle sortit.
En bas, on visite ses poches, on lui fait traverser les cours sous une pluie battante et on la mène en fiacre à la Conciergerie. A dix heures du soir, on l’introduit dans la salle du Conseil, où le juge Deliège, en compagnie de Fouquier-Tinville, lui inflige un premier interrogatoire :
– Avez-vous, avec le dernier tyran, conspiré contre la sûreté et la liberté du peuple français ?
– J’ignore à qui vous donner ce titre, mais je n’ai désiré que le bonheur des Français.

- Avez-vous entretenu des correspondances et des intelligences avec les ennemis extérieures et intérieurs de la République, notamment avec les frères de Capet et les vôtres, et ne leur avez-vous pas fourni des secours en argent ?
- Je n’ai jamais connu que des amis des Français. Jamais je n’ai fourni de secours à mes frères, et depuis le mois d’août 1792, je n’ai reçu de leurs nouvelles ni ne leur ai donné des miennes.
– Qu’avez-vous fait dans la nuit du 9 au 10 août 1792 ? [jour de la prise des Tuileries]
– Je suis restée dans la chambre de mon frère, et nous avons veillé.
– Je vous observe qu’ayant chacun vos appartements, il es étrange que vous vous soyez réunis dans celui de votre frère, et sans doute cette réunion avait un motif que je vous interpelle d’expliquer.
– Je n’avais d’autre motif que celui de me réunir toujours chez mon frère lorsqu’il y avait du mouvement dans Paris.
– Et cette même, nuit n’avez-vous pas été avec Marie-Antoinette, dans la salle où les Suisses étaient occupés à faire des cartouches ?
– Je n’y ai pas été, et n’ai nulle connaissance de cette salle…
– Lors de l’évasion du 20 juin, n’est-ce pas vous qui avez amené les enfants ?
– Non, je suis sortie seule.
– Avez-vous un défenseur ou voulez-vous en nommer un ?
– Je n’en connais pas.

On lui désigna d’office Chaveau-Lagarde. Mais à quoi bon? Donne-t-on un défenseur à la brebis qu’on va égorger? Lisons d’ailleurs la Note historique de Chaveau-Lagarde :
Je me présentais à l’instant à la prison pour m’entretenir avec elle de son acte d’accusation. On ne voulait pas que je lui parlasse. Fouquier-Tinville eut la perfidie de me tromper en m’assurant qu’elle ne serait pas jugée de sitôt, et il me refusa l’autorisation de conférer avec elle. Le lendemain, qu’elle ne fut pas ma surprise, lorsque, m’étant rendu au tribunal, j’aperçus Madame Elisabeth environnée d’une foule d’autres accusés, sur le haut des gradins, où on l’avais placé tout exprès la première pour la mettre plus en évidence. On la jugea, en effet, dès le lendemain, le 10 mai 1794.

La « fournée » était de vingt-cinq têtes, et il y avait vraiment de quoi satisfaire les sans-culottes les plus raffinés : il y en avait pour tous les goûts :
Une Parisienne « vivant de ses revenus », Denise Briard (52 ans);
Un ex-employé à l’habillement des troupes, Louis Letellier (21 ans);
Un tailleur, ex-sous-lieutenant de marine, Charles Cressy-Champmillon (33ans);
Un ex-officier municipal de la commune de Paris, l’apothicaire Georges Follope (64 ans), qui, de service au Temple, avait manifesté trop de commisération pour les prisonniers royaux;

De vils aristocrates : la marquise de l’Aigle, veuve (55ans); le comte Leneuf-Sourdeval (69 ans); la marquise de Crussal-d’Amboise (64 ans); Françoise de Canisy, veuve du comte de Montmorin, l’ancien ministre des Affaires Etrangères, acquitté par le tribunal du 17 août 1792, mais massacré dans sa prison en septembre, et son fils, le sous-lieutenant de chasseurs Antoine de Montmorin (22 ans); la marquise de Sénozans, soeur de Lamoignon de Malesherbes (76 ans).
Puis, un groupe de quatorze personnages, que l’épicier Maure, conventionnel en mission dans l’Yonne, apôtre de la Raison, avait expédiés d’Auxerre au tribunal : Louis-Claude Lhermite de Champbertrand, chanoine de Sens (60 ans); sa soeur, la comtesse de Rosset, femme d’un maréchal de camp (65 ans), et sa parente, Mme de Rosset-Cercy, femme d’un officier de marine (44 ans); trois membres de la famille Mégret : Antoine Mégret-Sérilly, ancien trésorier général de la guerre (48 ans), sa femme (31 ans), et Antoine Mégret d’Etigny, ex-aide-major des gardes françaises (46 ans); plus deux domestiques de la même famille, J.-R. Lhost et Antoine Dubois; le négociant de Sens, Théodore Halle (26 ans); enfin, cinq membres de la famille de Loménie : l’ancien ministre de la Guerre de Loménie de Brienne, l’ancien colonel de chasseurs Alexandre de Loménie (36 ans); l’ancien coadjuteur de l’archevêque de Sens, Martial de Loménie (30 ans), Charles de Loménie (33 ans) et sa soeur Charlotte de Loménie (29 ans).

Peut-on imaginer plus affreuse hécatombe ? Après la condamnation, Fouquier-Tinville ayant observé à Dumas que la princesse n’avait pas poussé une plainte :
De quoi se plaindrait-elle donc, Elisabeth de France, répondit avec une gaieté féroce le président du tribunal; ne lui avons-nous pas formé une cour d’aristocrates dignes d’elle? Rien ne l’empêchera encore de se croire dans les salons de Versailles quand elle va se voir au pied de la sainte guillotine, entourée de toute cette noblesse fidèle.
C’est bien elle, en effet, c’est son âme sublime qui va dominer cette cour sanglante, et c’est sur elle avant tout que s’acharne l’accusateur public.
Un seul acte d’accusation englobe les vingt-cinq victimes qui s’ignorent ou qui ne se sont pas revues depuis plusieurs années. Un seul témoin est entendu, une femme qui connaissait la marquise de l’Aigle. L’interrrogatoire public est presque inexsistant, et les charges sont nulles et ridicules. Dumas reproche, par exemple, au comte de Brienne, d’avoir été ministre en 1788 et de s’être fait nommer maire par une commune qu’il avait comblé de bienfaits. On les rend coupable, non pas même de ce qu’ils ont fait, mais de ce qu’ils ont pu faire, de ce qu’ils sont présumés avoir fait, des opinions qu’ils doivent avoir :
Dans un temps de révolution où chacun doit prendre parti, expose le président, on est fondé à présumer que les opinions, bien plus que les convenances, déterminent les rapports sociaux, et se serait blesser la vérité et la vraissemblance que de vouloir admettre les liaisons le patriote et le royaliste, qui sont aussi opposés l’un à l’autre que le protestant avec l’ultramontain.
En ce qui concerne Madame Elisabeth, les pièces ne sont autres que celles qui ont servi pour Louis XVI et Marie-Antoinette, et cela suffit, puisque l’on la va tuer uniquement en raison de son sang royal, du sang de cette « famille Capet » à qui le peulple français, rappelle Fouquier-Tinville, « doit tous les mots desquels il a gémi depuis tant de siècles »; puisqu’on l’accuse d’avoir elle-même partagé « les crimes de tout genre, les forfaits amoncelés par Capet, de la Messaline Antoinette, des deux frères Capet »… Lisons quelques autres passages du réquiqitoire :

Elisabeth a coopéré à toutes les trames, à tous les complots formés pas ses infâmes frères, par la scélérate et impudique Antoinette, et toute la horde de conspirateurs qui s’était réunie autour d’eux… elle encourage les assassins de la patrie…
Elisabath avait médité avait Capet et Antoinette le massacre des citoyens de Paris dans l’immortelle journée du 10 août. Elle veillait dans l’espoir d’être témoin de ce carnage nocturne, elle aidait la barbare Antoinette à mordre les balles et encourageait par ses discours les jeunes personnes que des prêtres fanatiques avaient conduites au château pour cette horrible occupation. Enfin, trompée dans l’espoir que toute cette horde de conspirateurs avait… elle fuit au jour avec le tyran et sa femme et va attendre dans le temple de la souveraineté nationale que la horde des esclaves soudoyés et dévoués aux forfaits de cette cour parricide ait noyé dans le sang des citoyens de la liberté, et lui eût foufni les moyens d’égorger ensuite ses représentants…
Enfin, on l’a vue, depuis le suplice du plus coupable des tyrans qui ont déshonnoré la nature humaine, provoquer le rétablissement de la tyrannie en prodiguant avec Antoinette au fils Capet les hommages de la royauté et les prétendus honneurs du trône.
Le nouvel interrogatoire n’est que la mise ne demandes de ces monstrueuses insanités. Madame Elisabeth y répond avec simplicité, une dignité, un calme merveilleux :
- N’avez-vous pas donné des sions, pansés vous-mêmes les blesssures des assassins envoyés aux Champs-Elysées contre les braves Marseillais ?
– Je n’ai jamais su que mon frère eût envoyé des assassins contre qui que ce soit. S’il m’est arrivé de donner des secours à quelques blessés, l’humanité seule a pu me conduire. Je n’ai point eu besoin de m’informer de la cause de leurs maux pour m’occuper de leur soulagement. Je ne m’en fait un mérite, et je n’imagine pas que l’on puisse m’en faire un crime…
– L’accusée Elisabeth, dont le plan de défense est de nier tout ce qui est à sa charge, aura-t-elle la bonne foi de convenir qu’elle a bercé le petit Capet de l’espoir de succéder au trône de son père, et qu’elle a ainsi provoqué la royauté ?
– Je causais familièrement avec cette infortuné qui m’étais à plus d’un titre, et je lui administrais, sans conséquence, les consolations qui me paraissaient capables de le dédommager de la perte de ceux qui lui avaient donné le jour.
– C’est convenir, en d’autres termes, que vous nourrissiez le petit Capet des projets de vengeances que vous et les vôtres de faire contre la liberté, et que vous vous flattiez de relevé les débris d’un trône brisé en l’inondant du sang des patriotes.

Les jurés, les solides -ceux qui condamnaient toujours- étaient éclairés. Et l’on préférerait qu’un avocat n’eût pas fait aux assassins l’honneur d’intervenir. Chauveau-Lagarde, pourtant, se leva et prononça une courte défense dont il écrivit plus tard le résumé : là où il ny a aucun élément légal de conviction, observa-t-il, il ne saurait y avoir de conviction légale; tous les débats consistaient dans les réponses de l’accusée, et ces réponses, loin de la condamner, ne prouvaient que la bonté de son coeur et l’héroisme de l’amitié : la princesse, qui avait été à la cour de France le plus parfait modèle de toutes les vertus, ne pouvait d’ailleurs être l’ennemis des Français… Dumas, furieux, reproche alors à l’avocat de « corrompre la morale publique » en parlant des « prétendues vertus de l’accusée », et Madame Elisabeth, jusqu’alors insensible à sa propre situation, se montra tout à coup émue des dangers courus par son défenseur.
La « conviction légale » n’avait cependant rien à voir dans cette affaire; ou plutôt nous savons en quoi elle consistait. Le jugement de condamnation avait été dressé à l’avance et signé en blanc, comme le prouve l’espace vide qui, dans l’original, sépare le corps de l’acte de la formule finale et de la signature des juges.

Comme d’ordinaire, les charrettes du bourreau attendaient à la porte de la Conciergerie.
Parquées dans l’étroite et obscure salle des condamnés à mort, assises sur les bancs de bois qui faisaient face à une cloison vitrée, les victimes assistaient à leur toilette funèbre. La vieille marquise de Sénozans (76 ans) se lamentait. La comtesse de Montmorin, après avoir vu massacré son mari, ne pouvait se résigner à voir périr avec elle son fils de vingt-deux ans. Madame Elisabeth, sereine, les réconfortait :
– On n’exige point de nous, disait-elle, comme des anciens martyrs, le sacrifice de nos croyances; on ne nous demande que l’abandon de notre misérable vie : faisons à Dieu ce faible sacrifice avec résignation.
Au bout d’une heure, on fit l’appel suprême, et les charette - » les bières des vivants », disait Barère- se remplirent. Madame Elisabeth monte à l’échelle avec Madame de Sénozans et de Crussol; au Pont-Neuf, le mouchoir blanc qui couvrait sa tête se détache et est ramassé par l’éxecuteur; elle refuse qu’elle le lui remette, et elle va tête nue jusqu’à la place de la Révolution, montrant à tous sa modeste et pieuse sérénité. Le médecin Dacy, qui crois les charettes, rentre chez lui boulversé, et dit à sa femme en pleurant :
– Je viens de rencontrer un ange allant à l’échafaud!

[les Parisiens l'appelaient aussi "Sainte Geneviève des Tuileries", sainte Geneviève (5e s.) étant leur sainte patronne]

Elle descend la première, s’assied, le dos à l’échaffaud, sur la banquette de bois où l’on attend son tour; puis -raconte un officier municipal, Moelle, témoin oculaire- « répand un angélique sourire sur les compagnons de sa mort, lève les yeux au ciel, les reporte sur eux, et leur dit ainsi que c’est au ciel qu’ils vont se réunir. »

La vieille marquise de Crussol d’Amboise est appelée la première : elle se lève, s’incline devant la jeune princesse, lui demande la permission de l’embrasser, et va livrer sa tête au bourreau. Les autres femmes l’imitent à son tour, et tout à tout aussi les hommes viennent s’incliner devant la royale victime qu’on a réservé pour la fin. Avant de mourir, le sous-lieutenant de Montmorin répond aux hurlements de la populace par le cri de Vive le Roi! et le domestique, Baptiste Dubois, répète ce cri vibrant.
Madame Elisabeth récite le De Profundis pour ceux qui déjà ne sont plus. L’avant dernier est le chanoine de Champbertrand, dont elle reçoit une suprême absolution.
Elle se lève enfin, et monte à l’échaffaud d’un pas si ferme que le bourreau renonce à la soutenir. Au moment où on l’attache, debout sur la planche redressée, son fichu de linon tombe et laisse apparaitre sur sa poitrine une médaille de la Vierge. La planche bascule, et s’accomplit le crime auquel on peut appliquer le mot de Napoléon Ier a prononcé au sujet du supplice de Marie-Antoinette : » Il y a quelquechose de pire encore que le régicide. » [creux!]
On n’a pas crié cette fois, Vive la République!
» Une odeur de rose, rapporte Madame de Genlis, se répandit sur la place Louis XV. »

Le corps, décapité, fut placé sur le tas de cadavres qui remplissaient la grande charrette et y baignaient, au fond, dans le sang. Au cimetière de la Madeleine, il fut dépouillé, abandonné ainsi sur le sol, puis précipité dans l’énorme fosse de douze à quinze pieds de longueur et de largeur, de dix-huit pieds de profondeur, dans la fosse commune où les ossements se confondirent à ce point avec les autres qu’il fut impossible de les identifier en 1817, lorsque son frère louis XVIII tenta de retrouver ses restes pour leur donner sépulture honorable.

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Posté le : 09/05/2015 14:27

Edité par Loriane sur 10-05-2015 16:35:53
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Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
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Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
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