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Accueil >> newbb >> Défi du jour de Pâques [Les Forums - Défis et concours]

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Défi du jour de Pâques
Plume d'Or
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Bonjour à toutes et à tous,

Je suis invité depuis ce matin à la réunion de gestion de crise de l'ordre international des cloches de Pâques. Elles ont voté à une grande majorité de ne pas sonner cette année.
Je leur ai demandé une suspension de séance pour trouver de nouveaux arguments pour qu'elles sonnent, malgré le malheur actuel des temps.

Je compte sur mes ami(e)s de l'Orée pour me trouver de nouveaux arguments pour les convaincre de sonner.
S'il vous plait, soyez nombreuses et nombreux à me les proposer en vers, en prose, en sonnets, en émotions, avec les mots que vous voudrez bien faire sonner en vous.

Et que vos mots résonnent de leur sonorité!

Amitiés.

Jacques

Posté le : 26/03/2016 10:53
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Re: Défi du jour de Pâques
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Elles avaient trop sonné, bien trop carillonné,
Ces cloches qui rythmaient la vie des gens d’avant,
Mais les temps ont changé, on peut dorénavant
Dérangé par son son, un clocher bâillonné.

Dés lors de guerre lasse, le battant sur la robe
S’est mit au grand repos, un besoin de vacances,
Les hommes n’ayant plus aucune tolérance,
Au moment de tinter la cloche se dérobe.

Elle regrette ce temps ou, sonnant à tout va,
Matines ou Angélus, vêpres ou enterrement,
Elle régissait l’instant de chaque événement,
Allant aux sombres jours, jusqu’à sonner le glas.

C’est pour elle aujourd’hui que le glas a sonné,
Elle s’est tue vaincue par la chose moderne,
Le portable et l’ordi désormais nous gouvernent
Mais plus le carillon, il faut se raisonner.

Rien n’est jamais acquis, et pour s’en persuader,
Je propose ceci : dés demain aux aurores
Chacun des Loréens fera ce geste fort
Aller dans les beffrois, l’interdiction braver

A la volée sonnez, sonnez, sonnez encore !!!
IL nous faut réveiller les vivants qui sommeillent
Sur leurs petits acquis qu’ils conservent en bouteille
Au risque d’en user jamais, jusqu'à la mort.

Agitez le tocsin, au plus fort, au plus haut
Que ce tonnerre de bruit secoue aussi les Dieux,
A défaut d'apparaître qu’ils exaucent ce vœu :
‘’A tous ces fous d'eux-mêmes, qu'ils leurs greffent un cerveau !!!!’’


‘’Qu'il serait doux, le son des cloches, s'il n'y avait, parmi les hommes, tant de mal’’.






Posté le : 26/03/2016 14:47
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Titi
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Re: Défi du jour de Pâques
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Cher Serge,

Tu as donc carillonner le premier.
Tu sembles à cela y être habitué.
Qu'il est doux de t'entendre statuer
Sur le renouveau des cloches à restituer.
Je m'en vais donc demain les sonner,
Rendre témoignage devant nos ami(e) de l'Orée.
En faisant sonner les cloches de Dijon, afin de greffer
des cerveaux à tous ces cons, à la rage échauffée.

Merci mon ami.
Je te souhaite un magnifique dimanche de Pâques au milieu de toutes celles et de tous ceux que tu aimes.
Porte toi bien et prend bien soin de toi.

Amitiés de Dijon.

Jacques

Posté le : 26/03/2016 17:20
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Re: Défi du jour de Pâques
Plume d'Or
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Quel sonorité dans ce poème, mon chère kjtiti !
Le défi commence sous les meilleures auspices.
Bravo !
Donald

Posté le : 26/03/2016 19:24
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Re: Défi du jour de Pâques
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Le petit Titi, enfant rêveur, demanda un jour à sa maman si elle connaissait le langage des cloches et des clochettes.
-Les cloches ne parlent pas !!! répondit elle.

-Mais si, elles parlent entre elles, il suffit de les écouter avec attention, pour s’apercevoir qu’elles ne disent jamais la même chose, elles ne sonnent jamais pareilles.

-Tu rêves trop mon Titi, les cloches ne sont là que pour prévenir les hommes des nouvelles du canton : elles annoncent les mariages, les naissances, préviennent la venue des grandes catastrophes, comme les guerres et accompagnent les personnes qui rejoignent définitivement les nuages!! On dit qu’elles sont le doigt qui indique le ciel.

-Mais pourquoi ne font-elles jamais le même son, alors ???

Bien décidé à élucider ce mystère, Titi se rendit sous le clocher de l’église, mais à l’ instant où il pénétrait dans l’édifice, les cloches se sont tues, comme si elles voulaient taire cette évidence: elles parlaient entre elles, mais ne voulaient pas que cela s’ébruite !!!

Titi, trop malin pour rentrer dans leur jeu, sorti de l’église nonchalamment, puis en fit le tour et pénétra subrepticement de nouveau dans celle-ci, par la porte de la sacristie, sans être vu des cloches !!!
-Ding, Ding, Dong firent les cloches et Titi tapi sous le clocher, bien que ne connaissant pas cette langue, de traduire de suite cette volée !!

-On l’a échappé belle, disait l’une des cloches

-Tu as raison répondit une autre, d’autant que seuls les enfants peuvent comprendre notre langage !!

-Aux oreilles des enfants et de ceux qui perdent un ami, nous avons un son tout particulier ajouta l’une d’entre elles.

-Bon, reprenons notre conversation, moi je ne suis pas d’accord pour faire la grève du son, nous sonnons depuis des siècles, personne ne comprendrait notre silence !!!!

-Justement, c’est l’intérêt de cette révolte silencieuse, il serait temps que les hommes aient un autre regard sur notre fonction, sans justement leur tirer les cloches !!!

-C’est vrai, reprit une troisième, alors que nous leur sommes fidèles depuis des centaines d’années, ils nous délaissent de plus en plus, ils ne regardent plus notre clocher pour vérifier l’heure, avec internet la technique nous tuent.

- Et le comble avança la seconde, c’est qu’ils font sonner leur Smartphone avec le bruit de l’une d’entre nous !!!!!

-Il nous faudrait entendre ce qu’en pensent les autres cloches du canton interrompit la première qui était la meneuse, pour avoir un autre son de cloche. Interrogeons-les.

-Ding, ding ,dong !!! Salut les filles, nous sommes les représentantes de la CGT, la Confédération Générale du Tintement, et nous projetons de faire grève ce prochain jour de Pâques, pour manifester contre le mépris avec lequel les hommes nous traitent. Pour preuve, si besoin, leur dicton :’’ Trois choses ne valent que si on les frappe : une cloche, un âne et un valet fainéant!!’
’
-Ding, ding, dong, il est vrai que leur considération à notre égard, n’est plus la même depuis des années, répondit une vieille cloche tintant d’ailleurs, j’ai encore en mémoire quand nous sonnions l’angélus par trois séries de trois tintements, suivis d'une « pleine volée »,ah !!! C’était le bon temps, nous étions alors écoutées.

-Allez votons, dit la meneuse, que celles qui sont pour la grève s’expriment !!

-DING, DING, DONG, !!!! DING, DING, DONG, !!!! DING, DING, DONG, !!!!, sonnèrent toutes les cloches de la ville et le ciel se mit a trembler devant un tel tonnerre !!

-Alors, c’est acquis, Pâques se déroulera sans nous, conclut la meneuse, fini de penser que l’on fait dire aux cloches ce que l’on veut !!!!

Mais soudant une petite voix s’écria:- Mais alors qui va amener mes chocolats dans le jardin, si vous ne sonnez pas ??

C’était Titi qui avait tout entendu, et avouait son désarroi après cette décision clochaire !!

Émue et attendrie par ce cri du cœur, la meneuse, dit alors: - Pour toi Titi et tous les enfants du monde, nous sonnerons en ce dimanche de Pâques. Mais ne sois pas surpris, si les adultes prétendent ne rien entendre: seuls les enfants sont capables de recevoir le message des cloches. Trop occupés à écouter la sirène nommée Autolâtrie, ils n’entendent même plus les voix de celle appelée Sagesse alors celle des cloches……………

Ding, Ding, Dong !!! Bonnes Pâques à tous les enfants et aux poètes qui, eux, ont gardé leurs âmes d’enfant.



Posté le : 27/03/2016 11:22
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Titi
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Re: Défi du jour de Pâques
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Cher Serge,

Entre les sonneries des cloches du matin et du soir de la cathédrale Saint Bénigne de Dijon, ne voilà-t-il pas que j'entends les cloches de Titi, les cloches de l'enfance éternelle.
Je crois que ce sont ces cloches qui sonnent l'harmonie de notre âme et de notre coeur.
Et tu le fais si bien.

Comment vais-je répondre maintenant à mon propres défi? Mes cloches risquent d'être fêlées!

Merci à toi très cher Serge.
Si si, je vais te le redire! Je ne peux pas m'en empêcher. Te lire est un grand bonheur et fait tellement du bien à l'âme.

Porte toi mon ami et prend bien soin de toi.

Avec toute amitié bourguignonne.

Jacques

Posté le : 27/03/2016 14:39
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Re: Défi du jour de Pâques
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Révolte sonore


« L’ordre international des cloches de Pâques, rien que ça ! » se dit Robert Wilkinson en relisant sa fiche de mission. Il ne connaissait pas cette organisation secrète, malgré ses longues années d’expérience en matière de coups fourrés, de bandes malfaisantes et autres clubs de psychopathes, au temps où il officiait dans une célèbre agence de renseignements. Robert Wilkinson entra dans le bureau du général Wilson, un proche de la présidente démocrate nouvellement élue. Ce dernier n’était cependant pas seul, entouré de grands garçons à lunettes et de lourds pithécanthropes en costume noir.
— Ah, Magic Bob, notre sauveur, commença Wilson. Seul vous pouvez démerder une telle situation.
— Définissez le niveau de merde, mon général, répondit Magic Bob.
— En gros, les cloches de Pâques ont décidé de ne pas sonner cette année, à l’appel de leur syndicat mondial.
— Qu’est-ce qu’on en a à foutre ?

Robert Wilkinson, plus connu sous son pseudonyme de Magic Bob, n’était pas un fervent des pratiques religieuses, encore moins des simagrées chrétiennes. Depuis qu’il avait quitté l’Agence, il s’était installé à Hawaii, où les seules divinités intéressantes s’appelaient les volcans, les belles aux colliers de fleurs et les cocktails parfumés de son bar favori. Alors, libre de tout engagement auprès du gouvernement américain, il pouvait désormais laisser flotter son esprit critique, challenger les options présidentielles en matière d’ingérence dans les affaires des autres, résumer une situation a priori compliquée en une seule et abrupte question. Pour cette raison et des milliers d’autres, Magic Bob bénissait plus que jamais son statut d’indépendant.

Le général Wilson sourit à la question de l’ancienne légende des services secrets américains.
— Décidemment, Bob, vous n’avez pas remisée votre langue dans votre poche, lança-t-il. J’ai toujours aimé ce style direct, vous le savez. Malheureusement, je ne suis pas le seul décideur sur ce coup. Notre présidente a dépêché ses experts en sciences religieuses, des gars bardés de diplômes, avec des mentions en latin et tout le tremblement.
— Ne me dites pas que cette organisation est à Rome, maugréa Magic Bob.
— Le problème est plus complexe, monsieur Wilkinson, commença un des grands garçons à lunettes.
— Je m’en doutais. Laissez-moi imaginer. Je tiens le truc : vous ne savez pas où elle est, qui la dirige, pour qui elle travaille. J’ai bon ?
— Nous sommes en train de réduire le nombre d’hypothèses. Nos analystes, avec l’aide du Pentagone, de nos alliés du Mossad et du MI6, du réseau « Eléphant », émettent des scénarios. Tout ce que je peux dire avec certitude, c’est que « l’ordre international des cloches de Pâques » est d’origine européenne, plutôt de l’Ouest, une organisation émancipée du Vatican.
— Sans déconner ? Vous avez carrément avancé. Je suis impressionné.

Les grands garçons à lunettes rougirent, signe qu’ils n’avaient rien compris au sens profond des paroles lancées à la volée par Magic Bob. Le général Wilson retint une envie de rire. Les lourds pithécanthropes en costume noir se détendirent un peu du holster. Magic Bob en arriva à la conclusion habituelle : personne ne maîtrisait rien dans une énième histoire à dormir debout. Les politiques se méfiaient des militaires, les soldats évitaient les espions, les agences gouvernementales se tiraient dans les pattes, les binocleux composaient des algorithmes savants pour expliquer l’intangible. Même Albert Einstein, avec sa théorie quantique n’aurait pas imaginé une telle invraisemblance. C’était là que Magic Bob était en général consulté, pour réussir là où les autres s’étaient lamentablement pris les pieds dans le tapis.

Le lendemain matin, Magic Bob prit l’avion en direction de l’Europe. Sa feuille de route n’était toujours pas très claire, avec comme seule ligne directrice la mention « convaincre les cloches de Pâques de sonner le jour J » écrite en rouge sur son ordre de mission. Comme d’habitude, il avait négocié un copieux acompte sur ses honoraires, une somme à sept chiffres versée en une fois sur son compte aux Iles Cayman, ainsi que l’accès aux fonds secrets de l’Agence. Adepte de la devise « gouverner c’est prévoir », Magic Bob avait mobilisé son réseau d’informateurs, d’anciens agents secrets de tous bords, d’actuels intermédiaires entre les différentes familles maffieuses, voire quelques hommes politiques versés dans les coups tordus mais à forte rentabilité. Il savait que ses contacts allaient entamer une partie de poker menteur mais cela lui importait peu, tant qu’il pouvait en tirer quelques informations cohérentes, et ainsi éliminer la moitié des options possibles.

Les jours suivants, il rencontra ses contacts, à Londres et Paris, à Berlin et Madrid, multiplia les recherches sur les réseaux alternatifs, sans résultat tangible. Il semblait que personne n’avait le début d’une idée sur pourquoi cet « ordre international des cloches de Pâques » avait décrété le silence pascal malgré ses conséquences inévitables sur le moral des Chrétiens. Washington commençait à s’impatienter, d’autant plus que la presse se mêlait à l’histoire, ébruitant le gros de l’affaire, créant du doute dans l’inexplicable, à coups de théorie du complot ou de présumée décadence des valeurs occidentales. La thèse de l’ingérence d’une puissance extra-terrestre avait même failli poindre, véhiculée par un grand couturier français, fanatique des explications surnaturelles. Loin d’être anodin, ce dernier point amena Magic Bob à changer de paradigme.

La rue de la grande truanderie méritait bien son nom ce soir-là. Magic Bob refoula un sentiment de dégoût en croisant des junkies décharnés et des prostituées sur le retour. Hawaii lui manquait. Il se sentait las de cette enquête, peut-être celle de trop dans une longue carrière passée à chercher des vessies, à les habiller en lanternes, pour finalement perdre le sens du mot « vérité » au profit d’intérêts nationaux. Arrivé à destination, il entra dans l’immeuble défraichi, gravit les trois étages indiqués par son informateur puis frappa à une porte bistre.
— Qui vient là ?
— Magic Bob.
— Quel est le sésame ?
— Waka-Jawaka !

La porte s’ouvrit, laissant apparaitre un géant chauve au regard peu amène. Magic Bob se demanda si ce n’était pas un agent russe ou bulgare, vu son accent prononcé. Le double-mètre le fouilla consciencieusement, sans un mot, puis lui indiqua de la main le chemin à suivre. Magic Bob marcha jusqu’à la salle placée au fond à droite du couloir dédalesque, sentant le souffle du cerbère dans son dos, puis entra.
— Voilà donc le fameux Magic Bob, dit une vieille femme au regard pétillant. Je vous croyais retiré des affaires d’espionnage.
— Que dire de vous, madame Irma. Je pensais que vous étiez une légende, un canular inventé de toutes pièces par les gars de Moscou, un nuage de fumée bien utile pour les enquêtes non résolues ou les histoires obscures.
— Je n’ai pas bénéficié du même traitement que le comte Dracula ou le docteur Frankenstein, certes, mais j’existe, en chair et en os.
— En parlant de Frankenstein, c’est sa créature qui m’a ouvert ?
— Non, répondit la Madame Irma en souriant. Vous avez juste rencontré mon neveu Igor, un Immortel peu loquace. Bon, arrêtons là les politesses et racontez moi votre cas.

Magic Bob décida de jouer cartes sur table, sans encombrer son récit des stériles précautions rhétoriques propres aux diplomates démocrates et des coups de mentons dignes des chefs à plumes du Pentagone. Madame Irma l’écouta attentivement, ne posa aucune question et le regarda droit dans les yeux.
— Vous savez tout, désormais, termina Magic Bob.
— Je ne sais rien, en fait. Ma seule certitude, c’est que vous êtes dans le flou, tout comme votre gouvernement, ses alliés et même ses ennemis. Pour cette raison, vous avez opté pour une voix alternative, loin des sentiers balisés de la raison scientifique et de l’information en temps réel. Le dieu Google s’avère impuissant alors vous vous tournez vers la boule de cristal.
— Ce n’est pas plus con que de lire dans les os de poulet ou la merde de chien.
— C’est un peu moins écologique.
— En plus, j’ai déjà pratiqué cette option avec un de vos collègues chinois. A l’époque, il m’avait fait jouer au tarot.
— Vous voulez parler de Ming Li Fu ?
— Exactement !
— Le pauvre n’avait pas prévu de finir dans les geôles de Pékin. Comme quoi, même le tarot chinois a ses limites.

Madame Irma proposa une boisson chaude à Magic Bob puis débuta son cérémonial.
— Je vous préviens, Magic Bob, vous n’allez pas boire que du thé. J’ai ajouté un nectar de ma composition, dans le but d’ouvrir des portes insoupçonnées de votre subconscient. La divination, voyez-vous, ne se réduit pas à la boule de cristal et aux signes de l’au-delà. Dans le cas présent, il s’agit de combiner les informations que vous avez récolté et celles issues de votre passé d’espion américain, de les faire rentrer en résonnance pour amener votre puissant esprit déductif à trouver une solution.
— On dirait du Aldous Huxley.
— Si vous saviez combien de fois je l’ai rencontré, lui, ainsi que d’autres artistes en recherche d’inspiration ? J’ai particulièrement adoré ma nuit avec le beau Jim Morrison, un vrai beau souvenir.
— Dois-je chanter la fin ?
— Non, rassurez-vous. Laissez-vous aller, ne mettez pas de barrières mentales entre nous, ne jouez pas de votre humour californien pour vous défiler.

Magic Bob se sentit partir. Le décor changea de couleur, un peu comme un kaléidoscope. Le son sembla gagner des dimensions, avec des ondes venant du haut, du bas et de la profondeur de son cerveau. La voix de Madame Irma se fit lointaine, presque intersidérale.
— Où êtes-vous, Robert ?
— Je ne sais pas.
— Que voyez-vous ? Décrivez-moi le paysage.
— La mer ou l’océan. Je pense que c’est le Pacifique. Je reconnais son odeur, celle de mon enfance quand j’allais surfer avec mes copains d’école après les cours. Le sable est mouillé.
— Voyez-vous des maisons ? Des gens ?
— Non. C’est désert. Pourtant, il fait beau, le soleil est au plus haut et le vent est idéal pour le surf. C’est bizarre, j’ai l’impression que cette plage n’a jamais connu autre chose que les vagues. Il n’y a aucune trace d’activité humaine, même passée.
— Quel âge avez-vous ?
— Je ne sais pas. Je ne vois pas mon corps, juste une ombre déformée sur le sable. Si je me penche, je ne vois pas mes pieds. Je ne sais même pas si j’ai des bras, un tronc ou des jambes.
— Vous êtes devenu une partie de la plage, Robert.

Robert Wilkinson accepta l’idée. Devenir un grain de sable noyé dans les vagues du Pacifique lui sembla confortable, presque jouissif.
— Qu’êtes-vous venu faire ici, Robert ?
— Résoudre une affaire de cloches de Pâques.
— Quel est leur problème ?
— Elles refusent de sonner le jour J.
— Qu’est-ce que vous en pensez ?
— Je m’en fous royalement.
— Pourquoi ça ?
— Je suis un grain de sable dans l’Océan Pacifique. Il n’y a pas de jour J, X ou Y, juste les cycles solaires et lunaires.
— Et si vous étiez, vous aussi, une cloche de Pâques ?
— Je ne sonnerais plus.
— Pour quelle raison ? Sonner est votre essence même.
— Je n’aurais plus la force de carillonner, de faire semblant, comme si le monde tournait aussi rond qu’avant, au temps où je n’étais qu’une petite clochette. Je refuserais de sonner au nom de la vanité des hommes, de leurs illusoires croyances, de leur manie de tout régenter. Et d’ailleurs, qu’est-ce qui dit qu’une cloche soit obligée de sonner ?
— Continuez, Robert.

Robert Wilkinson imagina un monde où les hommes sonneraient à leur tour, à des moments aléatoires, dans un carillon de joie et de fraternité. Il rêva d’une existence loin des clochers, des églises ou des monastères. Il se mit à comprendre la silencieuse révolte des cloches, une façon comme une autre de revenir aux fondamentaux, de s’unir avec les grains de sable du Pacifique, les gouttes d’eau salée et les rayons de soleil. L’univers devint de plus en plus vaste, sortant du pré carré des discours officiels sur l’infiniment grand. La réalité explosa dans un ciel constellé de diamants.

Le général Wilson écouta patiemment le rapport de Robert Wilkinson, devant une assemblée médusée de conseillers en sécurité et de militaires haut placés.
— Si je résume, les cloches de Pâques ont décidé de ne plus sonner, sans autre raison qu’une envie d’exister autrement. C’est ça, Bob ?
— Oui, général Wilson !
— Et personne ne les a influencées. Les triades chinoises, la maffia sicilienne, les islamistes des tous bords, j’en passe et des meilleures, ne sont pour rien dans ce bordel. Ai-je bien compris ?
— Cent pour cent, général !
— Enfin, vous ne voulez pas dévoiler vos sources, celles qui vous amènent à de si belles conclusions.
— Je pourrais incriminer Joan Baez ou le Dalai Lama, général, mais vous seriez capable de les mettre en détention préventive à Guantanamo. Ce ne serait pas juste.
— Si Joan Baez est dans le coup, il faut délivrer un mandat d’arrêt, rugit un jeune conseiller.
— Et si le Dalai Lama est complice, nous devons négocier avec Pékin, ajouta un vieux général trois étoiles.
— Messieurs, calmez-vous, ordonna le général Wilson. Magic Bob ne fait qu’illustrer ses propos. Ses sources sont confidentielles, elles l’ont toujours été, et ce n’est pas le sujet. Nous avons payé, cher je dois l’avouer, pour savoir qui se cache derrière cet « ordre international des cloches de Pâques » et pourquoi cette menace, si c’en est réellement une. Nous avons une réponse, moins floue que les différentes théories pondues par nos as du renseignement. Qu’elle nous paraisse incongrue ne change en rien la donne. Magic Bob a fait le job !

Grâce au général Wilson et à la présidente américaine, Robert Wilkinson obtint le reste de ses honoraires. Il repartit à Hawaii, se promettant de ne plus jamais quitter ses pénates, même pour une somme à sept chiffres. Les cloches de Pâques ne sonnèrent pas pendant une dizaine d’années. Un auteur américain, grand connaisseur de Rome et du Vatican, en tira une suite de romans, portés plus tard à l’écran sous la direction de Tom Hanks, avec Brad Pitt dans le rôle de Magic Bob. Le monde continua de tourner, l’Océan Pacifique de balayer des milliards de grains de sable, et des hordes de petits Américains de s’empiffrer de chocolat.

Posté le : 27/03/2016 19:29
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Re: Défi du jour de Pâques
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Ah, mon cher Robert Wilkinson, heu !!Heu, Pardon mon cher Donald, quel récit, et quel verve dans cette histoire de cloche (merle ???) contée avec ce talent habituel de narrateur qui est le tien. Un vrai régal !!!

J’ai aimé, en autres : ‘’les politiques se méfiaient des militaires, les soldats évitaient les espions, les agences gouvernementales se tiraient dans les pattes, les binocleux composaient des algorithmes savants pour expliquer l’intangible’’ situation qui heureusement ne sont que dans ton imagination……………

J’ai comme le ressenti d’une certaine méfiance vis-à-vis des instances érables qui nous gouvernent et gouvernent le monde......

.………… !!!

Merci Doanald, pour ce petit instant de bonheur narratif offert et à ton imagination fertile, bien que pas autant éloignée de la triste réalité de notre quotidien.

Amitiés d’un admirateur.

Serge

Posté le : 28/03/2016 13:07
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Titi
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Re: Défi du jour de Pâques
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Mon Titi,

C'est un vrai cri de rage et de guerre que tu nous livres ! Tu nous exhortes à nous réveiller et nous battre contre tout ce qui nous endort et nous empêche de voir le monde tel qu'il est.

Merci pour ce texte touchant.

Je t'embrasse.

Couscous

Posté le : 28/03/2016 16:28
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Re: Défi du jour de Pâques
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Deux textes ! Ce sujet t'a inspiré ! Qu'il est mignon ce petit Titi !

Je ne connaissais pas cette phrase : Trois choses ne valent que si on les frappe : une cloche, un âne et un valet fainéant. C'est vraiment horrible !

Donc, si mes enfants ont eu droit à leurs oeufs en chocolat, c'est bien grâce à toi.

Merci.

Couscous

Posté le : 28/03/2016 16:32
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Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
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