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Annonce : Cocu ?
Publié par Vadnirosta le 12-03-2023 16:21:18 ( 116 lectures ) Articles du même auteur



Cocu ?

Ah ! Je vous attendais et j'espère que vous ne me décevrez point. Pour l'instant, je leur demande non sans discrétion de rester sur le pas de la porte. Elles veulent à tout prix entrer. Sans doute pour me dépouiller de tous mes biens à mon insu. Je vais chercher ma veste et je suis à vous. Je leur somme de réfléchir sept fois avant de causer de ce dont j'attends, le temps pour moi de soulager cet enrouement profond qui ne me quitte plus depuis le début de la froidure.
Il faut que personne ne m'aperçoive en leur compagnie. Mais cachez-vous plutôt, mesdames, cachez-vous en m'attendant derrière la haie de lauriers soigneusement taillée et surtout ne levez point la tête. Car faut vous dire, ô lecteurs, que j'ai ma réputation à Perpignan : je viens d'une vieille famille très aisée qui ne supporte pas les infamies. Une famille que scandalisent au plus haut point les discordes incessantes entre ces foutus arabes et ces sales romanichels. Tous se disputent la moindre parcelle de quartier et j'enrage en silence. Restez bien ici et ne bougez d'un cil. Alors que je me dirige vers ma penderie, je les entends au-dehors mener tout un tapage avec leurs tambours de basque. Vous avez besoin de danser ? Vous ne savez rien faire d'autre de plus enchanteur que de voler en musiques ? Ah ces gueuses de Gitanes ! Avec leurs cheveux longs, gras et ébouriffés, elles puent à cent mètres et puis que penser de ces robes idiotes, longues, bariolées et hideuses, qui semblent dissimuler à l'heure d'un nouveau carnaval tout un vil enracinement dans la terre . Oui, c'est la Cour des Miracles bien plus au sud, aujourd'hui australe. C'est le défilé multicolore des épouvantails en haillons dessous les arcades de notre chère ville moyenâgeuse. Dieu ! Qu'elles me répugnent ! Vous êtes pressées ? Ça va ça va j'arrive. Vous danserez toujours ? Vous avez raison. Car, en leur revenant, mon regard s'attarde furtivement au fond de leurs corsages échancrés, dans le V de leurs seins nus. Elles ne sont pas si répugnantes qu'elles en ont l'air, ces mesdames de bohémiennes. Car, sans vous dire un mot, je sens un incoercible désir venir bousculer silencieusement mon âme ténébreuse, tordre sans bruit mon cœur de pierre et d'airain et attiser sans crépitement mes feux de bois morts. Mon verbe joli de bonne famille vous loue malgré moi plus ou moins ouvertement. Je ne puis le suivre et vous traduire les vers : vous ne comprendriez pas car chez nous, seul le geste compte. Seul l'accompagnement fameux. Seule la mélodie « facile ». M'envoûter ? Ah ! Quelle drôle d'idée ! Mais il y a vos bijoux et c'est déjà bien assez. A ce propos, qui vous a donc offert ces lourds colliers ? Elles ont dû les voler, ces pièces de monnaie d'or et d'argent...
Si vous pouvez me dire la bonne aventure ? Bien-sûr que oui... et je vous l'ordonne plutôt, mais veuillez donc patienter encore un peu. Le temps de nous joindre tous trois à la cave. Je m'en vais nous l'ouvrir... Voilà ! Entrez !
Comment ? Si vous devez laisser par terre vos tambours de basque ? Affirmatif. Essayez, voulez-vous, de parler un peu mieux français. Ici vous êtes chez moi et vous devez vous plier à ma loi. Vous chanterez et danserez plus tard. Maintenant, vous allez me dire na bonne aventure et je suis sûr que je ne serai pas déçu... Quoi ? Vous donner ma main avec la croix1 dedans ? Bon, puisque c'est là la loi du marché, j'accepte. Quoi encore ? Enlever pour vous deux toutes les toiles d'araignées et puis tout dépoussiérer ? Mais quoi encore ? Je ne suis pas femme (de ménage!), et puis je trouve que la crasse ici vous va si bien. Pourquoi deux Égyptiennes se plaindraient-elles chez moi de la seule pièce laissée à l'abandon et aux rats ? Regardez-vous bien dans les yeux et aussi de la tête aux pieds ! N'est-ce point là le point commun d'entre les Égyptiennes que de lâcher prise en toutes circonstances de la vie ? Mais, si vous voulez bien, revenons à nos mouton. Dites-moi ma bonne fortune ! J'ai une bonne physionomie... Oui oui, ça je le sais ; je l'ai toujours su. Je serai un jour quelque chose... Oui oui,ça aussi je le sais ; je l'ai toujours su... J'épouserai une femme qui sera chérie et aimée de tout le monde ? Vous radotez, mesdames les bohémiennes ; vous ne m'apprenez rien de nouveau... Et dire qu'il faut payer par dessus le marché. Débitez ! Débitez ! Racontez-moi la meilleure aventure et, si possible, sans me fâcher. Une femme qui me fera beaucoup d'amis ? Je le sais je le sais que j'ai beaucoup d'amis. Quoi d'autre ? Une femme qui fera venir l'abondance chez moi ? J'ai déjà plein d'argent mais si je peux en avoir encore davantage, c'est encore mieux... Allez allez ! Racontez ! Racontez ! Ne vous épuisez pas en éloges ! Pardon ? Vous disiez ? Une femme qui me donnera une grande réputation ? Merci ! Merci ! Une bohémienne ? Votre bonne aventure n'est pas aussi bonne qu'elle devrait l'être et que me dites-vous là ? Ne devez-vous pas me dire la meilleure aventure qui soit ? Allez au Diable, diablesses ! Vous n'êtes que des rabouines2 qui fabriquez remèdes et philtres. Vous mériteriez que je vous foudroie d'éclairs toutes deux pour tant d'effronterie et d'audace ! Vous mériteriez le bûcher, voilà tout !
Mais dites-moi, suis-je menacé d'être cocu ? Et voilà qu'elles se mettent à danser et chanter allègrement après être allées retrouver en haut leurs tambours. La, la,la... Cessez de vouloir à tout prix m'envoûter avec vos vieux instruments de fortune... Répondez-moi ! Serai-je cocu ? Elles se remettent à chanter de plus belle un air qui ressemble à un hymne international, un hymne intercontinental à la Liberté.
Serai-je cocu ? Serai-je cocu oui ou non, infâmes créatures ? Les deux Égyptiennes tournoient à présent autour de moi et me narguent en agitant leurs seins dessous mes yeux brillants. Elles ont pris ma croix au creux de ma main, me laissant à une aventure inachevée. Elles se dirigent vers le portail dont la peinture verte s'écaille. Quoi encore ? Rouillé ? Si je voudrais le remplacer ? Êtes-vous folles ? Transiger avec des bohémiennes et des ferrailleurs de bas-étage, des escrocs ?
Alors qu'elles quittent la propriété, une classe de jeunes écoliers qui vont par deux sur le trottoir d'en face. Tous sont encadrés par un maître qui m'a visiblement surpris en compagnie des deux Égyptiennes. Quelle honte pour ma réputation ! Vieilles carognes ! Allez-vous en ! Retournez à vos satanées roulottes et allez plutôt foutre le bordel au Maghreb au lieu de danser niaisement et tordre la croupe au nez des honnêtes gens !
Furieux, je retourne chez moi, la bouche pleine d'insultes. En m'asseyant confortablement dans mon canapé, je songe soudain loin de la foule à la bohémienne annoncée pour ma bonne aventure. Quel bonheur ! Une rabouine rien que pour moi ! Et avec en prime la musique et puis les déhanchements ! N'ébruitons surtout pas la chose et rendons-nous vite et en catimini sous le porche de la Cathédrale Saint-Jean-Baptiste pour forcer les verrous secrets de l'Amour physique et du marivaudage en compagnie de ces merveilleuses courtisanes barbares pour le moins sauvageonnes...

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Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
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