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Nouvelles : L'animal muet
Publié par gomedj le 07-12-2013 12:30:00 ( 1466 lectures ) Articles du même auteur



L'animal muet

"Dans le regard d'un animal muet, il est des paroles que seule une âme de sage peut vraiment comprendre."
Poète indien


Un soir où mon imagination s'empara de ma raison, j'étais sorti me promener à la lisière de la ville et m'étais arrêté devant une maison déserte, aux murs effondrés et aux piliers croulants. Il n'en restait qu'un vestige témoignant d'un abandon de longue date et d'un triste déclin.
étude chien couché A. Dürer
Je vis alors un chien couché sur un oreiller de cendres, dont la peau était couverte de plaies et le corps, frêle, ravagé de maladies. Il regardait le soleil couchant d'un regard empreint d'humiliation et de désespoir, comme s'il avait su que le soleil commençait à retirer la chaleur de ses souffles de ce coin abandonné, loin des enfants persécuteurs des faibles animaux; aussi le contemplait-il d'un oeil triste en faisant ses adieux. En m'en approchant tout doucement, j'aurais tant voulu savoir parler sa langue pour pouvoir le consoler de ses malheurs et lui montrer de la compassion pour sa misère! Arrivé près de lui, je lui fis peur et il bougea. Il tenta de rassembler ce qu'il lui restait de vie pour se relever sur ses pattes paralysées.Comme il n'y parvenait pas, il me jeta un regard qui mêlait une supplication amère et un doux apitoiement, un regard pétri de tendresse et de reproches, un regard qui tenait lieu de langage plus clair que celui d'un homme et plus éloquent que les larmes d'une femme. Lorsque nos yeux se furent croisés, je fus si ému et si impressionné que je vis ses regards incarner des paroles connues par le langage humain. Des regards qui voulaient dire: "J'en ai assez, jeune homme! J'ai assez souffert de la persécution des humains et des affres de la maladie. Passe donc ton chemin et laisse-moi seul emprunter quelques particules de vie à la chaleur du soleil. J'ai fui les injustices et la cruauté des descendants d'Adam et je suis venu me réfugier sur cette couche de cendres plus tendre que leurs coeurs, parmi ces ruines moins sauvages que leurs âmes. Epargne-moi ta présence, tu n'es qu'un habitant d'une terre où la justice est toujours déficiente...

Chien couché, Agasse Jacques-Laurent
"Je ne suis qu'un misérable animal qui servait le descendant d'Adam. Dans sa maison, j'étais loyal et fidèle et, à l'extérieur, j'étais son garde vigilant. Je partageais ses peines et ses joies. En son absence, je pensais à lui et, à son arrivée, je lui réservais un bon accueil. Je me contentais des miettes tombées de sa table et j'étais heureux des os que ses dents avaient dépouillés. Mais quand je suis devenu vieux et décrépit et que les maladies m'ont laminé, il m'a chassé de la maison, me livrant comme jouet aux cruels garçons des rues, comme cible aux infections et aux immondices.
"Ô descendant d'Adam, je ne suis qu'un pauvre animal; mais je vois une similitude entre moi et tes frères humains qui, lorsque leurs forces défaillent avec l'âge, ont moins de subsistance et se retrouvent en mauvais état. Je suis comme les soldats qui, dans leur prime jeunesse, combattent pour la patrie et qui, à la force de l'âge, font fructifier ses terres. Mais quand l'hiver de leur vie arrive et que leur utilité diminue, ils sont écartés et oubliés. Je suis comme une femme qui, jeune fille, se fait belle pour réjouir le coeur de la jeunesse et qui, épouse, veille la nuit pour élever ses enfants et peine pour fournir les hommes de demain. Mais, vieille et impotente, elle est mise aux oubliettes comme un objet indésirable...Ah! comme vous êtes injustes, descendants d'Adam, comme vous êtes cruels!"
Ainsi les regards de cet animal parlaient alors que mon coeur comprenait et que mon âme oscillait entre la compassion que j'éprouvais pour lui et les idées que je me faisais de mes congénères. Quand il eut refermé les yeux, je ne voulus pas l'importuner, je passai alors mon chemin.
Khalil Gibran

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Les commentaires appartiennent à leurs auteurs. Nous ne sommes pas responsables de leur contenu.

Auteur Commentaire en débat
aliv
Posté le: 07-12-2013 18:54  Mis à jour: 07-12-2013 18:54
Plume d'Argent
Inscrit le: 25-03-2013
De:
Contributions: 290
 Re: L'animal muet
Je trouve ton texte vraiment très triste mais très bien écrit. Très agréable à lire.

Auteur Commentaire en débat
couscous
Posté le: 07-12-2013 18:59  Mis à jour: 07-12-2013 18:59
Modérateur
Inscrit le: 21-03-2013
De: Belgique
Contributions: 3218
 Re: L'animal muet
Un texte emprunt d'une belle philosophie ... à méditer.

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A bientôt

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Auteur Commentaire en débat
arielleffe
Posté le: 08-12-2013 17:00  Mis à jour: 08-12-2013 17:00
Plume d'Or
Inscrit le: 06-08-2013
De: Le Havre
Contributions: 805
 Re: L'animal muet
C'est bien triste en effet, et on croise beaucoup de personnes semblables à ce pauvre animal. Que pouvons-nous faire ? Ne pas abandonner nos proches quand ils sont dans le besoin.

A bientôt pour un texte plus gai j'espère !
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Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
.

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