| A + A -
Connexion     
 + Créer un compte ?
Rejoignez notre cercle de poetes et d'auteurs anonymes. Lisez ou publiez en ligne
Accueil >> xnews >> Le tirailleur manchot - Nouvelles confirmées - Textes
Nouvelles confirmées : Le tirailleur manchot
Publié par tchano le 15-03-2014 14:20:00 ( 1163 lectures ) Articles du même auteur



A Ziguinchor, le fleuve s’apaise, s’océanise.
Prés du soir, le soleil y déverse un isthme long de lumière dépolie.
Elle enduit de sa paix le fronton de la ville et les murs bigarrés
du «  Tirailleur manchot .»
Le «  Tirailleur manchot » est un estaminet produit par l’assemblage,
incidemment plaisant, de toutes sortes de couleurs, de matériaux, de voix et de tressaillements.
Famara Cissé était le manchot!
Il était l’un des derniers tirailleurs de l’armée française.

C’est le vingt trois septembre mille neuf cent cinquante trois,
soit trois jours après l’embuscade Vietminh,
que le tirailleur Cissé fut amputé d’un bras.
Le vingt deux septembre, en province d’Annam, dans une base arrière française,
il profitait, avec une partie de sa section,
de quelques heures d’extinction de guerre.
Le soir même, au cours d’un de ces rites d’ablution de l'horreur et des peurs, Marian,
le légionnaire Polonais, sembla le défier…
« Un homme ça boit debout! »
« Un homme ça ivre-meurt debout! »
Famara décida alors qu’il ne tomberait pas avant le polack…

A travers quatre faibles clignements de cils, lui apparut la silhouette en pied de Marian.
Elle était appuyée sur le tronc d'un manguier, la face rose brouillée par une grappe d’orchidées.
Alors, telle une navette à ramarder, la main de Famara
- celle qui ne tenait pas la bouteille de vodka-
s’insinua entre les mailles du filet de camouflage, écumé par les flancs d’un camion assoupi.
Il referma les yeux, et ses jambes flanchèrent sans qu’il tomba à terre.

Le lendemain matin on le décrocha du filet, son bras avait reçu la couleur de la mort.

C’est trois jours après l’embuscade Vietminh qu’on amputa le tirailleur Cissé de son dernier bout de guerre.

Pendant vingt et un ans au « Tirailleur manchot » le bras restant de Famara,
continua de faire clapoter la vodka.
Pendant vingt et un ans la bouche de Famara relata aux mêmes oreilles éteintes,
le récit de l'embuscade qui, disait il, vola son bras.



Article précédent Article suivant Imprimer Transmettre cet article à un(e) ami(e) Générer un PDF à partir de cet article
Les commentaires appartiennent à leurs auteurs. Nous ne sommes pas responsables de leur contenu.
Auteur Commentaire en débat
EXEM
Posté le: 16-03-2014 01:19  Mis à jour: 16-03-2014 01:19
Plume d'Or
Inscrit le: 23-10-2013
De:
Contributions: 1480
 Re: Le tirailleur manchot
La bataille de la Vodka. Aussi dure que les autres mais aussi inutile. Belle écriture. Merci pour ce bon moment de lecture.
tchano
Posté le: 16-03-2014 13:57  Mis à jour: 16-03-2014 13:57
Plume d'Or
Inscrit le: 18-01-2012
De:
Contributions: 297
 Re: Le tirailleur manchot
^^ pour la "bataille de la Vodka!"
Cette mésaventure tient peut être plus du fait divers que du fait de guerre.
N'est elle pas surtout la conséquence d'une confrontation d'orgueils?
Et les confrontations d'orgueils ne sont ils pas à la source de beaucoup de conflits?
Merci d'être passé
arielleffe
Posté le: 20-03-2014 16:23  Mis à jour: 20-03-2014 16:23
Plume d'Or
Inscrit le: 06-08-2013
De: Le Havre
Contributions: 805
 Re: Le tirailleur manchot
Famara a tout de même participé à la bataille, cela fait de lui un héros. Si sa blessure visible est due à l'alcool, c'est probablement l'invisible qui l'a conduit à boire de la sorte. Famara tu gardes toute mon estime et plus encore.
Mes préférences



Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
.

Connexion
Identifiant :

Mot de passe :

Se souvenir de moi



Mot de passe perdu ?

Inscrivez-vous !
Partenaires
Sont en ligne
59 Personne(s) en ligne (16 Personne(s) connectée(s) sur Textes)

Utilisateur(s): 0
Invité(s): 59

Plus ...