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Nouvelles confirmées : Liberté ?
Publié par couscous le 14-01-2015 20:23:26 ( 938 lectures ) Articles du même auteur



Charlotte arrive à la caisse du supermarché. Elle vient de faire ses emplettes pour le mois. Le tapis roulant n’est pas assez grand pour recevoir tout le contenu de son caddy. Elle voit la caissière soupirer profondément car les articles déjà scannés s’accumulent en bout de caisse. Charlotte se dépêche de le vider pour aller le remplir quelques mètres plus loin. L’hôtesse de caisse en profite pour accélérer le rythme en lançant un petit regard moqueur à la cliente en difficulté. Puis arrive le dernier article : un lot de petites cuillères en solde. Mais celui-ci ne porte pas le précieux code barre, au grand désarroi de la caissière qui interroge Charlotte :
« ll n’y a pas le code barre. Vous les prenez ?
– Euh, oui. Elles étaient à 2 euros 99 ou 3 euros 99, je ne sais plus.
– Cela ne m’aide pas beaucoup. Vous les voulez vraiment ? »
Charlotte hésite avant de confirmer son désir d’acheter ces satanées cuillères, coûte que coûte, car elle a des invités ce soir et un nombre insuffisant de cuillères pour le dessert. La caissière souffle ostensiblement avant de lancer un appel au micro. Une collègue vient s’enquérir du problème et repart en rayon avec l’article. L’employée de caisse s’impatiente, tape du pied sous sa chaise, lance un regard exaspéré à la cliente, comme si elle était la pire chieuse du monde. Elle n’en peut rien s’il n’y a pas de code sur ces fichues cuillères. Charlotte a envie de lui crier son indignation face à son comportement à son égard, de lui demander pourquoi elle est si désagréable mais sa timidité la pousse à rester muette. Elle se sent brimée. Sa liberté d’expression devra se taire, à nouveau, lui provoquant une nouvelle poussée d’eczéma. Elle devra en parler à son psy lors de son prochain rendez-vous.

Charles est au restaurant avec Agnès. Il a réservé cette table il y a de nombreuses semaines car l’établissement a un succès fou. Il lui a aussi fallu économiser pendant quelques mois pour pouvoir honorer la note. Il se retrouve face à sa chérie et lit la carte. Chacun choisit soigneusement son plat. Il jette son dévolu sur une bouteille de vin au prix exorbitant, une fois n’est pas coutume. Derrière lui le maître d’hôtel installe un homme corpulent au visage bouffi, arborant un costume de grande marque. Ce dernier raconte des blagues salaces et parle si fort de son dernier voyage en jet privé que Charles n’entend plus Agnès lui raconter sa soirée avec sa meilleure amie Brigitte. Au milieu du repas, Charles porte le verre de vin à ses lèvres lorsque son voisin peu délicat recule violemment sa chaise, provoquant un soubresaut dans le corps du jeune homme qui se retrouve avec le précieux liquide dans les narines et sur la chemise au lieu de son gosier. Aucune excuse n’est présentée. Charles fulmine intérieurement. Il a une grande envie d’exprimer sa colère face à la désinvolture et l’impolitesse de cet homme. Mais c’est ici un milieu huppé et ses haussements de voix seraient mal vus, autant par les autres clients que par Agnès, d’autant plus qu’il ne se sent pas tout à fait dans ce milieu haut de gamme avec tous ces gens friqués, bien loin des soucis financiers. Il sait que s’il commence à livrer ses griefs, il ne pourra s’arrêter. Finalement, sa liberté d’expression sera muselée par la nécessité de respecter la bienséance et son sentiment d’infériorité.

Karl est travailleur social. Son téléphone sonne pour au moins la trentième fois de la matinée. Il reconnaît le numéro qui s’affiche sur le cadran. Il pousse un léger soupir avant de prendre le combiné. Voici le cinquième appel de Madame D., une femme spécialiste en plaintes de tous poils, pleurs sur commande et demandes farfelues. Elle commence par ressasser ses problèmes de santé, certes réels mais toujours présentés de façon dramatique, comme à chaque conversation. Puis viennent les complaintes sur son manque cruel d’argent… encore ! Karl sait très bien que ses sous filent dans des achats compulsifs effectués sur le net. Chaque fois, il doit écouter patiemment avant de proposer les sempiternelles mêmes solutions qu’elle dénigrera systématiquement. Il jette un œil à la pile de dossiers qui ne cesse de s’élever. Il aurait tant envie de couper court à cette conversation inutile en disant à cette femme qu’il ne lui répondra plus tant qu’elle n’aura pas consulté un psy, découpé sa carte de crédit et supprimé ses comptes sur les sites d’achat en ligne. Il voudrait aussi lui rappeler qu’il faut qu’elle le laisse travailler car de nombreuses personnes comptent sur lui. Comme il lui serait agréable de lui lancer que rien que le son de sa voix nasillarde et ses reniflements programmés lui filent des boutons ! Mais son professionnalisme limite sa liberté d’expression et l’empêche de livrer le fond de sa pensée.

Carlos attend, assis sur le lit conjugal depuis presque une heure. Caroline lui a demandé de l’attendre à la sortie de la salle de bain pour découvrir la nouvelle robe qu’elle a achetée pour la soirée chez les Vanderbilt. Il commence à s’impatienter. Soudain, la porte s’ouvre et la jeune femme sort lentement en lançant un « Tada ! » triomphant ! Carlos reste sans voix. Son épouse est emballée dans une robe mi-longue de couleur vert émeraude. La taille n’a pas l’air de lui convenir car son corps arbore un franc aspect boudiné, sa poitrine compressée semble avoir envie de sauter hors du bustier trop serré. Caroline est très fière et parade devant son mari comme à une élection de miss locale. Celui-ci est embêté. Il ne peut décemment lui livrer son impression, au risque de la voir bouder toute la soirée et refuser ses avances ce soir. Il sait aussi qu’elle se remet peu à peu d’une profonde dépression suite à la mort de sa mère et la revoir sourire lui fait tant plaisir. Comme il souhaite l’encourager dans la bonne voie, il opte pour l’hypocrisie et se met à encenser cette robe avec un bagout digne d’un homme politique en campagne électorale, et ce, pour le plus grand plaisir de Madame. La liberté d’expression en prend à nouveau un grand coup mais ce soir, ils seront heureux, tous les deux !

Voici donc des situations où la liberté d’expression a été muselée. Il en va ainsi dans la vie en société. Il est pourtant parfois si libérateur de crier un bon « M… ». Le tout est de savoir le faire au bon moment et sans risque de choquer autour de soi car notre liberté s’arrête là où commence celle des autres.

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Les commentaires appartiennent à leurs auteurs. Nous ne sommes pas responsables de leur contenu.
Auteur Commentaire en débat
Titi
Posté le: 15-01-2015 19:41  Mis à jour: 15-01-2015 19:44
Administrateur
Inscrit le: 30-05-2013
De:
Contributions: 1622
 Re: Liberté ?
Ma chère couscus,c'est une étude sociétale que tu nous présentes avec des cas de figure fréquents et rencontrés par chacun d'entre nous!!!

Mais quel bonheur de pouvoir dire M.....!!!!!!!,,de temps en temps, comme cela soulage.


J'ai retrouvez un ancien texte ou justement j'évoquais cela, avec le sourire, et dont je te livre quelques strophes!!


Fatigué et fort las de toutes convenances
Ne pourrez t-on un jour, un jour de l’existence .
Dire M.... à sa voisine quand elle reproche au chat
De miauler quelquefois, elle préfère qu’il aboie ??

Lancer à la caissière qui dans l’hyper marché
Encaisse votre chenue et oublie le merci
En mâchant son chewing-gum, : « Je vous en prie souriez,
Les muscles du visage doivent travailler aussi »

Merci couscous pour ce cri de colère....contenu!!!
,
Mes préférences



Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
.

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