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Accueil >> xnews >> Comment j’ai transformé ma demeure en maison hantée — Partie 4 - Nouvelles - Textes
Nouvelles : Comment j’ai transformé ma demeure en maison hantée — Partie 4
Publié par christianr le 09-03-2016 15:54:17 ( 946 lectures ) Articles du même auteur



Je déjeunais à la cuisine après une des nuits les plus étranges que j’avais vécu jusque-là. Je ne buvais jamais de café, mais j’étais tellement fatigué que je me serais bien baigné dans une piscine remplie de ce nectar brun. Je me remémorai ce qui s’était advenu la veille et mon côté rationnel voulait me convaincre que ce n’était qu’un rêve. Or, je savais pertinemment que je ne dormais absolument pas à ce moment-là. Je vis ma mère apparaître dans notre étroite salle à manger et je remarquai immédiatement son air exténué. Je lui demandai ce qui se passait, elle me répondit que ce n’était qu’une crise d’insomnie. Étant moi-même victime de ce mal par moment, j’avais arrêté la discussion. L’avoir continuée, j’aurais découvert qu’elle avait vécu son propre incident surnaturel. Est-ce ainsi que nos nuits allaient être constituées dorénavant ?

Je commençai à livrer les journaux. Mes réveille-matin avaient cessé de s’éteindre par eux-mêmes. Peut-être parce que Sue ne nécessitait plus mon attention, ou parce qu’elle était partie. Parlant d’elle, était-elle la responsable derrière l’avertissement que j’avais reçu la veille ? De quoi m’avait-elle protégé ? Beaucoup de questions se présentèrent à mon esprit surtout lorsque j’exécutais mon travail. L’action répétitive de déposer des périodiques à chaque porte me rendait introspectif. Un peu comme les bouddhistes répétant sans cesse les mêmes mantras. Je suis persuadé que si j’avais continué ce boulot jusqu’à aujourd’hui, j’aurais résolu de nombreux sujets existentiels. Socrate était sûrement un camelot.

Peu importe, je ne trouvais pas de réponses à mes interrogations. Le problème avec le monde invisible c’est qu’il est caché justement. On ne sait pas ce qui se déroule dans les coulisses, on observe uniquement ce que les âmes errantes veulent bien nous montrer. Voilà pourquoi les événements surnaturels ne sont jamais vus comme des faits, parce qu’on ne peut pas reproduire l’expérience comme l’exige la science. Qu’est-ce qui nous dit que ce que l’on a vécu est réel ou non ? Peut-être quand on se rend compte qu’on est plus le seul à éprouver de telles expériences. En particulier, lorsque les autres personnes en question ignoraient les épreuves passées des autres.

Ce fut le cas de Julie, blonde à Sébastien. Cela faisait six mois qu’elle sortait avec lui au moment où elle refusa de coucher chez nous. Sébas avait fréquenté tous les genres de filles : de la pétée, à la nymphomane, à l’hyper-jalouse, à la trop sérieuse. Mon frère aimait les extrêmes. Julie appartenait à la dernière catégorie. C’est-à-dire le sourire peu facile, une attitude introvertie, elle ne s’incluait pas dans les partys ni dans aucun groupe. Un peu comme moi, sauf pour elle c’était volontaire. Moi, j’aurais donné ciel et terre pour devenir un tantinet plus sociable. Je crois que Sébastien se cherchait un phare avec lequel se guider pour atteindre un terrain plus stable. Avant de la rencontrer, il avait beaucoup abusé de la drogue. À un point qu’il s’en est pratiquement rendu malade. Ses notes s’en sont ressenties et il dut aller en classe de rattrapage. Ça avait été, je pense, l’appel vers la réalité dont il avait besoin. Depuis quelque temps, il fournissait de grands efforts pour se remettre sur le droit chemin, même s’il continuait à fumer du pot ou à festoyer de temps en temps. On ne peut pas changer radicalement comme cela du jour au lendemain.

Donc, Sébastien demanda à sa blonde la raison pour laquelle elle refusait de coucher chez lui. Elle hésita à répondre, et il comprit plus tard pourquoi. Son explication le gifla d’étonnement.

--

Julie éprouvait de la difficulté à s’assoupir. Elle était serrée sur le lit plutôt petit de son chum, Sébastien. Cela ne semblait pas poser de problème à celui-ci, car il ronflait déjà. Elle tentait de le pousser un peu pour se mettre dans une position plus confortable, mais l’état comateux de son partenaire avait considérablement augmenté son poids. D’ailleurs, lorsque son copain dormait, le sommeil l’emportait tellement profondément dans les limbes qu’il fallait une force surhumaine pour l’en sortir.

Elle laissa tomber le projet et décida qu’à défaut de s’endormir, valait mieux se relaxer. Mais la relaxation ne vint pas davantage. Le malaise prit sa place. Elle se sentait observée. Or, la porte était fermée. La chambre se situait au deuxième étage et des stores cachaient l’unique fenêtre de la pièce. Une angoisse se pointa le bout du nez. Comme si un malheur imminent se préparait.

Les nerfs de Julie commençaient à ne plus tenir. Elle se mit debout, car elle avait besoin de bouger. Et puis, elle la vit. Une ombre en forme humaine. La noirceur de celle-ci était pourvue d’une opacité si dense qu’on aurait dit de la mélasse. La présence ténébreuse était d’abord figée au bout du lit. Elle semblait fixer les deux tourtereaux. Julie paniqua et voulut réveiller Sébastien, mais l’entité l’en empêcha en se plaçant entre elle et lui. Ensuite, comme pour la narguer, la silhouette sombre tournoya autour d’elle. Julie souhaitait crier, mais sa voix obnubilée par la terreur la lâcha. Elle ferma les yeux. Tout de suite après, elle avait ressenti que tout s’était arrêté subitement. Elle les rouvrit, et le phénomène avait disparu. Le calme avait rempli l’espace de nouveau. On aurait pu croire que rien ne s’était passé.

L’adrénaline tomba et des symptômes traumatiques apparurent. Elle tremblait comme si elle était atteinte du parkinson. Elle partit à pleurer. Elle pensa à sortir son conjoint de son sommeil, mais elle réalisa qu’il ne goberait pas ça. Valait mieux oublier toute cette histoire. Elle se colla à son chum comme à une bouée. La chaleur corporelle de ce dernier a eu raison de sa vigilance et elle put s’endormir. Enfin.

--

Le lendemain, elle lui déclara qu’elle ne souhaitait plus aller coucher chez lui. Évidemment, Sébastien voulait savoir pourquoi. Après maintes hésitations, elle lui décrivit ce qu’elle avait subi, et à son étonnement, Sébastien la croyait ! Celui-ci lui promit de tout régler.

C’est par la suite qu’il vint à ma rencontre. Il me raconta la mésaventure de Julie. J’ai associé cela immédiatement avec ce que j’avais vécu. Je lui détaillai toute la situation. Un problème se présentait. Il fallait y remédier. On décida de rejouer au Ouija et dicter aux esprits de partir.

On s’y mit le soir même. On ne prépara rien de spécial cette fois. Pas de chandelles, les lumières du sous-sol étaient allumées. Seb parla le premier : « Je souhaite discuter avec l’entité qui a effrayé ma blonde la nuit d’hier. » La planchette se mut vers le « Oui ». « Tu dois quitter la maison. », ordonna Sébastien. La goutte se déplaça légèrement vers l’« Au revoir », et puis elle changea d’idée. Elle se rendit rapidement sur le « Non ». Mon frère se fâcha :

- Tu es supposé quitter lorsqu’on te l’exige !
- V-a-c-h-i…
- Va chier ! Sérieusement, c’est quoi tu nous veux ? demanda Sébas hors de lui.
- T-u-e-z-S-e-b…

Sébastien prit le Ouija et la lança au bout de la pièce. J’étais estomaqué :

– Man ! Ça devient plus grave !
– C’est lui qui va aller chier… C’est chez nous icitte !
– On peut essayer de discuter avec Sue…
– Peut-être…

On reprit le Ouija et on remit nos mains sur la planchette. J’interrogeai les airs :

– On souhaite parler avec Sue.
– Tue Seb… Tue Seb… TUESEB…

La petite planche sélectionna ces lettres de plus en plus rapidement. Je ressentais qu’un malaise grandissait chez mon cadet. « OK ça suffit ! », cria-t-il. Il monta vers le haut, il se renfrogna. J’hésitais si c’était de la peur ou de la colère. Je resserrai le Ouija considérant que c’était le mieux pour le moment.

Qu’est-ce qui se passait ? La vie de mon frère était-elle vraiment menacée ? Lors de la session de Ouija, j’avais eu l’impression que l’entité parlait à moi. Comme s’il m’ordonnait d’assassiner Sébastien. Évidemment, ça n’allait pas arriver. À moins qu’il puisse me posséder ? Comme dans « L’exorciste » ? Ce film m’avait beaucoup impressionné lorsque je l’avais visionné. Il m’avait empêché de dormir pendant une semaine. Cette idée commençait à trotter dans mon esprit.

Et si j’allais tout déballer à maman ? Non, je ne pouvais pas, ça la rendrait furieuse. À mon père non plus. On lui avait donné notre parole. Comme tout adolescent, je n’aimais pas vivre les conséquences de mes actes. Mais d’une façon ou d’une autre, c’est ce qui survenait. De toute façon, qu’est-ce que mes parents auraient pu accomplir de plus ? Valait mieux les garder en dehors de cela, après tout.

Rien d’autre ne se passa du reste de la soirée ou de la nuit... Du moins pas pour moi...

--

Il baignait dans un état d’apesanteur. Le plafond était beaucoup plus rapproché qu’à l’habitude. Le plus étrange était son organisme. Il ne le sentait plus. On aurait dit qu’il était paralysé sauf qu’il pouvait bouger. Quoique bouger n’est pas le bon mot. Flotter serait plus adéquat. Sébastien savait que ce n’était pas un rêve. Même s’il se trouvait dans sa chambre. Alors qu’il se voyait coucher dans son lit. Excepté que le corps qu’il apercevait n’était pas celui qu’il manipulait en ce moment même. Il errait au-dessus de celui-ci.

Il était constitué d’une énergie pure et chaude. Il aurait pu éprouver le bien-être total, si ce n’était de la présence qui l’accompagnait. Il ne la remarqua pas au début, mais il ressentait tout le mal qui la composait. De la haine, de la terreur, de la domination. La négativité débordait de cette force jusque-là invisible et muette.

Ça n’allait pas durer. L’enveloppe éthérée de Sébastien pivota de 45 degrés et il vit au plafond une ombre opaque qui se déplaçait de droite à gauche. Une voix grave de ce qui aurait pu ressembler à un homme résonna de celle-ci. Elle l’invectivait :

– Sébastien, tu n’es qu’une merde et je pourrirais ta vie jusqu’à ce que tu en meures. Je te ferais souffrir sans aucune pitié. Je déchirerais ton être jusqu’à plus soif. Je boufferais tes entrailles. Je te souillerais, salope. Je vais te chier dessus, le con. Je pisserais sur ta tombe, petite tapette. Je te maudis et ainsi que tout le reste de ta famille…
– Toi, laisse ma famille tranquille, gros cave ! Coupa sèchement Sébastien.

Une force surhumaine le poussa. On aurait dit qu’un train avait foncé sur lui. Son âme se retrouva précipitée dans son corps. Il était essoufflé. Il tourna frénétiquement sa tête pour voir si l’esprit malfaisant s’y trouvait toujours. Parti... Il était parti. L’atmosphère s’apaisa. Seb s’assit dans son lit et reprit son souffle. Ses vêtements étaient imbibés de sueur.

La situation venait définitivement de gravir un nouvel échelon dans la dangerosité.

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Auteur Commentaire en débat
couscous
Posté le: 10-03-2016 18:14  Mis à jour: 10-03-2016 18:14
Modérateur
Inscrit le: 21-03-2013
De: Belgique
Contributions: 3218
 Re: Comment j’ai transformé ma demeure en maison hant�...
J'adore l'idée que l'on peut refaire le monde lorsqu'on fait un travail répétitif qui ne nécessite pas de penser.

L'exorciste est un film qui m'a terrorisée pendant de longs mois lorsque j'étais enfant. Brrrr....

Ton histoire pose plein de questions : qui est cette entité négative et pourquoi en veut-elle à Sébastien ?

La suite me le dira, j'espère...

Merci Christian

Couscous
christianr
Posté le: 10-03-2016 21:34  Mis à jour: 10-03-2016 21:34
Plume d'Or
Inscrit le: 17-03-2012
De: Boisbriand, Québec
Contributions: 125
 Re: Comment j’ai transformé ma demeure en maison hant�...
Citation :
Ton histoire pose plein de questions : qui est cette entité négative et pourquoi en veut-elle à Sébastien ?


Cette histoire est basé sur une véritable expérience que ma famille et moi-même avons vécu. Je romance un peu le tout mais en général c'est vrai, donc il y aura, comme c'est arrivé dans la vraie vie, des questions sans réponse.
couscous
Posté le: 11-03-2016 20:07  Mis à jour: 11-03-2016 20:07
Modérateur
Inscrit le: 21-03-2013
De: Belgique
Contributions: 3218
 Re: Comment j’ai transformé ma demeure en maison hant�...
Encore plus effrayant !!!
Mais en tant qu'auteur, tu as champ libre pour inventer les réponses.
Mes préférences



Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
.

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