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Nouvelles confirmées : Doudou blues
Publié par Donaldo75 le 09-05-2016 20:16:37 ( 772 lectures ) Articles du même auteur



Doudou blues


Doudou Hippo avait le blues. Tous ses copains, même doudou Clown, avaient été remisés dans une vieille malle en bois. Il était dorénavant seul, dernier vestige d’une enfance passée et bientôt repoussée par les feux de l’adolescence. La Petite n’était plus ce microbe, comme l’appelait sa maman, volubile et remuante qui déclenchait des tempêtes sur son lit, le soir avant de s’endormir. Elle ne le serrait plus dans ses bras quand elle avait mal au cœur ou que son amoureux du moment lui avait dit qu’il ne l’aimait plus cette semaine. Elle ne lui racontait plus ses matchs imaginaires où elle mettait des buts devant une foule habillée de bleu et de rouge. Elle l’avait juste posé sur sa petite commode, tel un objet ordinaire, un nid à poussière que la fée du logis époussetait tous les jeudis.

Il se rappela les derniers feux de son compagnon de toujours, le doudou Clown aux yeux tourbillonnants, le préféré de La Grande avant qu’elle ne devienne une collégienne.
— Doudou Hippo, l’heure est grave. Nos copains disparaissent les uns après les autres dans la grande malle de bois.
— Je sais. La Petite ne me raconte pas grand-chose ces derniers temps. Elle ne me bave plus sur le museau comme autrefois, ne me mâche plus les pattes, ne me tape plus sur le ventre. Elle préfère découper des images, jouer avec son ballon ou simplement rêvasser à la fenêtre.
— Nous vieillissons, je crois. Nous raccommoder ne suffit pas.
— Tu as certainement raison. Je ne compte plus les coups d’aiguille de La Mère, quand La Petite s’amusait à me découper au ciseau. C’était le bon temps. Elle me martyrisait puis s’excusait quand elle ne retrouvait pas une de mes oreilles.
— Nous en avons bavé mais c’était trop bien. Combien de fois je me suis retrouvé borgne ? J’ai arrêté de compter après la deuxième main.
— Pourtant tu as plus de doigts que moi.
— C’est dire !

Doudou Clown avait alors essayé de faire semblant, en tournoyant des yeux dans tous les sens. Malheureusement, le charme avait cessé d’agir. Doudou Hippo s’était mis à regretter de ne pouvoir pleurer. Il avait juste barri son désespoir dans le vide d’une chambre désertée par ses petits monstres à tête blonde.

Il imagina Doudou Clown au fond de la grande malle de bois, en train d’amuser la galerie de peluches. Girafe multicolore, ours débonnaire, champignon à collerette ou chien à grosse tête, tous devaient forcément rigoler devant le prince des amuseurs, le champion des soirées dans le lit, le chouchou de La Grande naguère volubile. Doudou Clown n’avait pas son pareil pour transformer un petit malheur enfantin en grande scène de délire, avec pléthore de personnages fantastiques. Plus drôle qu’un conte de fées où une Barbie sérieuse terminait forcément mariée au beau prince charmant malgré les tours de rosse de sa jalouse belle-mère, les histoires de doudou Clown ressemblaient à des chansons de gestes. Chacun trouvait sa place dans ce petit théâtre de la nuit, même la minuscule souris de la première dent.

Clarabella fit soudain irruption dans la chambre. Elle regarda l’hippopotame recousu, le jugea apte à un bon coup de plumeau puis le débarrassa d’une invisible toile d’araignée. La Mère entra à son tour.
— Vous êtes incorrigible, Clarabella. Ce doudou est propre comme un sou neuf. Vous avez des tocs, ou quoi ?
— Non, madame, je lui témoigne juste un peu d’attention. Il a l’air si triste, seul sur cette commode.
— C’est vrai qu’il n’a plus son sourire enjôleur, avec ses grosses dents et ses yeux ronds. Qu’est-ce qu’il me faisait rire ! Je regrette presque ce temps.
— Au moins, il aura protégé vos enfants.
— Vous croyez ?
— Oui. Chez nous, au Guatemala, nous avons des poupées tracas. Durant la nuit, elles avalent les peurs de nos petits. Je crois que ce doudou a fait de même durant des années.
— Un doudou tracas ?
— En quelque sorte.
— Et si je vous le donnais, Clarabella ? Vous avez des enfants, si je ne m’abuse.

Doudou Hippo se mit enfin à espérer. L’histoire des poupées tracas lui plaisait bien. Il commençait à croire que lui, doudou Clown et peut-être d’autres compagnons avaient protégé La Petite et La Grande de leurs monstres intérieurs, de leurs frayeurs nocturnes et de leurs chagrins enfantins. La perspective de reprendre du service dans une nouvelle famille lui redonna le sourire. Il imagina déjà des petits garçons bruns lui parlant espagnol, racontant leurs problèmes et mâchouillant ses oreilles. Doudou Hippo barrit de plaisir au rythme des coups de plumeau de sa nouvelle maîtresse de maison.

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Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
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