
Paname
Date 10-03-2023 09:51:54 | Catégorie : Annonce
| Paname
Ils promènent leur jolie bohème au son des lyres A travers les rues qu’arpentaient jadis les Poulbots Les bistrots des Abbesses ouvrent soudain leurs tirelires Pour ces amoureux de la rime et du pinceau.
Un peintre un peu laid qui forçait sur la bouteille Dessinait la jambe levée d’une gazelle paumée Client au bordel, il ne trouvait le sommeil Que dans la couche d’une putain des mauvais quartiers.
La mer se chante sous les combles de l’indigence Les cigales aux chants superbes sont des joueurs d’orgue Un poète navigue sur les pavés et ses stances Baignent dans la gaieté, dans les pleurs d’une morgue.
Les loups-garous de la nuit affluent rue Lepic Voilà la Grande Truanderie qui nous revient ! Lorsqu’on craint les lames venues d’un poème épique Il faut fuir la pègre à la casquette, les vauriens.
Le roi Pablo est là dans son Bateau- Lavoir Il y bleuit les gueux rabougris de Barbes La Main descend des nuées pour nimber cette gloire Que fuit l’espoir, qu’un soleil enjoué délaisse.
Les bigotes prient en petit tas à Notre Dame Pour le salut de la lie qu’on a séquestrée Le hibou royal s’est évadé au grand dam De l’ordre public, du moral des bijoutiers.
Un ogre à lunettes est accoudé au comptoir Et partage son ivresse avec deux trois voyous Le vin coule sur sa barbe drue du matin au soir Cependant qu’il récite son Bestiaire de trois sous.
Les guitares s’allument allègrement au Lapin On y vient veiller et entonner A Montmertre Au matin givré, on se réchauffe aux copains Qui déplient leurs petits brins de chansons place du Tertre.
Un albatros tournoie dans le ciel de Paris Il cherche une vague de dune sur l’Île de la Cité Le haschisch plonge les mots dans un lagon d’oubli Et éloigne ainsi leur père d’un spleen acharné.
Un juif un peu fou fait le guet à l’abattoir Il cherche une belle carcasse pour la toile à venir La voilà  ! L’homme sort à pas de loup et court choir Dans une géhenne qu’il faut quitter par le plaisir.
Hier c’était grand nettoyage à Pigalle : Les jets ont lavé à l’eau bénite un bordel ; Les the nanas sont descendues avec leurs malles La Camarde a eu raison d’un mac trop rebelle.
Un jeune poëte maudit aux cheveux en bataille Fignole le sonnet de ses hallucinations L’absinthe d’un tavernier vient semer la pagaille Dans son âme assiégée par un mauvais démon.
Les guinguettes se font belles sous le beau ciel léger La Marne tout autour offre aux barques un lit d’amour Des durs affriolent Casque d’Or, la font valser Puis iront se battre en duel aux alentours.
La rue a accouché d’une enfant à Belleville ; Les dieux du bitume ont œuvré dans une flaque d’eau Pour créer ce corps sculpté dans l’asphalte fertile Et cette voix des bas-fonds qui fait germer le Beau.
Voici écrits tes vieux tableaux, ô bien-aimée Nombril du verbe, du pinceau, du refrain des rues Je ne suis qu’une ombre et je demeure à tes pieds A jamais triste que ton âge d’or soit révolu.
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