Je suis un cimetière de bord de mer observé…

Date 10-03-2023 18:07:14 | Catégorie : Annonce



Je suis un cimetière de bord de mer observé…


(Il fait nuit. Prière de faire attention aux marches avant d’entrer dans l’essence toute grise du Verbe en cendres. Suivez ainsi le fil des idées morbides…)






Je suis un cimetière de bord de mer observé
Un quiet jardin de pierres une morne éternité
Où s’agitent mes morts les plus angoissés…
Il y a là le chiendent têtu les fils barbelés
Et puis le marbre d’un grand caveau à sculpter
Que transperce le tronc d’une yeuse âgée
par lentes mais sûres poussées…
Et puis il y a des dames toutes blanches recrachées
aux robes desquelles se décrasser de tout son noir étoilé
pour oublier enfin de loucher toujours à côté…
Il y a une tour en périphérie pour guetter
le vague printemps mort-né
à la fin de l’été meurtrier
le symptôme des mers sur le croquis d’une fée
l’Erreur par le Crabe incarnée…
Il y a une tour un radar froid une épuisette un filet
pour contenir la marée d’une sève qui a tourné…
Je suis l’âme rendue à la pierre taillée
Le soupir du chrysanthème le thème enténébré
L’impatience d’en renouer avec l’odeur oxydée
au- dedans d’une grille rouillée…
Je suis la tombe solitaire qui déborde du champ entamé
Le rectangle imparfait le plus boiteux ô anormale anormalité !
Celui pour quoi on est forcé
d’aménager un régime spécial tout détrempé
Celui à quoi on est condamné
d’offrir à nouveau le Sein goulu de la dernière des Gitane croisées…
Je suis le cimetière noyé
la Tasse vile bue par le trépassé
et le trépassé lui-même qui a bu cette Tasse d’eau salée…

Alors à quoi a-t-elle donc servi cette tour aux aguets ?
Alors qui donc gère ce c(h)amp de pierres fleuries profané par les alizés 
où s’inscrivent les pensées
de nos chers visiteurs enamourés ?

La tour distribue de la lumière blonde les soirs de blanches nuitées…
La tour pose esthétiquement la posologie mortuaire avec des mains fines de femme désirée…
La tour se livre à des analyses scientifiques jusque dans nos diarrhées…
La tour est triste de ne devoir garder de nous que les reliquats de la plus haute marée
que l’Ombre que la maladie esquisse sur le papier
que les Ténèbres vomies par nos chouettes perchées
que la Pluie sans grains d’eau dans la Passoire de notre Mémoire hantée…

Voila tout ! La tour ne peut rien face à la fumée…

Impuissante elle ne peut que lorgner mes macchabées les plus chers les plus abîmés
mes cadavres les plus observés
mes pourritures mes terres les plus stériles et désertées
mes os sans ADN répertorié
mis au service de mes investigateurs variés
qu’une fumée
vient saisir par tous les pores refermés
pour les faire tressaillir soudain -on y est enfin arrivé-
d’un plaisir inconnu déterré…
Impuissante elle ne peut qu’observer la douce fumée
venir relécher
mes rachitiques dépouilles gazées
par ladite fumée…

La tour ne peut tant rien qu’on la croirait presque complice intime premier
voire responsable numéro un à juger
à la place de tout un hiver sur un printemps étalé
à la place de l’Essence- même de l’existence menée,
d’une grisaille aujourd’hui sculptée…

Oui la tour observe mes enfumés…





Brignais, 22/06/2011.







Cet article provient de L'ORée des Rêves votre site pour lire écrire publier poèmes nouvelles en ligne
http://www.loree-des-reves.com

L'url pour cet article est :
http://www.loree-des-reves.com/modules/xnews/article.php?storyid=12463