
Fumée
Date 10-03-2023 18:43:33 | Catégorie : Annonce
| Fumée
Je fume ici Je fume là -bas J’enfume la fumée Je fais des braises avec mes doigts.
Je ne défume jamais J’avance en fumant Je fais marche arrière en surfumant J’entache la fumée.
Je fume dehors Je fume dedans Je fume mon bonheur Mais c’est toujours moi qui suis heureux.
Je fume le bout filtre Je fume des oreilles Fumeur de la bouche et du pied Je fais aussi des tableaux avec.
Je fume dedans Je fume à côté, Toujours de travers Je fume en vous aimant.
Je travaille ma fumée Je fais des ronds dans le ciel Et puis des nuages dans les nuages Je suis l’Erreur.
Je n’éteins mon briquet Qu’en fumant. Je ne dérange jamais la fumée Puisque ma conscience m’interdit de doublefumer.
Je vous jette la fumée au nez Tous les jours d’orage Et je n’aime personne Excepté les cancéreux du poumon.
Je fume en buvant rien Et je mange du tabac en fumant. Je m’en moque Puisque demain je repars à zéro.
J’écris en fumant Tant j’ai besoin d’une inspiration Je boite en fumant Pour garder mon élégance.
Je fais des mythes Avec mes taffes Alors pourquoi donc se plaindre des trous Que mon taf coutumier réveille…
J’effeuille la fumée Pour mieux faire l’amour avec ce qui reste J’effeuille la chevelure de la Gitane Pour l’enlaidir le plus près de moi…
Je fume au frigo Pour garder chaud cet amour Je fume au dedans de l’hiver Afin de m’octroyer un moment de vaine tendresse
Je fume du poumon Car j’aime les abats Je fume des épines Car j’aime encore bien la cuisine.
J’enfume ma bûche, Dorée au soleil Je fume sous l’Étoile du Jour, Capitale du système organique.
Je fume pour la forteresse Pour la barbe du Gaulois Je la fume pour la terreur De la porter très haut dans mon cœur.
Je la fume comme une erreur Pour la nuance du personnage Pour le point noirci Dans l’Océan blanc de l’Immaculé.
Je la fume dans la paresse Dans les boues à venir Le plus près possible de la torture. Elle est le strabisme menaçant au dessus de la marinière.
Je fume pour le paysage désolé Pour l’abandon qui me va comme un gant. Je fume pour me confier au poème Avec tout un jeu de mots noirs, brumeux et ténébreux.
Je fume pour créer Pour savourer la douleur Pour enfoncer le clou Pour préférer le mot malade au mot fragile.
Je m’enfume pour la souche Pour la flèche pour le muscle Pour le casque ailé Pour la délinquance du Gitan.
Je m’enfume pour la peur Pour l’agitation des nerfs dans la yeuse Pour la désolation où je caméléonne Pour les racines têtues dans la gorge.
Je m’enfume pour la révulsion Mais aussi pour le gommage des sens ; Je fume pour le bémol et le mode mineur Je fume pour vieillir mon autoportrait.
J’enfume au chaud délicieux de la distorsion graphique ; J’enfume pour surfaire enfin mon âge. Je suis le Monstre rayé du Loch Ness La marée noire la pièce unique portée par Picasso.
Je fumerai mieux demain En changeant de conduis ; Un conduis imaginaire perdu dans le Fouillis ! Un conduis que je m’empresserai de tracer, De dessiner, de sculpter, de magnifier Dans le cœur d’une yeuse tordue, Dans une écorce lisse retrouvée…
Écrire est un acte Avant l’Acte. Écrire ! Drainer la volute L’amadouer par la Beauté Par l’Image Puis l’apprivoiser La mener La conduire Par le biais du conduis verbal Jusqu’au paradis de la rédemption ; Écrire afin de mieux la maquiller Sans pour autant négliger sa mise à nue… La hisser plus haut encore qu’elle ne sait le faire, Jusque dessus un nuage blanc Parmi angelots nus, lyres classiques et superbes licornes En la dévêtant évidemment de sa grisaille De ses tristes oripeaux De son poids De sa charge De sa nocivité.
J’écris pour aller chercher un sourire joli chez la Sagesse Le plus près possible de la monstruosité… Le plus près possible Des dents cariées De ses dents manquantes De ses dents jaunes De son visage « lustré »…
Par pitié ! Ne condamnez rien !
Priez plutôt pour moi ! Amen.
Brignais, 18-19/04/2011.
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