Le jeu vidéo est-il le huitième art de notre époque ?

Date 19-02-2013 00:16:10 | Catégorie : Essais


Bonjour,
Après les diverses réflexions ça et là sur l’éducation apporté aux enfants de notre époque et les interrogations légitimes que l’on peut se faire sur la place du jeu vidéo dans l’éducation des jeunes, je propose le petit article suivant afin de charrier un peu d’eau au moulin.
Le jeu vidéo est-il le huitième art de notre époque ? Cette question me vient tandis que le musée d’art moderne de New-York (MoMA) est en cours d’acquisition d’une quarantaine de jeux-vidéos. Le but est entre autres la conservation de ces jeux face aux modifications de la technologie, mais le partie pris est là : le jeu vidéo est consacré en temps que forme artistique de notre époque, digne de figurer au côté des plus grandes toiles ou sculptures de maitres.

Il faut dire que le jeu vidéo a beaucoup évolué depuis ses premières émanations dans les années 70, avec le célèbre Pac-Man ou encore Tétris. Le but du jeu étant alors assez sommaire : pac-maner ses adversaires ou encore entasser des cubes de la bonne façon.
Le jeu vidéo a ensuite évolué sous forme de jeu d’arcane dans les années 80/90 : on le retrouve au côté du flipper dans les bars ou cafétérias. Ce sont des jeux de baston, des poursuites de voiture…
Avec l’apparition de la console individuelle, le jeu vidéo fait sont entrée dans les foyers dans les années 90 : c’est l’heure de gloire des super-marios (console Nintendos) ou autre Sonic (console Séga). Ce divertissement trouve alors son public : les enfants et les adolescents. Il fait partie intégrante de leur culture, s’échange dans la cours de récré, alimentant les conversations, et devient de plus en plus une source d’addiction pour ces derniers.
La mise en scène des aventures d’un personnage que le joueur va incarner au travers d’une quête de plus en plus longue et complexe rend le personnage très attachant. Le phénomène d’identification devient de plus en plus fort. A cet égard, on donne souvent en référence le jeu « Prince of Persia », à l’origine jeu de plate-forme (1989) et qui n’a eu de cesse d’évoluer vers le réalisme. Ou alors « Dune »: à l’origine jeu de stratégie (1992) inspiré du roman de science-fiction et qui a connu de multiples postérités. Et encore « Zelda » sorti en 1986 et qui se décline en une quinzaine de versions. Le jeu vidéo n’est plus réservé aux enfants, il grandit avec l’enfant et perdure sous de multiples formes. Il fait aussi le nécessaire pour séduire les jeunes adultes avec une grande gamme de jeux interdits aux moins de 18 ans : jeux de guerre, jeux de massacre…

Les scénarii de jeu se complexifient vers la fin des années 90 et les années 2000 la qualité de l’image et du son rendent certains jeux dignes du cinéma. Les jeux d’aventure rencontrent un immense succès. L’hyper-réalisme est recherché et devient un critère de qualité esthétique du jeu.

A cet égard, on peut prendre pour exemple le jeu « assassin’s Creed » dont la complexité de l’histoire lui vaut d’être bientôt adapté au cinéma. Développé à partir de 2006 par Ubisoft (société à l’origine des sympathiques Lapins Crétins), le jeu de l’assassin met en scène un jeune homme de notre époque explorant la mémoire de ces ancêtres grâce à une machine nommée l’Animus. Il se ballade ainsi dans la peau d’Altaïr, membre de la secte des assassins, dans le Jérusalem du XIIe siècle.

Justement, ce rapprochement entre cinéma et jeux-vidéos se confirme depuis quelques années. Les personnages de jeux-vidéos devenant suffisamment populaires pour intéresser l’industrie du film, et justifier des productions à budgets colossaux. On peut citer entre autres:
« Resident Evil », film d’horreur (2002) : une mystérieuse jeune femme dégomme des zombies dans la petite ville de Racoon City.
« Tomb Raider » qui reprend le personnage de Lara Croft, genre d’Indiana Johns au féminin (film de 2001)
Mais cela fonctionne également dans l’autre sens : un succès cinématographique tel qu’ « Avatar » (2009) a ainsi pu donner naissance à un jeu vidéo inspiré du film (il faut dire que le thème de l’avatar se prêtait plutôt bien à l’univers des consoles…)

Ce rapprochement avec le cinéma n’est pas la seule marque d’infiltration du jeu vidéo dans notre société. Le développement des technologies en est la principale explication puisque l’on trouve désormais ce type de jeux sur tous supports en dehors des consoles : téléphones portables, ordinateurs, tablettes, jeux en réseaux via internet. Le jeu en réseau est à cet égard particulièrement addictif : dans le jeu « word of warcraft » cesser de jouer met son personnage dans le terrible péril de se voir zigouiller par d’autres assaillants du net puisque les joueurs de l’autre côté de la planète sont eux aussi connectés. Théoriquement, il ne faudrait donc jamais cesser de jouer…

Tandis qu’il se banalise, le jeu vidéo trouve désormais de nouveaux usages : entrainement sportif (console WII), divertissements en société (Karaoké, danse), entrainement cérébrale, jeux éducatifs (on peut ainsi trouver sur le site de la cité des sciences, de petits jeux pour jeunes enfants à vertus éducatives).

Le jeu vidéo a également su investir la sphère affective avec le développement de la réalité virtuelle (possibilité de vivre une « seconde life » dans le jeu « les Sims ») ou apparition de certaines modes tel le Tamagotchi qui permet aux enfants d’élever leur « œuf-monstre » portatif.

La multitude des formes du jeu vidéo nous fait ainsi douter de ce qu’il est en temps d’objet, et de sa finalité. Il n’est plus tout à fait une simple interaction programmée entre l’homme et la machine visant à créer du divertissement. Cela explique-t-il le titre de « création artistique moderne » que les conservateurs du MoMA semblent vouloir lui donner ?

S’il est communément admis que l’art est l’activité humaine visant délibérément à créer du beau ou de traduire une certaine vision esthétique, de toucher les sens ou de créer de l’émotion à l’aide d’une technique qui tend vers un perfectionnement constant ; il faut bien reconnaître que cette définition peut fluctuer en fonction du lieu et de l’époque.

Le jeu vidéo a-t-il donc dépassé le stade de loisir dans lequel nous cantonnons des activités telles que la télévision, les jeux de cartes ou le Monopoly ? Notre époque est-elle prête à lui donner un nouveau statut, conforme à son degré de complexité et de son enracinement dans l’imaginaire collectif ?

Au regard d’un phénomène aussi nouveau à l’échelle de l’histoire de l’art, chacun est encore libre de se faire sa propre opinion…



Article sur le MoMA :
http://www.lefigaro.fr/jeux-video/201 ... e-hisse-au-rang-d-art.php

Bande annonce du jeu « assassin’s creed » :
http://www.youtube.com/watch?v=cc-ClutaN_I

Jeu pour enfants sur le site de la cité des sciences :
http://www.cite-sciences.fr/francais/ ... des-enfants/jeux-2-7-ans/





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