Un vilain petit canard

Date 20-05-2013 07:30:00 | Catégorie : Nouvelles


Remarque : pour ceux qui ont l'habitude de me lire, vous constaterez que ce texte est légèrement inhabituel. J'avoue avoir eu envie de vider un peu mon sac et vous dévoiler un morceau de moi ...



Vous connaissez cette histoire ? Eh bien, j’en suis un. Non, je n’ai ni bec ni plumes mais je me suis toujours sentie ainsi.

Je suis fille unique. Mes parents n’ont pas souhaité réitérer l’expérience de la parentalité une seconde fois. Mon père ne désirait pas d’enfant sous prétexte que projeter un être vivant dans le chaos du monde est un acte d’inconscience. Mais il a fini par se laisser convaincre par Maman, désireuse de faire comme Monsieur et Madame Tout-Le-Monde de l’époque, dans les années 70. Avoir un enfant, c’était comme posséder une voiture ou être propriétaire. J’ai donc débarqué dans ma famille qui m’aimait par obligation car un enfant n’est ni repris ni échangé. J’ai grandi en tentant de me faire apprécier grâce à de beaux résultats scolaires et un comportement irréprochable. Mais les premiers de la classe n’ont pas toujours la cote auprès des autres. Mais lorsqu’un de mes congénères était absent et qu’il devait rattraper des cours en retard, je devenais alors, pour un temps, la fille indispensable.

A l’adolescence, on oublie la crise identitaire afin de ne pas passer pour la mauvaise et donner une raison de ne plus m’aimer. J’étais la jeune fille modèle qui ne demandait jamais à sortir le soir. De toute façon, il me fallait garder la maison désertée par mes parents, partis se défouler en boîte de nuit. Le monde à l’envers … non ?

L’écriture est devenue mon échappatoire, une porte pour faire entrer de l’oxygène, me retrouver, m’évader. Plaisir longtemps solitaire car non partagé. Plus tard, quelques poèmes pour les collègues à certaines occasions m’ont permis de me démarquer, de me différencier. En suscitant toujours l’émotion de mon destinataire, je parvenais à m’en faire apprécier. La reconnaissance … cette sensation qui fait chaud au cœur et redonne le sourire.

Je pratique aussi couramment l’humour. Il me permet de cacher ce manque profond et d’attirer l’attention de mon interlocuteur, qui m’accordera peut-être une petite attention sympathique par son sourire.

Nous sommes nombreux à rechercher cette reconnaissance pour nous affirmer comme un être unique parmi une populace stéréotypée. Certains écrivent, d’autres jouent des rôles, chantent ou tentent simplement d’être le meilleur dans leur domaine. Nous sommes tous de vilains petits canards mais des cygnes dans les yeux de l’être qui nous chérit, de l’enfant qui nous sourit, de celui qui nous remercie.

J’ai donc décidé de muer. Je ne veux plus me voir comme ce petit caneton pleurnichard. Je revêts maintenant le plumage de cygne, sous les yeux de mes proches qui m’apportent enfin cette reconnaissance inespérée.




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