Une petite phrase ( dédié à Bacchus qui a de méchantes douleurs)

Date 22-07-2013 15:10:00 | Catégorie : Nouvelles


Dédié à Bachus, qui souffre le martyr en ce moment.


Je suis loin d'être toute neuve, j'ai un âge où je suis plus prés du Z que du A, ou, comme le disait Thierry le Luron, un âge où les bougies reviennent plus chères que le gâteau, bref j'ai soixante ans et des poussières.... beaucoup de poussières.

Comme tous les enfants nés après la dernière guerre, j'ai été élevée pas des parents plus ou moins traumatisés, qui avaient subi cette guerre pendant leur enfance ou adolescence, issus eux mêmes de parents qui avaient vécu celle de 14/18 !!
Deux guerres mondiales en trente ans entre- coupées par la crise économique de 1929 !!
Forcément ces jeunes parents, marqués à vie pour avoir connu la peur, le froid, la faim quelquefois et des privations multiples dont un manque totale de liberté dans cette France occupée étaient incapables de tendresse, de montrer leur amour, de dire " je t'aime " à leurs enfants, incapables de leur dire que la vie était belle car ils ne le pensaient pas.
Ces parents aimants, mais frustrés, mal dans leur peau, n'avaient qu'un désir : préparer leur progéniture à affronter une vie pleine d'embûches; l'éducation était donc rigide, austère, à coups de pieds aux fesses, il fallait marcher droit, entre eux, le curé et l'instituteur, sans avoir la possibilité de s'exprimer, de manifester le moindre désir, rien à voir avec l'éducation d'aujourd'hui.
Ces parents devenus matérialistes avec le progrés, voulaient profiter de cette période d'accalmie, mais en tenant leurs enfants à l'écart, afin ne pas les habituer " au luxe " - qui n'en était pas un en réalité - aussi quel ne fût pas leur étonnement de voir arriver mai 68 et cette foule de jeunes chanter " Faites l'amour et pas la guerre ", dansant sur des disques vinyl, et écoutant ensuite " Salut les copains"...

Mais certains parents, dont les miens, tenaient bon, pas question de suivre ce mouvement, la vieille école résistait !! alors, comme beaucoup, je me suis retrouvée à l'àge adulte ( majorité à 21 ans )avec quelques blessures au cœur et à l'âme :
Pourquoi mon pére me faisait- il pleurer au lieu de me prendre dans ses bras? pourquoi jamais la moindre parole affectueuse, pourquoi n'étais- je pas récompensée pour le travail que je fournissais, pourquoi ce manque de communication, de tendresse, pourquoi ces paroles cruelles et injustes ? et pourquoi ma mère ne me défendait- elle pas ?
Lorsque j'ai osé, un jour, demander à mon père, une deuxième robe pour sortir le jour de la fête du village - la premère datait de l'année précédente, il m'a répondu, " Je t'achèterai bien une robe, mais si je t'en achète une, il faut que j'en achète une aussi à maman,(ma mère était très coquette) sinon je vais avoir des histoires, et mes moyens actuels ne me permettent pas ( oh, le menteur ! ) d'acheter deux robes à la fois ".
Fermer le ban.

Devenue adulte, mariée, loin de mes parents j'ai enfin commencé à vivre normalement entre un homme qui m'aimait et un adorable petit garçon, mais toujours avec cette blessure profonde et un sentiment confus de rejets et d'amour envers mes parents.

Un jour, une amie me parle d'un homme qui, sans être médecin, lui apporte beaucoup psychologiquement, elle me propose de le rencontrer, j'accepte et en cinq minutes ma vie fût transformée....

- " Que vous arrive t il ? "
- " Mon pére, ma mère, .." il comprend très vite
- " Vous avez été malheureuse avec votre père militaire, et vous avez épousé malgré tout un
militaire ?
Je n'avais jamais fait le rapprochement , je pense aussitôt à ces enfants battus qui, dit- on, ( je
ne suis pas d'accord avec cette théorie) reproduisent, une fois parents, les mêmes sévices sur leurs descendants et je me défends :
-" J'ai pris soin d'épouser un militaire avec un caractère complètement opposé à celui de mon père"
Ma défense n'a pas l'air convaincante, il poursuit :
- " Remontez le plus loin possible dans votre mémoire et dîtes moi qu'elle est la première phrase ou le premier fait qui vous a fait souffrir "
Je réfléchis, c'est une phrase que mon père a adressé à ma mère, mais elle me concernait, je devais avoir quatre ou cinq ans.
Et brusquement les larmes me montent aux yeux et j'ai honte de cette faiblesse, je pleure en disant cette phrase cruelle.
"- Vous allez répéter cette phrase sans arrêt et vous me direz ce que vous en pensez."
Je répète cette phrase douloureuse cinq ou six fois et là je comprends, c'est pour moi une révélation.
Je me rends compte que ce ne sont que des mots, de simples mots les uns derrière les autres, les mots c'est du vent, ils prennent uniquement l'importance qu'on leur donne, et en répétant cette phrase plusieurs fois, elle se vide de tout son sens !!
Elle ne veut plus rien dire !
La phrase ne me choque plus, ne me blesse plus, elle a perdue tout son impact sur moi, elle ne me concerne plus, elle est sortie de mon esprit, elle est balayée, oubliée, elle est inoffensive , elle ne me fera plus jamais souffrir.
Maintenant, je sais quoi faire papa, tu ne viendras plus me torturer avec tes phrases assassines, Je suis une jeune femme libre et forte, ta triste influence sur moi est terminée.

Qu'elle était cette phrase qui me faisait pleurer ? aujourd'hui, je ne sais même plus et je n'ai pas envie de la chercher, c'est du passé et seul l'avenir m'intéresse.

Cela, c'était pour ne plus souffrir et quelques années après, j'ai eu l'idée saugrenue pour l'époque, de vouloir être heureuse !!! de profiter pleinement de ce que la vie m'offrait !!! un état d'esprit à acquérir, on ne parlait pas encore de développement personnel, de psychologie cognitivo-comportementale etc ... et c'est un voisin, un vieux monsieur charmant, plein de sagesse, qui m'a montré le chemin.

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