Comme une poupée : dimanche 2 novembre (partie 1)

Date 19-08-2013 19:50:00 | Catégorie : Nouvelles confirmées


Chers lecteurs, pour une bonne compréhension, je vous invite à lire le chapitre "Samedi 1er novembre"

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Dimanche 2 novembre
Lucie ouvre doucement les paupières. Le soleil a repris ses quartiers et inonde la chambre d’une douce lumière apaisante. Dans l’embrasure de la porte, la vieille dame de la veille apparaît. Elle adresse un sourire radieux à la jeune fille ainsi qu’un « bonjour » enjoué.
« Bonjour Madame. Je vous remercie pour hier soir.
- C’est normal Marguerite.
- Je m’appelle Lucie. »
La dame s’arrête un moment, pensive. Elle marmonne dans ses dents : « Je préférais Marguerite. Tant pis.
- Pardon ?
- Oh, rien. Tu as faim ?
- Oui, très. »
La maîtresse de maison quitte rapidement la pièce pour faire une entrée triomphale, quelques minutes plus tard, avec un plateau en bois qu’elle dépose sur les genoux de Lucie. L’odeur de café et de pain frais lui saute aux narines et la fait saliver. Elle ne se fait pas prier pour terminer les tartines beurrées et le jus d’oranges. La dame la regarde s’empiffrer avec une mine ravie. Entre deux bouchées, Lucie a le temps de l’observer. Elle doit avoir au moins quatre-vingt ans. Ses cheveux gris sont coiffés en un chignon parfait. Des rides profondes lui parcourent le visage. Derrière ses lunettes en écaille, elle ne quitte pas Lucie ses yeux. Elle porte une robe à fleurs des années soixante. Un petit tablier bleu lui enserre la taille qu’elle a fine, lui donnant un air de soubrette. Après avoir fini sa déglutition, Lucie s’exclame :
« Un grand merci, Madame. Je suis repue.
- Ne m’appelle pas Madame. Je suis Mom. »
Mom ? Quel étrange prénom se dit Lucie.
Mom reprend son plateau et repart en bas. Peu après, c’est le maître de maison qui vient s’enquérir de l’état de Lucie, en pleine digestion. L’homme est d’une stature modeste, diminuée par un dos voûté. Ses cheveux, plaqués en arrière, sont totalement blancs et une légère calvitie semble naissante au-dessus du front. Son visage émacié, son nez et ses doigts crochus lui donnent un air de rapace. Il adresse un sourire grimaçant à Lucie.
« Comment te sens-tu, mon enfant ?
- Ça peut aller. Puis-je téléphoner à ma famille ? Ils vont s’inquiéter.
- Mais nous n’avons pas le téléphone. Cela coûte trop cher.
- Ah ? Ce n’est pas grave. J’ai mon portable dans la poche de mon jean.
- Jean ?
- Mon pantalon … »
Le vieil homme se dirige vers une chaise dans le coin de la pièce. Il tend le pantalon, découpé et maculé de sang, à Lucie. Elle sort de la poche gauche son téléphone. Elle perçoit une petite lueur d’inquiétude passer dans le regard du vieux monsieur. Elle tente d’allumer l’appareil mais l’écran porte des taches d’humidité et reste impassible malgré les tentatives désespérées de sa propriétaire. Elle finit par se résigner en annonçant :
« Il a pris l’eau hier soir. Je pense qu’il est foutu. Vos voisins … ils ont le téléphone ?
- Nos plus proches voisins sont à dix kilomètres. Ce n’est pas grave. Ma femme et moi-même allons bien nous occuper de toi. Je m’appelle Dad. Tu es entre de bonnes mains. »
Dad ? Lucie se dit qu’ils se sont bien trouvés ces deux-là avec des prénoms aussi étranges.
Sur ce, il pose sa mallette, la même que la veille, sur la table de chevet et l’ouvre. Il en retire soigneusement des pansements et un flacon sans étiquette, contenant un liquide transparent. Il retire les bandes et le pansement sanguinolents. Lucie manque de tourner de l’œil à la vue du trou béant dans sa cuisse. Il badigeonne la plaie avec du liquide provenant du flacon mystérieux. Il lui donne finalement un comprimé et un verre d’eau.
« Avale. Tu te sentiras mieux.
- C’est pour la douleur ?
- Oui. »
Dad remballe la blessure et son matériel quand Lucie interroge son soigneur :
« Il vaudrait mieux que je passe une radio. Non ? Vous avez une voiture ?
- Non. Il te faut du repos. C’est moins grave que cela en a l’air.
- Ma tante habite à quelques kilomètres. Si vous avez une voiture, vous pourriez me conduire chez elle.
- Non, je n’en ai pas.
- Et mon vélo ?
- Je l’ai retiré du fossé. Il était bien abîmé. Je l’ai mis dans le garage. Maintenant, repose-toi jusqu’au dîner. »
Et il sort prestement. Lucie a une étrange impression dans cette maison qui semble totalement coupée du monde. Pas de téléphone, pas de voiture et elle ne se souvient pas avoir vu de télévision dans le salon, hier soir. Elle cogite sur le meilleur moyen de joindre ses proches. Ils ne vont pas s’inquiéter dans l’immédiat car elle vit seule dans un petit appartement. Ses parents sont en vacances deux semaines en Corse. Personne n’est censé s’enquérir de son sort, aussi malheureux soit-il, pour l’instant.


à suivre ...



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