Un rêve désordonné (suite et fin)

Date 24-08-2013 13:25:43 | Catégorie : Nouvelles



Un rêve désordonné ( suite et fin)


VI - Ils cotisèrent et s’offrirent les services d’une vieille et grosse prostituée qui se déplaçait péniblement en boitant. Ils la rencontrèrent près du bar. Comme elle n’était sollicitée par personne à cause de ses défauts physiques, elle accepta sans se faire prier. Mais elle exigea qu’elle soit payée d’avance.

N’ayant vécu aucune expérience avec une femme, les deux associés ôtèrent, sur le champ, leurs pantalons et ordonnèrent à la poule de se mettre directement à plat ventre. Celle-ci refusa catégoriquement et réclama une explication. Ils lui relatèrent leur polémique au sujet de l’européenne de la plage. Elle accepta finalement et se retourna sur sa bedaine.

« Si c’est rien que pour vérifier… »

Elle découvrit sa croupe extraordinairement large et flasque qui avait l’air d’une pâte levée et écarta légèrement ses jambes sillonnées de varices. Rachid escalada, le premier la butte de chair, visa bien et poussa violemment…

La cible fut atteinte du premier coup. Il avait raison.

La handicapée le pria d’opérer tout doucement : Elle avait mal partout. Son dernier client l’avait généreusement rossée avant de la mettre à la porte.

Omar voulut lui aussi prouver sa thèse. Mais c’était peine perdue. Quel que fut son angle de tir, son engin atteignait toujours le même but. Voulant défendre ses arguments à tout prix, il prétendit que la boiteuse avait le sexe anormalement large. Vexée, cette dernière propulsa le pauvre garçon, loin d’elle, avant qu’il ne jouisse.

« Va vérifier avec une vierge de ton âge ! », cria-t-elle.

Après avoir fumé une cigarette chacun, Ils voulurent recommencer. La prostituée postula pour sa pose préférée, et s’allongea sur son dos.

Omar eut son premier orgasme avec une femme.

Les deux jeunes garçons tentèrent une troisième fois et mirèrent différentes cibles du corps de la vieille femme.

Vers une heure du matin, agacée par les bouillants et torrides adolescents qui briguaient des postures largement au dessus de ses capacités physiques, la malheureuse prostituée, les quitta en injuriant.


VII - Issu lui aussi d’une famille très pauvre qui habitait, elle aussi, dans un des nombreux bidonvilles, Omar avait emprunté un itinéraire plus long et plus sinueux que son ami avant d’atterrir au même endroit.

La condition sociale de ses parents le jeta dans l’enfer du monde de travail alors qu’il n’avait pas encore atteint l’âge de cinq ans. On l’initia à plusieurs métiers en tant qu’apprenti. Mais à la fin de chaque semaine, alors qu’il espérait percevoir un petit salaire pour contribuer aux dépenses de la famille, comme disait son père, il ne recevait de ses patrons qu’une paire de gifles parce que le travail qui lui avait été confié n’était pas bien réussi. A la maison, son père ne croyait pas les dires du môme. Il réagissait automatiquement de la même façon : Il retirait la large et dure ceinture de son pantalon et battait à mort le petit apprenti, avant de le pousser violemment dans les toilettes pour y passer la nuit tout en méditant tranquillement les ordres et les volontés de son père.

Son calvaire dura quelques années.

Mais un jour, Omar ne revint pas à la maison.

Il alla au port et y vagabonda librement le reste de la journée.

Le soir, tiraillé par la faim et mort de fatigue, il vint demander à un docker une pièce pour s’acheter un morceau de pain.

Solidement bâti et portant une large moustache broussailleuse, l’homme d’une trentaine d’années, lui posa d’abord quelques questions avant de le rassurer et de l’inviter à partager son repas.

« Tu peux même passer la nuit chez moi. »



VIII - Ils passèrent des heures à admirer le corps de la jeune étrangère aux cheveux blonds en espérant qu’elle leur ferait signe. Couchée à plat ventre, les jambes croisées, l’européenne était accaparée par la lecture de sa revue.

Ils ne furent pas invités.

« C’est une femme frigide ! », déclara Omar.

D’un air songeur, Rachid annonça : « Quand je me marierai, j’aimerai bien faire l’amour à ma femme dans cette pose »

« Dans cette pose, tu ne peux jamais atteindre son sexe, parce qu’il se trouve de l’autre côté. Sauf bien entendu si tu veux la pénétrer par… » ; lui répondit son ami en éclatant de rire

« Tu parles. Je suis sûr que cette posture te permet d’aller directement à son… ». affirma Rachid en éclatant de rire à son tour.

Omar se rappela les longues nuits où il avait consolé le moustachu et conclut :

« Pour moi, cette position sert uniquement à glisser ton sexe entre ses jambes ! »

N’ayant pu se départager sur le lieu d’atterrissage du sexe masculin quand une femme était prise dans cette position. Ils décidèrent de vérifier avec une prostituée le soir même.

En attendant, ils poursuivirent leur contemplation et finirent par se masturber. Omar poussa même un cri aigu au moment de l’éjaculation : Une petite goutte d’un liquide clair et gluant.


IX - Les heureux moments qu’ils vivaient devinrent de plus en plus rares. La crise monétaire internationale obligea beaucoup d’investisseurs à mettre la clé sous le paillasson. Le port fut alors envahi par des hordes de jeunes et de moins jeunes qui cherchaient du travail. Personne n’était en sécurité contre cette vague humaine prête à tout pour survivre.

Vols. Bagarres. Crimes.

Devenus assez grands, Omar et Rachid achetèrent un conteneur rongé par la rouille. Le propriétaire, un vieux moustachu, leur avoua qu’il occupait ce cube métallique depuis plus de vingt cinq ans. Il les informa qu’il avait hébergé beaucoup de jeunes garçons avant que ces derniers ne s’envolent de leurs propres ailes.

Omar reconnut le docker qui l’avait recueilli le jour de son arrivée au port. Il se souvint de tous les sévices nocturnes qu’il lui avait fait subir. Son cœur commença à battre très rapidement. Une fureur volcanique grondait en son for intérieur. Il aurait aimé étrangler ce pédophile sans scrupule qui avait exploité abusivement son innocence et sa faiblesse. Il résista cependant à ce sentiment de vengeance qui rongeait ses entrailles.

« A quoi ça va servir ? », se dit-il.

En effet, du colosse qu’il avait connu autrefois, il ne restait qu’un corps osseux couvert de loques. Un spectre qui déambulait toute la journée à la recherche d’un morceau de pain. L’alcool et la drogue l’avaient complètement rongé. Cheveux gris, yeux larmoyant, il marchait en titubant et en crachant par terre.

L’ex-docker prit les quelques dirhams que Rachid lui tendit et partit vers une destination inconnue. Personne ne l’avait jamais revu.

Le local qu’ils venaient d’acquérir n’arrangea en rien leur situation. Pour faire face aux innombrables difficultés auxquelles ils s’exposaient quotidiennement, les deux jeunes hommes pratiquèrent beaucoup de petits métiers, légaux et illégaux. Ils connurent ainsi les commissariats de police, les tribunaux et la prison.

La seule période de l’année où ils pouvaient manger à leur faim était l’été. Beaucoup de jeunes de leur âge qui avaient la chance de travailler en Europe, regagnaient le pays pour y passer les vacances. Ils roulaient dans de très belles voitures et s’amusaient comme des fous. Certains d’entre eux étaient même mariés à des blondes qui ne parlaient pas la langue nationale.

Le soir, quand Omar et Rachid rejoignaient leur cube métallique pour y dormir, ils reparlaient de ces jeunes vacanciers à qui l’argent ne manquait jamais.

« Et attention, même en Europe, ces chanceux vivent comme des princes », déclara Rachid.

« Je ne pense pas », répliqua son ami.

«C’est sûr, crois moi. Un de mes amis m’a raconté que son frère qui travaillait en France passait toute l’année à s’amuser avec les petites françaises. Il paraît qu’il ne va à l’usine que deux ou trois heures par jour. Et tu sais, il gagne des millions chaque mois. Là-bas, la vie est facile. Les voitures et les maisons ne coûtent pas plus chères que deux ou trois bières. ». Rachid parlait avec enthousiasme de ces contrées lointaines. Ayant épuisé tous les qualificatifs positifs sur l’Europe et ses habitants, il se retourna vers son ami et lui proposa.

« Et pourquoi n’irons pas, nous aussi, là-bas ? »

« Comment veux-tu y aller ? Tu n’as même pas une carte d’identité, que dire alors du passeport ? », rétorqua Omar.

« Nous n’en aurons pas besoin. Il y a des gens qui nous feront passer, par bateau, de l’autre côté de la méditerranée. Mais il faut leur payer le prix du voyage. Et ça coûte cher ».

« Nous ramasserons le prix de ce voyage », cria Omar avec exaltation.

Ils travaillèrent.

Ils ramassèrent le prix du voyage.

Ils payèrent leurs billets.

Le jour « J », ils prirent leurs sacs et se dirigèrent joyeusement vers une petite plage très prisée par les européens.


LAABALI






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