La dernière farce.

Date 10-09-2013 16:09:43 | Catégorie : Nouvelles confirmées


Robert entra dans la maison en poussant la porte du pied. Il tendait devant lui ses deux mains couvertes de cambouis
- « Lucienne ! hurla t’il. Lucienne ! «
- « quoi encore « lui répondit une voix revêche, en provenance d’une chambre du premier.
-« Descends j’ai besoin de toi «
Peu de temps après, il l’entendit qui descendait l’escalier en ronchonnant qu’elle en avait marre qu’il l’appelle sans arrêt pour des bricoles qu’il pouvait très bien faire lui-même.
-« Qu’est-ce que tu veux encore ? »
-« J’avais promis au voisin , ce matin, avant qu’il parte, de jeter un œil sur le moteur de sa bagnole qui est en panne devant chez lui depuis quinze jours. J’ai fait ce que j’ai pu mais je n’y arrive pas Sois gentille, j’ai les mains sales écris-lui un petit mot pour lui dire que je n’ai pas réussi «
Toujours en ronchonnant, elle se dirigea vers la cuisine et prit le nécessaire pour écrire.
-« Qu’est-ce que je lui mets ? »
Elle n’avait jamais été capable de rédiger la moindre phrase sans la dictée de son mari.
- « T‘as qu’à lui dire..Tu écris ? ‘Je préfère arrêter tout : je n’ai plus la patience.’ Tu mets le mot dans une enveloppe .J’irai la glisser dans sa boite aux lettres tout à l’heure.
-« C’est tout toi, ça ! Tu promets et tu ne finis jamais «
Et une nouvelle dispute éclata, comme elle avait coutume d’éclater, dix fois par jour, pour des raisons toujours futiles et ridicules.


Quinze jours après :
Robert se trouvait dans la cuisine, burette à la main, en train de huiler tout ce qui lui tombait sous les yeux.
-« Lucieeenne ! hurla t’il, en levant la tête vers le plafond. »
-« Quoi encore ! cria la voix de Lucienne, à l’étage. »
-« Puisque tu es dans la chambre, amène-moi ma boite rouge qui est sur la bibliothèque. Puisque j’y suis, je vais en profiter pour nettoyer mon arme. Depuis le temps que je n’ai pas ouvert la boite ! «
-En râlant, Lucienne descendit l’escalier et rejoignit Robert dans la cuisine où il se tenait assis, un chiffon et la burette posés devant lui
-« Je t’ai déjà dit que j’étais pas ta bonne. Tu pouvais aller le prendre, ton rivoulver ! »
Robert rigola, moqueur :
-« Un revolver, pas un rivoulver. Et puis ce n’est pas un revolver, c’est un automatique «
Et il sortit l’arme de sa boite pour l’examiner.
-« De toutes façons, tu ne serais pas fichue de savoir par quel bout ça se tient, un automatique.
piquée au vif, Lucienne s’empara de l’arme et, un œil fermé, elle visa la fenêtre , l’arme au bout de son bras tendu.
En ricanant, Robert lui pris l’arme des mains, délicatement,du bout des doigts comme si c’était un objet fragile, et la déposa sur la table.
-« Maintenant que tu l’as touché, je ne suis pas sur qu’elle voudra marcher encore. »
Cela suffit pour mettre Lucienne hors d’elle, et une nouvelle querelle éclata.







L’inspecteur de police se releva et resta, l’air pensif, devant le cadavre du vieil homme étendu sur le sol, la tête baignant dans une mare de sang.
Il se tourna vers la femme effondrée sur le canapé, près de lui.
Lucienne avait le visage enfoui dans ses mains et pleurait en hoquetant bruyamment.
-« Je suis désolé, madame. Je comprends votre chagrin, mais je suis obligé de vous poser quelques questions «
En pleurant et en s’interrompant fréquemment pour se moucher ; Lucienne expliqua au policier qu’elle se trouvait dans le jardin lorsqu’elle entendit le coup de feu.
Elle s’était précipitée aussitôt et avait trouvé son mari, tel qu’il se trouvait en ce moment, sur le sol, baignant dans son sang . Il tenait encore son arme à la main et une enveloppe dans l’autre main.
Après tous les constats et prélèvements d’usage, le corps fut emporté et Lucienne resta à pleurer sur son canapé, en compagnie de sa sœur qui était accourue dès qu’elle eut appris la terrible nouvelle.
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Dans la cellule où elle se morfondait depuis longtemps, Lucienne n'arrivait toujours pas à réaliser ce qui lui était arrivé.
Les jurés l’avaient condamnée , à l’unanimité, après avoir entendu les charges d’accusation :
- La lettre d’adieu :’ Je préfère arrêter tout. Je n’ai plus la patience. ‘ était, bêtement, écrite de sa main !
- L’ automatique avait ses empreintes, bien visibles sous celles de Robert.
- Mais surtout, ce qui avait été l’argument décisif pour l’accusation : Comment diable un gaucher notoire aurait’ il bien pu se suicider en tenant son arme de la main droite ?






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