La chute

Date 01-10-2013 21:50:00 | Catégorie : Nouvelles


Je m’éveille un matin, les membres encore engourdis par le froid ambiant. Mes yeux sont prisonniers d’un voile de brume, ma gorge brûle intensément et mon nez semble ne plus pouvoir aspirer l’air du dehors. Je reste allongée sur ce qui me semble être un lit de glace, me gelant et m’incendiant à la fois. Ce lit, pourtant désagréablement dur, parait trempé d’un liquide dont émane une odeur âcre et nauséabonde. Peu à peu, j’ai recouvert mes sens. Le ciel, face à moi, pleure des milliers de larmes gelées. Je me redresse sur mon lit de souffrance et m’aperçois que je ne suis pas seule. D’innombrables corps jonchent la terre mouillée et leurs hurlements de douleur résonnent encore dans le lointain.

Je n’ose me lever, stupéfaite par cette scène qui semble provenir de mon imagination. Comme le veut la coutume, je me pince la peau, afin de m’évader de ce cauchemar, mais comment savoir s’il s’agit d’un rêve, ou d’une atroce réalité ?

Mon pouls s’accélère, ma respiration perd son rythme et mon cri vient percer le silence planant. C’est alors qu’un éclair s’abat tout juste devant mes yeux.

Je me souviens.

Je me revois alors, allongée sur mon lit, dans notre château. Le soleil frappait avec peine sur mes fenêtres encore ouvertes. C’est à ce moment que je les entendis. Des voix s’élevaient derrière les grilles de la citadelle, des voix puissantes et féroces, braillant à qui voulait l’entendre « Mort aux Pazzi ! Mort aux tyrans ! ». La porte de ma chambre s’ouvrit brusquement, laissant apparaître ma mère, à bout de souffle, me murmurant ces derniers mots « Fuis, ils vont nous tuer ». C’est dans l’incompréhension la plus totale que je m’étais mise à courir. J’avais trébuché de nombreuses fois dans les escaliers menant jusqu’aux sous-sols, et c’est là qu’ils m’ont attrapée.

Je me souviens m’être débattue. Ils m’ont emportée à l’extérieur, où les neiges d’hiver s’acharnaient dans les airs. Je me souviens avoir entendu des cris, des plaintes, des supplications, mais tous ont fini par se taire. J’ai été jetée au sol, comme on jette un objet cassé. Je me souviens avoir été frappée, frappée comme si l’on voulait me tuer.

Je ne me souviens plus.

Ma tête encore lourde me fait mal et, en portant ma main à ma tempe, je me rends compte que celle-ci n’a jamais cessé de saigner. Mon effroi est tel que mon corps ne parvient plus à me tenir droite. Je vacille et fini par m’écrouler une nouvelle fois. Mon corps devient un glaçon et ce voile qui m’avait pourtant quitté, revient se poser sur mes yeux. Le feu ardent qui avait assailli ma gorge fini par s’estomper, et mes membres sont redevenu pesants. Lentement, mes forces s’évaporent et ma vie s’enfuit dans un soupir.

Je ne me souviendrais pas.




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