Le mythomane surdoué - épisode 2

Date 26-05-2012 20:00:00 | Catégorie : Nouvelles


1962. L'été. Je suis en permission, au pays, et je suis en balade, de par la campagne environnante, dans l'espoir d'y rencontrer une ancienne copine qui m'aurait conservé un peu de tendresse. Moi, j'en avais plein à partager.
Et justement, j'entend une douce voix féminine qui m'interpelle. Elle venait d'une 2cv stoppée à quelques pas de moi. La portière arrière s'ouvre et j'aperçus la petite frimousse rieuse de Michèle, que je n'avais plus revue depuis mon départ dans la marine. La connaissant bien, j'ai su de suite que j'aurai ma conversation assurée pour l'après-midi.
Elle n' était pas seule . Je reconnus sa soeur, assise en passagère à l'avant. Ce ne fut qu'en m'approchant que je vis le conducteur de profil. Il n'avait pas du tout l'air enchanté de mon intrusion dans ses affaires de coeur. Michèle m'apprit un peu plus tard, à voix basse, qu'il la courtisait avec ardeur depuis un moment mais qu'elle n'en voulait pas.
Peut-être aussi qu'il se rappelait que je le connaissais un peu trop à son gôut. Toujours est-il qu'il me grogna un vague ' bonjour ' et démarra brusquement dès que je me fus installé près de celle qu'il désirait. Dupont avait changé d'allure. En petit polo, cheveux courts rabattus sur le front, il s'était pas mal empâté. Il avait utilisé la 2cv de sa mère pour réussir à décider Michèle: une promenade en voiture, à cette époque, était un atout majeur pour la drague.

Furieux, tout en conduisant, il ne quittait pas Michèle du regard, dans le rétro et la chipie se blottissait tendrement contre moi, autant pour l'agacer que pour le plaisir de m'avoir retrouvé.
Brusquement, il s'est arrêté devant une station-service et s'est retourné vers nous:
- ' C'est pas l'tout, mais y' plus d'essence. Qui c'est qu'a du pognon ?'
Tiens, il avait changé de vocabulaire ! j'ai sorti un billet de ma poche et lui ai tendu. Il est descendu pour prendre quelques litres et s'est enfouillé la monnaie, sans plus de formalité. Nous avons repris la route.
Comme nous avions beaucoup de choses à nous raconter, Michèle et moi, je demandais à Dupont de s'arrêter près d'une petite haie en bordure d'un prè, tout à fait propice à une conversation tranquille.
Tout en grommelant , il nous a laissé descendre et redémarra brusquement avant que ma copine ait posé le deuxième pied à terre. Elle s'envola dans les décors en se cogna la tête contre le sol. Elle est restée un long moment estourbie.Nous avons pu discuter ensemble, un peu plus tard.
Rentré de permission, Je reçu durant quelques temps des lettres de Michèle. Dupont était têtu. Et machiavélique.
Il avait monté une société, au Havre, avait loué un bureau et embauché Michèle comme secrétaire de direction. Je n'ai pas voulu connaître le détail des clauses qui la liait à son patron. Mais j' ai su qu'après quelques mois d'inaction totale ( ? ) dans son bureau, n'ayant jamais reçu de salaire ni vu l'ombre d'un document pouvant la renseigner sur l'objet de son emploi, Michèle démissionna. Je ne l'ai jamais plus revu, ni elle ni Dupont. Enfin...avec lui, on ne sais jamais.

1965. J'étais de retour dans la vie civile. J'avais trouvé un emploi comme ascensoriste et je me laissais vivre quelques temps, dorloté par ma mère, avant de me relancer de nouveau vers de nouvelles aventures.
Ma vie de marin m'avait habitué aux sorties nocturnes et le Havre, beaucoup fréquenté par les navigateurs américains, était une ville qui avait une grande activité dès la nuit tombée.
C'est accoudé au comptoir de ' La belle Portugaise ' que je vis entrer un homme qui alla directement vers la patronne pour lui poser des question. Un inspecteur de police, de toute évidence. Il lui demanda si tout allait bien, si elle avait vu untel ou untel et puis:
- ' Vous n'avez pas de nouvelles de Dupont?' Non, la patronne n'en avait pas.
Dès que le policier fut parti, je pris un air innocent pour dire:
- ' Tiens..Dupont..c'est un nom qui me dit quelque chose. J'ai connu un Dupont, dans le temps. '
- ' Et bien celui-là, vaut mieux que vous ne le connaissiez pas. Vous n'auriez que des ennuis.'
Et elle m'expliqua qu'il avait embrouillé une quantité de commerçants avec des histoires de placements surs, à gros rapport.
Je ne crois pas que la belle Portugaise m'ait vu sourire. Sacré Dupont, va.
Et puis le temps passa de nouveau et Dupont était bien la dernière de mes préoccupations. De toutes façons, je n'aurais plus l'occasion d'entendre parler de lui : Je partais vivre en Provence.



1973. Installé dans mon petit coin de Provence qui sentait bon la garrigue, je ne m'intéressais au reste du monde que dans des limites restreintes. La télé me tenais informé .
Une nouvelle faisait sensation à cette époque : deux chercheurs Français étaient en train de terminer la mise au point du moteur à eau ! rien que ça !
Le pètrole commençant a devenir un souci pour notre pays, cette invention arrivait à point pour soulager notre économie.
Un certain monsieur Chambrin, assisté d'un ingénieux ingénieur, venait d'en faire la révélation au monde émerveillé .
Le soir, au journal télévisé, j'attendais donc le reportage, annoncé depuis quelques jours, confortablement installé devant mon téléviseur.

L'image des deux célébrités apparut et j'éclatais d'un rire quasi homèrique ! Monsieur Chambrin au côté de son ingénieur Jacques Dupont, rebaptisé, pour la circonstance , en Jack Dupont ! je subodorais, dans ce changement, une intention d'aller plaire outre-atlantique. Je riais vraiment de bon coeur. Comment ! tous les médias réunis n'avaient aucune information sur le bonhomme ? Il pouvait ainsi, impunément, aller d'arnaque en arnaque sans que l'expèrience des professionnels de ce genre de détections aient la moindre petite alarme qui clignote ?
J'écoutais avec passion les explications du spécialiste. Oh que je connaissais bien ce petit chuchotement confidentiel, les yeux mi-clos sur un sourire de connivence. Vas-y Dupont ! Tous les ans, il naît autant d'imbéciles qu'il en meurt. Le cheptel est intarissable.

Cette histoire de moteur à eau a fait long feu et s'éteignit discrètement, les pigeonnés n'ayant pas trouvé avantageux d'en faire état. J'imagine que Dupont a su proviter des aides financières..;
Même la rigolade n'est pas éternelle. Une fois encore, j'oublais Le sieur Dupont.

Combien d'opportunité de rencontre avons-nous manquées parce que notre regard se portait à côté de la personne que nous aurions reconnue.
Je me souviens m'être retrouvé, marchant au côté d'un cousin, perdu de vue depuis longtemps, dans une rue marchande de Saint-Flour !

1981ou 82. J'étais au volant de ma voiture, à Marseille, et je me trouvais en attente au feu rouge du carrefour Canebière-Dugommier. Je regardais, en patientant l'animation sur les trottoirs. Mes yeux se portèrent vers un petit éventaire de bijoux et colifichets à un angle du carrefour, face à la banque. Et je me suis retrouvé les yeux dans les yeux avec le vendeur. Il s'était immobilisé. Nous nous sommes regardés sans bouger, jusqu'à ce que la reprise de la circulation m'oblige à détourner mon regard.
Bon sang ! qu'est-ce que Dupont pouvait bien fiche ici !

Le lendemain, je m'arrangeais pour revenir vers la Canebière et allais garer ma voiture à l'entrée de la rue Thubaneau. Je me suis dirigé ensuite vers le carrefour. L'éventaire n'était pas là...
J'étais tout à fait sur d'avoir reconnu Dupont, tout comme lui avait eu l'air de me reconnaître.
Que voulez-vous, ce devait être notre destin :: Je l'oubliais encore.....

Pour ceux que mon histoire intéresse, je suis en train de rédiger la fin des aventures du monsieur.
Y'a pas à dire, il n'y alllait pas avec le dos de la cuillère, le surdoué !
Mais là, sa finale ! fallait oser...

Pardonnez mes fautes d'orthographe : je n'aime pas trop me relire.












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