L'enfant nu.

Date 10-06-2012 23:50:00 | Catégorie : Poèmes confirmés


L'enfant nu :

Sur le coteau désert et glacé, bien souvent,
Où les nuages noirs paraissaient se répandre
Pour s'entasser au loin, en mur couleur de cendre,
Le triste chant d'hiver murmurait dans le vent.

J'étais venu ici, voyageur nostalgique,
Une dernière fois regarder le décor
dont le moindre recoin me rappelait encore
Chaque scène vécue, sur un air de musique.

Dans l'herbe où, maintenant, galopent des chevaux,
Des vestiges restaient et j'en cherchais les traces;
Les ombres d'un jardin dont le tracé s'efface
Et là, plus surprenant, un bout de caniveau.

C'était le caniveau, traversant la cité,
Qui avait vu passer tous nos fonds de culottes,
Tous nos rêves d'enfants et toutes nos parlottes,
Pendant de longs moments, durant notre goûter.

Cela m'est revenu...un triste souvenir...
Je rentrais à grands pas retrouver ma maison.
Oh oui, je m'en souviens ! une froide saison !
Plus terrible qu'aucun des hivers à venir.

Je descendais l'allée, transi dans mon manteau.
Pas un seul chien errant, et c'était chose rare.
Aucun bruit ni objet attirant le regard.;
Seul le gris des maisons, perdues sur le coteau.

Suivant le caniveau, j'était presque arrivé,
Et puis je l'ai vu là, apparition étrange,
Qui regardait ses pieds enfoncés dans la fange
Et qui ne bougeait pas, y paraissant soudé.

C'était un jeune enfant. Il était presque nu,
Si ce n'est un tricot, bien trop court pour son âge,
Et qui se tenait droit, bien tranquille et bien sage,
Comme si on l'avait mis là, en retenue.

Il avait environ deux ans, trois ans peut-être;
Sale et échevelé, attendant patiemment
Qu'un passant attendri, peut-être sa maman
S'en vienne lui porter juste un peu de bien-être.

C'était un parmi ceux de la horde d'enfants
Qui hantaient le coteau, dénudés, faméliques,
Ayant, pour tout menu, les gifles et la trique
Et une triste fin, précoce, bien souvent.

Sans doute pensez-vous : il en a rajouté.
J'aimerais, croyez-le, que vous ayez raison.
Mais j'ai vu cet enfant, pas loin de ma maison.
Je ne peux l'oublier malgré le temps passé.

Non, je ne l'ai pas pris gentiment par la main.
C'était à une époque...vous ne sauriez comprendre...
Je l'ai dit à ma mère. Elle est venue le prendre,
Et je n'ai jamais su s'il eut un lendemain.

Sur le coteau désert, dans un froid me glaçant,
Je me tenais devant ce bout de caniveau.
Sur la route les gens, roulant à mon niveau,
Regardaient étonnés, cet étrange passant.






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