L'envie

Date 16-08-2015 09:15:39 | Catégorie : Nouvelles confirmées


réponse au défi :

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– Elle m’énerve ! Elle m’énerve ! La voilà repartie pour Tahiti maintenant ! Après les Bahamas, New York, Le Cap Vert et je ne sais plus quoi, cela fait la cinquième fois qu’elle part en vacances dans la même année. C’est dingue ! Elle est pourtant assez bronzée. On dirait qu’elle est née en Afrique et pas en Belgique. Et nous, on épargne pendant une année pour partir en Bretagne et revenir avec un rhume et la peau blanche comme un camembert.
– Arrête avec ça. Laisse-la. Tu sais bien que nous n’avons pas le même train de vie !
– C’est clair ! Ils ont le TGV et nous un train à vapeur d’avant la guerre !
– Calme-toi. Ça ne sert à rien de s’énerver.
– Bien sûr ! Tu t’en fous. Tu ne demandes même pas une augmentation à ton patron. Tu pourrais ainsi me payer un bijou pour mon anniversaire au lieu de ma traditionnelle boîte de Leonidas. Tu te contentes de ton petit poste de comptable sous-payé. Et elle, son mari lui offre des bagues, des bracelets, des colliers en diamants. On dirait un arbre de Noël ! Et je ne te parle pas de sa chirurgie mammaire et autres liftings.
– C’est normal. Il est PDG d’une grosse boîte qui tourne bien. On ne peut pas rivaliser avec ces gens-là. Tu sais ce que disais ma grand-mère…
– Oui, tu me l’as rabâché des milliers de fois. « Faute de grives, on mange des merles ! ». Tu m’énerves avec tes dictons à la con.
Voilà, encore une prise de bec à cause de la voisine d’en-face. Je la jalouse depuis des années : sa vie tranquille sans avoir besoin de travailler, son aisance financière, ses vacances de rêve, sa décapotable rouge. Son mari est un bel étalon aux cheveux de geai et aux yeux verts émeraude. Le mien, Jacques, au physique moins avantageux, a beau tenter de m’apaiser, je trouve l’existence injuste. Moi aussi je veux des grives à chaque repas. J’en ai marre de bouffer mes merles noirs et déprimants. J’aurais aussi envie de laisser tomber mon boulot d’assistante sociale pour partir voyager autour du monde. Même si j’aime mon travail, ma vie manque de couleurs.

Un jour, qui je vois débarquer à ma permanence sociale : ma voisine. Evidemment, elle me reconnaît et rougit. Je l’invite à entrer dans le bureau en remarquant que pour une fois, elle ne porte aucun bijou. Ses seins rebondis semblent s’affaisser lorsqu’elle prend la parole.
– Je viens vous voir pour avoir de l’aide. Je me retrouve à la rue, sans un sou.
– Je ne comprends pas bien. Vous avez une villa et votre mari travaille.
– Non, la maison est à son nom et il m’a jetée à la rue. De toute façon, il veut vendre son entreprise, la maison car il compte refaire sa vie avec sa maîtresse à l’étranger. Je n’ai plus rien et je viens d’apprendre que j’ai un cancer de la peau.
Je suis à deux doigts de lâcher un commentaire ironique mais je m’abstiens en voyant la véritable détresse dans les yeux de mon interlocutrice. Si elle savait… que j’ai profité que mon mari fasse des heures supplémentaires au bureau pour mettre du beurre dans les épinards et m’enfiler une bague à mon doigt. Pendant que ma voisine était occupée à se brûler l’épiderme à la Martinique, j’en ai profité pour tenter une approche chez mon voisin. Ce dernier n’a pas manqué de remarquer mes formes généreuses, non siliconées car j’ai été élevée au lait de merle (ben oui, il y a bien du lait de poule !). Sa femme étant adepte du « livré à domicile », il a été séduit par mes petits plats « façon grand-mère », pas celle de Jacques qui bouffe des pâtés de merles ! C’est ainsi qu’on va s’expatrier à l’île Maurice où je vais enfin m’empiffrer de civets de grives et de grives au caviar !





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