L'auberge sans retour.

Date 28-06-2012 22:00:00 | Catégorie : Poèmes confirmés


L'histoire se situe, il y a cinquante ans,
Dans un village Corse ignoré par le temps....



Ce bar, vu du dehors, ne payait pas de mine.
C'est aux petits détails que, souvent, on devine
Qu'il s'agit d'un commerce et ce n'est évident
Qu'en allant vers sa porte et en entrant dedans.
Le bar était minable et l'endroit était sombre.
Toute vêtue de noir, debout dans un coin d'ombre,
Une femme aux yeux noirs nous regardait venir
Sans faire le moindre geste pour nous accueillir.
Quelques bancs disposés tout autour d'une table,
Quelques meubles branlants, quelques chaises bancales
Et des murs de torchis : voilà tout le décor.
Dans le genre dépouillé, c'était là un record.

Mon camarade et moi, nous nous sommes assis
Nous attendions tous deux; elle attendait aussi,
Dans son coin, sans bouger, nous couvant d'un regard
Qui, je ne sais pourquoi, me paraissait bizarre.
"- Ho ! tavernière, hola ! " Mon ami s'exclamait.
"- Deux grands pichets de bière pour deux grands assoiffés ! "
Timidement alors, elle vint nous aviser
Que tout ce qu'elle avait, c'est un peu de rosé.
"- Du rosé ? ça ira ..mais il faudrait qu'on mange !
A moins qu'il ne soit tard et que ça vous dérange ?
Un peu de cochonaille ferait bien notre affaire.
Merci, on va couper. Laissez, on va le faire . "

Nous avons bien mangé, nous servant largement,
En réclamant du pain et du vin, par moment.
Elle nous en apportait, mais un peu réticente..
Etait-ce notre faim ou bien notre descente ?

"Dites-nous, brave dame, si on vous en prévient,
Pourriez-vous préparer, ce dimanche prochain,
Un bon repas pour six, quelques plats du terroir ?
Nous viendrons entre amis, pour manger et bien boire.
La dame, tout à coup, sortit de sa réserve:
" - Excusez-moi, messieurs; votre culot m'énerve.
Vous débarquez chez moi, je ne vous connais pas,
Je vous donne mon vin, je vous sers un repas,
Vous voulez maintenant prendre des habitudes,
Vous abusez, je crois, de ma sollicitude.
Nous savons accueillir, parfois les étrangers,
S'ils viennent en amis et non pour déranger.
Je ne tiens pas un bar, pas plus qu'un restaurant
Et vous prie de partir, et vite, maintenant ! "

Nous avons brusquement mesuré notre erreur:
Nous avions confondu cette simple demeure
Avec un restaurant , comme on voyait souvent,
Humble et sans apparat, tels qu'ils étaient avant.
Nous nous sommes levés, rougissants et honteux,
Tout en nous excusant, le sourire piteux.
Mon ami demanda, pour faire bonne dose :
"- Merci beaucoup, Madame ! On vous doit quelque chose ? "
Nous venions de sortir, après cette boulette
Lorsqu'au dessus de nous est passé une assiette.











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