Modérateur
Inscrit: 02/02/2012 21:24
De Paris
Niveau : 32; EXP : 96 HP : 0 / 799 MP : 498 / 28717
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Début de l'histoire :
Il avait quitté son lieu de travail dans la lumière du couchant. C'est avec plaisir qu'il roulait lentement sur la route ombragée où les arbres conservaient encore leurs feuillages. Les prémisses de l'automne se devinaient en quelques touches légères de feuilles mordorées, parsemées et encore bien discrètes. La route était bordée de superbes platanes aux troncs tachés comme des pelages de léopard, de marron plus ou moins clair allant par endroit jusqu'au blanc. Il était heureux de vivre dans ce pays, dans cette région de nature bienveillante. La variété des paysages et des cultures offrait des richesses de beauté qui réjouissaient son âme et ses yeux. Un champ de verdure, soigné comme une pelouse, côtoyait un verger qui longeait la route, plus loin un champ offrant une chaude tonalité ocre indiquait que les labours venaient de commencer. La généreuse terre nourricière avait offert ses lourds épis de blé et attendait maintenant la venue des premiers gels qui la préparerait aux futures semailles. Son regard caressait plus qu'il ne regardait les rangées de vignes qui avaient commencé de rougir, alors que derrière, sur l'horizon immédiat se déroulait un rideau de peupliers qui serpentait dans les près. L'œil séduit, il ralentit pour mieux percevoir la musique du cours d'eau qui courait en cascades successives entre les arbres. A ce moment une bouffée de bonheur l'envahit. Il traversa une petite bourgade qu'il connaissait bien, le soleil rasant allumait de tendres incendies de rouges, ors et jaunes sur les vieilles pierres des maisons aux hauts toits de lauze. La vue de ces maisons paisibles et rassurantes ramena son esprit vagabond à son but du jour, à ce qui avait motivé ce déplacement imprévu, c'est à dire cette visite imprévue à sa propre maison. Car pour l'heure il se rendait dans sa vieille propriété perdue là -bas au fond d'une campagne déserte, ignorée des grands chemins, sa vieille, si vieille demeure solitaire, sans voisin au bout d'une discrète route de terre. Il fallait pour y parvenir traverser, champs, et bois sur plusieurs kilomètres avec pour seules rencontres des lapins affolés, des renards dorés et roux comme l'automne, des chauves souris qui rejoignaient leurs arbres dortoirs ou des chouettes superbes qui s'éveillaient la nuit venue. Son travail et ses activités de citadin l'avaient tenu loin de cette ancienne bâtisse héritée plusieurs années plus tôt de ses parents. Il ne venait guère souvent, la route était longue pour s'y rendre, il fallait faire un voyage de plusieurs heures et le confort que ce séjour offrait était très succinct. Il attendait avec espoir des jours de plus d'aisance pécuniaire pour entreprendre les travaux qui risqueraient bien de se révéler incontournables sous peu. Lorsque la missive de la mairie du village lui signala un problème urgent dans la maison, il fut tout d'abord furieux. Comment trouver le temps pour venir faire la moindre des réparations. Mais le message était clair, des tâches inexplicables apparaissaient sur les murs de la façade et il était impérieux que le propriétaire vienne se rendre compte des risques de dangers possibles que cela pouvait éventuellement représenter. Le service de la commune s'était fait insistant car il semblait que les tâches s'étaient encore agrandies dans les dernières semaines et il s'était résolu par la force des choses à aller assumer son rôle de responsable du lieu. C'est pourquoi luttant contre sa procrastination naturelle il s'était ce soir là mis en route. Sa rêverie durait depuis un long moment pendant que le véhicule avançait toujours aussi lentement, les heures défilaient et les traits de lumière avaient baissé en intensité, les couleurs perdaient leur combat contre l'ombre. Tout en dirigeant d'instinct son véhicule, il voyait les arbres l'entourer de toutes parts, il traversait maintenant une forêt épaisse qu'il avait du mal à reconnaitre. Il lui sembla que ce lieu lui était inconnu. Il ressentit soudain un sentiment d'étrangeté qui détruisit tout à fait l'euphorie qui l'avait envahi plus tôt pendant sa contemplation bucolique. Il n'avait jamais remarqué que ce bois fût si grand et que la route fût si étroite. Il avait trop rêvé, ne s'était-il pas trompé de route ? Il était soudain plus tendu, mais aussi en colère contre lui-même. Voilà , se reprochait-il, je rêve et je ne fais pas attention à ce qui m'entoure. Il se disait qu'il allait devoir faire demi-tour, ce n'était pas possible qu'il ne reconnaisse pas les lieux ! La nuit était maintenant totale. Un reflet de lune froide et blanche faisait sourdre un malaise dans son ventre. Mais où suis-je ? se répétait-il, et comme tourner, comment retourner en arrière ? Aucun lieu au bord de la route trop étroite ne permettait un retournement. Alors qu'après une longue distance parcourue, le bord de la route offrait enfin un bas côté permettant une manœuvre, il s'apprêta à reculer pour cela il engagea le véhicule face aux arbres et, c'est alors que de façon tout à fait inattendue il se retrouva face à un banc Napoléon et un calvaire qu'il reconnut immédiatement. A la vue de ce précieux point de repère il connut alors bien plus de stupéfaction que de soulagement. Mais qu'est-ce qu'il fait là ce monument ? s'écria-t-il ! je me croyais perdu, mais pourquoi je ne reconnais rien autour de moi, pourquoi ? Son esprit s'emballait et il lui semblait qu'il perdait son calme, un sentiment infime de peur s'insinuait en lui, lentement. Au moment où il décidait de quitter cette route, ce signe de reconnaissance lui apparaissait pour l'inciter à continuer, tout comme si la nature environnante le retenait. Maintenant il était rempli de crainte, il était, il se sentait effrayé par ces masses de végétation qui l'emprisonnaient, il ne comprenait pas, perdait-il l'esprit ? Il ne retrouvait rien de connu, il était étranger à cette route qu'il avait pourtant empruntée tant et tant de fois auparavant Sans en comprendre bien les raisons il continua machinalement d'avancer, incapable de prendre une décision, mais comme entrainé, il continuait son chemin que bordait un champ, puis un interminable stère de bois empilés, puis un bosquet touffu et noir et finalement, soudain après le virage, apparut sa maison haute, seule, sombre silhouette sur un ciel ténébreux. Et sous ses yeux plissés pour mieux transpercer l'obscurité, il fixait la porte, les fenêtres, et le mur de façade qui dans un rayon de lune blafarde se montrait couvert de larges tâches brunes irrégulières. Le spectacle était si stupéfiant, si inexplicable. Il restait immobile, indécis, assis avec un sentiment de stupéfaction qui faisait une fois de plus remonter en lui une boule d'angoisse. Mon Dieu, mais qu'est-ce que c'est que ce truc !? murmurait-il abasourdi.
Lydia Maleville
Posté le : 10/06/2012 14:20
Edité par Loriane sur 21-05-2016 13:34:14
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