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#71 Re: L'atelier de Mafalda
mafalda Posté le : 06/06/2015 03:02
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mafalda a écrit :
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mafalda a écrit :
Bonjour, merci emma: oui mes peintures correspondent souvent à mes poèmes. bonne journée!

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#72 Paul Gauguin
Loriane Posté le : 05/06/2015 22:25
Le 7 juin 1848 à Paris naît Paul Gauguin

de son nom complet Eugène Henri Paul Gauguin, peintre français postimpressionniste. Son maître est Camille Pissaro. Chef de file de l'École de Pont-Aven et inspirateur des nabis, Il travaille à Paris années de 1870 à 1891, Pont-Aven de 1886 à 1891, Martinique en 1887, à Arles en 1888, à Tahiti de 1891 à 1901. Il est considéré comme l'un des peintres français majeurs du XIXe siècle, mort, à 54 ans le 8 mai 1903, à Atuona, Hiva Oa aux marquises en Polynésie française. Ses Œuvres les plus réputées sont, Le Christ jaune, Manao Tupapau, Le café de nuit à Arles.

En bref

Peintre maudit et martyr, Gauguin fut consacré comme l'initiateur de la peinture moderne à l'exposition du centenaire à l'Orangerie en 1949. Une partie de l'œuvre, les sculptures et les céramiques, reste encore dans le cône d'ombre projeté par le rayonnement du peintre. La personnalité de Gauguin renforce le message de ses créations, car il fut l'un de ces artistes dont la biographie ne se confond pas, pour l'essentiel, avec la suite de ses œuvres. Sa vie, comme celle de Rimbaud, fut une aventure. Lié d'abord à l'impressionnisme, puis au mouvement symboliste, il devait dénoncer le premier au nom de ce que Kandinsky appellera le principe spirituel de l'art, et se prémunir contre les dangers de déviationnisme littéraire inhérents au second, au nom de la parfaite coïncidence du signifiant et du signifié dans l'œuvre plastique. L'exotisme de Gauguin exprime la quête douloureuse qu'il a poursuivie pour redécouvrir la valeur existentielle des symboles magiques et religieux, liens d'harmonie entre le temps pleinement vécu par l'homme et le mystère d'une destinée qui s'inscrit dans l'intemporel. Son œuvre ajoute à la documentation de l'anthropologue et de l'historien des religions comparées. Comme Tolstoï et Van Gogh, Gauguin a senti jusqu'à l'angoisse la faille qui sépare le christianisme de l'homme actuel et il a cherché, après Victor Hugo, une consolation sans dogme, un nouvel ordre où tout le mal cesserait de venir de la forme des dieux.
Les fugues vers les sources : Paul Gauguin est reparti sans cesse au cours de son existence vers le paradis de la nature sauvage, où tout est innocence et liberté. Cette remontée vers ce qu'il possédait en amont, et que ses premiers souvenirs lui avaient fait entrevoir, c'est d'abord dans son sang même qu'il la réalise : au-delà de l'image de sa mère, morte en 1867, il rejoint l'atavisme de sa grand-mère, Flora Tristan, aventurière et bas-bleu socialiste, qui le reliait à un arrière-grand-oncle vice-roi du Pérou et aux conquistadores de l'Amérique du Sud, dont le peintre avait le type physique. Eugène Henri Paul Gauguin était né à Paris mais il quitta tout jeune la France. À Lima, il parla espagnol de deux à sept ans. Il revint en France comme on sort d'un rêve. À neuf ans, il quitte Orléans pour une première escapade dans la forêt de Bondy, pèlerin portant déjà bâton et paquet sur l'épaule. Après ses études et jusqu'en 1871, il passa plus de trois ans à bourlinguer dans la marine de l'État. Puis il connut dix années de bonheur stable, marié avec Mette Gad la Danoise et gagnant largement sa vie à la banque Bertin. En 1883, il casse le fil de sa chance, démissionne de la banque, provoquant ainsi le destin qui allait le séparer de sa femme, l'isoler de ses enfants et l'enfoncer, jusqu'à sa mort survenue dans les îles Marquises, dans les difficultés matérielles, la misère physique et la déréliction morale.
Gauguin a commencé à dessiner en 1873, à peindre avant 1876, et, dès 1877, à sculpter, d'abord dans un matériau froid et classique, le marbre. Ses premiers tableaux sont d'un autodidacte formé au contact de la collection de son tuteur, Gustave Arosa, et du frère de celui-ci, Achille, riche en Delacroix, Courbet, Corot, Jongkind et Pissarro. Camille Pissarro allait devenir le maître de la première manière de Gauguin, qui se rattache à l'école des impressionnistes, avec lesquels il exposa de 1879 à 1885. Avant son premier séjour en Bretagne, 1886, la fuite avec son ami le peintre Charles Laval vers Panama, avril 1887 et le bref refuge à la Martinique, Gauguin sent s'éveiller en lui une vocation de céramiste, à la manière d'un Bernard Palissy décadent et barbare. Il produisit en quelques mois cinquante-cinq vases. Il y reprend des formes et des thèmes qu'il se souvenait avoir vus dans les vases péruviens de la culture Chimu chez sa mère et dans la poterie précolombienne d'Arosa – de la même manière que l'étrange Nature morte à la tête de cheval, peinte à Copenhague en 1885, recule « plus loin que les chevaux du Parthénon, jusqu'au cheval de mon enfance, le bon cheval de bois.
Au cours du second séjour en Bretagne, 1888, les discussions et les expériences de Gauguin et d'Émile Bernard devaient aboutir au double acte de naissance du synthétisme et du cloisonnisme, il faut comparer la Vision après le sermon du premier et les Bretonnes dans la prairie du second. La plongée vers les arts primitifs, Le Christ jaune, Le Christ vert ou Calvaire breton n'eut lieu qu'avec le troisième voyage, 1889. Parmi les peintures de 1889 apparaissent l'idole, dans La Belle Angèle, le symbolisme religieux syncrétique, annonciateur de Ia orana, Maria, Je vous salue, Marie de 1891, et de La Cène de 1899, avec Nirvāna : Portrait de Meyer de Haan, et les archétypes sexuels et solaires : la Femme caraïbe, qui provient de l'auberge du Pouldu, s'inspire à la fois d'une danseuse du pavillon javanais de l'Exposition universelle de 1889 à Paris et des tournesols de Van Gogh.

Sa vie

Eugène Henri Paul Gauguin est né à Paris en 1848. Son père est Clovis Louis Pierre Guillaume Gauguin 1814-1851, un journaliste républicain au National1. Sa mère, Aline Chazal 1825-1867, était la fille de Flora Tristan et donc, selon certains auteurs, la petite-fille de Simón Bolívar et de Thérèse Laisnay. Elle descendait de propriétaires terriens espagnols d'Amérique du Sud et même, selon la légende, d'un vice-roi du Pérou.
Le peintre a d'ailleurs passé les années de sa plus tendre enfance à Lima où son père, mort durant le voyage en 1851 au large de Punta Arenas et enterré à Puerto del Hambre, fuyait le régime politique de Napoléon III auteur du coup d'État lui confortant son pouvoir la même année. De retour en France à l'âge de 7 ans, il fait ses études, d'abord au Petit Séminaire de La Chapelle-Saint-Mesmin dirigé à cette époque par Mgr Félix Dupanloup puis à Orléans, notamment au lycée Pothier. Gauguin est embarqué sur le clipper Luzitano en qualité de novice/pilotin en décembre 1865, il est inscrit au Havre sous le matricule 790-3157. Il obtient le grade de lieutenant et embarque en 1866 sur le trois-mâts Chili, dont il est le second. Il effectue par la suite 1868 son service militaire dans la marine nationale, embarqué sur la corvette Jérôme-Napoléon. Il participe à la guerre de 1870 et prend part à la capture de six navires allemands. Après son retour à Toulon le 23 avril 1871, il quitte la marine. Il devient agent de change à la Bourse à Paris et connaît un certain succès dans ses affaires. Il partage alors une vie bourgeoise confortable avec son épouse danoise, Mette-Sophie Gad 1850-1920, et leurs cinq enfants : Émile, Aline, Clovis, Jean-René 1881-1961, sculpteur et Paul-Rollon. Il s'installe avec sa famille en 1877 dans le XVe arrondissement de Paris, d'abord rue des Fourneaux actuelle rue Falguière, puis rue Carcel.
Son tuteur, Gustave Arosa, homme d'affaires et grand amateur d'art, introduit Gauguin auprès des impressionnistes. En 1874, il fait la connaissance du peintre Camille Pissarro et voit la première exposition du courant impressionniste. Comme son tuteur, il devient amateur d'art et s'essaye alors à la peinture. Il expose par conséquent avec les impressionnistes en 1876, 1880, 1881, 1882 et 1886.

Paul Gauguin et les impressionnistes

En 1882, il abandonne son emploi de courtier en bourse, qui est dans une phase de mauvaise conjoncture pour se consacrer à sa nouvelle passion, la peinture. De janvier à novembre 1884, il s'établit à Rouen, où Camille Pissarro, qui l'avait guidé dans son approche de l'Impressionnisme, vivait également. Pendant ces 10 mois passés à Rouen, il réalise près de quarante tableaux, principalement des vues de la ville et de ses alentours. Cela ne suffit pas pour vivre et il part vivre avec sa femme et ses enfants dans la famille de celle-ci à Copenhague. Le courant passe mal avec la belle-famille. Ses affaires ne vont pas bien. Il retourne à Paris en 1885 pour peindre à plein temps, laissant femme et enfants au Danemark, n'ayant pas les moyens d'assurer leur subsistance. Il est déchiré par cette situation. Il participe de 1879 à 1886 aux cinq dernières expositions du groupe des impressionnistes.

Le symbolisme et son voyage initiatique en Amérique

En 1886, Gauguin effectue son premier séjour à Pont-Aven en Bretagne, où il rencontre Émile Bernard, le tenant du cloisonnisme. De retour à Paris, il rencontre pour la première fois Vincent van Gogh en novembre de la même année.
En avril 1887 il s'embarque avec le peintre Charles Laval pour le Panama où ils vont travailler au percement du canal. Ils y rencontrent des conditions de vie particulièrement difficiles et décident de partir dès qu'ils auront réuni suffisamment d'argent pour la Martinique, que Gauguin avait découverte alors qu'il était marin.
Il restera à la Martinique dans des conditions précaires de juin à octobre 1887, à l'Anse Turin au Carbet à deux kilomètres de Saint-Pierre, où se trouve, toujours aujourd'hui, un musée6 qui lui est consacré. Enthousiasmé par la lumière et les paysages, il peindra douze toiles lors de son séjour. Il y aura une fille naturelle7.
Malades de dysenterie et du paludisme, et sans ressources pour vivre, Gauguin et Laval rentrent en métropole en novembre 1887.

Le synthétisme à Pont-Aven

De retour en France, il se remet à Paris, avant de rejoindre, début 1888, la Bretagne, où il est le centre d'un groupe de peintres expérimentaux connus comme l'école de Pont-Aven. Dans une lettre de 1888 écrite à Émile Schuffenecker, Paul Gauguin lui exprime son credo qui sera l'âme des contestations artistiques à venir : Un conseil, ne copiez pas trop d'après nature, l'art est une abstraction, tirez là de la nature en rêvant devant, et pensez plus à la création qu'au résultat. C'est le seul moyen de monter vers Dieu en faisant comme notre divin Maître, créer.
Sous l'influence du peintre Émile Bernard, son style évolue, il devient plus naturel et plus synthétique. Il cherche son inspiration dans l'art indigène, dans les vitraux médiévaux et les estampes japonaises. Cette année-là il peint La vision après le sermon aussi appelée La Lutte de Jacob avec l'ange, qui influencera Pablo Picasso, Henri Matisse et Edvard Munch.
Il découvre les estampes japonaises à travers Vincent van Gogh en 1888 alors qu'ils vivent ensemble deux mois, d'octobre à décembre à Arles, dans le sud de la France, passant leur temps à peindre. Ils travaillent ensemble et peignent alors la série sur les Alyscamps. Les deux amis sont très sensibles, connaissent des moments de dépression et Gauguin, comme Van Gogh, tentera de se suicider plus tard. Leur cohabitation tourne mal et se termine sur le fameux épisode de l'oreille coupée de Van Gogh.

Vie en Polynésie

En 1891, ruiné, il habite un temps à l'hôtel Delambre, au no 35 de la rue du même nom dans le 14e arrondissement, puis s'embarque pour la Polynésie, grâce à une vente de ses œuvres dont le succès est assuré par deux articles enthousiastes d'Octave Mirbeau. Il s'installe à Tahiti, c'est là qu'il peindra le portrait de Suzanne Bambridge où il espère pouvoir fuir la civilisation occidentale et tout ce qui est artificiel et conventionnel. Il passera désormais toute sa vie dans ces régions tropicales, d'abord à Tahiti puis dans l'île de Hiva Oa dans l'archipel des Marquises. Il ne rentrera en métropole qu'une seule fois. Les caractéristiques essentielles de sa peinture, dont l'utilisation de grandes surfaces de couleurs vives ne connaissent pas beaucoup de changements. Il soigne particulièrement l'expressivité des couleurs, la recherche de la perspective et l'utilisation de formes pleines et volumineuses. Influencé par l'environnement tropical et la culture polynésienne, son œuvre gagne en force, il réalise des sculptures sur bois et peint ses plus beaux tableaux, notamment son œuvre majeure, aujourd'hui au musée des beaux-arts de Boston : D'où venons-nous ? Que sommes-nous ? Où allons-nous ?, qu'il considère lui-même comme son testament pictural.
À Tahiti, il fait la connaissance de Téha'amana, appelée aussi Tehura, jeune fille native de Rarotonga dans les îles Cook, à l'ouest de la Polynésie française, Gauguin la croyait originaire des îles Tonga. Celle-ci, âgée de treize ans, devient son modèle et sa compagne10. Il est très inspiré et peint soixante-dix toiles en quelques mois. Mais après quelques années de bonheur, des soucis administratifs et plus personnels, mort de sa fille Aline en 1897, la préférée de ses cinq enfants le minent. Il a également des problèmes de santé : une blessure à la jambe qui ne guérit pas depuis 1894, une crise de syphilis, si bien qu'il déprime et tente de se suicider.
Il décide alors de partir pour les Marquises afin de retrouver l'inspiration. En 1901, le voici donc à Atuona, sur l'île de Hiva Oa, dans les îles Marquises. Il lui semble être au paradis. Il va vite déchanter en se rendant compte des abus des autorités et en essayant de se battre pour les indigènes. Malgré ce fait, il laisse sur place une amertume des habitants et reste peu apprécié des Polynésiens en général et des Marquisiens en particulier, qui ont l'impression d'avoir eu affaire à un homme qui s'est servi des Polynésiens, surtout des femmes, comme si cela lui était dû. Affaibli, fatigué de lutter, il meurt le 8 mai 1903. Il est enterré dans le cimetière d'Atuona. La tombe de Jacques Brel côtoie la sienne.
Ses expérimentations sur la couleur et l'ensemble de son œuvre influencèrent l'évolution de la peinture, notamment le fauvisme du XXe siècle.

Influence de Gauguin

En marge des Impressionnistes, Gauguin fut sans doute, avec Paul Cézanne et Vincent van Gogh, le peintre de cette fin de XIXe siècle qui eut le plus d'influence sur les mouvements de peinture du XXe siècle. Cette influence réside probablement moins dans sa peinture que dans ses écrits, lesquels contiennent des formules qui, comme le dit Léon Gard, flattent ce penchant des hommes pour les recettes mirifiques, en même temps que leurs instincts de garnements déchaînés qui se saoulent d'indiscipline : « Comment voyez-vous cet arbre ? Écrivait Gauguin, Vert ? Mettez-donc le plus beau vert de votre palette ; et cette ombre ? Plutôt bleue ? Ne craignez pas de la peindre aussi bleue que possible, ou encore : Ne copiez pas trop d'après nature. L'art est une abstraction, ou encore : Vous connaissez depuis longtemps ce que j'ai voulu établir : le droit de tout oser.
Gauguin anima les mouvements mystiques et symbolistes de Pont-Aven, puis des Nabis où ses théories sur le cloisonnisme et le synthétisme étaient appuyées par les peintres Émile Bernard, Paul Sérusier et Maurice Denis et par le critique symboliste Albert Aurier. À la mort de Gauguin, à l'occasion d'expositions lui rendant hommage, ses idées s'étendirent, non sans extrapolation souvent, au Picasso de la période bleue et rose, puis aux groupes des fauves, André Derain, Raoul Dufy, des cubistes, Roger de La Fresnaye, des expressionnistes allemands, Jawlensky, Otto Mueller, Ernst Ludwig Kirchner, Paula Modersohn-Becker… et le groupe Die Brücke.
La première rétrospective eut lieu en Europe à Weimar organisée par le Comte Harry Kessler lequel était en relation avec Gustave Fayet, collectionneur qui lui prêta de nombreuses toiles. Gustave Fayet a sans doute été le collectionneur français détenant le plus grand nombre d'œuvres de Gauguin, 70 à son décès en 1925.

Gauguin en littérature

Paul Gauguin est le héros, avec Flora Tristan du roman du prix Nobel de littérature Mario Vargas Llosa. Dans ce roman qui retrace sa vie à Tahiti, il est appelé Koké le Maori en référence à son désir de devenir un véritable sauvage, de quitter la civilisation européenne qui l'aurait détruit. Y est décrite la conception du tableau que l'écrivain considère comme le chef-d’œuvre de Gauguin et qui s'intitule Manao Tupapau, Elle pense au revenant ou Le revenant pense à elle.
Somerset Maugham s'est inspiré de la vie de Paul Gauguin pour son personnage Charles Strickland dans L’Envoûté, The Moon and Sixpence.
La nouvelle Le Maître du jouir de Victor Segalen a pour protagoniste une version romancée de Gauguin. Victor Segalen est aussi l'auteur d'un article paru au Mercure de France en juin 1904 sous le titre "Gauguin dans son dernier décor". Il a écrit, en 1916, un "Hommage à Gauguin" pour servir de préface à l'édition des lettres de Gauguin à son ami Georges-Daniel de Monfreid.

La solitude et les dieux

Avec l'échec de la tentative de vie commune avec Van Gogh à Arles, 1888, le projet d'un atelier dans le Midi avait été abandonné. L'école de Pont-Aven, rassemblement de peintres en villégiature autour de Gauguin et Bernard, apportait une doctrine. Mais les conditions n'étaient pas réunies pour jeter les bases d'un grand atelier anti-académique et d'un credo symboliste qui aurait groupé les artistes dans une atmosphère de création communautaire. Gauguin caressait encore la chimère d'un atelier de rechange aux tropiques : en 1890-1891, il envisagea de fuir au Tonkin, à Madagascar ou à Tahiti, où il échapperait à l'étouffement d'une société dominée par l'argent. Son instinct choisit Tahiti. Après un séjour dans l'île de plus de deux ans, il retourne en France en 1894 pour y jouir d'une brève période de calme financier et moral. Mais deux ventes à Paris, dont le bilan fut négatif ou désastreux, Durand-Ruel et salle Drouot, lui signifièrent que sa nouvelle manière de peindre, la sauvage et l'incantatoire, aux titres encore plus incompréhensibles que barbares, rebutait davantage que le style encore impressionniste de la décennie précédente, et un dernier séjour en Bretagne lui fit sentir son dépaysement et son isolement total en Europe. Revenu à Tahiti, 1896-1901, la misère rendit insupportable la solitude. Il se prépara à sortir de la vie, peignit un testament monumental, la toile intitulée D'où venons-nous ? Que sommes-nous ? Où allons-nous ? à la fin de 1897, acheva en janvier 1898 le registre qui complète la deuxième version de Noa Noa, et partit pour mettre fin à ses jours dans la montagne. Un excès d'arsenic le rendit à la souffrance de vivre. Mais, en 1901, il était à nouveau à la limite de sa résistance. Le mirage d'une solitude plus complète dans une nature encore plus vierge, la foi dans une ultime renaissance de son imagination créatrice l'amenèrent à Hiva-Hoa dans les Marquises à la mi-septembre 1901. Dans cette île, Paul Gauguin, fidèle à la mémoire du libéralisme militant qui avait dressé son père Clovis contre Louis-Napoléon en 1849, attaqua l'administration coloniale et la toute-puissance de la mission catholique et apprit aux indigènes leur droit. La mort le sauva d'une défaite complète et vengeance ne fut tirée que de son œuvre.
En 1888, Gauguin avait écrit à sa femme que des deux composantes de sa nature, la sensitive – une sensibilité accordée aux valeurs morales de la civilisation occidentale – et l'indienne, seule l'indienne restait vivace. Il rêva de greffer sur la racine sauvage une poétique nouvelle. Comme les navigateurs du XVIIIe siècle en quête d'un éden sexuel, comme les héros de J. Conrad et R. L. Stevenson, il fut hanté par la vision d'une île dans les mers du Sud, environnée de calme extatique, peuplée de créatures simples et mystérieuses, où les battements de son cœur ne feraient qu'un avec le silence des nuits et les souffles embaumés, où le divin renaîtrait dans des idoles incarnant la nature entière, régnant en notre âme primitive, consolation imaginaire de nos souffrances en ce qu'elles comportent de vague et d'incompris devant le mystère de notre origine et de notre avenir. À Tahiti, Gauguin éprouva le désappointement de ne pas trouver d'idoles. Il dut recréer une mythologie polynésienne par un processus qui aurait été une mystification s'il ne l'avait rendue inséparable de son univers artistique. Les dieux chassés par les Européens reprirent dans son œuvre une existence magique. Tahiti n'avait d'ailleurs jamais possédé de sculpture en pierre ou en bois comparable aux statues de l'île de Pâques dont Gauguin avait pu voir un spécimen à l'Exposition universelle de 1889, mais simplement des poteaux-blocs drapés d'étoffe, les aniconiques atouas, effigies des dieux du ciel érigées dans les enceintes sacrées, on en voit dans le tableau Parahi te Marae, Ici est le temple des sacrifices et les tiis, figures totémiques, gardiennes des temples à ciel ouvert. Gauguin agrandit à l'échelle monumentale que lui suggéraient des photographies des bas-reliefs du temple javanais de Baraboudour, des tikis, objets symboliques sexuels et amulettes de sorciers, ou toute autre sorte d'ustensiles décorés de figures, provenant des archipels de la Polynésie et vendus sur le marché du folklore à Papeete. Il les incorpora, d'une manière parfaitement vraisemblable au point de vue mythique, dans ses paysages, par exemple Hina Maruru, Merci à Hina, déesse de la Lune et des renaissances cycliques dans la nature et recouvrit ses toiles et ses bas-reliefs en bois des îles d'un alphabet décoratif sacré, emprunté aux tatouages et aux impressions faites avec des jus jaunes ou rouges d'essences végétales sur les tapas, textiles obtenus par le pilonnage de l'écorce intérieure des arbres.
Dans un seul domaine les jardins des délices du Pacifique comblèrent l'espérance du peintre. Le nu, féminin ou masculin, avait jusque-là tenu peu de place dans son œuvre, Étude de nu ou Justine la couseuse, 1887 ; La Baignade, œuvre bretonne qui anticipe typologiquement Pape Moe, Eau mystérieuse, 1893. Ce thème devenu majeur dans l'œuvre de Gauguin devait être statistiquement diminué par l'autodafé de vingt Marquisiennes peintes nues, ordonné à Hiva-Hoa par l'évêque, après la mort de l'artiste. Gauguin a constamment soutenu que ses nus étaient chastes, parce que dessin et couleur les éloignaient de la réalité, leur conférant un style, c'est-à-dire les élevant à l'expression d'une forme universelle de l'être humain. Il faut ajouter que dans nombre de nus de Gauguin, Parau Api, Les Nouvelles du jour, Idole à la perle les caractères masculins ou féminins s'estompent, suggérant un aspect androgyne, qui est à la fois la marque de la créature primitive en deçà du péché originel et le symbole des deux principes complémentaires de la création et de la dualité de la vie et de la mort. Et l'or de leur corps traduit, par le rayonnement sans âge d'une argile tellurique vivante, un certain luxe barbare d'autrefois, qu'expriment aussi Poèmes barbares, Contes barbares. Dans l'un de ses Poèmes barbares, 1862, Leconte de Lisle avait mis en vers la cosmogonie de Taaroa – l'univers grand et sacré qui n'est que la coquille de Taaroa – que J. A. Moerenhout tenait d'un vieux prêtre, dernier témoin des cultes polynésiens détruits, et qu'il avait consignée dans Voyages aux îles du Grand Océan, 1837. Gauguin a puisé à la même source, mais il a prétendu dans Noa Noa l'avoir recueillie des lèvres de Tehura, sa vahiné de Tahiti. La genèse de la toile Manao Tupapau, Elle pense au revenant montre d'ailleurs comment une étude de nu océanien, semblable à la jeune fille nue couchée sur le ventre peinte par Boucher, intègre la mythologie, par l'introduction de l'effroi, figure du revenant, fleurs peintes avec des phosphorescences de feu-follet et la musique, par des tons violets, bleu sombre, jaune-orange et jaune verdâtre qui sonnent un glas lugubre et opulent. Pour Gauguin comme pour Mallarmé, tout peut devenir thème de poème, même une religion tarie, resucée par un voyant déraciné aux mamelles d'une humanité restée primitive.

Technique et esthétique

Dans les toiles de ses dix premières années, Gauguin brossait les tons peu distants les uns des autres, ce qui leur donnait un aspect floconneux, une harmonie sourde de couleur teigneuse, J. K. Huysmans. Il a acquis de Pissarro son habileté picturale, mais son maître secret resta Degas, dont il transposa deux danseuses sur un curieux coffre de bois sculpté, véritable coffre de matelot, 1884. De la Martinique au deuxième séjour en Bretagne, il évolua très rapidement de l'impressionnisme au synthétisme. Le synthétisme définit une forme non naturaliste, exprimant l'idée de l'œuvre d'art par un dessin concis et par la saturation subjective de la couleur. La couleur pure ! Il faut tout lui sacrifier. L'intensité de la couleur indiquera la nature de la couleur, Avant et Après. Gauguin avait le culte de Raphaël et d'Ingres, mais aussi celui de Delacroix ; il posera l'équation, la ligne, c'est la couleur, parce que la valeur spirituelle de l'une renforce celle de l'autre. L'acte de créer réside dans l'alliance de la forme et de la couleur, en éloignant de la réalité. La ligne exprime la potentialité vitale de l'œuvre d'art. Les lignes droites, ces arbres minces et syncopés qui rythment les paysages de Gauguin, tendent vers l'infini, et c'est pourquoi, malgré leur apparence classique, ses tableaux ne sont pas des classiques ; Maurice Denis a eu tort d'appeler Gauguin, un Poussin sans nature classique. Au contraire, les lignes courbes limitent et, se reployant, traduisent l'impuissance à atteindre l'absolu. La couleur apporte en vagues d'ondes sensorielles ce qu'il y a à la fois de plus universel et de plus secret dans la nature. Vibration musicale, elle est, comme la musique dans l'esthétique de Schopenhauer, l'objectivation de la volonté derrière le monde des apparences. Quand mes sabots retombent sur ce sol de granit de la Bretagne, j'entends le son sourd, mat et puissant que je cherche en peinture. Gauguin finira par dénoncer l'impressionnisme qu'il identifiera à un système de vibrations seulement optiques, art purement superficiel, tout matériel. Son incursion dans le pointillisme sera de simple curiosité, Nature morte ripipoint, 1889. Il regardera de haut les adeptes du divisionnisme, petits jeunes gens chimistes qui accumulent des petits points. Dès 1885, Gauguin avait retrouvé les accents de Baudelaire pour affirmer, pour chanter qu'il y a des tons nobles, d'autres communs, des harmonies tranquilles, consolantes, d'autres qui vous excitent par leur hardiesse.
C'est l'interdépendance des techniques et non le courant symboliste en littérature qui mit Gauguin sur la voie des correspondances et de son propre style pictural. L'énigmatique buisson de feu au pied de l'arbre bleu outremer des Alyscamps, 1888 éclate déjà au milieu de motifs péruviens et de chauves-souris chinoises sur les panneaux d'une bibliothèque sculptée et polychromée en 1881. Les couleurs, de plus en plus « loin de la nature, dans les tableaux peints après l'étape martiniquaise et la fabrication des cinquante-cinq vases, sont un vague souvenir de la poterie tordue par le grand feu. Tous les rouges, les violets rayés par les éclats de feu.Gauguin avait remarqué que les émaux nappant un grès après passage au four sont en harmonie impeccable parce qu'ils ont été fixés, sans creux ni recouvrement, d'un seul coup, dans une gamme qui se passe de complémentaires. Il recréa cet effet en peinture grâce au cloisonnisme de couleurs qui ne se mélangent pas mais s'enchevêtrent les unes dans les autres. Le cloisonnisme de la touche chez Gauguin va de pair avec le côté ornemental et donc abstrait de son dessin. Il a qualifié lui-même de tout à fait spécial, abstraction complète le dessin de l'autoportrait dit Les Misérables qu'il exécuta pour Van Gogh. Les yeux, la bouche, le nez sont comme des fleurs de tapis persan. Cette observation surprenante s'éclaire par celle qu'il fit dans les salles du Proche-Orient au Louvre sur les frises émaillées des palais achéménides, dont les monstres ont des muscles à contour de fleurs et dont les rosaces décoratives ressemblent à des musculatures, Le Moderniste, 4 juin 1889.
Après 1895, Gauguin ne fit plus de céramiques mais seulement des sculptures en bois, qui, comme ses vases, doivent leur style à la mise en relief, grâce au décor, du matériau même. Il fit aussi quelques idoles, des masques portraits. Dans une lettre à G. D. de Monfreid, il reconnut son échec d'artiste-décorateur : Dire que j'étais né pour faire une industrie d'art et que je ne puis aboutir, soit le vitrail, l'ameublement, la faïence... Voilà au fond mes aptitudes, beaucoup plus que la peinture proprement dite. Il se faisait illusion, sauf en ceci que son attirance pour les arts décoratifs, qui sont dans leur essence moins représentatifs que la peinture, le conduisit à inventer une peinture où la ligne et la couleur ornementales sont les chiffres du symbole. S'il avait eu le champ entièrement libre, il serait peut-être devenu l'équivalent d'un William Morris français. Mais Gauguin vaincu, Gauguin crucifié, Autoportrait, Près du Golgotha et Le Christ au jardin des oliviers, qui est aussi un autoportrait, a été beaucoup plus que l'un des annonciateurs de l'Art nouveau, il fut le libérateur de l'art moderne.Philippe Verdier

Les oeuvres


Voyageur dans l'âme, Paul Gauguin suit une trajectoire artistique qui fait la transition entre l'impressionnisme et le symbolisme. Par ses formes et ses couleurs, il exerce une influence décisive sur les peintres fauves et expressionnistes.

La vocation forcée

De sa prime enfance passée au Pérou, Paul Gauguin gardera le goût de l'inconnu. Il s'engage dans la marine en 1865, mais, suivant les conseils de son tuteur Gustave Arosa, qui est un collectionneur de peintures, il la quitte en 1871 pour entrer chez un agent de change parisien.
Marié en 1873 avec une Danoise, Mette-Sophie Gad, dont il aura cinq enfants, il peint le dimanche et fréquente l'académie fondée par l'Italien Filippo Colarossi. Camille Pissarro, ami des Arosa, le conseille et l'incite à participer, à partir de 1879, aux expositions impressionnistes ; il l'invite ensuite à travailler à Pontoise avec Jean-Baptiste Armand Guillaumin et Paul Cézanne, dont l'exemple pousse Gauguin à se détacher de l'impressionnisme.
À la fin de 1883, chassé de la Bourse par la crise économique, Gauguin tente d'abord de vivre de sa peinture à Rouen, où Pissarro et Claude Monet sont en relation avec de riches amateurs, puis il décide de faire du commerce au Danemark. Il échoue et regagne Paris en 1885, sans femme ni enfants. Son destin est scellé : pendant des années, il continue à rêver d'affaires, mais la peinture est devenue sa vie.

L'imprégnation bretonne

Paul Gauguin, Lutte de Jacob avec l'ange
Au retour d'un premier voyage à Pont-Aven, Gauguin expose en 1886 les toiles qu'il en rapporte avec celles de la période de Rouen et du Danemark, aux tonalités denses et sourdes.
L'année suivante, faisant un séjour en Martinique où il s'essaye au métier de planteur, il y exécute des tableaux discrètement pointillistes où apparaissent l'exotisme et la couleur dont ses souvenirs du Pérou et ses voyages en mer ont inscrit les émerveillements dans sa mémoire, Bord de mer.
Le second séjour de Gauguin à Pont-Aven se situe en 1888. Des longues discussions avec le jeune Émile Bernard naît alors une esthétique nouvelle opposant au néo-impressionnisme le synthétisme, couleurs pures posées à plat, cernes sombres, dont la Vision après le sermon 1888 – ou la Lutte de Jacob avec l'Ange – est l'œuvre manifeste.

En Arles avec Van Gogh Paul Gauguin, Vieilles Femmes à Arles

Gauguin apparaît comme le chef de l'école symboliste au cours de cette période, où s'intercalent, de novembre à décembre 1888, le séjour en Arles chez Vincent Van Gogh et les toiles éclatantes, les Alyscamps. Gauguin quitte Van Gogh après une violente crise de folie de ce dernier. La Belle Angèle 1889, le Christ vert 1889 reflètent les préoccupations plastiques et morales de cette période, que va suivre le premier voyage à Tahiti 1891-1893.

L'appel de l'exotisme

Paul Gauguin, Quoi ? Tu es jalouse ? La vie de Paul Gauguin s'est partagée entre l'Europe et les Tropiques. C'est la Polynésie qui lui insuffle une force créatrice nouvelle en faisant de lui le premier grand peintre à apprécier et à étudier les arts que l'on dit aujourd'hui premiers, puis à en livrer les clés à l'Occident.
Je pars pour être tranquille, pour être débarrassé de l'influence de la civilisation, déclare Gauguin avant de s'embarquer pour Tahiti, au printemps 1891. Je ne veux faire que de l'art simple ; pour cela, j'ai besoin de me retremper dans la nature vierge ... sans autre préoccupation que de rendre, comme le ferait un enfant, les conceptions de mon cerveau avec l'aide seulement des moyens d'art primitifs, les seuls bons, les seuls vrais.

Reconnaissances d'artistes Paul Gauguin, Arearea : Joyeusetés

Gauguin trouve à Tahiti l'univers relativement préservé dont il rêvait, Femmes de Tahiti, 1891. Mais, craignant à la fois les intrigues et l'oubli, il revient à Paris dès qu'il a suffisamment de tableaux nouveaux pour exposer chez Durand-Ruel, Arearea ou Joyeusetés, 1892 ; la Lune et la Terre, 1893.
Voyant ses œuvres, Stéphane Mallarmé s'émerveille d'y trouver tant de mystère dans tant d'éclat. Non seulement les écrivains – dont August Strindberg et Charles Morice, avec lequel il compose son autobiographie, Noa-Noa, 1897 – mais aussi les musiciens fréquentent son atelier.
Pourtant, le succès financier se fait attendre. Un procès perdu, une échauffourée à Concarneau, où des marins se moquent de sa compagne Annah la Javanaise, et Gauguin, écœuré par l'Europe, repart en 1895 pour Tahiti.

Enfer et paradis

À la religiosité confuse des œuvres bretonnes succèdent en Polynésie les grands mythes plaisir, peur, mort, les formes massives aux couleurs saturées. La joie d'un retour aux sources baigne les tableaux de 1896, Jours délicieux, puis l'angoisse s'infiltre (Nevermore, 1897.
Souffrant et déprimé par l'annonce de la mort de sa fille Aline, Gauguin pense au suicide. D'où venons-nous ? Que sommes-nous ? Où allons-nous ? 1897 a dès lors valeur de testament.
Le regain d'enthousiasme qui suit son installation au village d'Atuona, dans l'île d'Hiva-Oa, aux Marquises 1901, est générateur de chefs-d'œuvre où passe son sentiment d'un univers édénique, Contes barbares, 1902 ; Cavaliers au bord de la mer, ibid.. Gauguin exécute également des sculptures. Mais, épuisé par la maladie, par l'alcool et par de lancinants démêlés avec les autorités locales, il trouve la mort peu avant d'atteindre l'âge de 55 ans.


Principales œuvres

Le Lac dans la plaine 1873, Fitzwilliam Museum, Cambridge
La Seine au pont d'Iéna 1875, musée d'Orsay, Paris
Paysage d'automne 1877, Collection particulière.
Mette Gauguin cousant v. 1878, Fondation et Collection Emil G. Bührle, Zurich
Jardin sous la neige 1879, Szépmûvészeti Múzeum, Budapest
Les Maraîchers de Vaugirard 1879, Smith College Museum of Art, Northampton, Massachusetts
Étude de nu ou Suzanne cousant 1880, Ny Carlsberg Glyptotek, Copenhague
Intérieur du peintre à Paris, rue Carcel 1881, Nasjonalgalleriet, Oslo
Manao Tupapau, L'esprit des morts veille, 1892
Nave Nave Mahana, Jour délicieux, 1896
Jardin à Vaugirard 1881, Ny Carlsberg Glyptotek, Copenhague
Rouen, Les Toits bleus 1884, Collection particulière, Winterthour, Suisse
Mette Gauguin en robe du soir 1884, Ny Carlsberg Glyptotek
villa Julia. Pont-Aven 1887/1888,
Conversation dans les prés. Pont-Aven 1888, musées royaux des beaux-arts de Belgique, Bruxelles
Ferme à Arles 1888, Indianapolis Museum of Art, Indianapolis
Au café à Arles 1888, musée Pouchkine de Moscou,
Vision du Sermon - Combat de Jacob avec l'ange, 1889, National Gallery of Scotland, Édimbourg
Le Calvaire breton 1889, musées royaux des beaux-arts de Belgique, Bruxelles
Le Christ jaune 1889, Galerie d'art Albright-Knox, Buffalo
Nature morte à la Statuette maorie, vers 1890, musée des beaux-arts, Reims
La Mère de l'artiste entre 1890 et 1893, Alte Staatsgalerie, Stuttgart
Ia Orana Maria 1891, au Metropolitan Museum of Art, New York
Manao Tupapau 1892, Galerie d'art Albright-Knox, Buffalo
Nafea faa ipoipo 1892, Fondation Beyeler, Bâle
D'où venons-nous? Que sommes-nous? Où allons-nous? 1897-1898
Mahana maa I 1892
Piti Teina 1892, Musée de l'Ermitage - Saint-Pétersbourg
Arearea 1892, musée d'Orsay, Paris
Autoportrait au chapeau 1893, Musée d'Orsay, Paris
Eiaha Ohipa 1896
Te Tamari no atua 1896, Neue Pinakothek, Munich
Nave Nave Mahana 1896, Musée des beaux-arts, Lyon
D'où venons-nous? Que sommes-nous? Où allons-nous? 1897-1898, musée des beaux-arts de Boston
Deux femmes ou La Chevelure fleurie, prix : vendu 17,9 millions d'euros en février 2006
Arearea Joyeusetés 1892
Arbres bleus 1888, Ordrupgaard museum de Copenhague, Danemark
Les seins aux fleurs rouges 1899
Le Sorcier d'Hiva Oa ou Le Marquisien à la cape rouge, 1902, musée des beaux-arts de Liège
Bonjour Monsieur Gauguin, Galerie nationale de Prague
De nombreuses toiles de Paul Gauguin sont peintes sur les deux faces, des deux côtés. À l'instar de nombreux peintres du xixe siècle, en particulier pour des raisons pécuniaires ou de disponibilité de toiles neuves, Paul Gauguin retournait certaines toiles qu'il possédait de peintres de son époque pour y composer ses propres œuvres. C'est le cas, par exemple, du nu de la collection Slomovic comportant au verso la vue d'une chambre. Un autre cas est la nature morte Villa Julia de l'ancienne collection Lefort des Ylouses montrant un nu, inachevé et non identifié de l'autre côté.

Cote de ses œuvres

Nafea faa ipoipo a été achetée le 7 février 2015 pour un montant de 300 millions de dollars, 265 millions d'euros. Cela en ferait, à la date de la vente, l'un des records de prix pour un toile. L'acquéreur a gardé l'anonymat - mais serait, semble-t-il, quatari.
La Fin royale a été achetée par le Getty Museum de Los Angeles en mars 2008 pour un montant qui pourrait approcher les trente millions de dollars.
L'Art Institute de Chicago a acheté vers 2001, une statue de Gauguin, Un faune, qui s'est révélée être un faux moderne réalisé par une famille anglaise, les Greenhalgh

Musées

À Clohars-Carnoët, la Maison-Musée du Pouldu : reconstitution de l'auberge du XIXe siècle, où se sont retrouvés les peintres de l'École de Pont-Aven : Paul Gauguin, Paul Sérusier, Charles Filiger et Meijer de Haan Meyer de Haan.
Musée Paul Gauguin, à proximité de l'Anse Turin et Anse Latouche, au Carbet, en Martinique.

Correspondance

Lettres à sa femme et à ses amis, éd. par Maurice Malingue, Paris, 2003 première éd. 1946.
Correspondance de Paul Gauguin : documents témoignages. 1, éd. par Victor Merlhès, Paris, 1984; suivi de compléments en 1989 et 1995.
Fonds Gauguin conservé à la Bibliothèque centrale des musées nationaux, sur le site de l'Inha.

Carnets

Le Carnet de Paul Gauguin fac-simile des carnets de 1888-1891, éd. par René Huyghe, Paris 1952.
Paul Gauguin. Carnet de croquis = A sketchbook fac-simile des carnets de 1884-1889, éd. par Raymond Cogniat et John Rewald, New York, 1962.

Catalogues raisonnés

Marcel Guerin, L’Œuvre gravé de Gauguin, Paris, 1927 ; reprint, San Francisco, 1980.
Christopher Gray, Sculpture and ceramics of Paul Gauguin, Baltimore, 1963 ; nouv. éd. New York, 1980.
Georges Wildenstein avec Raymond Cogniat, Gauguin. 1, Catalogue, Paris, 1964.
Merete Bodelsen, Gauguin’s ceramics : a study in the development of his art, Londres, 1964.
Gabriele Mandel Sugana, Tout l’œuvre peint de Gauguin, Paris, 1987 première éd. 1972
Richard S. Field, Paul Gauguin : monotypes, Philadelphie, 1973.
Elizabeth Mongan, Eberhard W. Kornfeld, Harold Joachim, Paul Gauguin. Catalogue raisonné of his prints, Bern, 1988 (ISBN 3-85773-019-6).
Jean-Pierre Zingg avec Marie-José Pellé, Les éventails de Paul Gauguin, Papeete, 1996 repr. 2001
Daniel Wildenstein avec Sylvie Crussard et Martine Heudron, Gauguin : premier itinéraire d'un sauvage. Catalogue de l'œuvre peint, 1873-1888, Milan, Paris, 2001

Sur Gauguin

Bénézit, Dictionnaire critique et documentaire des peintres, sculpteurs, dessinateurs et graveurs de tous les temps et de tous, vol. 5, éditions Gründ,‎ 8 février 1999, 13440 p., p. 908-913
Françoise Cachin, Gauguin, Paris, Flammarion,‎ 2003, 311 p.
Jean-Luc Coatalem, Je suis dans les mers du sud; Sur le traces de Paul Gauguin, Paris, Grasset, 2001
Bengt et Marie-Thérèse Danielsson, Gauguin à Tahiti et aux îles Marquises, Papeete, 1975 trad. d'après Gauguins söderhavsar, Stockholm, 1964 nouv. édition, Paris, 1989
Denise Delouche, Gauguin : entre Japon et Bretagne , ArMen, éditions Fitamant, no 191,‎ novembre-décembre 2012,
Charles Gorham trad. F. M. Watkins, Et l'or de leurs corps : le roman de Gauguin, Paris, René Julliard,‎ 30 mai 1956, 375
Christian Jamet, Gauguin à Orléans, Joué-lès-Tours, Éditions La Simarre,‎ 2013, 99 p.
Alain Georges Leduc, Résolument moderne, Gauguin céramiste
Georges Daniel de Montfreid, Sur Paul Gauguin inclut des bois dessinés et gravés d'après Paul Gauguin par Daniel de Monfreid, La Rochelle, 2003 : Contient les lettres de G. D. de Monfreid à Paul Gauguin, décembre 1897-août 1903.
Henri Perruchot, La vie de Gauguin, Hachette, 1961.
Jean-François Staszak, Géographies de Gauguin, Paris, Bréal, 2003
Antoine Terrasse, L'Aventure de Pont-Aven et Gauguin, avec Mary Anne A. Stevens et André Cariou. Skira, 2001.

Citations

Paul Gauguin
Le laid peut être beau, le joli, jamais.
Paul Gauguin
Les impressionnistes cherchent autour de l'œil et non au centre mystérieux de la pensée.
Paul Gauguin, cité par André Breton, le Surréalisme et la peinture.

Bibliographie De Gauguin

Ancien culte maori 1892 ; éd. fac-simile par René Huyghe en 1951, repr. 2001
Cahier pour Aline 1892 ; éd. fac-simile 1989 en ligne ; éd. typographiée, Éditions du Sonneur, 2009
Noa Noa 1893-1894, première éd. 1901 par Charles Morice 1 2; éd définitive 1924 ; éd. de 1988 par Pierre Petit ; éd. de 1998 par Jérôme Vrain ; éd. fac-simile du ms. de 1893 et des ill. du ms. de 1895 de 2001 par Gilles Artur, Jean-Pierre Fourcade et Jean-Pierre Zing.
Racontars de rapin 1902 ; fac-simile, 1994 ; nouv. éd., 2003
Avant et après 1903 ; éd. 2003
Oviri, Écrits d’un sauvage textes choisis 1892-1903, éd. 1974 par Daniel Guérin
Racontars de rapin; éditions Marguerite Waknine 2013.


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#73 Andrea Appiani
Loriane Posté le : 30/05/2015 19:40
Le 31 mai 1754, à Milan naît Andrea Appiani

mort dans cette même ville le 8 novembre 1817, peintre italien néoclassique, fresquite formé à l'académie des beaux-arts de Brera, ses maîtres sont Carlo Maria Juges, Giuliano Traballesi. Il étudie à Milan sous la direction de différents maîtres ; de cette formation, il conservera une finesse d'exécution qui adoucit la froideur néo-classique de ses œuvres (Histoires d'Amour et Psyché, 1789, Monza, Villa royale). Lié au cercle de l'architecte Piermarini, il effectue des études préalables à la manière de Léonard de Vinci, qui témoignent du classicisme d'esprit néo-grec vers lequel il tend. Dans les fresques de la coupole de S. Celso à Milan 1792, il se souvient de Corrège et de Dominiquin. Même après 1796, lorsque Appiani subit l'influence de David et qu'il reçoit des charges et des commandes de portraits officiels (en 1805, il est nommé " premier peintre " de Napoléon Ier, sa peinture conserve la même fluidité de facture : Jacob et Rachel 1795-1805 env., Portrait de Vincenzo Monti 1805, Rome, G. A. M., Apollon et Daphné 1811, Brera. Au cours de cette période, le style de ses œuvres les plus importantes s'infléchit vers l'héroïsme tout en révélant un sens aigu de la réalité contemporaine : frise monochrome des Fastes napoléoniens 1803-1807, Milan, Palais royal, salle des Cariatides, détruite en 1943.
Appiani fut apprécié par ses contemporains, tant pour ses peintures commémoratives et allégoriques Apothéose de Napoléon Ier, 1808 que pour ses portraits exemples à Versailles : portraits du Général Louis-Charles-Antoine Desaix et de Madame Regnaud de Saint-Jean-d'Angély.

En bref

Parmi les représentants majeurs du néo-classicisme, on doit à coup sûr compter Andrea Appiani. Aux côtés d'un Giani, plus tendu et brutal, d'un Camuccini, plus maniérisant, Appiani est en Italie dans la lignée de Mengs et d'Angelica Kauffmann le représentant d'un art où le retour à l'antique passe, entre autres, par une méditation des classicismes, de celui du Raphaël de la Farnésine à celui de Poussin.
Excellent décorateur, Appiani fait preuve dans les fresques de la Rotonde de Monza, commandées en 1789 par l'archiduc Ferdinand, de qualités alexandrines qui lui donnent la réputation d'un nouvel Albane. De même, le cycle de fresques consacrées à Apollon dans la casa Sannazzaro de Milan (1800) pour le ministre francophile Prina, qui ont été déposées, en partie, et conservées à la Brera et à la Galleria d'arte moderna de Milan, ont une transparence et une élégance qui ne peut que faire penser à Guido Reni.
Son chef-d'œuvre est sans doute l'ensemble de fresques, pratiquement détruit pendant la Seconde Guerre mondiale, commandées par Napoléon pour le Palazzo Reale de Milan, demeure du vice-roi Eugène de Beauharnais, son beau-fils (actuellement à la Galleria d'arte moderna). La salle des Cariatides (1803-1807) comprenait trente-cinq épisodes en grisaille des fastes de Napoléon, qui ont été détruits en 1943, mais heureusement connus par les gravures de Rosaspina (la salle du Trône, 1808, illustrait l'apothéose de Napoléon). Le morceau central, détaché, est à la villa Carlotta à Tremezzo, tandis que les étonnants cartons (Louvre) et diverses études (Galleria d'arte moderna, Milan) permettent d'accéder encore à cette décoration. Usant sans difficulté du langage allégorique, choisissant de représenter l'empereur à l'antique, tel un Jupiter-Auguste, sur un trône que portent des Victoires assez botticelliennes, Appiani réussit cette synthèse du présent et du passé qui fit achopper tant d'artistes et dont les difficultés expliquent, en partie, les préférences de Napoléon pour la traduction franchement réaliste de l'histoire contemporaine. Dans cette manière, Appiani n'a qu'un rival, Prud'hon.
Le portraitiste montre une élégance nerveuse et pure, qui rappelle celle du baron Regnault. Le portrait du Premier consul, 1803, coll. privée, Bellagio est une des effigies les plus racées de Bonaparte : l'énergie de Gros contenue dans un dessin d'une acuité bronzinienne, une étrange harmonie en noir et or. Les dignitaires du royaume d'Italie, tels Francesco Melzi coll. privée, Bellagio, le ministre de l'Intérieur, Arborio di Gattinara (musèo del Risorgimento, Milan, le général Achille Fontanelli Galleria d'arte moderna, Milan, etc., ont trouvé en Appiani celui qui sut donner de l'épisode napoléonien une effigie où la dignité de l'antique se tempère de la grâce d'une nouvelle Renaissance. Bruno Foucart

Sa vie

Issu d'une famille modeste, il étudia à Milan à partir de 1769 à l'école de l'Ambrosiana avec Carlo Maria Juges, au grand hôpital d’anatomie avec Gaetano Monts, puis avec de Giorgi où il étudia Leonardo, Raphaël et Bernardo Luini ; en 1776 il fréquente l'Académie de Brera avec Giuliano Traballesi et Martin Knoller, en approfondissant les techniques de la fresque. Il quitta bientôt ses maîtres pour étudier seul, sans autre guide que les chef-d'œuvres de l'Antiquité et de la Renaissance. Les documents sur sa première œuvre remonte à 1777 ce sont les fresques de la paroisse de Présure. De 1779 à 1782 il s'occupe de scénographie à Milan avec les frères Bernardino et Ferdinand Galliari et de 1783 à 1784 il est à Florence où il fréquente l'école de Dominique Chelli. En 1789 il reçoit de l'archiduc d’Autriche la commande d’une fresque sur le thème de L'Histoire de l’Amour et Psyché pour le Rond-point des Serres dans la Villa Reale de Monza, Appiani a une personnalité artistique bien définie : il adopte la grâce de la peinture grecque et la douceur de Léonard de Vinci.

Début de carrière

En 1790 et en 1791 il voyage pour étudier à Rome, Parme, Bologne, Florence et Naples, ceci aussi en vue de la réalisation de ses fresques milanaises à Santa Maria presso San Celso, commencées le 10 juin 1793 et terminées en 1795, après celles du Rond-point de la Villa du Grand-duc à Monza, peintes à son retour de Rome vers 1792. De 1795 à 1800 il peint la fresque de l'immeuble milanais Sannazzaro le 9 juin 1796. Après l'entrée des Français à Milan, le 15 mai 1796, le "Corriere Milanese" décrit son portrait de Napoléon à la bataille de Lodi. À cette même date il est nommé « Commissaire supérieur », chargé de choisir les œuvres d'art lombardes et vénitiennes à envoyer à Paris.

Artiste du régime napoléonien

En 1797 il fait partie du Corps législatif de la République cisalpine et il est chargé d'en préparer la Fête Fédérative le 9 juillet 1797. Du retour des Autrichiens à Milan, le 28 avril 1799, au retour de Napoléon, le 2 juin 1800, Appiani travaille très peu ; le 18 octobre 1800 il est nommé à nouveau Commissaire aux œuvres d'art. Le 7 mai 1801 le Journal des débats annonce la venue à Paris du peintre et le 19 mai le gouvernement français le charge, avec Jacques-Louis David, de s'occuper du projet du Forum Bonaparte. Le 4 juin 1801 il est enseignant à l'Académie de la Brera et le 16 janvier 1802 il est nommé Commissaire des Spectacles ; le 17 avril il rédige un inventaire de la collection archiépiscopale, le 3 mars 1811, il choisira 23 peintures qu'ils feront partie, avec d’autres, de la nouvelle Pinacothèque : la Brera, inaugurée le 5 août 1811. Le 16 juin 1802 il est membre du jury dans le Concorso della Riconoscenza, gagné par Giuseppe Bossi ; le 12 juillet il écrit un rapport sur les dégradations de la Cène de Léonard de Vinci et le 15 octobre il est membre de l'institut National de la République Italienne ; en janvier 1803 il va à Bologne et à Parme, où il copie les fresques du Corrège dans le Chambre de saint Paul. Le 7 mai 1803 il est membre de la Classe de Littérature et Beaux-Arts de l'Institut de France, le 20 juin il finit, au Palais royal de Milan, les premiers 15 épisodes des Fasti, une série de monochromes à la détrempe commencé en 1801. Le 26 juin 1803 on inaugure l'Arène de Milan, projet d'Appiani, Barbillons et Sanquirico. Le 23 janvier 1804 une commission composée par Vincenzo Monti, Giuseppe Bossi et Giuliano Traballesi examine les cartons de l'Apothéose de Napoléon en Jupiter triomphateur et de la Chute des Géants dont Appiani fit la copie d'après Francesco Valentini, et qu’il apporta en cadeau à Napoléon. Le 2 décembre 1804 il est à Paris, pour le couronnement de Napoléon comme empereur des Français et le 26 mai 1805, à Milan, il participe à la cérémonie du couronnement de Napoléon comme Roi d'Italie avec le sculpteur Pietro Cure : deux semaines après, le 7 juin 1805, il est nommé premier peintre du Roi d'Italie.
Le 31 août 1805 Eugène de Beauharnais lui commande la préparation des estampes des Fasti, commencé par Giuseppe Longhi en 1807 et complété seulement en 1817 ; le 27 juillet 1806 il est nommé chevalier de la Couronne de Fer par le prince Eugène.

Fin de carrière

En 1808 sont réalisées les fresques du Palais Royal de Milan, en grande partie détruite pendant la seconde Guerre Mondiale, seules deux œuvres ont échappé à la destruction : l'Apothéose de Napoléon et les quatre Vertus qui sont actuellement à la Villa Carlotta, au Tremezzo, sur le lac de Côme. Le 18 août 1808 Appiani peint dans cette seule année 16 portraits de Napoléon et de la famille Beauharnais ; entre août et septembre 1811 il peint l'Ensemble de poètes dans la Villa Reale de Monza et il rentre à Rome faire partie de l'Accademia di San Luca. En 1812, après la défaite napoléonienne en Russie, il interrompt sa fresque de la Chute des Géants destinée au Palais Royal. Le 28 avril 1813 il est frappé par un infarctus qu'il le laisse paralysé, et lui empêche pour le reste de sa vie de travailler, en laissant inachevées les œuvres pour le Palais Royal. Il meurt dans sa maison milanaise de Corso Monforte en 1817.

Franc-maçonnerie

Il fut initié en Franc-maçonnerie en 1785, dans la Loge "La Concordia" de Milano, constituée en 1783 par le comte Johann Joseph Wilczek avec patente des Illuminés de Bavière, qui en 1784 avait adhéré 1784 à la Grande Loge Nationale de Vienne. Pendant la période napoléonienne, sous le Grand Orient d'Italie, il fut membre de la Loge "Amalia Augusta" de Milan, et ensuite Vénérable maître de la Loge "Royale Josephine", toujours à Milan. Il fut aussi dans les mêmes années Garde des sceaux du Grand chapitre général de la maçonnerie italienne. Lors de la naissance du Grand Orient d'Italie à Milan il fut nommé Grand Officier en exercice1. Il a laissé de nombreuses traces artistiques à caractère maçonnique dans ses œuvres au Palazzo Reale de Milan.

Œuvres dans les collections publiques et les monuments publics

Alzano Maggiore, église San Martino : La Rencontre de Jacob et Rachel, huile, 1795 - 1805.
Arona, cathédrale : Adoration des bergers, huile, 1791.
Bellagio, Villa Melzi : Napoléon premier consul, huile, 1800 ; Francesco Melzi, huile, 1803 ; La princesse Belgioioso, huile sur toile, 1804 ; Scène mythologique fresque
Bergame, Accademia Carrara : Giovanni Battista Sommariva, huile
Birmingham, Museum of Art Gallery : Étienne Pierre Graf Méjan, huile, 1806
Brescia, Pinacothèque Tosio Martinengo : Madonne à l'Enfant, huile, 1805 - 1806 ; La toilette de Junon, huile, 1811
Cambridge, Fitzwilliam Museum : Minerva mostra lo specchio all'Innocenza, huile, 1811
Cardiff, National Gallery of Walles : Marianna Moriggia Reina, huile, 1810.
Firenze, Offices : deux autoportraits, huiles, 1811.
Lyon, Archevêché: Cardinal Joseph Fesch, huile, 1805.
Milan
Pinacoteca Ambrosiana : Carlo Pitrot Angiolini, huile, 1803 - 1805 ; Napoleon Roi d’Italie, huile, 1805 ; La signora Rua, huile, 1811 ; Severino Bonsignori, huile, 1813
Galleria d'Arte Moderna : Giuseppe Parini, 1793 ; Apollon et Clizia ; Apollon et Mars, fresques, 1795 - 1800 ; Portrait d'Asioli, huile ; Portrait de Bovet, huile ; Antonio Canova, huile ; Diane et Actéon, huile ; Mars et Vénus, huile, vers 1801 ; Pluton et Proserpine ; Aurore et Céphale, huile sur cuivre, 1801 ; Orphée et Eurydice, fresque, 1805 ; Portrait de la signora Porro Lambertenghi Serbelloni, huile, 1811 ; Portrait de Vieillard, huile, 1810 ; Portrait de Fontanelli, huile, 1811 – 1813
Accademia di Brera : Napoléon, 1796 ; Napoléon Roi d’Italie, huile, 1805 ; Autoportrait, huile, 1811
Pinacothèque de Brera : Apollon et Daphné ; Apollon et Hyacinthe ; Le char d’Apollon, fresque, 1795 - 1800 ; Ugo Foscolo, huile, 1801 - 1802 ; L'Olympe, huile, 1806
Cà Granda : Giovanni Battista Fratres, huile, 1805
Collegio di San Carlo : Giove ed Ebe, fresque, 1792 – 1799
Palais Greppi : Giove e Ganimede, fresque, ca 1790
Palais Litta Cusani : Le Char du soleil, fresque, 1790
Église Santa Maria presso San Celso : Les Évangélistes et les Pères de l'Église, fresques, 1793 - 1795
Palais Orsini : L'Amour triomphant ; Le Banquet de Jupiter, fresques, ca 1787
Musée Poldi Pezzoli : Giuseppe Parini, ca 1795 ; La signora Milesi, huile, ca 1810
Préfecture : Divinità, fresque, 1783
Musée du Risorgimento : Ugo Foscolo, 1801 ; Napoléon, huile, 1805 ; Ludovico Artorio di Gattinara, Marchese di Breme, huile, ca 1806
Museo della Scala : La Vertu punissant les vices, 1800 ; Ritratto di Landriani, huile, 1792
Palais Radice Fossati - Stanga : Scene mythologique, fresques, 1790
Moltrasio, Villa Lucini Passalacqua : Vierge à l'Enfant, fresque, 1790.
Montevecchia, chiesa di San Giovanni Decollato : fresques, 1795.
Monza
Palazzo del Comune : Amore e Psiche ; L'officina di Vulcano, huile, 1801
Villa Reale, già Arciducale : Storie di Psiche, fresques, 1792.
Munich, Neue Pinakothek : I bambini Carlotta e Raffaello, huile, 1808.
Oggiono, église Sant’ Eufemia : Visitazione, fresque, 1790.
Paris
Collection du Prince Napoléon : Joséphine de Beauharnais, huile, 1796
Napoleon Art Collection: Napoleon en costume de Sacre, huile, signée, 1805
Musée Carnavalet : Madame Hamelin, huile, 1796-1799
Parme, Pinacoteca Nazionale : Giovanni Battista Bodoni, huile, 1798
Pavie, Pinacoteca Malaspina : Venere e Imeneo, huile, 1790.
Rancate, église Santa Maria Assunta : fresque, 1778-1780
Rome
Accademia di S. Luca : Maria di Santa Cruz Waldstein, huile, 1807
Galerie nationale d'art moderne : Vincenzo Monti, huile, 1806
Gabinetto Nazionale delle Stampe : Giuseppe Bossi, 1802.
Rueil-Malmaison, Châteaux de Malmaison et de Bois-Préau, Portrait d'Eugène de Beauharnais, 1810.
Soragna, Rocca Meli Lupi : Storie di Venere, huile, 1805-1810
Tremezzo, Villa Carlotta : Scene mitologiche, huile ; Apothéose de Napoléon ; Quattro Virtù, fresques, 1808, du Palais Royal de Milan
Trévise, Museo Civico : Ritratto di Grimaldi Prati, huile, 1811.
Venise
Gallerie dell'Accademia : Portrait de Vallardi, 1792
Museo Correr : Eugène de Beauharnais, 1805-1807.
Vercelli, Museo Borgogna : Napoléon, huile, 1800.
Versailles
Musée National : Le général Desaix, huile, 1801-1802 ; Madame Regnault de Saint Jean d'Angély, huile, 1796-1799
Galerie des Batailles : Napoléon, huile, 1809
Vienne, Kunsthistorisches Museum : Napoléon Roi d’Italie, huile, 1805
Valbrona, église San Michele : Vierge à l'Enfant, huile, 1805, Appiani et le comte Davenne
Œuvres passées en vente[modifier | modifier le code]
Portrait de Claude Petiet et de ses deux fils en uniforme de l'armée impériale, et son pendant : Portrait de Madame Petiet sous un arbre avec sa fille et son fils, huile sur toile, 135,5 par 112, Salle Rossini, Paris 28 juin 2001, adjugés 1 7000 000 €.
Portrait de Napoléon Bonaparte, huile sur toile, 211,5 par 131, Christie's New York, 26 octobre 2001, invendu, (ce tableau fut exposé lors de la rétrospective Vivant-Denon, 1999-200, comme École Française).
Portrait de Napoléon en Premier Consul, huile sur toile, 99 par 80,8, Christie's New York, 17 juin 2004, adjugé 769 100 $.
Portrait de Joséphine de Beauharnais, huile sur toile, 98 par 74, Château de Monrepos, près de Stuttgart, 9 octobre 2000, adjugé 127 000 £.


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#74 Boticelli
Loriane Posté le : 16/05/2015 10:46
Le 17 mai 1510 à 65 ans meurt à Florence Sandro Botticelli

de son vrai nom Alessandro di Mariano, di Vanni Filipepi, dit plus couramment Sandro Botticelli, né dans cette même ville entre le 1 Mars 1444 ou 1445, peintre italien né à Florence. Botticelli est l'un des peintres les plus importants de la Renaissance italienne et de l'histoire de l'art. Son maître est Fra Filippo Lippi
Éson élève Filippino Lippi. Il représente le mouvement artistique de la première Renaissance. ses mécènes sont Laurent de Médicis, Sixte IV, Laurent II de Médicis
Ses Œuvres réputées les plus réputées sont : Le Printemps, La Naissance de Vénus, Annonciation, Vénus et Mars, la Madone du Magnificat, Pallas et le Centaure, La Calomnie d'Apelle, illustrations de la Divine Comédie de Dante

En bref

Peintre de l'idéal humaniste gardant les yeux fixés sur l'idéal chrétien, Botticelli fut l'un des plus grands maîtres de la Renaissance florentine. Son œuvre nous plonge dans la vision d'un monde paré d'une poésie fascinante.
Fils du tanneur florentin Mariano Filipepi, Alessandro, dit Sandro, reçoit le surnom de Botticelli de botticello, petit tonneau pour une raison qui reste incertaine. Il commence son apprentissage chez un orfèvre, où il découvre ses talents d'artiste et acquiert le goût du contour précis.
Vers 1464, il entre dans l'atelier de Fra Filippo Lippi pour trois ans environ. S'il met à profit l'enseignement de son maître, créateur de formes à la fois denses et élégantes, il semble prendre encore plus d'intérêt aux recherches de Verrocchio, dont il sera l'aide. De cette première période datent plusieurs Vierges à l'Enfant, généralement accompagnées d'anges.
C'est à Florence que se déroule presque toute la carrière de Botticelli. En 1470, celui-ci ouvre son atelier et, grâce à un homme de confiance des Médicis, obtient sa première commande officielle, la Force, qui est une allégorie. Vers 1472, il s'initie à la peinture religieuse avec le Retour de Judith , à la facture précieuse, et un Saint Sébastien. Vers 1476-1477, l'Adoration des Mages est sa première œuvre importante, dans laquelle il se représente aux côtés de plusieurs Médicis.
C'est vers 1478 que Botticelli achève la Madone avec huit anges et surtout le Printemps, commandé pour deux frères Médicis ; la grâce linéaire qui s'y épanouit atteste que l'artiste a trouvé un langage totalement personnel. Délaissant les panneaux de bois pour la fresque, il peint un Saint Augustin 1480 et une Annonciation 1481, dans lesquels la composition s'organise selon les lignes de la perspective.
La réputation du peintre est telle que le pape Sixte IV l'appelle à Rome. Entre 1481 et 1482, Botticelli y peint trois fresques pour la chapelle Sixtine : les Épreuves de Moïse, la Punition des lévites rebelles et la Tentation du Christ – chacune d'elles, obéissant à une tradition médiévale, rassemble plusieurs épisodes. La brillante Adoration des Mages vers 1478/1482 est sans doute un autre témoignage de l'activité romaine du maL
À Florence, l'humanisme dont la cour des Médicis est un ardent foyer trouve en Botticelli son meilleur interprète dans le langage de l'art avec les deux célèbres tableaux mythologiques Pallas [Minerve] et le Centaure vers 1480-1483 et la Naissance de Vénus vers 1484, auxquels succède un Mars et Vénus , peut-être commandé par une autre illustre famille, les Vespucci.
À la demande des Médicis, Botticelli entreprend une série de dessins sur parchemin (en 1490) qui vont illustrer la Divine Comédie de Dante Alighieri.
Vers 1485-1486, Botticelli était revenu au thème de la Madone, qu'il avait traité dans plusieurs compositions élégantes et lumineuses (la Madone du Magnificat). Peu avant 1490, il reçoit la commande, assez rare dans sa carrière, de deux ouvrages de dimensions importantes : le Retable de saint Barnabé, pour la confrérie des médecins et des pharmaciens, et le Retable de saint Marc, pour la corporation des orfèvres.
La crise politique et morale qui secoue Florence à la mort de Laurent le Magnifique (1492) se répercute dans la vie même de Botticelli, dont les dernières œuvres révèlent une exaltation du sentiment religieux. Déjà, l'Annonciation peinte vers 1490 avait renouvelé le thème dans un climat tourmenté dont la Vierge debout avec l'Enfant embrassé par saint Jean-Baptiste, postérieure de quelques années, offre de nouveau l'exemple. Deux Pietà, peintes vers 1495, portent la tension tragique à son comble.
Enfin, les prédications de Jérôme Savonarole semblent avoir directement inspiré la Nativité mystique 1501 et la Crucifixion, avec une vue de Florence en pleine tempête.
Le mouvement, essentiel au monde de Botticelli, est saisi par le trait, qui a plus d'importance que le volume. Nerveux et imprévu, il fait ondoyer la figure humaine ou parfois la tourmente et la brise selon le caprice du peintre ; mais son irrégularité lui évite de se confondre avec l'arabesque décorative : il est l'expression de la pensée.
Cependant, la primauté du trait ne veut pas dire, chez Botticelli, indifférence à la matière picturale. Son goût pour le raffinement de l'exécution et pour la transparence du coloris, qui semble pénétré d'une lumière cristalline, se rencontre tout au long de sa carrière.
La grâce inquiète de Botticelli ferait peut-être de celui-ci un précurseur des maniéristes du XVIe siècle, si le peintre n'avait d'abord exprimé les exigences spirituelles de son temps. En cet âge d'or pour les hommes de génie, Giorgio Vasari, il s'agissait de voir dans le monde sensible le reflet du monde des idées. Le Printemps, qui semble opposer de part et d'autre de Vénus l'amour charnel et l'élan de l'âme, et la Naissance de Vénus, qui serait un hymne à la fécondité universelle, sont la transposition la plus parfaite de ce dualisme.
Au moment où Botticelli meurt, de jeunes artistes donnent à la Renaissance une orientation nouvelle : Léonard de Vinci, Raphaël, Michel-Ange, entre autres. Sa peinture, déjà démodée, va tomber dans l'oubli. C'est au xixe siècle qu'elle retrouvera la place qu'elle mérite.
Les jeunes dandys des années 1890, tel Marcel Proust, sont de grands laudateurs de Botticelli. L'auteur d'Un amour de Swann s'inspire d'une de ses fresques de la Sixtine, dont il a connaissance grâce aux Essais critiques de John Ruskin, pour imaginer le portrait d'Odette de Crécy.
C'est la figure de Zéphora, la future épouse de Moïse, qui offre à l'écrivain son modèle plastique et lui permet de trouver l'incarnation de la femme aimée dans son roman. Swann, y lit-on, plaça sur sa table de travail, comme une photographie d'Odette, une reproduction de la fille de Jéthro.

Sa vie

Alessandro Filipepi, qui sera plus tard surnommé Sandro Botticelli, naît dans le quartier Borgo Ognissanti, à Florence, en Toscane, cadet de quatre frères. Il grandit dans une famille modeste, son père Mariano Filipepi est tanneur, son atelier est situé dans le quartier voisin de Santo Spirito. Botticelli a un surnom, venant du mot botticello qui signifie petit tonneau ; le surnom vraisemblablement donné à son frère aîné Giovanni, passa rapidement au cadet.
Son frère Antonio, orfèvre de profession, lui prodigue son premier enseignement artistique.
Botticelli entre à l'âge de vingt ans dans l'atelier de Fra Filippo Lippi entre 1464 et 1467, moine et peintre de Florence, auteur de peintures religieuses. Il y travaille avec les peintres Antonio del Pollaiuolo et Andrea del Verrocchio quand son maître part pour Spolète. Cet apprentissage de l’orfèvrerie, de la gravure et de la ciselure influence la ligne de son dessin. Botticelli travaille beaucoup avec les artisans et notamment avec son frère Antonio, orfèvre avec qui il partage son atelier.
Il reçoit sa première commande publique en 1470 quand il ouvre son propre atelier. Il s'agit d'une allégorie pour le Tribunal de Commerce de Florence qui doit représenter la Force, panneau qui doit s'insérer dans une commande passée à Piero Pollaiuolo qui devait livrer les six autres vertus catholiques mais qui fut révoqué pour n'avoir pu les livrer à temps.
Il compose en 1472 le diptyque des Épisodes de la vie de Judith 1472, avec La Découverte du cadavre d'Holopherne dans le style du Pollaiolo, et Le Retour de Judith à Béthulie, avec la sensibilité de Fra Filippo.
Devenu l'ami des philosophes néoplatoniciens, en accueillant pleinement leurs idées, il réussit à rendre visible cette beauté qu'ils théorisent, en y rajoutant son interprétation personnelle du caractère mélancolique et contemplatif, qui le distingue des autres artistes de son temps comme le Martyre de saint Sébastien de 1473, en une version totalement différente de celle du Pollaiolo.
Botticelli fréquente le cercle de la famille Médicis, notamment les humanistes comme Ange Politien ou Pic de la Mirandole, ce qui lui offre protection et garantie de nombreuses commandes, comme L'Adoration des mages celle de 1475, peinte pour la chapelle funéraire de Gaspare Zanobi del Lama de Santa Maria Novella, une œuvre importante dans laquelle il dépeint un cortège dans lequel il représente les membres de la famille Médicis.
De cette même période date 1474-1475 une œuvre composée avec les mêmes principes qui révèle également l'influence flamande dans le Portrait d'un jeune homme portant le sceau de Cosme l'Ancien et plus tard en 1478, le célèbre Portrait de Julien de Médicis.
À partir de 1481, Botticelli est appelé à Rome par le pape Sixte IV pour décorer la chapelle Sixtine accompagné par Cosimo Rosselli, Domenico Ghirlandaio et Le Pérugin pour illustrer les vies de Jésus et Moïse sur les murs latéraux de la chapelle. La rivalité qui existe entre le pape, un Della Rovere et les Médicis, ses mécènes, fait que son talent n'est pas reconnu.
Il réalise trois grandes fresques Les Épreuves de Moïse, La Tentation du Christ et La Punition des Rebelles Lévites.
Il revient à Florence, mécontent de l'accueil réservé à ses fresques, et décide de ne plus jamais quitter sa ville natale. Aussitôt rentré, il peint pour la villa Medicea di Castello de Laurent de Pierre-François de Médicis, cousin de Laurent le Magnifique, Le Printemps en 1482 et la Naissance de Vénus vers 1485, ses deux œuvres les plus connues.
En 1497, le moine Savonarole et ses disciples élèvent le bûcher des Vanités. Des jeunes garçons sont envoyés de porte en porte pour collecter tous les objets liés à la corruption spirituelle : les miroirs et cosmétiques, les images licencieuses, les livres non religieux, les jeux, les robes les plus splendides, les nus peints sur les couvercles des cassoni, les livres de poètes jugés immoraux, comme les livres de Boccace et de Pétrarque. Ces objets sont brûlés sur un vaste bûcher de la Piazza della Signoria. Des chefs-d’œuvre de l’art florentin de la Renaissance ont ainsi disparu dans le bûcher, y compris des peintures de Sandro Botticelli, que l’artiste avait lui-même été contraint d'apporter.
Il eut comme élève Filippino Lippi, le fils de son maître, Fra Filippo Lippi.
Il meurt en 1510 dans la maison de la Via della Porcellenna où il a travaillé toute sa vie. Son tombeau est situé dans l'église Ognissanti.

Controverse concernant sa foi

Le peintre avait une grande prédilection pour les portraits, en particulier féminins, qu'ils soient de son époque ou tirés de la mythologie gréco-romaine.
Il est présent à Florence pendant que Savonarole la transforme en théocratie 1497. Il porte lui-même quelques-uns de ses nus féminins au bûcher des vanités. On peut penser que cet acte est plus ou moins forcé. Selon Sophie Chauveau, Botticelli a été obligé de brûler quelques-unes de ses œuvres, ce qui l’a attristé. Toutefois, après avoir rencontré Savonarole, Botticelli ne peignit plus de nus féminins.

Connaissances probables de Sandro Botticelli
Simonetta Vespucci,
Julien de Médicis,
Flavius Mithridate,
Ange Politien,
Pic de la Mirandole,
Jérôme Savonarole,
Michel Marulle

L'art de Botticelli, étonnamment personnel, d'une subjectivité intense, est, en même temps, le plus profondément accordé au climat de ce « siècle d'or » florentin évoqué par Vasari au début de la biographie qu'il lui consacre. Botticelli ne connaît pas l'épanouissement heureux de Raphaël, l'insatisfaction tourmentée de Léonard, les angoisses ou les triomphes de Michel-Ange. Mais l'originalité de son œuvre est dans la réaction d'une sensibilité constamment en éveil devant les êtres et les choses, devant les événements, les suggestions, les rêves qui s'affrontent et se succèdent au cours d'une carrière apparemment sans histoire.

Disciple de Filippo Lippi L'apprentissage à Florence et les premières œuvres

Alessandro di Mariano di Vanni Filipepi, dit Sandro Botticelli, est né à Florence l'année même où le palais Médicis sort de terre. Michelozzo, qui en est l'architecte, poursuit en même temps la construction du couvent de Saint-Marc, dont Fra Angelico décore les cellules ; Brunelleschi, un an avant sa mort, dirige les premiers travaux de Santo Spirito ; Andrea del Castagno entreprend les fresques de Sant'Apollonia et Paolo Uccello, dans le cloître vert de Santa Maria Novella, crée deux de ses œuvres les plus impressionnantes, Le Déluge et Le Sacrifice de Noé.
Le milieu où s'écoule l'enfance de Botticelli n'est pas celui de ces maîtres que protègent les Médicis et les grands Florentins qui forment leur entourage : son père est un modeste tanneur du borgo Ognissanti. Mais le petit monde qui est le sien est en relation constante avec celui des artistes de métier. Les travaux entrepris à Florence sous l'impulsion des Médicis, la construction et le décor des églises, des couvents, des palais rassemblent sur les mêmes chantiers les menuisiers, les marqueteurs, les ciseleurs, les peintres et les sculpteurs.
Sandro se révélant décidément rebelle à l'étude, il apprenait tout ce qu'il voulait, dit Vasari, mais refusait de s'appliquer à l'écriture, à la lecture et au calcul , son père le confie à l'un de ses amis qui est orfèvre. Pour Botticelli, cet apprentissage est une étape décisive : orfèvres et peintres entretenaient alors des rapports étroits c'est encore Vasari qui l'écrit : le jeune garçon découvre la peinture, se passionne, et décide son père à le laisser suivre sa vocation ; il devient l'élève d'un frère carme plus ou moins en rupture de ban, Fra Filippo Lippi. Mais son œuvre de peintre restera marquée par cette première formation dans l'atelier d'un orfèvre : c'est là sans doute qu'il acquiert le goût des motifs « ciselés », le sens du trait incisif et délié, qui donnent une précision étrange à ses évocations les plus immatérielles.
Aucun document ne permet d'identifier à coup sûr les œuvres que Botticelli peignit chez Filippo Lippi. Mais dans la série des Vierge à l'Enfant visiblement dérivées des compositions du maître (Vierge à l'Enfant, à la National Gallery ; Madone des Guidi de Faenza, au Louvre), on peut distinguer plusieurs peintures où semblent affleurer les traits qui caractérisent les œuvres ultérieures de Botticelli : d'une part, une nuance de mélancolie, d'angoisse contenue dans l'expression attendrie de la Vierge contemplant son fils, qui donne un accent nouveau au thème élaboré par Donatello et si souvent traité après lui par les artistes florentins ; d'autre part, une insistance sur le contour, un souci du relief, du modelé, tout à fait étrangers à l'art de Filippo Lippi. Botticelli n'a certainement pas ignoré les travaux des peintres sculpteurs dont les ateliers étaient alors les plus actifs de Florence, Antonio del Pollaiuolo et Verrocchio. Leur influence est très nette dans la première œuvre attestée de Botticelli, La Fortezza, qu'il peignit en 1470 : c'est une jeune fille à l'air rêveur, à l'attitude indolente, mais le visage est modelé avec fermeté ; les détails de l'architecture, les ornements du costume, du diadème, de l'étrange armure sont travaillés avec une sûreté et une finesse extrêmes... Le tableau fait partie d'une série de sept peintures représentant les « Vertus » que le tribunal de la Mercanzia avait demandé en 1469 à Piero del Pollaiuolo. Mais celui-ci avait dû ensuite céder une partie de la commande à Botticelli, sur l'intervention de Tomaso Soderini, homme de confiance des Médicis, et probablement par la volonté de Laurent lui-même. Le vieux Cosme avait toujours protégé Fra Filippo Lippi, malgré sa vie agitée et quelque peu scandaleuse. Sans doute Botticelli était-il entré en contact dès sa jeunesse avec les maîtres de Florence. La faveur qu'ils lui marquèrent au début de sa carrière de peintre indépendant, établi désormais à son compte, allait se poursuivre jusqu'à la fin de sa vie.

Formation du style

Les deux petits panneaux représentant Judith revenant de Béthulie et Les Assyriens découvrant le cadavre d'Holopherne, probablement contemporains de La Fortezza, montrent Botticelli attentif aux mêmes leçons : les draperies flottantes qui enveloppent Judith et la servante dérivent de Verrocchio, le mouvement des silhouettes a son équivalent dans plusieurs compositions de Filippo Lippi. Mais leur démarche déjà est presque dansante. L'expression désenchantée de Judith, son geste nonchalant transposent le sujet biblique dans l'univers de poésie mélancolique où s'épanouit l'imagination du peintre. Les accords de couleurs, clairs et subtils pour la Judith, plus riches et plus sonores pour Holopherne, ajoutent à l'intensité lyrique des deux peintures.
L'enseignement de Filippo Lippi ne sera pas rejeté d'un coup. Dans la première Adoration des mages peinte par Botticelli vers 1470-1475, le groupe de la Vierge et de l'Enfant est très proche des compositions du moine sur le même sujet. L'apport personnel de Botticelli est ici la recherche d'une organisation rationnelle de la surface qu'il rythme d'éléments d'architecture, aux lignes fuyantes.

La perspective

Cette préoccupation de la perspective, commune aux artistes florentins de son temps, l'amènera peu après à renouveler l'ordonnance traditionnelle en largeur, qui permettait de traiter le sujet en multipliant, dans le cortège fastueux des rois, les portraits des donateurs, de leurs familiers, des personnages importants de la cité. C'est une composition centrée qu'adopte Botticelli pour L'Adoration des mages peinte en tondo vers 1476 et pour la célèbre Adoration des mages que lui commande, la même année sans doute, un riche financier dévoué aux Médicis, Guaspare di Zanobi del Lama. La première est agencée selon les volumes et les lignes obliques d'une haute architecture claire. Pour la seconde, Botticelli utilise à peine les ressources de la perspective : deux pans de murs à demi ruinés suffisent à indiquer la profondeur. Dans l'espace ainsi délimité, le peintre dispose habilement les personnages, dont beaucoup sont, selon la coutume, des portraits contemporains : le vieux Cosme de Médicis, Pierre et Jean ses fils, ses petits-fils Laurent et Julien, enfin le peintre lui-même, qui s'est représenté debout à l'extrémité droite du tableau. La chaude luminosité baignant la composition, l'harmonie des tons, où dominent les rouges et les ors, font de ce tableau un hommage aux Médicis, dont l'éclat rivalise, sur un autre mode, avec la brillante chevauchée peinte par Gozzoli en 1459 dans la chapelle de leur palais pour illustrer le même thème.

La Sixtine Peintures mythologiques pour les Médicis

Botticelli, dès maintenant, fait partie du cortège de leurs protégés et de leurs amis. Il a peint, l'année précédente, une Pallas sur l'étendard de Julien, le frère du Magnifique, pour une joute fameuse dont il sortit vainqueur. En 1478, après la conjuration des Pazzi et l'assassinat de Julien, Botticelli représente, sur le mur de la Douane, près du Palais Vieux, le châtiment des conjurés. À la même époque, il réalise pour un petit-neveu de Cosme, Lorenzo di Pierfrancesco, la première d'une série de compositions mythologiques, l'une des plus célèbres, l'une de celles où s'exprime le mieux la sensibilité de son imagination : Le Printemps. Les textes contemporains permettent d'en déchiffrer le symbole : c'est l'apparition merveilleuse des dieux protecteurs évoqués par les humanistes florentins autour du jeune Laurent, le règne de Vénus décrit par Politien, royaume où se complaît la grâce, où Zéphyr, lascif, vole derrière Flore, où l'herbe verte fleurit. Botticelli peint sur ce thème un jardin de rêve, où toutes les fleurs de Toscane s'épanouissent comme sur une tenture médiévale, tandis que la souplesse des lignes, l'ondulation des gestes suggèrent le rythme lent d'une chorégraphie quasi rituelle dont la qualité même du style accentue l'irréalisme. La subtile calligraphie suscite une interprétation personnelle et sensible du thème philosophique, en même temps qu'elle illustre, presque littéralement, les préceptes énoncés quarante ans plus tôt par Alberti : J'aime voir les chevelures... s'enroulant en volutes comme pour se nouer, et ondoyant dans l'air, semblables à des flammes qui tantôt s'entremêlent à la manière des serpents, tantôt s'élèvent et se dispersent.

L'inspiration religieuse

Botticelli ne reprendra que dix ans plus tard, toujours pour les Médicis, les thèmes inspirés de la mythologie. Le succès qu'il connaît à Florence lui impose de se consacrer essentiellement à la peinture religieuse. Là encore, une réaction toute personnelle devant le sujet, et en même temps le besoin d'en rechercher le sens le plus profond, le plus secret, donnent à ses œuvres un pouvoir expressif singulier. Il suffit, pour s'en rendre compte, de comparer le Saint Augustin qu'il peint en 1480 à l'église d'Ognissanti et le Saint Jérôme de Ghirlandaio, exécuté la même année, pour la même église. Celui-ci n'ajoute rien à l'image traditionnelle, élaborée par les peintres flamands, du pieux docteur dans son cabinet de travail minutieusement représenté. Botticelli, au contraire, a montré, dit Vasari, « la concentration, la subtilité aiguë qui est celle des intellectuels constamment absorbés par la réflexion sur les idées les plus hautes et les plus ardues ». Alors que Botticelli, pour autant que nous le sachions, fait ici probablement ses premières armes comme peintre de fresques, Ghirlandaio a déjà acquis une expérience et une réputation certaines en ce domaine : il a travaillé à Ognissanti dès 1472, à la collégiale de San Gimignano en 1475 et, la même année, il est allé décorer à Rome la bibliothèque de Sixte IV. Il sera tout naturellement parmi les artistes que le pape fera venir en 1481 pour réaliser les fresques de la chapelle qui porte son nom et dont la construction s'achève. Parmi les autres artistes chargés de l'entreprise, le Pérugin lui aussi a déjà travaillé à Rome pour Sixte IV. Mais Botticelli, comme Rosselli, le plus âgé du groupe, avait eu jusque-là une carrière purement florentine. Il n'en est pas moins arrivé à la pleine maturité de son talent. Le pape, en le choisissant, fut peut-être guidé par le désir d'être agréable aux Médicis avec lesquels il venait de se réconcilier après les démêlés violents qui s'étaient élevés lorsque avait été découverte la part prise par Sixte IV à la conjuration des Pazzi.
Le programme assigné aux peintres de la Sixtine développait un parallèle entre la vie du Christ et celle de Moïse. Certains épisodes pouvaient aisément coïncider, d'autres analogies étaient plus complexes et posaient des problèmes aux artistes chargés de les illustrer. Ce fut le cas des compositions dont fut chargé Botticelli : la première groupe sept épisodes de la jeunesse de Moïse ; une autre montre le châtiment des lévites Coré, Dathan et Abiron, qui s'étaient révoltés contre l'autorité d'Aaron ; la troisième enfin représente, sur la paroi opposée, la Tentation du Christ et le sacrifice de purification du lépreux. Botticelli a tenté de compenser la fragmentation des sujets par l'animation de chaque épisode et l'harmonie des rythmes. Des éléments, parfois secondaires, sont mis en valeur, comme fortuitement, et retiennent l'attention sans nuire au thème principal : ainsi le groupe des filles de Jéthro, la silhouette mouvante d'une jeune femme portant sur sa tête le bois destiné à l'autel, dans la scène du sacrifice. Certains visages sont des portraits, d'autres incarnent les créatures de rêve qui peuplent l'imagination du peintre : profils féminins encadrés de boucles blondes, adolescents perdus dans un songe indéchiffrable.
Les fresques de Botticelli à la Sixtine furent parmi les plus appréciées, écrit Vasari : le pape lui donna une grosse somme d'argent, qu'il s'empressa de dissiper avant de rentrer à Florence, aussi pauvre qu'il en était parti. Quoi qu'il en soit, le séjour de Botticelli hors de Florence n'a pas marqué l'évolution de son style. Il ne semble pas avoir réagi aux œuvres qu'il a pu voir au Vatican même, celles de Melozzo da Forli par exemple.

L'art antique

Quant aux monuments de l'ancienne Rome, il les a sans doute attentivement regardés, puisque l'arc de Constantin et le Septizonium de Septime Sévère apparaissent à la Sixtine dans la fresque du Châtiment des lévites. Mais on ne retrouve rien de semblable dans ses peintures ultérieures. L'art antique l'inspirera moins que les sujets tirés des textes historiques et littéraires remis en honneur par les humanistes florentins, dont il donnera d'ailleurs des interprétations, ou des transpositions, toutes personnelles.
Selon l'anonyme Magliabecchiano, Botticelli peignit durant son séjour à Rome une Adoration des mages qu'on a identifiée avec le tableau provenant de l'Ermitage, aujourd'hui conservé à la National Gallery de Washington collection Mellon. L'œuvre date en effet de cette période. La manière dont Botticelli traite ici le sujet révèle une maîtrise accrue dans la science de la composition. Elle démontre en fait les relations existant entre lui et Léonard de Vinci. Les deux peintres, si différents par leur tempérament et par leur génie, étaient pourtant amis. Léonard, dans son Traité, rapporte leurs discussions sur le paysage. Le tableau de Washington montre que Botticelli n'ignorait pas les nombreuses études de Léonard sur le thème de l'Adoration des mages et notamment les esquisses utilisées pour la peinture, demeurée inachevée, que lui avaient commandée les moines de Scopeto. La concentration de toute l'ordonnance autour du groupe de la Vierge et de l'Enfant, élément essentiel de la scène, vers lequel convergent les regards et l'émotion, les attitudes méditatives de certains personnages, les groupes de cavaliers à droite et à gauche sont autant d'échos de l'œuvre de Léonard.

Les thèmes néo-platoniciens L'atelier florentin

Celui-ci, en 1481, part pour Milan où l'appelle Ludovic le More. Botticelli retrouve à Florence son atelier, ses élèves, dont le nombre s'accroît, ses clients qui lui demandent surtout des Madones et des tableaux de dévotion. Ses travaux à Rome lui ont acquis pourtant une nouvelle réputation comme fresquiste : il reçoit, pour le palais de la Seigneurie, la commande d'un décor qu'il n'exécutera pas. Un peu plus tard, Laurent de Médicis le charge de peindre, avec Filippino Lippi et ses anciens compagnons de la Sixtine le Pérugin et Ghirlandaio, une série de compositions mythologiques, aujourd'hui détruites, dans une villa qu'il possédait près de Volterra. Pour juger donc de l'activité de Botticelli fresquiste durant cette période, il nous reste les scènes allégoriques de la villa Lemmi, maintenant au Louvre : une jeune femme recevant les dons de Vénus et des Grâces, un adolescent introduit dans le cercle des Arts libéraux. Pour illustrer ces thèmes néo-platoniciens, Botticelli, infiniment plus libre dans son expression qu'il ne l'était à la Sixtine, retrouve par la sérénité des compositions, par l'accord subtil des couleurs claires, l'atmosphère de grâce et de poésie qui est celle du Printemps. Il revient d'autre part aux compositions mythologiques. Après Mars et Vénus où l'on a vu parfois une allusion aux amours de Julien de Médicis et de Simonetta, il peint Minerve et le Centaure, symbole de la sagesse triomphant de la violence et du désordre : la robe de la déesse est semée d'anneaux surmontés d'un diamant, l'un des emblèmes médicéens. La Naissance de Vénus enfin, exécutée comme Le Printemps pour Lorenzo di Pierfrancesco, illustre un sujet antique bien connu, l'Aphrodite Anadyomène d'Apelle, décrite par Pline, puis par Politien. Botticelli y trouve le point de départ d'une évocation merveilleuse, soutenue par des modulations graphiques d'une virtuosité incomparable. L'attitude de la déesse est celle de la Vénus pudique souvent représentée dans la statuaire antique. Mais Botticelli lui a donné le visage de ses Madones, et celui de ses anges aux zéphyrs qui la poussent vers le rivage.

Vers l'irréalisme

Dans les grands retables qu'il peint à la même époque, l'acuité d'observation, le souci d'un certain réalisme dans l'individualisation des personnages ont cédé peu à peu la place à une stylisation presque maniériste qui vise, semble-t-il, à libérer la représentation de références terrestres trop précises pour la hausser au niveau idéal de la vision mystique. Sur le tableau de La Vierge à l'Enfant entre les deux saints Jean, peint en 1485, le visage de l'Évangéliste est buriné comme celui d'un vieillard dont la vie a été consacrée à l'étude et à la réflexion. Son compagnon, émacié, anguleux, est un ermite surgi du désert. L'année suivante, Botticelli prêtera ses traits au centaure dompté par Minerve, car les êtres qu'il peint deviennent ses propres créations, les habitants de son univers particulier. Dans le Retable de San Barnaba, un peu postérieur, le profil de sainte Catherine est celui d'une jolie Florentine, qui évoque à la fois la Vénus du tableau de Londres et la jeune femme recevant les dons des Grâces, sur la fresque du Louvre. Mais, dans l'ensemble, le tableau indique une évolution : le canon des figures s'allonge, les regards se perdent dans un rêve intérieur.
Pour Le Couronnement de la Vierge, peint sans doute vers 1488, pour l'autel de la corporation des orfèvres à Saint-Marc, Botticelli adopte une composition plus dépouillée : quelques éléments de paysage remplacent à l'arrière-plan la puissante architecture des tableaux de San Barnaba ; les attitudes des quatre saints, celles de la Vierge et de Dieu le Père sont devenues conventionnelles. L'émotion, l'effusion de spiritualité que lui inspire le sujet s'épanouissent dans la ronde des anges, dans le tourbillon qui emporte les silhouettes dansantes, soulève les draperies, éparpille les fleurs multicolores sous les rayons dorés de la gloire céleste.
Les prédelles accompagnant les grandes compositions religieuses offrent une simplicité de conception, une vivacité expressive qui subsistent malgré l'intervention fréquente des élèves. La prédelle du tableau de San Barnaba associe la fine grisaille d'un Christ au tombeau à des petites scènes esquissées en quelques traits et rehaussées de tons vifs : la Vision de saint Augustin, Salomé portant la tête de saint Jean et la Mort de saint Ignace.
Parallèlement à ces tableaux d'autel, les tondi de la Vierge reflètent la même évolution vers un lyrisme de plus en plus abstrait auquel s'ajoute un sentiment de mélancolie douloureuse, dont les Madones peintes au début de sa carrière offraient un premier accent. La Vierge du Magnificat 1482 est une harmonie parfaite de rythmes, de lignes et de couleurs, qui crée une atmosphère de spiritualité intense dans l'espace défini par la forme circulaire du tableau. Un paysage serein occupe le fond de la composition. Dans la Vierge à la grenade 1487, la signification profonde de la composition est donnée par le fruit symbolique évoquant la Passion du Christ. Le sentiment mystique s'exalte tandis que la densité des couleurs s'exprime dans un ruissellement d'or.

Botticelli et les arts mineurs

Botticelli consacre une partie de son activité aux arts mineurs. Il réalise des décors de tentures par des assemblages de tissus : c'est ainsi qu'il avait réalisé l'étendard de Julien en 1475. Selon Vasari, il aurait exécuté aussi un baldaquin pour l'église d'Or' San Michele et donné des modèles pour une croix processionnelle brodée. Les artisans, marqueteurs, ciseleurs, recherchent ses dessins. Mais c'est surtout dans la gravure florentine du temps, spécialement à la fin du siècle, qu'on trouve la marque de son influence.

De la poésie pure à l'angoisse Ligne et mouvement

En fait, dans la dernière partie de sa vie, à partir de 1490 environ, le caractère essentiellement linéaire du style de Botticelli s'accentue encore. Une calligraphie de plus en plus emportée répond à une inspiration de plus en plus fébrile. C'est la double évolution que montrent, après La Calomnie d'Apelle, vers 1490-1495, les panneaux illustrant L'Histoire de Lucrèce et celle de Virginie vers 1499, puis les Scènes de la vie de saint Zénobe, qui proviennent sans doute d'un cassone. Avec la Calomnie, Botticelli reprend, une fois encore, un thème antique, celui d'un célèbre tableau d'Apelle décrit par Lucien, qu'Alberti avait évoqué dans son Traité de peinture. La composition tout entière est traversée d'un élan frénétique, élan qui, dans les compositions narratives ultérieures, se brise et se disperse en tourbillons multiples.

Crise mystique

L'univers de poésie pure qui était celui de Botticelli semble envahi alors par le tumulte et les troubles que suscitent à Florence la prédication de Savonarole, la fuite des Médicis en 1494, la condamnation et le supplice du moine quatre ans plus tard. Vasari affirme que le peintre adhéra au mouvement des piagnoni, les disciples de Savonarole. Au-delà du drame que fut pour lui le départ des Médicis, ses protecteurs de toujours, puis la mort de Savonarole sur le bûcher, il ressentit profondément l'angoisse morale, les déchirements qui étaient ceux de tous les Florentins. C'est alors qu'il peint, après la Pietà torturée de la Pinacothèque de Munich, la Crucifixion allégorique, où s'opposent, derrière la croix, un panorama ensoleillé de Florence, protégée par Dieu le Père, et un paysage infernal peuplé de démons dans des nuages de fumée. Vers 1500-1501, Botticelli donne enfin, avec la Nativité mystique, une vision d'espérance retrouvée. Au-dessus de la crèche se déploie une ronde d'anges portant des rameaux d'olivier et les couronnes destinées aux élus, tandis qu'en bas de la composition, d'autres anges accueillent, les hommes de bonne volonté et les embrassent en signe de réconciliation. Dans le haut du panneau, Botticelli a placé une inscription, en lettres grecques, qui éclaire la signification du tableau et l'intention du peintre : Ce tableau a été peint par moi, Sandro, à la fin de l'année 1500, pendant les désordres d'Italie, dans la moitié du temps après le temps, selon le chapitre XI de saint Jean, dans la seconde douleur de l'Apocalypse, lorsque Satan fut déchaîné sur la terre, pour trois ans et demi. Puis selon le Cantique XII, il sera de nouveau enchaîné et nous le verrons foulé aux pieds comme sur ce tableau.

Les dessins

Parallèlement à ces dernières œuvres, d'une inspiration exaltée, Botticelli exécute, avec les peintres de son atelier, les nombreux tableaux de dévotion que réclame la piété populaire sensibilisée par la prédication et la mort du dominicain. En même temps, Botticelli achève les dessins de la Divine Comédie, que lui avait commandés, sans doute dès 1482, Lorenzo di Pierfrancesco. La comparaison avec les peintures réalisées à partir de cette date semble indiquer que les dessins pour L'Enfer ont été exécutés d'abord, tandis que, dans les illustrations du Purgatoire et du Paradis, des rapprochements peuvent être établis avec certains détails d'œuvres comme la Pietà ou la Nativité mystique. Les visions surgissent d'un espace totalement dématérialisé. Libéré des règles de la perspective et de la composition picturale, le peintre s'abandonne au pouvoir magique de la ligne, à la subtile cadence du graphisme pur, et fait naître, au-delà des références littérales au poème, l'illusion et l'extase
Il semble avoir achevé sa vie dans l'isolement, hors des courants artistiques nouveaux qui se dessinent à Florence. Il meurt, presque oublié, après avoir été le plus grand peintre de la cité, au moment où celle-ci connaissait un rayonnement prestigieux en Italie. Mais Botticelli avait suivi une voie trop personnelle pour que d'autres puissent l'emprunter après lui. Marie-Geneviève de LA Coste-Messelière

Œuvres

Le premier nu peint par Botticelli est masculin. Il s'agit du corps nu du général assyrien Holopherne décapité, découvert par ses aides de camp, deuxième panneau d'un diptyque dont le panneau gauche montre le retour de Judith suivie de sa servante portant la tête du général dans un panier. Le second nu du même peintre, masculin également, est un Saint Sébastien percé de flèches, montré en pied lié à une colonne, et auquel, pour la première fois, Botticelli fait observer une double arabesque. Dans ces deux œuvres, le sexe du personnage est dissimulé sous des voiles opportuns. Dans "La Naissance de Vénus", panneau peint une dizaine d'années plus tard, la déesse est représentée nue de face, en pied, grandeur nature. Commandé par Lorenzo di Pierfrancesco, parent de Laurent de Médicis, comme pendant du "Triomphe du Printemps" dont le Magnifique, son tuteur, lui avait fait cadeau, ce tableau était destiné à décorer sa villa de Castello, proche de Florence. Seuls pouvaient l'admirer les amis de son propriétaire, des néoplatoniciens amateurs de mythologie gréco-romaine et souvent collectionneurs de statues antiques, que la nudité ne pouvait choquer.
Botticelli représente dans cette œuvre une Vénus pudique, dont l'attitude est vraisemblablement inspirée par un bas-relief romain. Il montre la déesse sous les traits de Simonetta Vespucci, en dépit du fait que cette jeune femme était morte depuis au moins huit ans quand il a peint d'elle ce portrait idéalisé et très stylisé ! Déesse de la beauté et de l'amour, la Vénus nue de Botticelli est au contraire très chaste, se couvrant d'une main la poitrine, dissimulant de l'autre son pubis derrière une mèche de sa longue chevelure flottant au vent. En outre, le peintre a estompé la pointe des seins et le nombril de sa Vénus, et il lui a donné de plus un regard rêveur qui supprime toute équivoque de l'esprit du spectateur. Loin d'avoir voulu peindre une Venus Erotica, Botticelli a peint la Venus Humanitas des platoniciens, pour lesquels la contemplation de la beauté donnait aux hommes une image de la perfection divine. Une copie du personnage central de la Naissance de Vénus a été réalisé se découpant sur un fond brun par l'atelier de Botticelli, modèle dont devait s'inspirer ultérieurement Lorenzo di Credi pour peindre sa propre Vénus.
Botticelli peignit un dernier nu féminin environ vingt ans plus tard, la Vérité de sa Calomnie d'Apelle, pour laquelle il reprit la silhouette de Simonetta Vespucci telle qu'il l'avait représentée dans sa Naissance de Vénus, le corps observant la même double arabesque, une main levée pour indiquer le ciel, l'autre main dissimulant pudiquement son sexe.

Allégories

Ce peintre est connu pour ses allégories. Son étude de l'Antiquité gréco-romaine fait partie de ses humanités apprentissage. Peintre intellectuel dont le public est composé des courtisans d'un haut niveau de culture, autant que richissimes, il peint de nombreux tableaux sur le mode de la référence à la mythographie hellénique pour en tirer des allusions fines destinées à ses amateurs.
La Calomnie d'Apelle constitue un emblème de ce type de travaux.
Son thème général de travail est la représentation de la femme, sur laquelle il porte un regard nouveau, tout en la magnifiant et la rendant sublime : ses contemporains artistes n'ont jamais pu égaler une telle splendeur dans la finesse des traits et la représentation charnelle.

Thèmes religieux

Dans ses thèmes religieux signalons celui de ses sept œuvres sur le thème de l'Annonciation, celui de la Vierge à l'Enfant (la célèbre Madone du Magnificat).

Peintures

La Calomnie d'Apelle 1495
L'Adoration des mages 1475
Le Retour de Judith à Béthulie, reprise du thème biblique et hébraïque.
1467, La Vierge à l'Enfant avec un ange dite des Innocents
1468, La Vierge à l'Enfant avec un ange
1470, La Force
1470, La Vierge à la roseraie
1472, Le Retour de Judith à Béthulie
1472, La Découverte du cadavre d'Holopherne
1473, Saint Sébastien
1473, Portrait d'homme avec la médaille de Cosme de Médicis
1475, L'Adoration des mages de 1475
1475, Sainte Catherine d'Alexandrie, en portrait de Catherine Sforza, conservé au Lindenau-Museum de Altenburg Allemagne
1477-1478, Le Printemps, détrempe sur bois, 203 × 314 cm, musée des Offices, Florence
1478, Portrait de Julien de Médicis
1480, Portrait d'une jeune femme
1480, Saint Augustin dans son cabinet de travail, église Ognissanti, Florence.
1481/1485, La Madone du Magnificat, tondo, détrempe sur bois, diamètre 115 cm, musée des Offices, Florence
1481, L'Annonciation de San Martino alla Scala
1482, Scène de la vie de Moïse
1482, Le Châtiment de Coré
1482, La Tentation de Christ
1482, Pallas et le Centaure
1483, Vénus et Mars, détrempe sur bois, 69 × 174 cm, National Gallery, Londres
1483, Série de L'Histoire de Nastagio degli Onesti :
Premier épisode : Nastagio rencontre une dame et le cavalier dans le bois de Ravenne, musée du Prado, Madrid
Deuxième épisode : Assassinat de la dame, musée du Prado, Madrid
Troisième épisode : Le Banquet dans le bois, musée du Prado, Madrid
Quatrième épisode : Le Banquet dans le bois, palais Pucci, Florence
1485, La Naissance de Vénus, tempera faible sur toile, 172,5 × 278,5 cm, musée des Offices, Florence
1487, La Madone de Pomegranate
1489, L'Annonciation du Cestello
1493, L'Annonciation de la chiesa fiorentina di San Barnaba
après 1490, Lamentation sur le Christ mort, détrempe sur bois, 140 × 207 cm, Alte Pinakothek, Munich
1490, Saint Jérôme
1490-1500, Croce sagomata e dipinta (Crucifix chantourné et peint11), musée civique de Prato
1495, Portrait de Dante
1495, L'Abandonnée
1495, La Calomnie d'Apelle
1501, La Nativité mystique

Fresques et Chapelle Sixtine

Botticelli est appelé à Rome en 1481 par le pape Sixte IV pour exécuter trois fresques : le Châtiment de Coré, de Datan et Abiram (ou Punition des Rebelles), Les Épreuves de Moïse et La Tentation de Jésus.
Le Châtiment de Coré, de Datan et Abiram, ou Soulèvement contre la loi de Moïse ou encore La Punition des Rebelles, dernière fresque peinte par Botticelli à Rome : La fresque comprend trois scènes où Moïse apparaît représenté en vieillard à longue barbe blanche revêtu d’un manteau vert-olive recouvrant une tunique jaune :
à droite, les juifs se révoltent contre Moïse et menacent de le lapider, mais Josué se place devant lui pour le protéger ; les deux personnages représentés derrière Moïse sont le cardinal Alexandre Farnèse, futur pape Paul III, et Giulio Pomponio Leto.
au centre, les fils d’Aaron, et des Lévites qui ont pratiqué un encensement interdit s’effondrent, face au grand-prêtre Aaron, portant la tiare et une tunique bleues.
à gauche, les meneurs subissent la punition divine : la terre s'entrouvre sous leurs pieds ; au-dessus, les deux fils innocents de Coré sont épargnés et portés par un nuage ; en arrière-plan, l’homme en noir est un autoportrait de Botticelli.

Autres fresques


Villa Tornabuoni Lemmi di Careggi : La fresque Vénus et les Grâces offrant des présents à une jeune fille ; celle-ci serait Matteo di Andrea Albizzi, qui a épousé Niccolo Tornabuoni en 1484. La seconde fresque, également sauvée sur les trois, représente Lorenzo reçu par le cortège des Arts Libéraux (conservées aujourd'hui au musée du Louvre.

Enluminure

Divine Comédie illustrée par Botticelli.
Illustration par 92 dessins de 47 cm × 32 cm d'un manuscrit de la Divine Comédie de Dante commandé par Lorenzo di Pierfrancesco de Médicis, un des cousins de Laurent de Médicis (pointe de métal sur parchemin, repris à l'encre et mis partiellement en couleurs. Une partie de ces illustrations a appartenu à la reine Christine de Suède et se trouve actuellement au Vatican, l'autre partie est parvenue au Cabinet Royal des Dessins et Estampes de Berlin.

Citations

Sandro fut un dessinateur hors du commun et bien des artistes s'ingénièrent à se procurer ses dessins.
Giorgio Vasari Sandro Botticelli, peintre florentin
Ce sont plutôt des hommes et des femmes de condition mêlée et incertaine, toujours attirants, revêtus parfois par la passion d'un caractère de beauté et d'énergie, mais attristés sans cesse par l'ombre que projettent sur eux les grandes choses auxquelles ils se refusent.
Walter Pater, parlant des personnages de Botticelli dans un essai qui tira le peintre de l'oubli :la Renaissance 1873.
Le premier il osait, après avoir peint la Vierge, peindre Vénus presque aussi chaste et aussi douce.
Émile Bertaux 1869-1917, historien d'art français la Grande Encyclopédie, 1885-1902.


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#75 Montpellier
Loriane Posté le : 12/05/2015 18:20


#76 Re: L'atelier de Mafalda
mafalda Posté le : 30/04/2015 13:09
Citation :

mafalda a écrit :
Bonjour, merci emma: oui mes peintures correspondent souvent à mes poèmes. bonne journée!


#77 Re: L'atelier de Mafalda
mafalda Posté le : 30/04/2015 13:03
Bonjour, merci emma: oui mes peintures correspondent souvent à mes poèmes. bonne journée!


#78 Eugéne Delacroix 1
Loriane Posté le : 24/04/2015 20:19
Le 26 avril 1798 naît Ferdinand-Victor-Eugène Delacroix

le 7 floreal an VI, à Charenton-Saint-Maurice Seine, mort, à 65 ans, le 13 août 1863 à Paris, peintre majeur du romantisme en peinture, mouvement arrivé en France au début du XIXe siècle. Il a pour maître Pierre-Narcisse Guérin. Il appartient au mouvement artistique Romantisme, Influencé par Géricault, Antoine-Jean Gros, Pierre Paul Rubens, Francisco de Goya. Ses Œuvres les plus réputées sont La Mort de Sardanapale; Femmes d'Alger dans leur appartement; Scène des massacres de Scio; La Liberté guidant le peuple

En bref

Delacroix naît dans un milieu parisien relativement aisé, cultivé et artistique. Il descend, par sa mère, de certains des ébénistes parisiens les plus célèbres du XVIIIe siècle Jean-François Œben notamment, et son père a eu une brillante carrière d'administrateur puis d'homme politique sous l'Ancien Régime et la Révolution, avant de terminer préfet de l'Empire. Mais l'un et l'autre sont morts avant son adolescence, et si Delacroix maintient toute sa vie des liens de famille assez étroits avec son frère et sa sœur aînés, plus âgés, ainsi que de nombreux cousins et neveux, il n'en reste pas moins, fondamentalement, ce qu'il a été très tôt, un solitaire, fidèle toutefois en amitié, comme d'ailleurs aux bonnes fortunes. L'homme, cultivé, musicien, curieux, imprégné des classiques, amateur de littérature contemporaine, était certainement très séduisant, et ceux qui l'ont approché ont vanté sa conversation, son esprit, son intelligence et sa hauteur de vues. Il avait tout pour briller dans le monde, mais ne s'y dispersa pas, retenu par des ennuis de santé précoces et une ardente volonté de travail qui est l'une des marques les plus affirmées de son caractère volontaire. De ses débuts dans le salon du peintre Gérard jusqu'aux réceptions de Napoléon III aux Tuileries, il sut cependant rester sociable et nouer des relations suivies dont il avait personnellement besoin (comme en témoigne par exemple son attachement à Chopin), mais qui servirent aussi sa carrière : il dut de partir pour le Maroc à l'actrice Mlle Mars, et à des arrangements de loges et d'alcôves. Les honneurs, sinon la reconnaissance unanime de la critique lui sont plutôt tardivement venus. Il les a acceptés non pour lui-même, mais pour l'idée, très haute, qu'il se faisait de la peinture, et de son œuvre, à laquelle il a consacré toute son existence.
"Quand j'ai fait un beau tableau, je n'ai pas écrit une pensée. C'est ce qu'ils disent. Qu'ils sont simples ! Ils ôtent à la peinture tous ses avantages. L'écrivain dit presque tout pour être compris. Dans la peinture, il s'établit comme un pont mystérieux entre l'âme des personnages et celle du spectateur. Il voit des figures, de la nature extérieure ; mais il pense intérieurement, de la vraie pensée commune à tous les hommes. "Ces quelques phrases du Journal, écrites par Delacroix en 1822, sont révélatrices des malentendus qui l'ont toujours entouré. Attaqué de son vivant pour son style et la facture de ses œuvres, qui lui valurent ensuite d'être considéré comme un précurseur génial et comme un maître par des artistes aussi divers que Courbet, Degas, Cézanne, Signac ou Picasso, il déroute aujourd'hui par ce qui le rattache au camp classique, une peinture qui a toujours revendiqué et assumé la notion de sujet. C’est pourtant peut-être cette tension entre novation et tradition, constante chez lui mais qui n'est apparue clairement qu'avec le recul du temps ses contemporains retenant surtout ses audaces formelles, qui doit le faire ranger parmi les plus grands, comme l'a si bien exprimé Baudelaire dans l'article qu'il lui a consacré en 1863 : « La Flandre a Rubens ; l'Italie a Raphaël et Véronèse ; la France a Lebrun, David et Delacroix. Un esprit superficiel pourra être choqué, au premier aspect, par l'accouplement de ces noms qui représentent des qualités et des méthodes si différentes. Mais un œil spirituel plus attentif verra tout de suite qu'il y a entre tous une parenté commune, une espèce de fraternité ou de cousinage dérivant de leur amour du grand, du national, de l'immense et de l'universel.
Toujours davantage replié sur lui-même, il jette dans la peinture les forces que lui laisse une laryngite tuberculeuse contractée vers 1835. Les compositions de la fin de sa vie sont souvent en diagonale, comme la Montée au calvaire Salon de 1859 ; certaines reprennent le thème favori de la femme victime et suppliante : Desdémone aux pieds de son père 1852, inspirée non par Shakespeare mais par l'opéra de Gioacchino Rossini, l'Enlèvement de Rébecca 1858, tableau après lequel il n'expose plus au Salon tant les critiques sont virulentes- sauf celle de Baudelaire, son génial défenseur.
Le ton philosophique perceptible dans les grandes décorations est aussi manifeste dans un souci de représenter l'impuissance de l'homme face aux éléments. En 1840, Delacroix s'est inspiré du Don Juan de Byron pour son Naufrage de don Juan Louvre, isolé entre ciel et terre. À partir de 1853, il représente sept fois Jésus sur le lac de Génésareth, opposant au déchaînement des flots, qu'il aime tant observer à Valmont ou à Dieppe, et à l'affolement des disciples le sommeil apaisé du Sauveur. L'ambiance est plus élégiaque, la composition plus passante, les couleurs plus subtiles dans les dernières œuvres comme Ovide chez les Scythes 1862, sujet déjà traité au Palais-Bourbon.
Ses forces déclinent, mais son imagination garde sa souveraineté ; peu avant sa mort, il confie à sa vieille servante, témoin de tant d'efforts, d'enthousiasmes, de désenchantements : "Si je guéris, je ferai des choses étonnantes."
Bientôt, l'impressionnisme exploitera toutes les libertés en germe dans l'œuvre du maître, et Paul Cézanne pourra dire à propos des Femmes d'Alger :" Nous y sommes tous, dans ce Delacroix…".

Sa vie

Il naît au 2 rue de Paris1 actuelle 29, rue du Maréchal Leclerc à Charenton-Saint-Maurice aujourd'hui Saint-Maurice dans le Val de Marne, en proche banlieue parisienne. Sa maison natale, une grande demeure bourgeoise du xixe siècle, existe toujours. Inscrite à l'Inventaire Supplémentaire des Monuments Historiques, depuis 1973, elle a été transformée en bâtiment municipal en 1988 et abrite désormais la médiathèque de Saint-Maurice. Eugène Delacroix est le quatrième enfant de Victoire Œben 1758-1814 et de Charles-François Delacroix 1741-1805.
Charles-François Delacroix, a débuté comme secrétaire de Turgot, Intendant de la généralité de Limoges qu'il a suivi à Paris. Député de la Marne le 3 septembre 1792, sous la Convention, il vote la mort du roi, comme le peintre David. Il devient tout d'abord ministre des Affaires extérieures, du 4 novembre 1795 au 18 juillet 1797, ensuite ministre en Hollande du 6 novembre 1797 à juin 17982. Rallié à l'Empire, il est nommé préfet de Marseille, le 2 mars 18002, puis trois ans plus tard, le 23 avril 1803 3 Floréal, An XI, préfet de la Gironde où il meurt le 4 novembre 1805 et où il repose, au cimetière de la Chartreuse.
Sa mère, née en 1758, descend d'une famille d'ébénistes de renom les Œben. Le père de celle-ci, Jean-François Œben 1721-1763 est le célèbre ébéniste de Louis XV. Elle est également apparentée aux Riesener par le remariage de sa mère, en 17663, avec l'ébéniste Jean-Henri Riesener 1734-1806. De cette seconde union nait le 6 août 1767 Henri-François Riesener, peintre, demi-frère de Victoire et oncle d'Eugène Delacroix. Elle meurt le 3 septembre 18144, en le laissant dans un grand dénuement5.
Le couple a quatre enfants : trois garçons et une fille. Charles-Henri Delacroix, l’aîné, naît le 9 janvier 1779 et fait une très belle carrière dans les armées impériales. Promu maréchal de camp honoraire en 1815, il est démobilisé avec le grade de général mais en qualité de demi-solde. Leur second enfant est une fille, Henriette. Elle naît le 4 janvier 1782 et meurt le 6 avril 1827. Elle a épousé le 1er décembre 1797, Raymond de Verninac-Saint-Maur 1762-1822, un diplomate dont elle a un fils, Charles de Verninac 1803-1834, futur neveu d'Eugène. C'est elle qui a recueilli son frère à la mort de leur mère en 1814.
À la demande de son époux, David fait son portrait musée du Louvre, en 1799, dans un genre qu'il développe au cours des dernières années de la Révolution, c'est-à-dire le modèle assis, coupé aux genoux, sur fond uni. Son mari fait également sculpter par Joseph Chinard 1756-1813 son buste en Diane chasseresse préparant ses traits 1808, musée du Louvre.
Son deuxième frère, Henri, né en 1784, est tué le 14 juin 1807, à la bataille de Friedland. Le règlement de la succession maternelle ruine la famille Delacroix. Ce désastre engloutit toute la fortune des enfants une propriété, achetée par la mère de l'artiste afin de couvrir une créance, doit être vendue à perte.

Controverse sur la paternité de Charles Delacroix

Selon certains auteurs, le géniteur d'Eugène Delacroix aurait été Talleyrand10. Cette opinion disputée se base en partie sur l'état de santé du père du peintre quelques mois avant sa naissance. Charles-François Delacroix, ministre des Affaires extérieures en 1795, remplacé par Talleyrand le 16 juillet 1797, souffrait depuis quatorze ans d'une volumineuse tumeur testiculaire. Le chirurgien militaire Ange-Bernard Imbert-Delonnes 1747-1818 publia en décembre 1797 une brochure à propos de l'ablation le 13 septembre 1797 de ce sarcocèle. Cette opération constituait une première médicale. Le bulletin, communiqué à l'Institut, indique que l'opération a réussi et que le citoyen Charles Delacroix fut complètement rétabli au bout de soixante jours. Eugène Delacroix nait sept mois après l'intervention. Cependant, pour A. Camelin, la tumeur de Charles Delacroix n'était pas nécessairement un obstacle à la procréation.
S'il y a de sérieuses raisons de penser que Charles-François Delacroix n'a pas pu être son géniteur, celles qui font de l'artiste un fils naturel de Talleyrand sont moins solides. Caroline Jaubert évoque en 1880 cette rumeur dans la description d'une scène de salon qui aurait eu lieu vers 1840. Pour plusieurs historiens comme Raymond Escholier entre le masque du prince de Bénévent et celui de Delacroix il existe une étonnante ressemblance ... les traits de Delacroix ne rappellent ni ceux de son frère le général, ni ceux de sa sœur Henriette ...volà bien des chances pour qu'Eugène Delacroix ait été un de ces fils de l'amour, doués si souvent de dons prestigieux. Cependant Talleyrand était blond et pâle, alors que, décrivant leur ami Eugène Delacroix à la chevelure de jais, Baudelaire parle d'un teint de Péruvien et Théophile Gautier d'un air de maharadjah.
Emmanuel de Waresquiel rappelle l'absence de sources sérieuses à cette paternité supposée et conclut : Tous ceux qui ont aimé à forcer le trait de leur personnage, ... se sont laissé tenter, sans se soucier du reste, ni surtout des sources ou plutôt de l'absence de sources. Une fois pour toutes, Talleyrand n'est pas le père d'Eugène Delacroix. On ne prête qu'aux riches…
Talleyrand est en tous cas reconnu comme un proche de la famille Delacroix et l'un des protecteurs occultes de l'artiste. Il aurait facilité l'achat, pour une somme de 6 000 francs, des Massacres de Scio, présenté au Salon de 1824 et aujourd'hui au musée du Louvre, par le baron Gérard. Le petit-fils adultérin de Talleyrand, le duc de Morny, président du corps législatif et demi-frère utérin de Napoléon III, fit de Delacroix le peintre officiel du Second Empire, bien que l'empereur lui préférât Winterhalter et Meissonnier. L'ombre tutélaire de Talleyrand s'étend à travers Adolphe Thiers, dont il est le mentor. L'appui de Thiers semble avoir aidé Delacroix à obtenir plusieurs commandes importantes. Il obtient notamment la décoration du Salon du Roi, au Palais Bourbon, et une partie du décor de la Bibliothèque du Sénat, au Palais du Luxembourg.
Cette protection n'établit cependant pas une paternité naturelle, et Maurice Sérullaz évite de se prononcer à ce sujet tandis que de nombreux autres refusent cette hypothèse, la frontière entre une ressemblance réelle et le phénomène de paréidolie étant ténue.
Au-delà de l'intérêt de curiosité, les opinions sur cette controverse reflètent l'importance que les commentateurs veulent attribuer, soit au talent individuel et au caractère, soit aux relations sociales et familiales, soit même à l'hérédité, dans le succès de Delacroix.

Études et formation

À la mort de son père, Eugène n'a que 7 ans. La mère et le fils quittent alors Bordeaux pour Paris. En janvier 1806, ils habitent au 50 rue de Grenelle, dans l'appartement d'Henriette et de Raymond de Verninac. D'octobre 1806 à l'été 1815, Delacroix fréquente un établissement d'élite, le Lycée Impérial actuel lycée Louis-le-Grand où il reçoit une bonne instruction.
Ses lectures sont classiques : Horace, Virgile, mais également Racine, Corneille et Voltaire. Il y apprend le grec et le latin. Les nombreux dessins et croquis griffonnés sur ses cahiers attestent déjà de ses dons artistiques. C'est au Lycée Impérial qu'il rencontre ses premiers confidents : Jean-Baptiste Pierret 1795-1854, Louis 1790-1865 et Félix 1796-1842 Guillemardet, et Achille Piron 1798-1865. Ils partagèrent sa vie de bohème et lui restèrent fidèles jusqu'à la fin de sa vie.

Éducation musicale

Il reçoit aussi une éducation musicale précoce, prenant des leçons avec un vieil organiste1, qui adorait Mozart. Ce maître de musique, qui a remarqué les talents de l’enfant, recommande à sa mère d’en faire un musicien. Mais, la mort de son père en 1805 met fin à cette possibilité. Cependant, toute sa vie, il continuera à participer à la vie musicale parisienne, recherchant la compagnie des compositeurs, des chanteurs et des instrumentistes : Paganini jouant du violon 1831, Collection Philipps de Washington.
En 1815, son oncle, Henri-François Riesener, le fait entrer dans l'atelier de Pierre-Narcisse Guérin où il a pour condisciples Paul Huet, Léon Cogniet, Ary et Henry Scheffer, et Charles-Henri de Callande de Champmartin. C'est également dans son atelier qu'il fait la connaissance de Théodore Géricault, de sept ans son aîné, qui eut une influence capitale sur son art. Guérin leur enseigne les principes de la représentation néo-classique de l'ancienne école : primauté du dessin sur la couleur, retour à l'Antique, beauté des statues chères à l'Allemand Winckelmann, auteur de l'Histoire de l'art de l'Antiquité 1764. Toutefois, ce maître n'est pas totalement fermé aux idées nouvelles. Son enseignement est à la fois classique et libéral.
En mars 1816, Delacroix entre aux Beaux-Arts également chez Guérin où l'enseignement est moins onéreux qu'en atelier privé. Il y poursuit son apprentissage en privilégiant le dessin et la copie des maîtres. Grâce à sa carte de travail qu'il acquiert le 13 juillet 1816, pour le Cabinet des Estampes de la Bibliothèque Nationale, il copiera pendant plusieurs années, des manuscrits d'après des recueils de costumes du Moyen Âge. Ses résultats aux concours et aux examens de l'École des beaux-arts ne lui laissent pas espérer un séjour romain. En 1820, il tente le Prix de Rome où il échoue à la première partie. Parallèlement, il trouve des petits travaux dessin industriel, décoration d'appartements, costumes de théâtre, la faible rente de l'héritage ne suffisant pas à subvenir à ses besoins.

Le peintre romantique

La vocation artistique de Delacroix s'est manifestée assez tôt, dès ses années de collège, peut-être cristallisée par l'exceptionnel rassemblement d'œuvres d'art visibles alors au Louvre. Il entra dans l'atelier de Pierre-Narcisse Guérin en 1816, et les deux ou trois années de formation qui suivirent ont sans aucun doute été déterminantes. Son apprentissage a été celui d'un peintre classique. Il a exécuté nombre d'académies, dessiné et copié d'après l'estampe ou l'original, comme l'avait fait avant lui Géricault. C'est aussi chez Guérin qu'il a appris à maîtriser une technique picturale sans cesse reprise, perfectionnée et même théorisée, le mélange des pigments, l'usage des liants et des siccatifs, bref le métier de peintre qui ne lui fera jamais défaut, au contraire de tant d'artistes romantiques qui ruineront leurs toiles par un usage excessif du bitume ou un mauvais emploi des couleurs et des vernis. Seule la peinture murale lui occasionnera des problèmes sur ce point, bien plus d'ailleurs par la disposition interne des édifices qu'il aura à décorer que par méconnaissance pratique des contraintes de la peinture à la cire ou de la fresque. Il apprend également l'aquarelle, fait ses premiers essais de gravure et de lithographie, tout en se liant à un milieu artistique jeune et ouvert, où se détachent deux personnalités : Géricault, son ancien dans l'atelier de Guérin, qu'il considère très vite comme un modèle, et Bonington, qu'il rencontre au Louvre, avec lequel il travaille, séjourne à Londres et en Grande-Bretagne en 1825, renforçant grâce à d'autres camarades, les frères Fielding, sa connaissance de l'art et de la littérature d'outre-Manche, qui lui fournira tant de sujets.
Trois tableaux, exécutés, sans avoir été autrement commandés, uniquement en vue du Salon, vont rapidement imposer le nom de Delacroix au public et à la critique. La Barque de Dante 1822, Scènes des massacres de Scio 1824, La Mort de Sardanapale 1827-1828, par leur sujet, par leur format, par l'ambition artistique qu'ils manifestent, par les polémiques qu'ils déclenchent font de lui, en moins de six ans, un des artistes français les plus en vue, mais pas des moins controversés. Le premier envoi avait été remarqué, sans plus, et immédiatement acheté par les Musées royaux. Le deuxième, exposé en même temps que Le Vœu de Louis XIII d'Ingres, avait frappé les imaginations par son côté dramatique et morbide, la franchise de l'exécution qui rappelait aussi bien les Vénitiens que les peintres britanniques contemporains, et la portée politique du sujet, évidente en plein mouvement philhellène. Mais la composition en restait somme toute relativement classique et maîtrisée, et l'on pouvait y distinguer l'influence manifeste de Gros. Le scandale survint avec Sardanapale, lointainement inspiré de Byron. Le mouvement romantique s'étendait dans les arts graphiques en ce moment précis, comme il l'avait fait précédemment dans le domaine littéraire, en s'opposant délibérément à tous les canons du beau idéal prôné par les tenants de l'esthétique néo-classique. Delacroix, par la violence du sujet dramatique et morbide qu'il avait en partie inventé, par la liberté qu'il avait prise dans son exécution, tant du point de vue de la composition que dans l'usage de la couleur, parut pousser jusqu'à l'outrance les caractères de la nouvelle école. Alors même que celle-ci s'imposait définitivement, avec des artistes plus sages comme Horace Vernet, Paul Delaroche ou Eugène Devéria, son tableau, objet de toutes les attaques, ne fut pratiquement pas défendu. Le peintre reçut une admonestation de l'administration des Beaux-Arts Sardanapale ne devait entrer au Louvre, par achat, qu'en 1921, sans pourtant être exclu des commandes officielles ou prestigieuses : La Bataille de Poitiers 1829 pour la duchesse de Berry, Le Cardinal de Richelieu disant sa messe 1828 pour la galerie du Palais-Royal rassemblée par Louis-Philippe et La Mort de Charles le Téméraire ou Bataille de Nancy, mort du duc de Bourgogne, Charles le Téméraire, 1831, esquisse peinte en 1828, sujets révélateurs du goût ambiant pour le Moyen Âge et le XVIIe siècle, et dont Delacroix est tout aussi friand comme de ceux qui sont tirés de Walter Scott, de Byron, de Shakespeare ou de Goethe il exécute une suite de lithographies sur Faust entre 1825 et 1828 et sur Hamlet entre 1836 et 1843. Cette fin de la Restauration est en fait sa véritable période romantique, celle où il va le plus loin dans la rupture avec les principes classiques, et où il se rapproche le plus de certains de ses contemporains, tant par les thèmes qu'il traite que par la facture de ses tableaux. C'est dans cette perspective qu'il faut replacer l'influence très perceptible d'artistes britanniques comme Lawrence ou surtout Bonington, sensible parfois à tel point que l'attribution de certains tableaux a oscillé entre les deux amis.
Delacroix, toutefois, n'a jamais, même à ce moment, totalement renié l'héritage classique. Il revendique simplement une autre filiation que celle, communément reconnue de son temps, qui va de Raphaël aux peintres italiens du Seicento, puis de Poussin à David, artistes pour lesquels il éprouvait d'ailleurs une vive admiration. Mais ses vrais maîtres spirituels, ses modèles, demeurent les coloristes Titien, Véronèse, Rubens. Encore faut-il souligner que le dessin reste pour lui essentiel, comme en témoignent d'innombrables et souvent admirables feuilles, qui révèlent, au-delà de l'aspect strictement utilitaire, une pratique assidue, presque une ascèse. En revanche, il ne lui soumet pas totalement la composition, comme a pu le faire Ingres, dont le systématisme en la matière lui était insupportable. Il est enfin pour lui un autre point capital dans la mise en œuvre d'un tableau, le sujet. Son Journal est ainsi parsemé d'indications mises en réserve, au fil de la plume, où l'Antiquité et la mythologie se mélangent à la littérature classique ou contemporaine, et la religion à l'histoire.
Le 28 Juillet, ou la Liberté guidant le peuple sur les barricades, une allégorie de faits contemporains à la composition dynamique mais équilibrée, probablement l'une de ses toiles les plus populaires reprise, en France, dans les timbres et les coupures bancaires exposée au Salon de 1831, synthétise bien ces diverses tendances. Aussi son côté subversif réside-t-il moins dans les aspects formels bien qu'on lui ait reproché son réalisme et l'absence d'idéalisation dans la figure de la Liberté que dans la portée politique jugée trop radicale : si le tableau fut acheté par l'État, il n'apparut jusqu'à la IIIe République que par intermittences sur les cimaises du musée du Luxembourg, puis du Louvre.

L’apprentissage de l’aquarelle et le voyage en Angleterre

C'est en 1816 que Delacroix rencontre Charles-Raymond Soulier, aquarelliste amateur anglophile, revenu d'Angleterre et influencé par les artistes anglais, notamment Copley Fielding 1787-1855 dont il est un ancien élève. Grâce à cet ami et à Richard Parkes Bonington, Delacroix se familiarise avec l'art de l’aquarelle, qui le libère ainsi du carcan académique enseigné aux Beaux-Arts. Pour les Britanniques, l’aquarelle n’est pas qu’une peinture à l’eau. Ils l’associent aussi à la gouache et à divers procédés, tel l’emploi des gommes, de vernis et de grattages. Charles Soulier lui enseigne également les rudiments de la langue anglaise
Du 24 avril à la fin août 1825, il effectue un voyage en Angleterre où il découvre le théâtre de Shakespeare, en assistant aux représentations de Richard III, Henri IV, Othello, Le Marchand de Venise et La Tempête avant qu'une troupe anglaise se déplace à Paris, deux ans plus tard le 9 septembre 1827. Il assiste également à une adaptation audacieuse du Faust 1773-1790 de Goethe 1749-1832. Pour Delacroix, la littérature et le théâtre seront une source importante d'inspiration, tout au long de sa carrière : Hamlet et Horatio au cimetière 1835, Francfort et Hamlet et les deux fossoyeurs 1859, musée du Louvre. Ces nouveaux sujets se mêleront jusqu’à sa mort aux thèmes orientaux, historiques ou religieux. À partir de ce voyage, la technique de l'aquarelle acquiert une importance dans son œuvre. Elle lui sera d'une grande aide lors de son voyage en Afrique du Nord, pour pouvoir en restituer toutes les couleurs.

Les débuts de la carrière de Delacroix Ses débuts en peinture 1819-1821

En 1819, Delacroix aborde pour la première fois la décoration avec la salle à manger de l’hôtel particulier de M. Lottin de Saint-Germain, situé dans l’île de la Cité. Les dessus de porte, qu’il exécute dans le style pompéien, seront terminés avant mars 1820. De cet ensemble, aujourd’hui disparu, il ne reste que les dessins et projets, personnages, scènes allégoriques ou mythologiques, déposés au musée du Louvre.
Il exécute également le décor de la salle à manger de l'hôtel particulier que le tragédien Talma se faisait construire, au 9 rue de la Tour-des-Dames, à Montmartre. Cette décoration lui a été confiée en 1821 et a pour sujet : les quatre saisons en dessus de porte, dans le style gréco-romain dont l'inspiration vient des fresques d'Herculanum, comme précédemment pour celles de M. Lottin. Le Louvre a en sa possession un certain nombre de dessins préparatoires et de projets, le reste étant conservé dans une collection particulière à Paris.
Ses premiers tableaux de chevaux sont deux retables religieux41,5, inspirés des peintres de Renaissance :
La Vierge des moissons 1819, Église St Eutrope d'Orcemont, près de Rambouillet, influencé par les Madones florentines41 de Raphaël 1483-1520, notamment La Belle jardinière 1507-1508, musée du Louvre.
La Vierge du Sacré-Cœur 1821, Cathédrale d'Ajaccio, rappelle Michel-Ange 1475-1564, par l’aspect massif et statique de la figure de la Vierge. Ce retable a été commandé, à l’origine, à Géricault, par le ministère de l'Intérieur, pour la cathédrale Saint-Pierre de Nantes. Peu intéressé par le sujet, celui-ci le sous-traite à Delacroix, qui avait des besoins pressants d’argent. La substitution ne sera révélée qu’en 1842, par Batissier, dans un article publié dans La Revue du XIXe siècle.
La révélation d’un talent 1822-1824

La Barque de Dante ou Dante et Virgile aux Enfers

En 1822, Delacroix, désireux de se faire un nom dans la peinture et de trouver une issue à ses difficultés financières, se présente pour la première fois au Salon officiel, avec La Barque de Dante ou Dante et Virgile aux Enfers que l’État achète pour 2 000 francs au lieu des 2 400 francs demandés par le peintre. Les réactions de la critique sont vives, voire virulentes, comme celles d'Étienne-Jean Delécluze, défenseur de l'école davidienne, qui parle d’une vraie tartouillade, dans le Moniteur du 18 mai. Cependant, Adolphe Thiers, jeune journaliste, écrit dans le Constitutionnel du 11 mai, un article élogieux qui parle de l’avenir d’un grand peintre. Quant à Antoine-Jean Gros, qui admire La Barque de Dante, il qualifie le peintre de Rubens châtié.
Ayant défini son sujet très tardivement à la mi-janvier, Delacroix doit travailler dans l'urgence afin d’être prêt pour exposer au Salon Officiel, dont l'inauguration est le 24 avril. Pour cela, il utilise des vernis qui, en permettant un séchage plus rapide des couleurs, compromettent la conservation de sa toile. Les couches sombres sous-jacentes en séchant plus vite que les couches claires en surface provoquent d’énormes craquelures et gerçures. Très attaché à ce tableau, il finit par obtenir, en février 1860, l'autorisation de le restaurer lui-même46. En agissant ainsi, il veut prouver qu’il est un vrai peintre, en montrant qu’il maîtrise les différentes parties de son art : le nu, le drapé, l’expression.
Le thème, tiré du chant VIII de l'Enfer de Dante, est inédit pour l’époque. La connaissance superficielle, que ses contemporains ont de l’œuvre de Dante, font qu’ils illustrent toujours les mêmes épisodes : l’histoire d’Ugolin Enfer, chant XXXIII, Paolo et Francesca Enfer, chant V, et La Barque de Charon Enfer, chant III. La nouveauté de Delacroix s’exprime donc par le choix du sujet et par le format utilisé, pour cette peinture à sujet littéraire. Jusqu’à présent, ce format était réservé pour des peintures à sujets religieux ou mythologiques.
Pour ce tableau, les influences sont multiples. Il faut d'abord noter celle du Radeau de la Méduse 1819, musée du Louvre de Géricault : une vue de gros plan, une embarcation, des flots déchaînés. Si la critique signale des ressemblances entre La Barque de Dante et l'œuvre de Géricault, c'est pour mieux en diminuer l'importance. Ensuite, c'est l'emprise de Michel-Ange 1475-1564 qui apparaît avec les musculatures imposantes des damnés rappelant l'un des Deux Esclaves du Louvre et de la femme dérivée d'un prototype masculin. Celle de l’Antique vient après : la figure de Phlégyas, le nocher, chargé de conduire Dante et Virgile jusqu’à la ville infernale de Dité, renvoie au Torse du Belvédère IVe av. J.-C., Musée Pio-Clementino à Rome. Et pour finir, il faut également parler de l'influence de Rubens, avec les naïades du Débarquement de Marie de Médicis à Marseille 1610, musée du Louvre, dont il s'inspire pour la coloration, par petites touches de couleurs pures juxtaposées, des gouttes d’eau sur les corps de damnés. D'ailleurs, il en a fait une esquisse : Torse d'une sirène, d'après le Débarquement de Marie de Médicis Kunstmuseum de Bâle.
C'est sous l'influence de Géricault et les encouragements de Gros que dans les années 1820, Delacroix s'intéresse aux chevaux et multiplie les études d'après nature. À la date du 15 avril 1820, il note dans son journal : Il faut absolument se mettre à faire des chevaux. Aller dans une écurie tous les matins ; se coucher de très bonne heure et se lever de même. Pour cela, il s'établit un véritable programme d'étude comprenant des visites dans les écuries ou au manège. La constitution de cette encyclopédie lui servira pour ses futurs tableaux.
Théodore Géricault, dont Delacroix fait la connaissance dans l'atelier de Guérin a eu une influence importante, particulièrement au début de sa carrière. Il lui emprunte sa manière de peindre : de forts contrastes d’ombres et de lumières donnant du relief et du volume aux modèles. Il utilise également certaines de ses couleurs : des vermillons, des bleus de Prusse, des bruns, des blancs colorés. L’un des sommets de sa première manière est : L’Assassinat de l’évêque de Liège 1831, Louvre. L’Officier turc, enlevant sur son cheval l’esclave grec Les Massacres de Scio 1824, musée du Louvre est notamment inspiré de L’Officier de chasseur à cheval 1812, musée du Louvre de Géricault. Quand celui-ci meurt le 26 janvier 1824, Delacroix devient malgré lui le chef de file du Romantisme.

Les Scènes des Massacres de Scio

Les Massacres de Scio, que Delacroix présente en 1824 au Salon Officiel, obtient la médaille de seconde classe. Il est acheté 6 000 francs, par l’État, pour être exposé ensuite au musée du Luxembourg. La toile s’inspire d’un fait d’actualité : le massacre de la population de l’Île de Chio par les Turcs, survenu en avril 1822. Dès cette date, Delacroix a l’idée de peindre un tableau sur ce thème qu’il abandonne au profit de La Barque de Dante.
Les costumes orientaux que Jules-Robert Auguste 1789-1850 dit M. Auguste, lui prête pour l’élaboration de son tableau, proviennent de la collection qu’il ramena de ses voyages, en Orient. Delacroix put également effectuer des recherches iconographiques à La Bibliothèque Nationale. Un carnet, conservé aux Départements des Arts graphiques du musée du Louvre et utilisé vers 1820-1825, mentionne la consultation d’un ouvrage de Claude-Étienne Savary 1750-1788, Lettres sur la Grèce, édité en 1788 ainsi que des croquis effectués d’après le livre de Rosset, Mœurs et coutumes turques et orientales dessinés dans le pays, en 1790.
M. Auguste, ancien sculpteur devenu aquarelliste et pastelliste, a rapporté de ses voyages en Grèce, Égypte, Asie Mineure et Maroc61 de remarquables études et toute une série d’objets : étoffes, costumes, armes et bibelots divers. Il est considéré comme l’initiateur de l’Orientalisme, en France. Son influence sur Delacroix et son art est très forte, surtout entre 1824 et 1832, date de son voyage en Afrique du Nord. C’est avec des œuvres, comme Les Massacres de Scio et le La Grèce sur les ruines de Missolonghi 1826, musée des Beaux-Arts de Bordeaux, toutes les deux tirés d'évènements contemporains, que Delacroix participa au mouvement philhellène. Tout d’abord, ce sont les poètes, qui se sont enflammés les premiers, pour la cause grecque :
Casimir Delavigne 1793-1843 et ses Douze Messéniennes 1818-1842,
Byron,
Népomucène Lemercier 1771-1840 et ses Chants héroïques des montagnards et matelots grecs, de 1824 et sa Suite des chants héroïques et populaires, de 1825,
Victor Hugo 1802-1885 et ses Orientales.
Son tableau fut durement accueilli par les critiques, par la majorité des artistes et par le public. Bien que Gros ait apprécié La Barque de Dante, il jugea Les Massacres de Scio, avec sévérité, en affirmant qu’il s’agissait du Massacre de la peinture !. Certains critiques, tout en signalant l’influence des Pestiférés de Jaffa de Gros, écrivirent qu’il avait Mal lavé la palette de Gros. Cependant, Delacroix eut aussi des défenseurs. Dans Le Constitutionnel, Thiers écrivit : M. Delacroix … a prouvé un grand talent, et il a levé des doutes en faisant succéder le tableau des Grecs à celui de Dante. Ce tableau le place comme porte-drapeau des romantiques, ce qu'il déplore, ne voulant être affilié à aucune école. En fait, ce que ses détracteurs lui reprochent, c’est sa manière de peindre, sa négligence vis-à-vis du dessin, d’où l’emploi du mot tartouillade par Delécluze en 1822 et les remontrances d’Anne-Louis Girodet sur ce sujet.
En effet, c’est à dessein que Delécluze emploie ce mot, car selon Le Littré, il signifie : En langage d’atelier, peinture d’une exécution très lâchée, et dans laquelle la composition et le dessin sont complètement sacrifiés à la couleur. Cependant, Delacroix n’a pas eu que des détracteurs. Tout au long de sa carrière, il a pu bénéficier du soutien indéfectible de Thiers qui lui apporta son appui, de Théophile Gautier 1811-1872 et de Charles Baudelaire 1821-1867 qui lui consacra un poème64, Les Phares VI, Les Fleurs du mal et un de ses salons, celui de 1846 IV, Mes Salons.
Le peintre présente également trois autres tableaux au Salon : Tête de vieille femme musée des Beaux-Arts d’Orléans et Jeune orpheline au cimetière musée du Louvre et hors catalogue, Le Tasse dans la maison des fous collection particulière. Entre 1823 et 1825, il peint plusieurs tableaux de Grecs en costume de palikares soldats grecs combattant les Turcs pendant la Guerre d’indépendance et des Turcs, dont certains ont pu être utilisés pour Les Massacres de Scio. Lors du Salon Officiel, Delacroix eut l’occasion de voir des peintures de John Constable que son marchand Arrowssmith présentait, notamment La Charrette à foin 1821, National Gallery de Londres, récompensée par la médaille d’or. Une anecdote veut qu’après avoir vu cette toile, il décida de refaire le ciel des Massacres de Scio, après en avoir demandé la permission au comte de Forbin 1777-1841, directeur des musées.

La période de maturité Les années romantiques 1825-1831

Durant son voyage en Angleterre, qui s’est déroulé de mai à août 1825, Delacroix a visité Hampstead et l’Abbaye de Westminster, dont il s’est inspiré pour l’Assassinat de l’évêque de Liège 1831, musée du Louvre. Il a rencontré Sir David Wilkie 1785-1841, peintre d’histoire, de genre et de portrait ainsi que Thomas Lawrence 1769-1830, qu’il a pu voir dans son atelier. Il a été très influencé par son style et ses portraits qu'il admirait beaucoup. Il s'est inspiré du portrait de David Lyon vers 1825, Musée Thyssen-Bornemisza de Lawrence, pour celui du baron de Schwiter 1826-1830, National Gallery de Londres.
C'est dans les années 1820 que Delacroix, de sept ans son aîné, croise pour la première fois, chez son ami Jean-Baptiste Pierret, Louis-Auguste Schwiter 1805-1889. Ils furent des amis très proches et tous les deux, de grands admirateurs du portraitiste anglais. Il rend également visite au Dr Samuel Rush Merrick, un antiquaire très réputé68 pour sa très belle collection d’armes et d'armures, dont il fait des études, en compagnie de Richard Parkes Bonington qu’il avait revu à Londres. Les deux hommes partageaient les mêmes goûts pour le Moyen Âge, d'où les études communes qu'ils firent ensemble : plusieurs feuilles leur ayant été successivement imputées l'un à l'autre.
C’est à partir de 1826 que Delacroix fréquente Victor Hugo et son cénacle. Dans un premier temps, un premier groupe se constitue autour de deux représentants de la littérature officielle : Charles Nodier et Alexandre Soumet 1788-1845. Ce premier cénacle se réunit tout d’abord dans l'appartement de Nodier, rue de Provence puis à l’Arsenal où il avait été promu bibliothécaire. Leur intérêt commun pour le Moyen Âge donnera naissance au style troubadour : Ingres et Delacroix ont l'un et l'autre réalisés des peintures de petit format dans ce style.
En parallèle et dès 1823, les amis de Hugo se groupent autour du poète, formant une sorte d'école. De plus en plus nombreux, ce second groupe forme à partir de 1828 et en 1829 le second cénacle : Hugo devenant le chef de file du mouvement romantique. Les membres du premier cénacle se rallieront à eux. C'est en 1830 que les rapports entre Delacroix et Hugo se détériorent : le poète lui reprochant son manque d’engagement vis-à-vis de la cause romantique.

Eugène Delacroix, La Grèce sur les ruines de Missolonghi, 1826, musée des Beaux-Arts de Bordeaux.

Le 25 avril 1826, Missolonghi, bastion de la résistance grecque, est prise par les Turcs. Une exposition est organisée le 24 mai, à la Galerie Lebrun, 4 rue du Gros-Chenet afin de récolter des fonds pour soutenir leur cause. Delacroix y présente d'abord Le Doge Marino Faliero Wallace collection de Londres, Don Juan et Un officier tué dans les montagnes, qu'il remplace en juin, par Le Combat du Giaour et d'Hassan et en août, par La Grèce sur les ruines de Missolonghi musée des Beaux-Arts de Bordeaux. Il s’agit pour le peintre d’alerter l’opinion publique alors que le gouvernement français prône la neutralité. Pour cette allégorie de La Grèce, il s’inspire des Victoires Antiques et de la figure mariale avec son manteau bleu et sa tunique blanche. Ce tableau rappelle la mort de Byron, le 19 avril 1824 à Missolonghi, et le courage et la témérité de Marcos Botzaris 1788-1823, qui a lui-aussi été tué à Missolonghi. Hormis Victor Hugo, les critiques étaient déroutés par cette interprétation du sujet qui les laissait perplexes.

Eugène Delacroix, La Mort de Sardanapale détails 1827-1828, Louvre.

Au Salon officiel de 1827-1828, Delacroix expose plusieurs œuvres, dont La Mort de Sardanapale musée du Louvre, unanimement rejeté par les critiques. Pourtant, par ses références à l’art du passé, par la multiplicité de ses sources d’inspiration et par le choix de son thème dans l’Orient ancien, Delacroix n’a nullement voulu choquer ses pairs, mais plutôt les convaincre de son génie. Mais, les injures fusent de partout. Dans Le Quotidien, il est question d’un ouvrage bizarre 24 avril. Pour La Gazette de France, c’est le plus mauvais tableau du Salon 22 mars. Quant à Étienne-Jean Delécluze, il en rajoute en affirmant, dans Le Journal des débats, qu’il s’agit d’une erreur de peintre 21 mars.
Le déchaînement suscité par la présentation de son tableau gêne ses amis, qui n’interviennent pas pour le défendre. Victor Hugo, en effet, ne prend pas publiquement son parti. C’est seulement dans une lettre du 3 avril 1828, adressé à Victor Pavis, qu’il manifeste son enthousiasme pour La Mort de Sardanapale, en écrivant : Ne croyez pas que Delacroix ait failli. Son Sardanapale est une chose magnifique et si gigantesque qu’elle échappe aux petites vues …. Le peintre est également victime des bons mots des humoristes, qu’il n’apprécie pas, malgré son goût pour les calembours. Le surintendant des Beaux-Arts, Sosthène de La Rochefoucauld 1785-1864 l’invite même à changer de manière. Ce qu’il refuse catégoriquement. La violence de ces attaques va précipiter sa brouille avec le mouvement romantique et cette fois-ci le tableau n’est pas acheté. Il écrit qu'on l’éloigne pendant cinq ans des commandes publiques, mais il n'en est rien, dès l'année suivante il en obtient des nouvelles.
Comme autre participant au Salon, il faut également citer Ingres, avec L'Apothéose d'Homère musée du Louvre. Celui-ci avait déjà exposé, au Salon de 1824, Le Vœu de Louis XIII Cathédrale de Montauban. Jean-Auguste-Dominique Ingres, représentant du peintre néoclassique par excellence, sera le grand rival de Delacroix, pendant toute sa vie. À travers ces deux artistes, c’est deux conceptions de la peinture diamétralement opposées qui s’affrontent : le disegno dessin et le colorito couleur. Avec L'Apothéose d'Homère musée du Louvre d’Ingres et La Mort de Sardanapale musée du Louvre de Delacroix, les deux artistes affirment leurs doctrines. La fameuse querelle du coloris des années 1670, qui opposa jadis les Rubénistes et les Poussinistes, partisans de la couleur et de la ligne, était toujours vivace au XIXe siècle.

Eugène Delacroix, La Nature morte aux Homards 1826-1827, Louvre

Après cet échec cuisant, Delacroix va conserver son tableau, dans son atelier jusqu’en 1844, date à laquelle il se décide de le mettre en vente. En 1845, il trouve un acquéreur en la personne d’un collectionneur américain, John Wilson, pour une somme de 6 000 francs. Le Salon de 1827-1828 est avec l’Exposition Universelle de 1855, la manifestation la plus importante pour Delacroix, par le nombre de toiles présentées. En deux envois, il expose tout d’abord :
Le Portrait du comte Palatiano en costume souliote 1827-1828, Cleveland Museum of Art,
Le Christ au jardin des Oliviers 1824-1827, Église Saint-Paul-Saint-Louis
Le Doge Marino Faliero Wallace collection de Londres
Deux chevaux de ferme anglais 1825, Brame et Lorenceau
Jeune turc caressant son cheval,
Un pâtre de la campagne de Rome, blessé mortellement,
Tête d’une indienne,
Scène de la guerre actuelle des Turcs et des Grecs,
Nature morte aux homards 1826-1827, musée du Louvre
L’Empereur Justinien composant ses lois tableau aujourd’hui détruit
Puis ce sera :

Le Docteur Faust dans son cabinet, Milton et ses filles.

En 1828, Charles Motte, éditeur rue des Marais, publie Faust, la tragédie de Goethe 1749-1832 : celle-ci a été traduite par Philippe Albert Stapfer 1766-1840 et illustrée d’une suite de 17 lithographies 1827-1828, par Delacroix. De Weimar, dans une lettre adressée à son ami Johann Peter Eckermann 1792-1854, Goethe est enthousiasmé par le travail du peintre et estime qu’il a bien su retraduire les scènes qu’il avait imaginées.
Eugène Delacroix, Quentin Durward et le Balafré, vers 1828-1829, musée des Beaux-Arts de Caen
C’est après la visite de Charles X à Nancy que Delacroix reçoit, le 28 août 1828, une commande du ministre de l’Intérieur. Il s’agit de La Mort de Charles le hardi ou Le Téméraire, plus couramment appelé La Bataille de Nancy musée des Beaux-Arts de Nancy, que le roi veut offrir à la ville de Nancy et qui ne sera terminé qu’en 1831, et ne sera exposé au Salon qu’en 1834. Sa disgrâce n’a donc pas duré longtemps. Grâce à la protection de la famille royale, Delacroix reçoit en décembre 1828 ou en janvier 1829, la commande de deux peintures pour la duchesse de Berry 1798-1870, veuve de l’héritier du trône légitimiste : Quentin Durward et le Balafré vers 1828-1829, musée des Beaux-Arts de Caen et La Bataille de Poitiers, dit aussi Le Roi Jean à la bataille de Poitiers musée du Louvre, qui ne seront achevés qu’en 1830.

Eugène Delacroix, L’Assassinat de l’évêque de Liège, 1830, Louvre

À la demande du duc Louis-Philippe d'Orléans 1775-1850, Delacroix peint un tableau de grande dimension 420 × 300 cm pour sa galerie historique, au Palais Royal. Il s’agit de Richelieu disant sa messe 1828 ou Le Cardinal de Richelieu dans sa chapelle au Palais-Royal, détruit durant La Révolution de 1848 et dont il ne reste qu’une lithographie de Ligny figurant dans l’Histoire du Palais Royal par Jean Vatout 1830
En janvier, il le sollicite de nouveau pour un autre tableau inspiré de Walter Scott 1771-1832, l’Assassinat de l’évêque de Liège musée du Louvre, tout d’abord présenté à la Royal Academy en 1830, ensuite au Salon officiel de 1831 et enfin à l’Exposition Universelle de 1855 à Paris et à celle de Londres en 1862. Une anecdote circule au sujet de ce tableau, concernant une nappe blanche, point capital de cette scène, que Delacroix avait du mal à peindre. En dessinant un soir chez son ami Frédéric Villot 1809-1875, le peintre se serait fixé un ultimatum, en déclarant : Demain j’attaque cette maudite nappe qui sera pour moi Austerlitz ou Waterloo. Et ce fut Austerlitz. Pour la charpente de la voûte, il s’était inspiré de croquis faits au Palais de justice de Rouen et du vieux hall de Westminster qu’il avait visité durant son séjour à Londres.
C’est à partir de 1830 que Delacroix commence à écrire, comme critique d’art, cinq articles pour La Revue de Paris, fondée en 1829 par le docteur Véron 1798-1867. Le premier de ses articles, consacré à Raphaël 1483-1520, paraît en mai et le deuxième, sur Michel-Ange 1475-1564, en juillet. Dans ces deux articles, il y exprime son admiration pour ces deux artistes, qui ont eu une grande influence sur son œuvre. Ce qui lui permet également d’y exposer ses propres convictions esthétiques.
Les journées du 27, 28 et 29 juillet 1830 ont lieu les évènements, qui devaient précipiter la chute de Charles X 1757-1836 et propulser au pouvoir, Louis-Philippe 1773-1850. Sur les trois concours organisés le 30 septembre, par le nouveau gouvernement, pour la décoration de la Salle des séances, dans la nouvelle Chambre des Députés, au Palais Bourbon, le peintre se présente aux deux derniers. Les sujets proposés sont :

Le Serment de Louis-Philippe Ier à la chambre des Députés en août 1830,

La Protestation de Mirabeau 1749-1791 contre le congé signifié par Louis XVI aux États généraux par la bouche du marquis de Dreux-Brézé 1766-1829,
Boissy d’Anglas 1726-1826 tenant tête à l’émeute.
Delacroix se voit préférer Nicolas-Auguste Hesse 1795-1869, élève de Gros 1771-1835, pour Mirabeau et Jean-Baptiste Vinchon 1787-1855 pour Boissy d’Anglas 1756-1826. Le jury est composé de Guérin 1774-1833, Gros et Ingres 1780-1867. Cette injustice est récupérée par Achille Ricourt 1798-1874, écrivain et journaliste, fondateur de L'Artiste, une grande revue d’art, pour la défense de la cause romantique. Louis Boulanger 1806-1867 y écrit un article sur Un des Cinquante Boissy d’Anglas : Mon peintre, c’est Delacroix. Tout cela vit, tout cela se meut, se tord et accélère le mouvement du sang dans vos artères … C’est l’accent de la nature saisi dans ce qu’il a de plus inattendu, qualités précieuses, qui seules révèlent le grand peintre, mais qui malheureusement le révèlent trop souvent à un trop petit nombre.
La longue lettre, intitulée Lettre sur les concours que Delacroix avait adressée le 1er mars 1831, a été également publiée par la revue, afin d’accentuer la controverse. C’est un violent réquisitoire contre les concours, opposant les médiocres, aux Rubens, aux Raphaël, aux Hoffmann89, sur un ton plein d’ironie. L’esquisse qu’il avait réalisée pour le deuxième sujet, intitulée Mirabeau devant Dreux-Brézé 1830, est aujourd’hui exposée au Musée National Eugène-Delacroix. Celle du troisième sujet, Boissy d’Anglas tenant tête à l’émeute, se trouve au musée des beaux arts de Bordeaux.

La Liberté guidant le peuple, 1830

En 1831, Delacroix présente au Salon officiel, qui avait ouvert ses portes, cette année-là, le 14 avril La Liberté guidant le peuple. Le tableau, répertorié au no 511 du catalogue du Salon, est intitulé Le 28 juillet ou La Liberté guidant le peuple titre qu’il conservera par la suite. Il l’a peint afin d’effacer les mémoires de son précédent échec au salon de 1827 et pour s’attirer les bonnes grâces du nouveau pouvoir, et bénéficier ainsi de nouveau des commandes publiques. Il a été acheté pour une somme de 3 000 francs par Louis-Philippe afin d’être exposé au Musée Royal, alors au Palais du Luxembourg.
Sa peinture n’y est présentée que quelques mois, de peur que son sujet encourage les émeutes. Elle est d’abord mise dans les réserves par Hippolyte Royer-Collard, directeur des Beaux-Arts, ensuite reprise par Delacroix, dès 1839, avec l’autorisation d'Edmond Cavé, son successeur et exposé de nouveau en 1848. Cependant, quelques semaines plus tard, il est invité à la reprendre. Grâce à Jeanron, directeur des musées et à Frédéric Villot, conservateur au musée du Louvre, La Liberté guidant le peuple rejoint les réserves du musée du Luxembourg. Avec l’accord de Napoléon III, elle sera exposée à l’Exposition Universelle de 1855. Ce n'est qu'en novembre 1874, qu'elle est déplacée d'une manière définitive, pour être exposée en permanence au musée du Louvre.
Son sujet est lié aux combats de rues, qui se sont déroulés durant les journées révolutionnaires des 27, 28 et 29 juillet, dites aussi Les Trois Glorieuses. La figure de La Liberté, représentée par une jeune-femme à la poitrine nue, coiffée d’un bonnet phrygien, tenant un drapeau tricolore97 est accompagnée par un enfant des rues, placé à sa droite et par un jeune homme à la redingote, coiffé d’un haut de forme et tenant une espingole fusil tromblon à deux canons parallèles, placé à sa gauche. La légende veut que ce jeune homme représente Delacroix et qu’il ait participé aux évènements.
Or, plusieurs éléments réfutent ces faits : le témoignage d’Alexandre Dumas, les convictions politiques du peintre fervent bonapartiste. Il aurait tout au plus été enrôlé dans la garde nationale, qui avait été restaurée le 30 juillet 1830 après avoir été supprimée en 1827, afin de garder le trésor de la Couronne, d’ailleurs déjà au Louvre.
Pour Lee Johnson, expert britannique et spécialiste de Delacroix101, il s’agirait plutôt d’Étienne Arago 1802-1892, ardent républicain, directeur du Vaudeville de 1830 à 1840. C’était déjà la figure politique à laquelle Jules Claregie avait pensé, en 1880. Quant à l’enfant des rues, il aurait inspiré Victor Hugo 1802-1885 pour son personnage de Gavroche, des Misérables, publiés en 1862.
Le tableau reçoit un accueil modéré de la part de la critique. Cependant, Delécluze s’est montré compréhensif104 envers lui, en écrivant dans Le Journal des Débats, du 7 mai : … Ce tableau peint avec verve, coloré dans plusieurs de ses parties avec un rare talent, rappelle tout à fait la manière de Jouvenet …. Certains critiques ont apprécié le tableau, mais d’autres ont trouvé que la représentation de la Liberté était inacceptable. Celle-ci a été la cible des qualificatifs les plus vulgaires : poissarde, fille publique, faubourienne. C'est son réalisme qui dérangeait : la nudité de son torse, la pilosité des aisselles.
Son absence, pendant des années des cimaises du musée, en fait une œuvre emblématique, une icône républicaine, qui servira d’affiche à la réouverture en 1945, du musée du Louvre et ornera l’ancien billet de 100 francs. Le sculpteur François Rude s’en inspirera pour son Départ des volontaires, figurant sur l’arc de triomphe de Paris et en 1924, le peintre, Maurice Denis, reprendra ce sujet pour orner la coupole du Petit Palais, consacré à l’art romantique et réaliste.
Les querelles, qui opposent les classiques et les romantiques ou modernes, agacent beaucoup Delacroix. Le 27 juin 1831, il écrit au peintre Henri Decaisne 1799-1852, membre comme lui de la Société libre de peinture et de sculpture, fondée le 18 octobre 1830, afin d’adopter une stratégie commune face à l’influence puissante de la Société des Amis des Arts, proche de l’Institut créée en 1789 et ressuscitée en 1817. Sur les conseils de Decaisne, il contacte Auguste Jal 1791-1873, critique d’art important pour qu’il défende leur cause dans Le Constitutionnel. Dans une longue lettre qu’il adresse alors à M. d’Agoult, ministre de l’intérieur de l’époque, afin d’exposer leurs griefs et de signaler les dangers de séparer les artistes officiels, des autres, d’un talent bien souvent plus grand. Par ailleurs, en septembre 1831, Delacroix obtient la Légion d’honneur. Ce qui est un début de reconnaissance officielle.

Le voyage au Maroc

Ce qui peut apparaître comme un retour à l'ordre se concrétisa, assez paradoxalement, dans le voyage que Delacroix fit au Maroc au cours des six premiers mois de 1832. Il y accompagnait un diplomate, le comte de Mornay, venu négocier avec le sultan des arrangements rendus nécessaires par la conquête de l'Algérie voisine. Partie de Toulon, l'ambassade arriva à la fin de janvier 1832, via Gibraltar, à Tanger, qui devait constituer sa base. Elle se rendit à Meknès, pour rencontrer le sultan, en mars-avril, avant de rentrer en France, cette fois-ci par Oran et Alger, en juin-juillet. Une brève escapade avait permis à Delacroix, en mai, de découvrir l'Espagne, c'est-à-dire Cadix et Séville. Durant ce séjour, il n'arrêta pas de prendre des notes, remplissant carnets et feuilles volantes de brèves indications manuscrites et surtout de croquis au crayon ou à l'aquarelle, plus ou moins rapides, qu'il lui arrivait de reprendre le soir, et où l'on voit en germe nombre d'œuvres futures. Le voyage marocain devait en effet lui procurer, jusqu'à la fin de sa vie, une source inépuisable de sujets. Aux compositions religieuses, mythologiques, historiques ou littéraires s'ajoutent désormais, développant et parachevant sa veine grecque, les tableaux orientalistes, une part majeure de son œuvre, appuyée, on l'a amplement souligné, sur une réalité vécue et non, comme avant 1832, sur un Orient mythique, imaginé ou rêvé.
Il ne faut cependant pas réduire l'expérience nord-africaine au seul apport pittoresque. De même que l'Italie, Rome et l'antique avaient ouvert les yeux de David, le Maroc fut pour Delacroix une révélation, celle du « sublime vivant qui court ici dans les rues et qui vous assassine de sa réalité, comme il l'écrit à son ami Pierret. À chaque pas, il y a des tableaux tout faits qui feraient la fortune et la gloire de vingt générations de peintres. Vous vous croyez à Rome ou à Athènes moins l'atticisme .... Un gredin qui raccommode une empeigne pour quelques sous a l'habit et la tournure de Brutus ou de Caton d'Utique, dira-t-il un peu plus tard à Armand Bertin. L'antique imaginé par le peintre se vivifie au contact de la réalité marocaine, qui lui apporte des impressions similaires à celles qu'avaient éprouvées, cinquante ans plus tôt, les néo-classiques devant la statuaire romaine et les fresques de Pompéi. Il y a plus : c'est certainement dans ces quelques mois décisifs que le coloriste s'est définitivement révélé, par l'exemple même de la réalité exotique et bigarrée qu'il avait sous les yeux, certes, mais aussi par les effets d'une lumière tout aussi nouvelle et inattendue. Il y sentit, selon ses propres termes, la précieuse et rare influence du soleil qui donne à toute chose une vie pénétrante : une caractéristique, pourrait-on dire, de toute son œuvre ultérieure.


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#79 Eugéne Delacroix 2
Loriane Posté le : 24/04/2015 20:16
Les grands travaux

La protection de Thiers, arrivé au pouvoir et qui l'avait, comme critique d'art, remarqué à ses débuts, lui valut, moins d'un an après son retour du Maroc, une prestigieuse commande officielle, dans le cadre des travaux de rénovation et d'embellissement du Palais-Bourbon. Il y fut chargé de la décoration du salon du Roi, où le souverain devait se tenir lors de ses venues à la Chambre des députés et qu'il acheva en 1838. L'architecture en était assez ingrate, et Delacroix avait, en la matière, assez peu d'expérience. Il sut magistralement s'imposer en faisant modifier quelque peu la disposition interne de la pièce, où, au-dessus de pilastres en grisaille représentant les fleuves et les mers de France, il fit courir une frise aux thèmes conventionnels la Guerre, l'Agriculture, la Justice et l'Industrie, repris dans les caissons du plafond, mais avec une très grande invention dans les figures et une extraordinaire vigueur de coloris. Ce premier succès entraîna d'autres commandes : l'activité de Delacroix se structure désormais autour de grands travaux décoratifs, qui ne cessent de se succéder : bibliothèque du Palais-Bourbon 1838-1847, probablement son chef-d'œuvre, où entre deux hémicycles Orphée vient policer les Grecs encore sauvages et Attila, suivi de ses hordes barbares, foule aux pieds l'Italie et les Arts se déploient cinq coupoles où à chaque fois quatre pendentifs illustrent, par des scènes tirées de la Bible, de la mythologie ou de l'Antiquité, les Sciences, l'Histoire et la Philosophie, la Législation et l'Éloquence, la Théologie et la Poésie ; bibliothèque de la Chambre des pairs actuel Sénat, avec une coupole L'Élysée ou Dante et les esprits des grands hommes, un hémicycle Alexandre faisant enfermer les œuvres d'Homère dans une cassette d'or et quatre médaillons allégoriques 1841-1846 ; galerie d'Apollon au Louvre avec la composition centrale du plafond, Apollon vainqueur du serpent Python 1850-1851 ; salon de la Paix à l'Hôtel de Ville de Paris 1852-1854, détruit en 1871 ; chapelle des Saints-Anges à Saint-Sulpice enfin, son testament pictural 1849-1861, où sous L'Archange saint Michel terrassant le démon , La Lutte de Jacob avec l'Ange fait face à Héliodore chassé du Temple. C'est avec ces travaux, qui sont les seuls pour lesquels il engagea des collaborateurs il n'eut sinon jamais d'atelier au sens habituel du terme, que Delacroix s'insère véritablement dans la continuité de la tradition classique et se mesure avec ceux qu'il avait pris pour modèle, tant par son inspiration personnelle, puisqu'il a choisi librement la plupart de ces sujets, que par un style volontairement élevé, idéaliste dans l'esprit et réaliste dans le détail, par sa préoccupation enfin d'adapter à chaque lieu ses compositions et notamment en tenant compte des sources lumineuses, souvent faibles, qu'il compensa par un coloris encore plus éclatant.

Le voyage en Afrique du Nord fin janvier à juillet 1832

C’est à la mi-octobre 1831 que Louis-Philippe informe Charles-Edgar, comte de Mornay 1803-1878 de sa mission diplomatique auprès de Moulay Abd er-Rahman 1778-1859, chef chérifien du Maroc. Il s’agit de porter un message de paix à l’empereur du Maroc et aux Britanniques, bien implantés sur le plan commercial, dans le pays. Cette ambassade doit clore plusieurs dossiers épineux, dus à la conquête de l'Algérie par la France. Sa mission sera une réussite sur le moment : Mornay enverra le 4 avril 1832, une lettre déclarant au général en chef de l’état-major d’Alger, Savary, duc de Rovigo, que le Maroc abandonne ses visées sur la région de Tlemcen et d’Oran, promet de rester neutre et de retirer ses troupes de l’Algérie.
C’est tout d’abord, Eugène Isabey, qui avait été pressenti, pour se joindre à la mission diplomatique en Afrique du Nord. Or, le peintre revenu depuis peu d’Alger, s’était désisté, craignant un deuxième voyage en Afrique. C’est donc Delacroix qui sera choisi pour accompagner la mission, à ses frais. Ce n'est qu'à la fin de l’année 1831 que le peintre et Mornay font connaissance, grâce à Edmond-Henri Duponchel 1794-1868, futur directeur de l’opéra, et Armand Bertin, directeur du Journal des Débats, à la requête de Mademoiselle Mars 1779-1847, maîtresse officielle de Mornay, et amie de Duponchel et de Bertin : celle-ci étant désireuse de trouver un compagnon de voyage agréable, à son amant. Mornay et Delacroix dînèrent ensemble à la Saint-Sylvestre, en compagnie de la comédienne.
Le départ, prévu le lendemain vers 3 heures du matin, eut lieu rue de la Tour-des-Dames en berline jusqu’à Toulon où avait été appareillée une corvette-aviso de 18 canons, commandée par le capitaine de frégate Ange-François Jouglas. La Perle quitte Toulon le 11 janvier 1832, longe les côtes de Minorque, Majorque, Malaga et celles du royaume de Grenade, passe près de Solobrena et de Motril en Espagne, s’arrête à Algésiras pour le ravitaillement et mouille devant Tanger, le 24 janvier 1832 à 8 heures. C'est Jacques-Denis Delaporte, consul de France à Tanger qui les accueille, et se charge des formalités de débarquement et de la mise au point du protocole de réception, par les autorités de la ville. Ce n'est que le lendemain que Mornay et ses collaborateurs débarquent, pour s'installer à la Maison de France. Profitant d’un intermède, Delacroix se promène dans Tanger, un carnet à la main.
Bien que Mornay soit accompagné par Antoine-Jérôme Desgranges 1784-1864, interprète du roi, il ne peut s’opposer à ce qu’Abraham Benchimol se joigne à eux : le protocole voulant qu’un Européen ne puisse s’adresser directement à l’empereur et que seul un juif y soit autorisé. Quant à Delacroix, sans préjugés vis-à-vis des juifs et très intéressé par leur communauté, il se lie d’amitié avec le drogman, au service du consulat depuis 1820, et bénéficie ainsi du bon accueil de son entourage. Ce qui lui permet de croquer la nièce d'Abraham, Léditia Azencot, Saada, sa femme, et Presciadia et Rachel, ses filles. Grâce à Madame Delaporte, la femme du consul, il put également dessiner de jeunes musulmanes, très effarouchées par un étranger.

Eugène Delacroix, La Noce juive au Maroc, 1837-1841, Louvre.

L’entremise du drogman lui permet aussi d’assister à l’une des fêtes données lors d’une noce juive, le 21 février 1832. Il en a gardé des traces dans l’un de ses carnets à couverture cartonnée, appelée Album du Maroc acquis par Le musée du Louvre en 1983. Tous les éléments récoltés la tenue et l'attitude de certains participants l'aideront ultérieurement à peindre La Noce juive au Maroc 1841, musée du Louvre. Les deux évènements notables auxquels Delacroix put participer lors de ce voyage, sont cette noce et l’entrevue avec l’empereur à Meknès.
La prochaine étape de cette mission diplomatique était l’entrevue avec Moulay Abd er-Rahman. Mornay envoya un courrier à Meknès afin de demander l’autorisation de le rencontrer. Le 3 février 1832, correspondant à l’année 1248 de l’Hégire, est proclamé le début du Ramadan qui se termine par la fête de l’Aïd es-Sghir, le 4 mars 1832. Pendant cette période sacrée de jeûne et de prières, le commandeur des croyants ne pouvait les recevoir. De plus, le décès de Moulay Meimoun, frère du souverain, retarde encore le départ de la mission. Cette longue attente de 42 jours permettait d'apaiser les partis anti-français et de modérer les exigences de la diplomatie française. Ce n’est que le 3 mars que l’autorisation du souverain est donnée.
Le 5 mars, la délégation part de Tanger pour Meknès, accompagnée d’une escorte de soldats et d’un pacha pour chaque étape, dans la limite de la province où s’exerce leur autorité. Les deux villes étaient à 45 lieues, l’une de l’autre. Une fois passé le gué à l’oued Mharhar, un premier campement est établi à El Arba Aïn-Dalia. Le 6 mars, la mission et l’escorte passent près du lac Lao, et de la mer, avec à droite, une vue du Cap Spartel. Nouvelle étape à Souk el-Had el-Gharbia, le soir, ils dînent avec le caïd Mohammed Ben-Abou et font une halte à Tléta Rissana.
Le 8 mars, ils partent sous la pluie et passent le gué de l’oued Maghazen, affluent de l’oued Loukkos. Ils déjeunent ensuite à l’oued Ouarrour, près de Ksar el-Kébir appelé aussi Alcazarquivir, lieu de la Bataille des Trois Rois où combattirent le 4 août 1578 Don Sébastian, roi du Portugal, son allié Moulay Mohammed, dit el Motaouakir et le Sultan Moulay Abd el-Malek. C’est Moulay Abd el-Malek, qui remporta ce combat où les trois protagonistes trouvèrent la mort. Ce qui permit à Al-Mansur, frère de Moulay Abd el-Malek, de monter sur le trône chérifien.
Le 9 mars, ils s’arrêtent à Ksar el-Kébir : le vendredi étant un jour de prière. Dans la soirée, ils se dirigent vers l’oued Fouarate où la délégation est attaquée. Delacroix s’en souviendra pour La Perception de l’impôt arabe ou Combat d'Arabes dans la montagne, National Gallery de Washington, tableau qu’il peignit en 1863, année de sa mort. C’est à Fouarate qu’un campement est installé pour la nuit. Le 10 mars, à cause d’un malaise du peintre et du jour du Sabbat jour de repos des juifs, le départ de la mission est différé. Ils passent tout de même l’oued Mda et installent leur campement à El-Arba de Sidi Aîssa Belhacen.

Eugène Delacroix, Les Bords du fleuve Sebou Londres.

Le 11 mars, ils longent le Sebou et le 12, un campement est établi sur les bords du fleuve dont les eaux grossies par les pluies sont difficiles à traverser. Delacroix s’inspire de ces deux journées pour peindre un tableau intitulé, Les Bords du fleuve Sebou 1858-1859, Artemis Group, Londres. Le 13 mars, ils arrivent à Sidi Kacem. Le dernier campement de la mission est dressé le 14 mars au pied du Zerhoun, devant Moulay Idriss, une ville établie sur deux hauteurs irrégulières dont les étrangers n’avaient pas le droit d’en gravir les lacets. Le 15 mars, ils quittent Zerhoun pour arriver près de Meknès où ils assistent à de grandes fantasias.
Les fantasias ou courses de poudre n’étaient pas destinés à divertir les étrangers, mais des exercices militaires censés montrer l’adresse et le savoir-faire des cavaliers marocains au combat. Delacroix a pu voir plusieurs fois des courses de poudre, entre Tanger et Meknès.
Il exécutera une belle aquarelle sur ce sujet, pour le comte de Mornay : Une Fantasia ou jeu de poudre devant la porte d’entrée de la ville de Méquinez 1832, musée du Louvre. Ces courses ont fourni à Delacroix le sujet de quatre peintures entre 1832 et 1847 :
Exercices militaires des Marocains 1832, Musée Fabre de Montpellier,
Fantasia arabe 1833, Städelsches Kunstinstitut de Francfort-sur-le-Main,
Choc de cavaliers arabes 1843, Walters Art Museum de Baltimore,
Exercices militaires des Marocains 1847, coll. Oskar Reinhart de Winterthur.
Ils longent également le tombeau d’un saint, celui de Sidi Mohammed ben Aïssa, fondateur de la communauté des Aïssaouas. La découverte des pratiques religieuses chants, danses et contorsions de cette secte enflamme son imagination. Ce qui lui fournira, à son retour, le sujet de deux tableaux :
Les Aïssaouas 1838, The Minneapolis Institute of Arts,
Avant de rentrer dans Meknès, ils doivent faire le tour complet de la ville et de ses remparts138. Installée dans la Maison des hôtes, au cœur du quartier de la Berrima, la délégation reste enfermée pendant 8 jours, du 15 mars au 22 mars, avant d’être reçue par l’empereur. Le 22 mars, c’est l’audience publique avec Moulay Abd er-Rahman. La délégation à cheval est précédée du Kaïd et de quelques soldats, et suivie de ceux portant les cadeaux, destinés au souverain. Les présents envoyés par Louis-Philippe comprenaient notamment une magnifique selle brodée, des armes précieuses, des bijoux, des brocards, des soieries et des montres.

Le convoi passe à côté de la mosquée Jamaa el-Kbir, traverse un passage couvert de cannes Souk el-Hdim et arrive sur la place située en face de la grande porte (place el Hdim. Ils entrent dans une grande cour, passent entre une haie de soldats, sur leur gauche se trouve une grande esplanade place Lalla Aouda. Ils entrent plus en avant, arrivent dans une grande place, le Mechouar, située dans le quartier de Dar el-Kbir, où ils doivent rencontrer le souverain. C’est par une porte mesquine et sans ornement qu’il paraît, monté sur un cheval gris, entouré de ses gardes à pied et d’un porteur de parasol, qui lui emboîte le pas.
Pour Delacroix, le roi ressemble à Louis-Philippe, mais en plus jeune. Après les compliments d’usage, il ordonne à Sidi Muchtar de prendre la lettre du roi des Français et de les guider dans la visite de la résidence royale. Cette cérémonie sera consignée dans le second album-journal du peintre. De cette audience mémorable, Delacroix a réalisé de nombreux croquis dont il se servira pour sa grande toile, intitulée Le Sultan du Maroc Abd Al-Rhaman entouré de sa garde, sortant de son palais de Meknès 1845, musée des Augustins de Toulouse.
Du 23 mars au 4 avril, Delacroix visite la ville de Meknès : le marché aux fruits secs d’El-Hdim, le Mellah, le quartier juif où il acquiert des objets en cuivre, les haras, le zoo royal et l’autrucherie d’où la mission emmène les animaux offerts à Louis-Philippe, une lionne, un tigre, deux autruche, un bœuf sauvage, une espèce d’antilope, deux gazelles et quatre chevaux, le marché Bab el-Khmis. Il dessine également beaucoup : la porte Bab-el-Mansur, les autres monuments de la ville, deux hommes jouant aux dames rencontrés dans le Mellah, dont il se souviendra pour son tableau des Arabes jouant aux échecs, vers 1847-1848, National Gallery of Scotland d'Édimbourg, appelés également Marocains jouant aux échecs.
Le 30 mars, un trio composé de deux musiciens et d’une chanteuse était venu honorer la mission à l’initiative de l’Empereur. Ces musiciens juifs de Mogador, étaient réputés, comme faisant partie des grands maîtres de la musique andalouse. Cet évènement lui inspirera, en 1847, une composition, intitulée Les Musiciens juifs de Mogador.
Le départ de Meknès est donné le 5 avril à 11 heures. Les membres de la mission reprennent à peu près le même chemin qu’à l’aller. C’est le 12 avril qu’ils arrivent à Tanger où ils sont accueillis par les consuls étrangers et les notables. Ce second séjour se prolonge jusqu’à début mai. À la suite de grosses fatigues dues au voyage, Delacroix tombe malade sa fièvre se déclare le 16. Cependant, le peintre se rétablit et profite de cette convalescence pour dessiner à Tanger et dans les environs.
Le 9 mai, Delacroix emprunte la Perle pour une excursion, en Andalousie. Près des côtes de Cadiz où l’épidémie de choléra sévit, le bateau est mis en quarantaine. Il en profite pour dessiner deux vues de la ville album de Chantilly. C’est le 18 mai qu’il peut enfin débarquer pour visiter la ville, notamment le couvent des Augustins, en compagnie de M. Angrand 1808-1886, vice-consul de France à Cadix. Les études effectuées sur place lui serviront pour réaliser, en 1838, une toile intitulée Christophe Colomb au couvent de Sainte-Marie de Rabida, Museum of Art de Toledo.
Sur la route de Séville, il fait un arrêt près des murailles de Jerez de la Frontera dont il fait un croquis. Jusqu’au 28 mai au soir, il visite la ville de Séville, en particulier l’Alcala, la cathédrale et les bords de Guadalquivir, la Giralda, la Cartuja une ancienne chartreuse où il admire des Zurbaran, des Murillo et des Goya143. C’est grâce à cet artiste, dont il avait copié quelques planches de ses Caprices, dans sa jeunesse, qu’il découvre la tauromachie. Les notes contenues dans son carnet semblent confirmer qu’il ait bien assisté à une corrida : aquarelle intitulée Le Picador Cabinet des dessins du musée du Louvre. Le 29 mai s’achève son séjour en Andalousie. Ce n’est que le 30 mai, à Cadix, qu’il embarque à bord de la Perle pour retourner, à Tanger.
Le voyage que Delacroix a effectué en Afrique du Nord de fin janvier à juillet 1832 est primordial pour sa technique et son esthétique. Il en rapporte sept carnets constituant le journal de son voyage, dont il ne reste plus que quatre exemplaires trois sont conservés au musée du Louvre et un, au musée Condé de Chantilly et quelque 800 feuilles. Ils permettent de suivre pas à pas le périple africain du peintre. Il a peint en tout plus de quatre-vingts peintures sur des thèmes orientaux, notamment Les Femmes d'Alger dans leur appartement 1834, musée du Louvre, La Noce juive au Maroc 1841, musée du Louvre, Le Sultan du Maroc 1845, musée des Augustins de Toulouse.
Ce voyage permettait à Delacroix, qui n'avait jamais été en Italie, de retrouver l’Antiquité vivante. La lettre, qu’il adresse à Jean-Baptiste Pierret le 29 janvier, est très éloquente à ce sujet : Imagine mon ami ce que c’est que de voir couchés au soleil, se promenant dans les rues, raccommodant des savates, des personnages consulaires, des Caton, des Brutus, auxquels il ne manque même pas l’air dédaigneux que devaient avoir les maîtres du monde….
Par ailleurs, grâce à un voyage en Afrique du Nord et à son séjour en Algérie du lundi 18 au jeudi 28 juin 1832, Delacroix aurait alors visité le harem d'un ancien reis du Dey qu'il évoquera dans sa peinture des femmes d'Alger dans leur appartement, du Salon de 1834. ouvre, cat. no 163 scène qu'il reproduit de mémoire dans son atelier dès son retour.
Cette visite est finalement rendue possible par l'intervention de Poirel, ingénieur au port d'Alger, qui lui présente un ancien corsaire qui accepte d'ouvrir les portes de sa maison au jeune français. Delacroix est transporté par ce qu'il voit: C'est comme au temps d'Homère, s'écrit-il, la femme dans la gynécée, brodant de merveilleux tissus. C'est la femme comme je la comprends.
Grâce à ce voyage, il fut l'un des premiers artistes à aller peindre l'Orient d'après nature, ce qui valut, outre de très nombreux croquis et aquarelles, quelques belles toiles de la veine des Femmes d'Alger dans leur appartement, tableau à la fois orientaliste et romantique, l'orientalisme étant caractéristique des artistes et écrivains au XIXe siècle.

Les premiers grands ensembles décoratifs

C’est le 31 août 1833 que Thiers, ministre des Travaux Publics de l’époque, confia à Delacroix, sa première grande décoration : la peinture sur muraille du Salon du Roi ou Salle du Trône, au Palais Bourbon actuelle Assemblée nationale. Cette commande lui fut réglée : 35 000 francs. Cet ensemble est composé d’un plafond, avec une verrière centrale entourée de huit caissons quatre grands et quatre petits, de quatre frises situées au-dessus des portes et fenêtres, et de huit pilastres. Il fut peint à l’huile, sur toiles marouflées, et les frises à l’huile et à la cire, directement sur le mur afin d’obtenir une matité plus proche de la détrempe. Les pilastres furent peints eux aussi sur les murs, en adoptant la même technique, mais en grisaille. Cette commande fut terminée au début de 1838 et réalisée sans collaborateurs, excepté des ornemanistes pour les décors dorés, en particulier Charles Cicéri 1782-1868, peintre décorateur et aquarelliste, qui se fit connaître au Salon de 1827, en exposant des aquarelles.
Dans les quatre caissons principaux, il a représenté quatre figures allégoriques symbolisant pour lui, les forces vives de l’État : la Justice, l’Agriculture, l’Industrie et le Commerce, et la Guerre. Les quatre plus petits, disposés aux quatre angles de la pièce, entre les caissons principaux, sont couverts de figures d’enfants, avec des attributs, comme :
La chouette de Minerve pour la Sagesse,
La massue d’Hercule pour la Force vertu,
Le ciseau et le marteau pour les Arts.
Dans les trumeaux allongés, séparant les fenêtres et les portes, ont été peints en grisaille, les principaux fleuves de France la Loire, le Rhin, la Seine, le Rhône, la Garonne et la Saône. L’océan et la Méditerranée, cadre naturel du pays, ont été placés des deux côtés du trône. Son travail fut bien accueilli par les critiques, qui, dans leur ensemble, lui reconnurent les talents d’un grand décorateur, à l’égal d’un Primatice ou d’un Medardo Rosso. Pour eux, Delacroix avait su allier intelligence et culture, en choisissant des thèmes adaptés à l’espace et au volume du lieu à décorer. La Salle du Trône aujourd’hui appelé salon Delacroix, où le roi se rendait pour inaugurer les sessions parlementaires, était effectivement une pièce ingrate à décorer, de format carré, d’environ 11 mètres de côté et qu’il dut faire aménager.

Les dernières années

Les derniers grands ensembles décoratifs
La coupole centrale de la bibliothèque, représentant la Législation
À peine son œuvre fut-elle achevée dans le salon du Roi, qu'en septembre 1838 le ministre de l'Intérieur Camille de Montalivet lui confie le décor de la bibliothèque de l'Assemblée nationale, toujours dans le Palais Bourbon. Pour ce projet d'une grande ampleur, Delacroix peindra les 5 coupoles, ainsi que les deux culs-de-four de la salle de lecture.
Chacune des cinq coupoles est consacrée à une discipline, évoquée dans les pendentifs par des scènes ou des évènements qui l'ont illustrée : la Législation au centre, la Théologie et la Poésie d'un côté, la Philosophie et les Sciences de l'autre.
Les deux culs-de-four qui les encadrent représentent quant à eux la Paix, berceau du savoir, et la Guerre, qui en est l'anéantissement :
« Attila, suivi de ses hordes, foule aux pieds l'Italie et les Arts cul-de-four de la guerre
« Orphée vient policer les Grecs encore sauvages et leur enseigner les Arts de la Paix cul-de-four de la paix
Ce travail s'échelonnera jusqu'à la fin de l'année 1847, le chantier ayant pris du retard pour divers problèmes de santé et d'autres travaux en parallèle. L'ensemble est accueilli avec enthousiasme par la critique, et a participé à sa reconnaissance en tant qu'artiste complet, se situant dans la tradition de la renaissance italienne.
Il fut également sollicité dans le même temps pour la décoration de la salle de lecture de la bibliothèque du Sénat au Palais du Luxembourg à Paris, entre 1840 et 1846 :
coupole La rencontre de Dante et Homère : Homère, les Grecs, Orphée, les Romains.
quatre médaillons hexagonaux La Philosophie, La Théologie, L'Éloquence, et La Poésie.
un dessus de fenêtre Alexandre après la bataille d'Ardelles.

La consécration

Tant que la demande des collectionneurs reste minoritaire, sa carrière dépend du mécénat officiel. Il y a les acquisitions directes effectuées généralement sur les fonds privés du souverain. Pour se concilier les faveurs du pouvoir, il fréquente tous les cercles politiques à la mode et ne refuse jamais une visite pouvant s’avérer fructueuse. Durant toute sa vie à l'exception des dernières années marquées par la maladie, Delacroix a une vie mondaine intense mais en souffre, se pliant à cette mode afin d'obtenir des commandes.
Bien que trouvant des appuis auprès de la presse, des revues d’art et de certains critiques de l’époque Théophile Gautier et Charles Baudelaire seront de constants soutiens, son génie ne sera que tardivement reconnu par les milieux officiels de la peinture. Il ne triomphera qu’en 1855 à l’Exposition Universelle et ne sera élu à l’Institut de France que le 10 janvier 1857 au siège de Paul Delaroche, après sept candidatures infructueuses, Ingres s'opposant à son élection. Il n'est pas entièrement satisfait, car l'Académie ne lui donne pas le poste de professeur aux Beaux-Arts qu'il espérait. Il se lance alors dans un Dictionnaire des Beaux-Arts qu'il n'achève pas.
Delacroix devient, lors de l'exposition universelle de 1855, l'homme qui sut dépasser la formation classique pour renouveler la peinture.
Il meurt d'une crise d'hémoptysie des suites d'une tuberculose le 13 août 1863, au 6 rue de Furstemberg à Paris. Il repose au cimetière du Père-Lachaise, division 49.
Eugène Delacroix participa à la création, en 1862, de la Société nationale des beaux-arts mais laissa son ami, le romancier Théophile Gautier qui l'a fait connaître dans le cénacle romantique, en devenir le président avec le peintre Aimé Millet comme vice-président. En plus de Delacroix, le comité était composé des peintres Albert-Ernest Carrier-Belleuse, Pierre Puvis de Chavannes et parmi les exposants se trouvaient Léon Bonnat, Jean-Baptiste Carpeaux, Charles-François Daubigny, Laura Fredducci, Gustave Doré et Édouard Manet. En 1864, juste après la mort de Delacroix, la société organisa une exposition rétrospective de 248 peintures et lithographies de ce célèbre peintre et step-uncle de l'empereurQuoi ?.
Cet effort de discipline et de maîtrise fut reconnu par une partie de la critique contemporaine, mais le public en resta généralement aux toiles, toujours plus ou moins sujettes à polémiques, que Delacroix continuait parallèlement à envoyer au Salon : Femmes d'Alger dans leur appartement (1834), Bataille de Taillebourg 1837, Médée furieuse 1838, Justice de Trajan 1839, Prise de Constantinople par les croisés et Noce juive dans le Maroc 1841, Les Dernières Paroles de l'empereur Marc Aurèle et Le Sultan du Maroc 1845, la Chasse aux lions 1855 sont les plus marquants de ces tableaux qui montrent la fécondité du peintre vieillissant autant que sa prodigieuse activité. Une rétrospective particulière lui fut consacrée, comme à Ingres, Horace Vernet et Alexandre Gabriel Decamps, au sein de la section des Beaux-Arts lors de l'Exposition universelle de 1855, forme de reconnaissance officielle que vint couronner, à sa septième tentative, sa tardive élection à l'Institut, en 1857. Devenu d'une certaine façon, à son tour, un classique, il semblait y représenter, face à Ingres, aux tenants du dessin, aux partisans de Raphaël et de Poussin, le primat de la couleur, de Véronèse, de Titien et de Rubens.
C'est cette interprétation qui prévaut généralement dans les esprits, autant que celle qui fait de lui le peintre romantique par excellence. On a vu tout ce qu'il peut y avoir de juste, mais aussi de partiel, dans cette vision des choses que viendraient encore plus contrecarrer, s'il en était besoin, les écrits mêmes de Delacroix, son Journal, tenu entre 1822 et 1824, puis, après une longue interruption de nouveau à partir de 1847, son projet de Dictionnaire des beaux-arts 1857, resté à l'état manuscrit, ses articles, sa correspondance, qu'on commença à faire paraître au lendemain de sa mort. L'écrivain et le théoricien, malgré un réel effort d'édition et de recherche, restent en fait ignorés de beaucoup, comme est d'ailleurs méconnue une bonne part de son œuvre, négligée alors même qu'elle n'a cessé de constituer un repère et une source d'inspiration pour tous les peintres qui ont suivi. Une des raisons principales de cette situation tient sans doute à l'inintelligibilité, pour le grand nombre, des sujets traités par Delacroix, qui empêche de rentrer au plus intime de sa démarche esthétique. Mais la facture de ses tableaux, de ses aquarelles, de ses dessins et de ses estampes n'en reste pas moins séduisante, comme la liberté de son style, et explique le succès rencontré, dans le même temps, par les expositions qui lui sont consacrées. Son rôle dans le mouvement moderne en peinture ne doit toutefois pas faire oublier combien il tenait à ce qui l'avait précédé. Delacroix n'écrivait-il pas déjà, en 1824, ce qui fait les hommes de génie ou plutôt ce qu'ils font, ce ne sont point les idées neuves, c'est cette idée, qui les possède, que ce qui a été dit ne l'a pas encore été assez. Barthélémy Jobert

Après sa mort

À sa mort, les artistes contemporains lui rendirent de vibrants hommages, notamment Gustave Courbet. Authentique génie, il a laissé de nombreuses œuvres engagées qui étaient souvent en rapport avec l'actualité Les massacres de Scio ou La Liberté guidant le peuple. Il exécuta aussi nombre de tableaux à thèmes religieux La Crucifixion, La Lutte de Jacob avec l'Ange, Le Christ sur le lac de Génésareth, etc., bien qu'il se soit parfois déclaré athée. Sur tous les terrains de son époque, il reste le symbole le plus éclatant de la peinture romantique.
En 1930, pour le centenaire du romantisme, Élie Faure apporte cependant des mises au point sur ce terme attribué à Delacroix. Delacroix est, selon lui, plus classique qu'Ingres : Il est aisé de montrer qu'Ingres, par ses déformations plus arbitraires qu'expressives et son peu d'intelligence de l'ordre rationnel d'une composition, est à la fois plus romantique et moins classique en dépit de ses qualités réalistes et sensuelles que Delacroix, Barye ou Daumier. La définition du mot romantique » en peinture devant être élargie, toujours selon Élie Faure : Les plus grands de nos classiques sont des romantiques avant la lettre, comme les bâtisseurs de cathédrales l'étaient quatre ou cinq siècles auparavant. Et à mesure que les temps s'éloignent, on s'aperçoit que Stendhal, Charles Baudelaire, Barye, Balzac, Delacroix prennent naturellement place auprès d'eux. Le romantisme, en vérité, pourrait n'être réduit à se définir que par l'excès de la saillie, qui est le principe de l'art-même et de la peinture avant tout. Mais où commence cet excès, où cesse-t-il ? Avec le génie justement. Ce serait donc les mauvais romantiques qui définiraient le romantisme.

L'influence de Delacroix

L'œuvre de Delacroix inspirera nombre de peintres, tel le pointilliste Paul Signac ou Vincent van Gogh161. Ses tableaux témoignent en effet d'une grande maîtrise de la couleur.

Delacroix et la gravure

Faust de Goethe
En 1827, l'éditeur et lithographe Charles Motte le persuade d'illustrer la première édition française du Faust de Johann Wolfgang von Goethe, lui-même se chargeant de lithographier les planches et de les colorier à l'aquarelle.

Delacroix et la peinture d'histoire
Les thèmes littéraires
La plupart des œuvres de Delacroix sont d'inspiration littéraire. Il en était déjà ainsi de sa La Barque de Dante. Il en sera de même de son Sardanapale162, inspiré d'un poème de Byron ; il en sera également ainsi de sa Barque de don Juan, tiré d'un autre poème de Byron, et il en sera encore ainsi de quantité d'autres peintures qui sortent tout droit des œuvres de Shakespeare, de Goethe163 ou d'autres écrivains, notamment Walter Scott, Dante et Victor Hugo. Les Pirates africains enlevant une jeune femme au Louvre, seraient vraisemblablement inspirés par une de ses Orientales la Chanson du Pirate.

Les thèmes religieux
Il exécuta aussi nombre de tableaux à thème religieux tout au long de sa carrière :

La Crucifixion.
Lutte de Jacob avec l'Ange, Saint Michel terrassant le dragon, Héliodore chassé du temple, chapelle des Saints-Anges de l'église Saint-Sulpice, Paris.
Le Christ sur le lac de Génésareth.
La Vierge du Sacré-Cœur.
Pietà.
Saint Sébastien.
Madeleine au désert.
Le Christ au Jardin des Oliviers 1827, Église Saint-Paul-Saint-Louis, Paris.
Le Christ sur la croix également connu sous le nom de Le Christ entre les deux larrons ou Le Calvaire 1835, musée de la Cohue de Vannes.
L'Éducation de la Vierge 1842, Musée national Eugène-Delacroix.

Le Journal d’Eugène Delacroix

Débuté en 1822, interrompu en 1824, repris en 1847 jusqu'en 1863 à sa mort, le journal intime de Delacroix est le chef-d'œuvre littéraire du peintre. Il y note ses réflexions sur la peinture, la poésie ou la musique. Il y consigne ses discussions avec George Sand (avec qui il entretient une profonde amitié), la baronne Joséphine de Forget (dont il est l'amant pendant une vingtaine d'années), Chopin, Chabrier… C'est un témoignage au jour le jour non seulement sur la vie du peintre, de ses inquiétudes, de sa mélancolie (qu'il évite de montrer à ses proches, excepté à sa gouvernante et confidente Jenny Le Guillou, Delacroix n'ayant jamais été marié), mais aussi de la vie parisienne au milieu du xixe siècle. On y remarque également une certaine misogynie et une obsession du corps masculin : "Je regarde avec passion et sans fatigue ces photographies d'hommes nus, ce poème admirable, ce corps humain sur lequel j'apprends à lire et dont la vue m'en dit plus que les inventions des écrivassiers"164. La première édition du Journal de Delacroix est parue chez Plon en 1893 et a été révisée en 1932 par André Joubin, puis rééditée en 1980 avec une préface d'Hubert Damisch chez le même éditeur. Il a ensuite fallu attendre 2009 pour que Michèle Hannoosh en publie, aux éditions José Corti, une monumentale version critique, corrigée sur les manuscrits originaux et augmentée des découvertes récentes. On doit aussi à Delacroix l'ébauche d'un Dictionnaire des Beaux-Arts, assemblé et publié par Anne Larue, et des articles sur la peinture.

Bibliothèque numérique de l'INHA - Journal et Correspondance d'Eugène Delacroix
Ateliers
Au 20 rue Jacob, à Paris, en 1824 dans l'atelier que lui laissa Thales Fielding.
Delacroix travailla longtemps dans son premier atelier de la rue Notre-Dame-de-Lorette, à Paris. En 1857, afin de se rapprocher de l’église Saint-Sulpice dont il avait été chargé en 1847 de décorer une chapelle, il rejoignit l'Atelier de la rue Furstenberg. Célèbre adresse où se succèderont Frédéric Bazille, Claude Monet, ou encore Diogène Maillart, élève de Delacroix et Grand Prix de Rome en 1864.

Élèves de Delacroix liste non exhaustive

Alexandre Bida 1813-1895, peintre
Émile Hirsch 1832-1904, peintre-verrier.
Diogène Maillart.
Victor Monmignaut 1819-1891
Maurice Sand fils de George Sand
Les œuvres de Delacroix
Les dessins et peintures
De 1819 à 1821
Nu assis, dit Mlle Rose, (1817-1820), musée du Louvre à Paris,
La Vierge des Moissons, (1819), église Saint-Eutrope d’Orcemont,
Étude d’homme nu, dit aussi Polonais, (vers 1820), musée du Louvre à Paris,
La Vierge du Sacré-Cœur, (1821), (cathédrale d’Ajaccio),
De 1822 à 1824
La Barque de Dante ou Dante et Virgile aux Enfers, (1822), 189 × 241,5 cm, (musée du Louvre à Paris),
Études de chevaux, (vers 1822-1824), 27 × 32,5 cm, (Collection particulière),
Les Natchez, (1822-1835), (Metropolitan Museum of Art de New York),
Bouquet de fleurs, (vers 1824), (musée des Beaux-Arts et d'Archéologie de Châlons-en-Champagne),
Cheval arabe à la couverture bleue, (1823), (New York, Collection particulière),
Scènes des massacres de Scio, (1824), (musée du Louvre à Paris),
Jeune orpheline au cimetière, (1824), (musée du Louvre à Paris),
Le Tasse dans la maison des fous, (Collection particulière),
Aline la mulâtresse ou Portrait d'Aspasie la Mauresque, (vers 1824), (musée Fabre de Montpellier),
Autoportrait dit en Ravenswood ou en Hamlet, (vers 1824), (musée Eugène-Delacroix à Paris),
Le Christ au jardin des Oliviers, (1824-1827), église Saint-Paul-Saint-Louis de Paris),
De 1825 à 1832
La Femme au bas blanc, (1825), (collection privée),
Deux chevaux de ferme, (1825?), (Brame et Lorenceau),
fresques de la chambre de Madame de Pron (vers.1826),
Louis d'Orléans montrant sa maitresse, (1825-1826), 35,2 × 26,8 cm, (musée Thyssen-Bornemisza à Madrid)
La Grèce sur les ruines de Missolonghi, (1826), 213 × 142 cm (musée des Beaux-Arts de Bordeaux),
Le Doge Marino Faliero condamné à mort, (1826) (Wallace collection de Londres),
Combat de Giaour et Hassan, (1826) (Art Institute de Chicago),
Nature morte aux homards, (1826-1827) (musée du Louvre à Paris),
Louis-Auguste Schwiter, (1826-1830) (National Gallery de Londres),
La Mort de Sardanapale, (1827-1828), huile sur toile, 392 × 496 cm, (musée du Louvre à Paris),
Femme avec un perroquet, (1827) (musée des Beaux-Arts de Lyon),
le Christ au jardin des Oliviers, (1827) (Église Saint-Paul-Saint-Louis Paris),
Méphistophélès apparaissant à Faust, (1827), (Wallace Collection de Londres),
Portrait d'Auguste-Richard de la Hautière, (1813-1882), (1828), (musée Eugène-Delacroix à Paris),
Cromwell au château de Windsor, (1828), (galerie Hans à Hambourg)
Jeune Tigre jouant avec sa mère (1830), huile sur toile, 130,5 cm × 195 cm, Musée du Louvre, Paris « Notice no 000PE000908 », base Joconde, ministère français de la Culture
L'Assassinat de l'évêque de Liège, (1829), (musée du Louvre à Paris),
La Liberté guidant le peuple, (1830), (260 × 325 cm) (Louvre-Lens à Lens),
Mirabeau et Dreux-Brézé, le 23 juin 1789, (1830), (musée Eugène-Delacroix à Paris),
La Bataille de Poitiers, (1830), (musée du Louvre à Paris),
La Bataille de Nancy, (1831), 237 × 350 cm, (musée des Beaux-Arts de Nancy),
Boissy d’Anglas saluant la tête du député Féraud, (1831), (musée des Beaux-Arts de Bordeaux),
Paganini jouant du violon (1831), (Collection Philipps de Washington),
Fantasia arabe ou exercices marocains, (1832), (musée Fabre de Montpellier),
Fantasia marocaine, (1832), (Städelsches Kunsinstitut, Francfort),
Campagne anglaise (1825), musée du Louvre à Paris,
Tigre attaquant un cheval sauvage (1826-1829), musée du Louvre à Paris,
Paire de babouches, (1832), pastel sur papier, 10 × 18 cm, (musée Eugène-Delacroix à Paris).
De 1833 à 1839
L'Éducation d'Achille, (1833-1847), (Palais-Bourbon de Paris),
Portrait de Léon Riesener, (1834), (musée du Louvre à Paris),
Femmes d'Alger dans leur appartement, (1834), 180 × 229 cm (musée du Louvre à Paris),
Le Christ entre les deux larrons., 1835, (La Cohue) - (musée des beaux-arts de Vannes).
Portrait de Félix Guillemardet, hst, (coll.part. USA)166
Hamlet et Horatio au cimetière, (1835), (Francfort),
La Bataille de Taillebourg, (1835-1837), 485 × 555 m, (musée du château de Versailles),
Turc à la selle, (vers 1835-1840), (musée du Louvre à Paris),
Saint Sébastien, (1836), (église Saint-Michel de Nantua),
Hamlet au cimetière, (1836), (Suisse, collection particulière),
Autoportrait au gilet vert, (1837), 65 × 54,5 cm, (musée du Louvre à Paris),
Charles Quint au monastère de Yuste, (1837), (musée Eugène-Delacroix à Paris),
Guerrier près d'un tombeau, (1838), (Museum of Art d'Hiroshima),
Portrait de Chopin, (1838), (musée du Louvre à Paris) ;
Portrait de George Sand, (1838), (Ordrupgoard-Samlingen d'Ordrupgoard),
Fanatiques de Tanger, (1838), 98 × 131 cm, (Minneapolis Institute of Arts),
Christophe Colomb et son fils à La Rabida, (1838), (Museum of Art de Toledo),
Médée furieuse, (1838), 260 × 165 cm, (Palais des Beaux-Arts de Lille),
Hamlet et Horatorio au cimetière, (1839), (musée du Louvre à Paris),
Le Retour de Christophe Colomb, (1839), (Museum of Art de Toledo),
De 1840 à 1846
Entrée des Croisés à Constantinople, (1840), (musée Condé de Chantilly),
Autoportrait, (1840), (Galerie des Offices de Florence),
Entrée des Croisés à Constantinople, (1840), 410 × 498 cm, (musée du Louvre à Paris),
La Justice de Trajan, (1840), (musée des Beaux-Arts de Rouen),
Le Naufrage de Don Juan, (1840), (musée du Louvre à Paris),
Portrait de Jenny Le Guillou, (1840), (musée du Louvre à Paris),
Indienne dévorée par un tigre, (v. 1840-1850), (Staatsgalerie de Stuttgart),
La Noce juive au Maroc, (1841), (musée du Louvre à Paris),
La Fuite de Loth, (v. 1841), (musée du Louvre à Paris),
L'Éducation de la Vierge, (1842), (musée Eugène-Delacroix à Paris),
Cheval attaqué par une lionne, (1842), (musée du Louvre à Paris),
Pietà, (1843-1844), (Église Saint-Denis du Saint-Sacrement à Paris),
Madeleine dans le désert, (1845), (musée Eugène-Delacroix à Paris),
Le Sultan du Maroc entouré de sa garde, (1845), (musée des Augustins de Toulouse),
Le Christ en croix, (1846), (Walters Art Museum de Baltimore),
Corps de garde à Meknès, (1846), (Von der Heydt Museum de Wuppertal),
De 1847 à 1853
Corps de garde marocain, (1847), (musée Condé à Chantilly),
Musiciens juifs de Mogador, (1847), (musée du Louvre),
Marocains jouant aux échecs, (vers 1847-1848), (National Gallery of Scotland d'Édimbourg),
Comédiens et Bouffons arabes, (1848), (musée des Beaux-Arts de Tours),
Paysage à Champrosay, (vers 1849), (musée Malraux du Havre),
Othello ou le Maure de Venise et Desdémone, (1849), (Ottawa),
Michel-Ange dans son atelier, (1849-1850), (musée Fabre de Montpellier),
Lady Macbeth Somnambule, (1850), (The Beaverbrook Art Gallery, Canada),
Lion dévorant un Lapin, (1850), (musée du Louvre à Paris),
Apollon combattant le serpent Python, (1850-1851), (Galerie d'Apollon du musée du Louvre à Paris),
Cavalier arabe donnant un signal, (1851), (The Chrysler Museum de Norfolk),
La Mer à Dieppe, (1852), (musée du Louvre à Paris),
Parfise et la Demoiselle, (1852), (Walters Art Gallery de Baltimore),
La Fiancée d'Abydos, (1852-1853), (musée du Louvre à Paris),
Le Christ sur le lac de Génésareth, (vers 1853), (Portland Art Museum),
De 1854 à 1863
La Chasse aux lions, (1854), (musée d’Orsay à Paris),
Baigneuses ou Femmes turques au bain, (1854), (Wadsworth Atheneum à Hartford),
Les deux Foscari, (1855), (Musée Condé de Chantilly),
Marocains en voyage, (1855), (Museum of Art de Providence, Rhode Island),
Chapelle des Saints Anges à l’Église Saint-Sulpice de Paris), (1855-1861) peinture à l’encaustique, appliquée sur le mur préalablement imbibé d’huile et recouvert d’une couche de blanc de céruse :
Lutte de Jacob avec l'Ange,
Saint Michel terrassant le dragon,
Héliodore chassé du temple,
Les Convulsionnaires de Tanger, (1857), (musée des Beaux-Arts de l'Ontario de Toronto),
Chasses aux lions, (1858) (Art Institute de Boston),
L'Enlèvement de Rébecca, (1858), (musée du Louvre à Paris),
Ovide chez les Scythes, (1859), 88 × 130 cm, (National Gallery de Londres),
Hamlet et Horatio au cimetière et les deux fossoyeurs, (1859), (Musée du Louvre à Paris,
Chevaux arabes se battant dans une écurie, 1860, Musée du Louvre à Paris,
Ugolin et ses fils dans la tour, 1860, Ordrupgaatd-samlingen d'Ordrupgaatd,
La Chasse aux lions, 1860-1861, Art Institute de Chicago,
Médée furieuse, 1862 Musée du Louvre à Paris,
Chevaux à l'abreuvoir, 1862, Museum of Art de Philadelphie
Orphée secourant Eurydice, 1862 Musée Fabre de Montpellier
Camp arabe, la nuit, 1863, Szépmüvészeti Muzeum de Budapest
La Perception de l’impôt arabe ou Combat d'Arabes dans la montagne, 1863, National Gallery de Washington,

Les gravures Les lithographies

Macbeth consultant les sorcières, 1825, lithographie, Bertauts, R. Rodier imprimeur, Paris
Faust et Méphistophélès galopant dans la nuit du sabbat, 1826, Nemours au Château-Musée
Faust dans la prison de Marguerite, 1826, lithographie, chez motte imprimeur, Paris

Écrits

Œuvres critiques
Œuvres littéraires : I. Études esthétiques 1829-1863 : http://classiques.uqac.ca/classiques/ ... s/etudes_esthetiques.html
Journal et correspondance
Eugène Delacroix, Journal : précédé d'une étude sur le maître, Paris, Plon,‎ 1893, 3 volumes (tome 1 : 1822-1850, tome 2 : 1850-1854, tome :
édition établie par Paul Flat et René Piot
Eugène Delacroix, Journal (1822-1963), Paris, José Corti, coll. « Domaine Romantique »,‎ 2009, 2 volumes (tome 1 : 1822-1857, tome 2 : 1858-1863), 2519 p.
nouvelle édition intégrale établie par Michèle Hannoosh
George Sand et Eugène Delacroix, Correspondance : le rendez-vous manqué, Paris,
édition de Françoise Alexandre
Eugène Delacroix, Journal , Bibliothèque numérique de l'INHA

Objets d'usage courant

Plusieurs œuvres d'Eugène Delacroix ont servi à des objets français d'usage courant :
Eugène Delacroix sur le billet de 100 Francs 1979 de la Banque de France
Dans les années 1980, une série de timbres postaux représenta des détails du tableau suivant : La Liberté guidant le peuple.
À la fin du XXe siècle, le billet de banque de cent francs commémorait Delacroix et son tableau La Liberté guidant le peuple. Il s'agissait alors du seul billet de banque au monde représentant une femme aux seins nus. Il était impossible de le changer en monnaie locale dans certains pays islamiques.
Généalogie cognatique et collatéraux
La grand-mère de Delacroix, Françoise Vandercruse était la sœur du célèbre ébéniste Roger Vandercruse. Elle épousa, en premières noces, l'ébéniste Jan-François Œben, puis à la mort de ce dernier, elle s'unit avec Jean-Henri Riesener, élève de son premier époux.
Victoire Œben, fille de Françoise Vandercruse et Jean-François Œben épousa Charles Delacroix d'où ? Eugène.
Jean-Henri Riesener et Françoise Vandercruse eurent un fils le peintre Henri-François Riesener 1767-1828. H.-F. Riesener eut de son union avec Félicité Longrois un fils le peintre Léon Riesener 1808-1878, demi-cousin d'Eugène Delacroix.



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#80 Re: L'atelier de Mafalda
emma Posté le : 23/04/2015 12:16
Bonjour,

C'est l'oiseau de ton dernier poème?
Très réussi, bravo !



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Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
.

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