Modérateur
Inscrit: 03/05/2012 10:18
De Corse
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A force de voir, par la fenêtre du train ou du bus m'emmenant au boulot, des gens vivre en vacances, j'avais commencé à me dire qu'après tout, ce n'était écrit nulle part que je ne pouvais pas en prendre, moi aussi.. Vous ne pouvez pas vous imaginer comme c'est démoralisant, alors que vous roulez vers une cimenterie d'un beau gris uniforme, en plein été, de longer la mer au mois de juillet. La côte Bleue, de Marseille à Martigues, en passant par Carro, Carry-le rouet, Sausset-les-Pins, La Couronne et toutes les petites calanques que je voyais défiler , en bas de la voie ferrée, est vraiment un endroit idéal pour les vacances. Pas en passant pour aller au boulot. Je voyais des gens sortir de leur tente en s'étirant, d'autres déjà installés sous un arbre,prenant leur petit-déjeuner ou d'autres encore en train de barboter dans la mer. Je me disais toujours que, moi aussi, je passerai un jour des vacances au soleil, comme eux. Je ne savais pas quand, mais je le ferai.
Le temps avait passé . J'avais deux petites filles de deux ans et cinq ans. Ma situation s'était améliorée dans la mesure où je ne manquais jamais de travail et que je disposais maintenant d'une voiture de fonction que je pouvais utiliser à ma guise. C'était l'époque durant laquelle il était possible de travailler de jour, de nuit, dimanches et jours de fêtes; autant qu'on le pouvait, ce qui permettait de vivre décemment. C'était ce que je faisais. Le coup de tête, vous connaissez ? Je suis un homme à avoir des coups de tête, ce qui me vaut parfois des surprises. Alors que j'étais loin d'y penser un quart d'heure auparavant, je me suis retrouvé, dans un magasin Trigano, en train de désigner du doigt tout ce que je voyais. Je n'en revenais pas moi-même ! Tout, je voulais tout. Le vendeur, ayant vu la bonne affaire, me signalait ce qui n'était pas sous mes yeux Ça allait de la petite cuillère au réchaud à gaz en passant par les matelas pneumatiques, table chaises, fauteuils . Tout. Et j'avais toujours l'impression qu'il manquait quelque chose.. Grande tente ' deux chambres avec séjour'. Pour bibi.Jusqu'au moment où je me suis senti désemparé lorsque je me suis aperçu que je ne pouvais plus acheter quoi que ce soit : j'avais tout. Bien sur que c'était au-dessus de mes moyens ! Le vendeur, finaud, me proposa un mode de paiement qui ne pouvait que me convenir et m'aida à charger mon véhicule et ma galerie de tout mon matèriel tout neuf. Petite parenthèse en passant pour vous dire que l'année suivante, je me retrouvais de la même façon en train de remorquer un bateau " Tabur IV " avec moteur et équipement, avant même d'avoir compris ce qui m'arrivait. Elle est pas belle, la vie ?
Bon. J'avais mon matériel, maintenant, fallait s'en servir Là , j'étais coincé : bien obligé de prendre les vacances que je refusais avec obstination depuis tant de temps. Je suis aussi un velléitaire: mes vacances, je les ai voulu tout de suite. Des fois, je m'agace.. Autre parenthèse : Sans avoir prémédité quoi que ce soit, un Vendredi soir, je suis rentré à la maison pour passer, enfin un vrai week-end dans mes pantoufles...et le samedi, au petit matin, nous faisions notre entrée dans Versailles endormi...Je me suis calmé, mais il fut un temps où il fallait avoir envie de me suivre. Idem pour notre balade du samedi après-midi au centre commercial des Milles, près d'Aix. Le soir, on mangeait dans une petite auberge paumée, dans les montagnes, au dessus de Gênes, en Italie. Non..J'ai même pas honte. En attendant, j'avais tout mon matériel de camping qui vibrait d'impatience dans mon entrée. J'avais déjà tout essayé, je comptais bien m'en servir ! Je crois que mon employeur ( un ami ) a été aussi surpris que moi de me voir partir en congé dans l'heure qui a suivi l'expression de mes intentions. Et c'est ainsi que, très tôt le lendemain matin, la voiture chargée et surchargée de tout mon beau matériel, ma petite famille essayant de réaliser ce qui lui arrivait, je me mis au volant pour prendre la route vers de nouvelles aventures. Où ça ? Alors là ! fallait pas encore me le demander. On prenait la route, quoi... Ce qui me rappelle qu'une autre fois, plus tard, partant pour le Limousin, nous nous sommes retrouvés près de Barcelonne en train de manger une paella. Oui.Bon...
" Le soleil, la route, le ciel et le grand vent, ma pipe et mon bandonéon !..." Chacun de nous chantait ou gazouillait, selon ses moyens. Il faisait un temps splendide, un vrai temps de vacances et, cette fois-ci, il était aussi pour moi ! Sur la route avec ma petite famille, ne sachant pas où nous allions, chaque kilomètre était un début de vacances. En fin de matinée, ayant traversé Avignon. Passé le pont de l'Europe, nous avons trouvé un petit bosquet de verdure pour inaugurer notre table pliante et nos chaises.Nous mangions dans la nature, et nous allons le faire tous les jours pendant quelques temps. Comme nous étions sur la route de Bagnoles/Cèze, il n'y avait aucune raison pour faire demi-tour. Alors nous nous sommes retrouvés à Bagnoles/Cèze. La Cèze, c'est une rivière. Nous avons pris la route qui la longe et, de suite, j'ai senti que ce serait quelque part au bord de cette rivière que nous nous installerions. J'ai eu raison de me faire confiance. Goudargues est un petit village charmant.Après quelques kilomètres durant lesquels j'étais tenté , sans cesse, de m'arrêter pour nous installer, j'ai trouvé l'endroit idéal: une petite plage au bord de la rivière, entourée de buissons. Certains seront sans doute surpris que ce ne soit pas dans un camping que je me suis arrêté. Le camping sauvage était encore toléré, à cette époque, ce qui permettait de choisir sur un coup de cœur La griserie de l'aventure ne m'empêcha pas de monter la tente en veillant bien à ce que la chambre enfants soit un peu enfoncée dans les bosquets, donc inaccessible, de l'extérieur, la nuit.. Ça y était ! il était là , tout installé, mon petit matériel !
La première nuit a été pratiquement blanche, pour moi. J'avais l'oreille aux aguets et le moindre craquement me faisait sortir de la tente, carabine en main. Un bruit de branches...Je suis sorti en vitesse. Pour voir, dans les fourrés, sous un mauvais clair de lune, deux yeux blanchâtres qui me fixaient, sans bouger. J'ai braqué mon arme et j'ai attendu que la bête se décide.J'ai attendu longtemps et puis j'en ai eu marre. Je me suis approché lentement, le doigt sur la gâchette, trèèès lentement...Jusqu'à la boite de conserve qu attrapait la faible lueur de la lune , dans un semblant de regard entre quatre zieux.
Ah les belles vacances que nous avons passés, au bord de la Cèze ! les baignades, avec mes deux filles collées à moi comme des arapèdes, une sur le ventre, une sur le dos. Les dévalades de cascades dans le courant qui nous entraînaient à vive allure, le bruit de l'eau couvert par les lamentations de mon épouse qui n'appréciait pas notre témérité et qui nous le criait bien fort.
Nous avons eu l'occasion depuis, assez souvent, d'y retourner pour de courts séjours. La dernière fois, c'était il y a quelques années. Nous avons eu bien du mal à reconnaître les lieux .Des professionnels des vacances s'en étaient occupé...
Posté le : 04/02/2014 21:02
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