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Accueil >> newbb >> Défi d'écriture du 22/02/2014 [Les Forums - Défis et concours]

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Défi d'écriture du 22/02/2014
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C'est à moi de proposer un sujet ?
Chacun a la mémoire qu'il peut. Les souvenirs commencent à nous imprégner dès une époque de notre vie, mais laquelle ?
Essayez de retrouver et de raconter le tout premier souvenir dont vous pensez vous rappeler.

Posté le : 21/02/2014 17:59
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Re: Défi d'écriture du 22/02/2014
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Souvenir

Si je me pose et demande à ma mémoire de procéder à son devoir de souvenir, me viennent alors des images, des morceaux de vie, comme des extraits de films « super 8 », tels ceux que possédait mon grand-père paternel, grand fan de caméras depuis l’enfance.

Je dois avoir trois ou quatre ans. Je vois une petite maison de rangée dans le bas d’une rue de Saint Nicolas, petite ville dans la banlieue industrielle de Liège, dont la pente fait frémir en cas de verglas ; douze pourcent ! Par la fenêtre, je vois de grandes cheminées d’usine cracher une fumée noire et opaque. On me raconte que Frédéric François habiterait un peu plus loin et, plus tard, que Sandra Kim (https://www.youtube.com/watch?v=AnQ9424lxlo) aurait été aperçue à l’arrêt de bus juste à côté.

Je vais souvent jouer avec les siciliens d’en face, les Rizzo, une famille très nombreuse où les enfants sont tous plus âgés que moi et me prennent pour la petite sœur, une aubaine pour la fille unique que je suis. Les parents sont de vrais italiens et la « mamma » prépare les pâtes comme personne.

Mais pourquoi sommes-nous à Liège alors que tout le reste de la famille est à Mouscron, la ville de naissance de mes parents et moi ? Papa, jeune ingénieur chimiste, diplôme tout frais en poche, a trouvé son premier job ici et on a dû migrer. J’ai l’âge d’aller à l’école, celle qui est à quelques mètres de la maison, une petite école catholique où des bonnes sœurs donnent cours. Lorsque nous passons à Mouscron saluer mes grands-parents, oncles et tantes, ils rient de mon accent liégeois très marqué.

Mon idole du moment est Chantal Goya. Ses spectacles passent à la télévision mais finissent trop tard pour mon jeune âge. Mes parents me promettent donc de les enregistrer sur des cassettes audio. Mais moi, je veux voir et non seulement entendre car les costumes et les décors sont magnifiques et enchanteurs. À pas de loup, je me poste en haut de l’escalier et tend l’oreille. Je me couche sur la dernière marche, tend l’oreille, le cou … de plus en plus … tellement que je finis par dévaler l’escalier et atterrir en pleurs en bas, dans le salon. Mes parents, surpris, comprennent et m’autorisent à regarder le spectacle de Chantal, seul moyen de me consoler. Cela valait le coup d’avoir quelques ecchymoses.

J’adore passer les après-midis dans le grenier aménagé en chambre d’ami, à écouter le gramophone qui craque en me chantant les airs qui ont bercé mes grands-parents.

Papa est embauché ailleurs, il faut encore déménager, en plein hiver vers une maison sinistre, posée en plein milieu de la campagne et des champs couverts de neige. La maison est froide, à cause des hauts plafonds, qui lui donnent un air strict, et du chauffage au charbon poussif.

Quelques jours après notre arrivée, c’est mon anniversaire et je trouve le camion que j’avais tant réclamé. Un gros camion vert et jaune sur lequel je peux m’asseoir et parcourir les immenses pièces, dans l’attente de faire le même dans le jardin, une fois les beaux jours revenus.

Ma chambre est grande, trop pour moi toute seule. Les toilettes étant situées à l’extérieur, c’est « pisspot » la nuit. J’attends de ne plus pouvoir me retenir pour allumer la lampe de chevet dont la lumière ne peut éclairer qu’une partie de la pièce. Je cours alors jusqu’au petit pot pour vider ma vessie et retourner me pelotonner, en grelottant, dans mon lit encore chaud.

Maman me demande d’aller chercher une boîte de conserve à la cave. Cette pièce m’effraie plus que toutes les autres. La lumière faiblarde illumine cet endroit sans fenêtre, à la forte odeur d’humidité avec ses drôles de signes gravés à même les murs. Je repère la boîte demandée, l’attrape et remonte l’escalier comme si ma vie en dépendait, avec l’horrible sensation que quelqu’un veut m’attraper les pieds.

Mais nous ne resterons pas longtemps dans cette maison, à ma plus grande joie, on repart enfin vers Mouscron, ville que je ne quitterai plus et qui me verra en jeune mariée, mère et assistante sociale dévouée à sa population.

Posté le : 22/02/2014 16:05
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Re: Défi d'écriture du 22/02/2014
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j'ai environ quatre ans, mes parents ont quitté le sud de la France pour habiter dans le département du Nord, nous habitons momentanément chez ma grand mère paternelle, je m'ennuie, seule enfant dans cette grande maison.
Par la fenêtre, je vois quelquefois des enfants passer, j'aimerai les rencontrer mais malgré mes pleurs, chaque après midi je dois aller faire la sieste.
Bien décidée à rencontrer d'autres enfants, Je traine une lourde chaise de la salle à manger, jusque la porte d'entrée, je grimpe sur la chaise et réussit à ouvrir la porte. La rue est complètement déserte, c'est sinistre toutes ces maisons de briques et….. il fait froid !
Sans avoir aucun souvenir de la région où nous habitions auparavant , je sais malgré tout, que c'était mieux " avant ".

Ma grand mère a fini par céder, je peux rester assise sur la marche d'entrée et un jour je vois quelques maisons plus loin, deux garçons, un très grand, et un plus petit, mais plus âgé que moi, je me dis que l' on pourrait devenir copains malgré tout ? Je n'ai pas le choix, il est le seul enfant dans cette rue.
je lui adresse un petit signe de la main sans savoir si seulement il me regarde.

Et chaque jour, assise sur un coussin, j'espère le revoir… et quand il apparait, je réitère mon bonjour avec la main. Il ne répond jamais.
Ma grand mère m'a dit qu'il serait surprenant qu'il joue avec moi, étant donné la différence d'âge et, en plus, il a des copains dans une autre rue.

Un jour, il se dirige dans ma direction, il marche seul, au milieu de la rue, je suis émue, il va me parler et nous allons jouer ensemble, je vais avoir un compagnon de jeux !
Il passe indifférent, restant au centre de la rue, il me jette seulement un regard furtif, j'ai envie de pleurer, il ne sera pas mon copain…

J'ignorai encore que nous allions devenir les meilleurs amis du monde pendant quelques années, mes parents ayant quitté l'habitation de ma grand mère pour habiter la maison juste en face.

J'ignorai que nous nous retrouverions, un jour et un peu plus grands, perchés dans un prunier mangeant des fruits pas mûrs et fumant des cigarettes qu'il avait piqué à son grand frère et que nous serions, évidemment, malades tous les deux.
J'ignorai qu'il m'emmenerait partout avec lui : chez ses copains, en ville avec son grand frère. Que j'aiderai à la construction d'une cabane et que nous irions jouer sur les arbres de la scierie, que nous jouerions au mécano,aux billes, au foot, qu'il me raconterait l'histoire de Jésus et qu'il partagerait ses bonbons et les chewing-gums auquels je n'avais pas encore droit.
Et puis, la vie, nous a séparés . J'avais sept ans, mes parents démangeaient une nouvelle fois. Je ne sais pas ce qu'il est devenu mais Il reste toujours une petite place pour lui dans mon coeur.







Posté le : 25/02/2014 19:04
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Re: Défi d'écriture du 22/02/2014
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Bonsoir Couscous. Désolé d'avoir tardé à me manifester à ma propre proposition.. On ne fait pas toujours ce qu'on voudrait.
J'aime beaucoup que les gens se souviennent de leur petite enfance. Ce sont des souvenirs emplis de fraîcheur et de sincérité.
Les souvenirs datant de tes quatre ans sont touchants.
J'ai connu un homme qui m'assurait que les premiers de ses souvenirs n'allaient pas en dessous de ses dix ans ! Il avait l'air de ne pas être conscient du gaspillage d'une des plus belles tranches de son existence.
Tu avais la télé, dans tes souvenirs Moi, c'était Zappy Max....
Merci Couscous !

Posté le : 25/02/2014 21:49
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Re: Défi d'écriture du 22/02/2014
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Bonsoir Grenouille.
Effectivement, les souvenirs d'une petite fille, enfant unique, fraîchement débarquée dans la triste ambiance d'un coron, ne peuvent pas être empreints de couleurs .
Pauvre petite puce qui voulait des copains !
Ça finit toutefois par bien s'arranger, genre ' jeux interdits '. Tout ce qu'on n'avait pas le droit de faire était délicieux...
Merci Grenouille .

Posté le : 25/02/2014 22:00
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Re: Défi d'écriture du 22/02/2014
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Je suis un Limousin né dans une famille Normande qui, à Brive-la-Gaillarde, ne parlait pas comme tout le monde.Puis, à l'âge de cinq ans, je suis devenu un Normand qui était très sollicité par ses petits copains à cause de son drôle d'accent du midi. Ça démarrait bien...
Trente ans après avoir quitté Brive, je suis retourné dans ma ville natale pour la première fois et, aussi incroyable que cela paraisse, je me suis guidé dans la ville uniquement grâce aux souvenirs que j'en avais gardé.
Quand je me suis retrouvé devant la maison où je suis né, sur le boulevard Henri de Jouvenel, j'ai eu un doute : la maison avait subi des transformations qui empêchaient mes souvenirs de s'affirmer. Et une chose étonnante s'est produite.
Sans trop savoir ce que je faisais, j'ai contourné la maison par un petit sentier qui s'enfonçait dans des buissons; je me suis retrouvé devant un mur contre lequel mes sœurs avaient joué à la balle, j'ai contourné un petit jardin et je me suis arrêté devant une cour, à l'arrière de la maison . C'était ma maison. Les souvenirs m'ont enseveli.
L'escalier extérieur qui montait jusqu'à l'étage où nous habitions. Au pied de cet escalier, je me suis souvenu de l'arbre fruitier que mon copain le jardiner, Mr Pierre, m'avait planté. C'était un poirier, mais j'étais déjà très arrangeant : comme c'était l'époque des cerises, mon poirier, à chaque retour de la maternelle, me produisait un gros bouquet de cerises attachées avec un fil de laine dont j'aimais la couleur.
Je remarquais que la rangée de vignes, longeant le chemin d’accès à la cour, avait disparu. C'était là que maman, affolée en ne retrouvant plus, m'avait découvert à quatre pattes en train de brouter, museau dressé, le raisin à même la vigne.
C'était sur ce chemin d’accès que je situe, avec beaucoup de certitude, le tout premier souvenir dont je suis sur. Maman, lorsque je lui ai raconté un jour, m'a dit que ce n'était pas possible, tout en étant troublée par certains détails. Mon souvenir parait vraiment impossible : Par l'ouverture de mon landau, je revoie maman me poussant. Elle était habillée tout de noir, avec un chapeau haut sur la tête et une voilette noire sur le visage. Elle se souvenant, effectivement d'avoir porté le deuil à cette époque, mais que j'étais bien trop petit pour m'en souvenir....
La porte de garage contre laquelle mon père posait son vélo; le vélo que mon frère Bernard avait pris, à l'insu de nos parents, pour faire un tour sur le boulevard. Il s'est fait écraser par un camion. Tous les détails de cette soirée me sont revenus.
La sombre et triste soirée, autour de la table, à la lueur d'une faible lampe. J'étais assis sur ma chaise haute en bois et maman me faisait manger une soupe tomate-vermicelle. En pleurant, elle me nourrissait comme d'habitude: chaque cuillerée passait d'abord par sa bouche afin d' en assurer la température et un niveau de sécurité pour ma petite bouche.
Je sentais bien qu'il se passait quelque chose d'inhabituel. Et puis, il manquait un de mes frères, à table.
-" Où il est, Coco ? " ai-je demandé.
Tout le monde a éclaté en sanglots....
J'étais le plus jeune bambin de la maternelle, ma mère ayant obtenu qu'on m'accepte, bien que je n'avais pas encore l'âge requis. Ma maîtresse , lorsqu'il faisait beau, me plaçait sur un gros tapis aux couleurs vives, sous la fenêtre près de son bureau, afin de pouvoir me surveiller. Durant les récréations, les filles venaient me rejoindre pour jouer au poupon. Mes sœurs revendiquaient le droit de s'occuper de leur petit frère..
C'est ainsi qu'un après-midi, face au ciel, j'ai vu passer une escadrille d'avions. Ce que je vais vous dire est totalement dingue:
En 1961, à Agadir, quand j'ai vu une escadrille de Lancaster, j'ai de suite penser aux avions que j'avais vu, enfant, dans la cour de l'école...
Je me souviens aussi que les garçons, le soir, lorsqu'ils marchaient en rangs pour sortir de l'école, chantaient toujours la même chanson : " Maa-ré-chaaal, nous voi-là ! "
Je suis allé , durant ce court séjour à Brive, en n'utilisant que mes souvenirs d'enfant, dans tous les coins de la ville:
Le bord de la Corrèze où nous passions des journées, en famille. On m'attachait une ficelle au bout d'un bâton pour que je pêche. Mes frères , sous l'eau, venaient y accrocher de temps en temps un petit poisson .Je mangeais MA friture, le soir, fièrement.

L'esplanade, à l'entrée du pont de La Bouvie. Je m'y suis arrêté longuement. Je me suis souvenu du grand feu de la St Jean Les jeunes gens, en farandole, sautaient au travers des flammes. Sur l'estrade dressée, les danseurs de bourrée tapaient fort des pieds , au rythme des accordéons, vielles, cabrettes et cornemuses.
J'ai hésité avant de me décider à aller voir si mon vieil ami Mr Pierre était toujours en vie. Comme je le pensais âgé, au temps de mon enfance, je l'imaginais mal avec trente ans de plus. En fait, il n'avait qu'une quarantaine d'années, âge vénérable pour un bambin.
Lorsque je suis arrivé devant son jardin, son nom était toujours sur son portail. Au son de la petite clochette, le torse d'un monsieur s'est penché en arrière , surgissant d'une haie. Un visage plein de mousse est apparue: Mr Pierre, solide vieillard, se rasait sous sa tonnelle, comme il le faisait depuis toujours. Cela a été, pour moi, un moment très émouvant.
Je me suis présenté et j'ai eu l'agréable surprise de constater qu'il se souvenait parfaitement bien de ma famille. Il m'a rappelé que je venais de très bonne heure lui donner l'aubade, avec mon tambour ou mon " cor de chiasse " ( un entonnoir au bout d'un tube de caoutchouc enroulé ).Il ne se rappelait pas de mon pêcher à cerises....
C'est ainsi que, sous sa tonnelle, près du bassin où j'avais pris des têtards, tout enfant, j'ai retrouvé le goût d'un véritable sirop de de cassis, à l'eau de son puits..

Le chemin de l'école, la Guerle, où je faisais de la voiture à pédale, le cinéma-théâtre, où j'avais oublié ma belle casquette blanche toute neuve, la route de la grotte de St Antoine de Padoue, le patron de maman à qui elle adressait des rafales de prières si sincères et pathétiques qu'il condescendait, parfois, à lui faire retrouver quelques bricoles égarées.
J'avais retrouvé, dans l'air que je respirais, une odeur, un goût, des parfums indéfinissables qui s'infiltraient dans ma mémoire et qui me parlaient comme rien ne m'avait parlé avant.
Mes retours en Normandie, plus tard, après bien des années d'éloignement, n'ont jamais eu cette intensité. Jamais...


Posté le : 25/02/2014 22:09
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Re: Défi d'écriture du 22/02/2014
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Grenouille, belle évocation de cette amitié d'enfance, une qu'on n'oublie jamais, qui reste gravé dans la mémoire et le coeur.
J'espère qu'un jour vous vous croiserez à nouveau pour partager tous ces beaux souvenirs.

Merci

Couscous

Posté le : 26/02/2014 06:42
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Re: Défi d'écriture du 22/02/2014
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Bacchus, j'ai voyagé dans le temps avec toi, aux côtés de ce petit garçon qui retrouve ses souvenirs d'enfance, encore bien vivaces. Tes histoires sont comme des films que tu fais défiler dans ma tête. On sent toute l'émotion qui t'a habité pendant ce petit périple dans la ville qui t'a vu petit.

Merci

Couscous

Posté le : 26/02/2014 06:49
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Re: Défi d'écriture du 22/02/2014
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Mes premiers souvenirs

Mes premiers souvenirs sont ceux de ma mère devant la cuisinière en blouse verte. Elle m’explique que l’école c’est très bien, que je vais avoir des copains et des copines, que je vais pouvoir apprendre à lire et à écrire, que je pourrai lire tous les livres qui existent, comme mes cousines, et comme mon père. Elle me dit que je n’aurais plus besoin de personne pour me lire mes histoires préférées. D’ailleurs elle garde précieusement dans un placard des romans pour enfants que ma tante Annabelle m’a envoyé pour mon anniversaire. Ce sont des petits livres assez épais, écrits très petit. L’intérieur paraît tout noir, et il n’y a que quatre images colorées, réparties au fil des pages.

J’ai très envie d’apprendre à déchiffrer ces histoires de grandes filles. Sur une des couvertures, une hôtesse de l’air blonde sourit. Moi aussi plus tard j’aimerais bien avoir ce joli visage et ce corps beau et mince.

Pour l’instant je suis petite, je viens d’avoir trois ans et l’école me fait un peu peur. Nous sommes allées en reconnaissance avec ma mère pour repérer un peu les lieux. Souvent en allant et en revenant du marché, nous passons devant cette petite cour sombre et humide. Au fond il y a des lavabos très sales, je me demande à quoi ça peut servir dans une école et comment on fait pour vous apprendre à lire.

Comment on peut avoir des copains et des copines quand on ne connaît personne. Plusieurs fois, j’avais vu des enfants jouer dehors. Ils étaient très grands et courraient partout en criant très fort. Il y avait beaucoup de garçons, et je ne connaissais aucun garçon dans mon entourage, j’étais toujours seule avec ma mère et ses amies.

- Maman, je n’ai pas besoin de me faire des copines à l’école, je veux avoir une petite sœur, comme ça je pourrai jouer avec elle tout le temps même à la maison.

- Mais si tu sais lire ce sera encore mieux, et puis à ton âge on doit aller à l’école, on ne peut pas rester à jouer à la maison comme un bébé.

- Mais moi je m’ennuie, j’aimerais jouer avec une petite sœur. Quand est-ce que j’aurai une petite sœur ?

- Oh, tu me fatigues. Zut ! La tarte est en train de brûler ! Maudit four, c’est de ta faute aussi, me faire faire des gâteaux maintenant … Et moi je fais tes quatre volontés !

Elle avait du mal à se baisser pour prendre le gâteau, et ce dernier semblait trop lourd pour elle. Elle disait toujours en riant qu’elle était petite mais que tout ce qui était petit était gentil. Elle se moquait souvent des femmes grandes, elle les traitait de « grand cheval ». Pourtant, là, elle semblait trop petite pour faire de la pâtisserie. Et toutes les mères doivent savoir faire des gâteaux !

Quelques jours plus tard, le jour de la rentrée des classes est arrivé, au grand soulagement de ma mère qui en avait marre de m’avoir dans ses jambes, et qui semblait toujours fatiguée. Elle criait souvent après moi et paraissait énervée.

J’étais habillée de neuf des pieds à la tête. Nous étions allées chez Parunis, un grand magasin où de belles dames très bien habillées vous demandaient d’une voix mielleuse :

- Que désirez-vous ?

Ma mère faisait très attention au prix et à la taille des vêtements, il fallait du beau, mais rien d’extravagant, un vêtement devait être utile, pratique, solide et bon marché.

Comme je l’avais craint, la cour était pleine de ces enfants braillards que j’avais déjà vus. Ma mère discutait avec d’autres femmes qui laissaient, elles aussi leurs enfants à l’école.

- J’espère qu’elle ne va pas trop pleurer. Elle pleure la vôtre ?

Ma mère me regardait du coin de l’œil, je ne devais pas avoir l’air très rassurée. Mais pour qui me prenait-on ? Je n’étais pas comme tous ces gosses sales et moches. Je ne pleurais pas, pour tranquilliser ma mère mais aussi pour qu’elle soit fière de moi. Je partis directement au fond de la cour. Il y avait un banc près des lavabos. Je m’assis là en attendant de voir ce qui allait se passer. C’était très bizarre, il me semblait que nous étions là depuis une éternité, mais rien ne se passait. Tous les enfants étaient dans la cour, et les mères devant la grille à attendre. Je me demandais comment on pouvait bien apprendre à lire dans de telles conditions !

Un garçon assez laid vint s’assoir à côté de moi. Il me souriait, peut-être voulait-il me parler. Mais je n’allais certainement pas adresser la parole à un enfant que je ne connaissais pas, surtout si c’était un garçon. Il me regardait avec un air niais et se tripotait quelque chose qui sortait de son pantalon. Je le regardais, et je me rendis compte qu’il s’agissait de sa « cocotte » comme disait ma mère. Elle m’avait expliqué que les garçons avaient une cocotte pour faire pipi mais pas les filles. C’était ça la différence entre nous. Pour ma part je voyais beaucoup d’autres différences : ils avaient les cheveux courts, portaient des pantalons, avaient des grosses voix et bousculaient tout le monde en criant. Souvent ils avaient les genoux et les vêtements sales.
J’étais outrée par le comportement de cet individu. Comment osait-il se montrer comme ça ? Il me dit :

- Tu me montres ta zézette ? Regarde la mienne. »
Quel imbécile ! En plus il ne savait même pas que ça s’appelait une cocotte et pas une zézette. Il ignorait aussi que les filles n’en avaient pas. Sans lui répondre, je m’éloignais et m’assis un peu plus loin sur le banc en jetant un coup d’œil vers ma mère. Cet endroit avait l’air quand même dangereux. Elle avait vu que quelque chose se passait et me faisait des signes. Beaucoup d’enfants s’accrochaient aux grilles pour rejoindre leur maman. Je n’allais pas les imiter, il fallait être courageuse, je devais affronter ce fou furieux obsédé par sa cocotte.

Le temps était bien long. Tout à coup, une grande dame avec un chignon nous appela, elle ressemblait à une vendeuse, en plus sévère. Elle dit plusieurs noms, dont le mien. Elle nous dit qu’elle s’appelait Madame Tortier, Qu’elle était notre maîtresse et que nous étions la classe des « petits ». De quoi parlait-elle ? Nous n’étions pas petits puisque nous étions à l’école !

L’imbécile de toute à l’heure n’était pas dans notre groupe, il devait donc être grand. Pour qu’on le garde à l’école, il fallait qu’apprendre à lire et à écrire ne fut pas si difficile ! Je me sentis donc rassurée.
FB arielleffe

Posté le : 11/03/2014 16:21
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Re: Défi d'écriture du 22/02/2014
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C'est très joli cette histoire Grenouille, il faudrait lancer un avis de recherche on ne sait jamais.

Posté le : 11/03/2014 16:24
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Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
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