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Nouvelles confirmées : A l'école
Publié par Loriane le 16-03-2012 21:20:00 ( 1045 lectures ) Articles du même auteur



A l'école

Anne était assise à son bureau, elle avait devant elle vingt six petites têtes, et tous ces petits élèves avaient le nez planté dans leur copies.
Ce calme est magique se disait-elle, la concentration était telle, que Anne supposa un instant que toutes ses intelligences en action allaient produire un signal latent, un bourdonnement électrique...

Elle dégustait ce plaisir produit par ce travail fructueux de réflexions denses et productives.
Pleinement satisfaite, elle amorça un geste pour se lever et se dégourdir les jambes.
Une explosion de décibels, à la fois graves et aigües, la cloua net sur place et stoppa un instant son mouvement.
Affolée, tous les regards tournés soudain vers elle, elle se précipita sur la porte et l'ouvrit.
Dans le couloir, elle vit toutes les portes de classe s'ouvrir en même temps que le sienne, et un attelage de fous qui courait d'un bout à l'autre du long couloir, couloir qui se terminait par un escalier à chaque extrémité.
Les cris et le tumulte était tel que Anne mit un certain temps avant de comprendre ce qui initiait une pareille confusion.
Jean-Claude, l'insupportable élève de CM1, Jean-Claude le cas, le problème insoluble de l'école, et dont la classe était située juste en dessous de la sienne, courait, une fourchette à la main, il était menaçant, et était poursuivi par cinq personnes qui hurlaient toutes ensembles, des ordres aussi bruyants qu' inopérants.
Tout d'abord interdite par toute cette violence, Anne comprit rapidement que Jean-Claude avait encore fait preuve de cette rébellion habituelle.
Ce gamin, dont la mère se prostituait, dont le père était en prison depuis 2 mois, était « LE » problème de l'école.
Que faire ?
Ce jeune adolescent était incontrôlable, les enseignants étaient allés d'échec en échec, impossible d'obtenir l' adhésion au travail de ce garnement, inutile de le punir, impossible de l'exclure.
Mais que faire ?
Sa poignée de cheveux blonds et frisés cachait ses yeux d'un bleu clair et souvent déjà durs.
Anne vit cette bouille d 'affreux gamin se précipiter sur elle.
« Pousse toi », lui cria-t-il en lui fonçant dessus.
« Pourquoi ? », répondit d'une voix calme mais blanche, Anne, qui resta immobile dans la porte.

Cette question semblait stupide, le gamin avait décidé de toute évidence de rentrer dans sa classe, et d'y trouver un refuge, mais c'était clair, en se passant de son autorisation , évidemment.

Il avait compris depuis longtemps la terreur qu'il provoquait chez les autres, et les enseignants n'étaient pas un rempart suffisant pour stopper sa révolte, bien au contraire!
L'autorité avait pour effet de le mettre hors de lui, et le galvanisait, elle excitait son désir de révolte et aiguisait son comportement opposant à tout prix.
Jean-Claude montrait combien il était décidé à ne faire aucune concession à la discipline , qui était apparemment sa plus grande ennemie, son aversion absolue.
Cette attitude rebelle expliquait en partie qu'il était soudain poursuivi par un groupe de force.
Poursuivi par ces adultes dépassés, et à bout de patience, et visiblement bien résolus, enfin, à lui faire admettre, la règle et la discipline de l'établissement.
Jean-Claude venait de se heurter à Anne, qui resta toujours aussi silencieuse, et immobile dans l'encadrement de la porte et faisant ainsi obstacle à cette invasion imprévue.
« Pousse toi », répéta-t-il méchamment.
« Oui, mais Pourquoi ? »
Répondit de nouveau Anne, à voix douce juste interrogative, mais toujours statique et obstruant le passage paisiblement, donnant l'apparence de la tranquillité.
« Je veux rentrer », hurla le révolté.
Le groupe d'enseignants était resté en arrière, ils étaient pétrifiés et en attente dans un lourd et soudain silence.
Chacun étaient tendu, suspendu à la suite des évènements
« D'accord, rentre, mais donne moi ta fourchette, et va t'asseoir »

Anne enchaîna aussitôt en se tournant vers les élèves de sa classe stupéfaits, et leur annonça toujours aussi calme :
« rasseyaient vous, Jean-Claude vient avec nous, Martin, s'il te plaît enlève tes affaires sur la table, Jean-Claude va se mettre à côté de toi ».
Le silence était palpable, l'instant était délicat, tous en avait conscience.
Le face à face était décisif, et tout pouvait s'arrêter là, ou exploser plus fort encore.
Le garnement se tourna vers ses poursuivants et ne vit pas le regard complice, d'injonction que leur lança dans son dos Anne.
Ils comprirent ce message, qui leur disait « stop, je m'en occupe »
Le gamin, hors de lui, rouge de colère, échevelé et en nage, quelques secondes avant, semblait se dégonfler comme un ballon d'hélium, il considéra l'invitation que Anne lui faisait sans manifester à son endroit aucune malveillance, aucune inimitié.
Il sembla réfléchir, ce qu'il n'avait évidemment, pas fait depuis le début du grabuge, qu'il avait à tout coup provoqué.
Son courroux, sa rage infernale fondait sous le regard aimable de Anne.
Devant ce visage paisible et qui ne cherchait pas à punir, son moteur emballé se calmait, et le jeune enfant soudain, la regarda.
Ce n'était plus un regard aveugle de fou furieux, mes deux yeux d'enfants, avec des points d'interrogations et de stupéfactions dans ses pupilles bleues.
Anne, toujours droite devant lui, à la même place depuis le début, tendit doucement la main, en lui souriant simplement.
Jean-Claude sembla hésiter, puis un mouvement incertain s'amorça, il leva son bras et remit, presque timidement, sa fourchette à Anne qui tendait la main.
Celle-ci la prit sans précipitation, comme si c'était un cadeau, elle lui fit alors un vrai sourire et se recula pour permettre à l'enfant d' entrer complètement dans sa classe, vraiment désarmé.
Tout à fait désarmé, puisque plus de fourchette, plus d'arme, mais, surtout plus de violence dans le coeur.
Elle le vit se diriger vers la table de Martin, qui se poussa afin de le laisser s'asseoir.
Elle fit un signe de complicité à ses collègues rassemblés, bouche bées, médusés dans le couloir.
Elle les vit se retourner pour partir, referma posément la porte et regagna sans précipitation, sa place, tout comme si aucun incident d'aucune sorte ne s'était produit.

Ben, je me suis bien dégourdi les jambes ! , se dit-elle pour elle même, avec une pointe d'humour salutaire.
Elle prit sur son bureau une feuille et un stylo alla les déposer devant Jean-Claude.
« Tiens , ne reste pas inactif, fais moi un dessin, ou écris ce que tu veux ».
« Vous avez fini ? »
Sa phrase adressée à la cantonade dans la classe était le signal de fin de pugilat, le signe du retour à la vie normale, au quotidien.
Il fallait que l'incident soit clos.

Elle se rassit et regarda les têtes qui tentaient quoique bien perturbées de se remettre au travail.
Quelques regards trahissaient encore le malaise général, mais retournaient toute fois vers leurs copies délaissées.
La touffe de cheveux frisés et blonds était penchait sur son papier.
Ce silence revenu était plus étrange encore que celui d'avant l'algarade.
On sentait des tourbillons de pensées et de sentiments qui circulaient dans ces têtes d'enfants quelque peu secouées.
Anne troublée, tentait de rassembler ses idées, de faire baisser sa tension pour s'apaiser et réfléchir.
Elle s'employait à rétablir en elle, un calme et une sérénité qu'elle avait pour le bien de tous affiché faussement
Qu'est-il arrivé à cet enfant pour qu'il fasse preuve d'une telle anomie, et qu'il soit ainsi sans ordre, sans structure ?
Pourquoi est il dans cette rage et ce refus ?
Pourquoi tant de violence, de détermination à se révolter ?
Pourquoi provoquer presque une émeute, et aussi, pensa t-elle pourquoi une capitulation si simple, si facile ?
Pourquoi ce va -t-en guerre, cet enfant furieux, tellement hors de lui s'est-il soudain rendu à la raison, et pourquoi a-t-il accepté le retour à l'ordre ?

Tout de même se dit -elle, à bout de ses questions , il y a bien un gagnant dans cette histoire!
Oui, et si il y a un gagnant , c'est juste la gentillesse et l'amour des autres.
Oui, décidément, le plus fort c'est bien, la bienveillance pour les autres et, absolument rien d'autre.

Lydia Maleville

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Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
.

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