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Nouvelles : Les retrouvailles ( suite )
Publié par Salimbye le 14-09-2013 20:36:12 ( 787 lectures ) Articles du même auteur



IV- Safi le, 08 octobre 1967

Ma très chère Tity, mon amour, mon espoir,
Ma mère est morte il y a trois jours.
Comme si ce malheur n’était pas suffisant, je viens d’apprendre qu’un conflit s’est déclenché entre Israël et certains pays arabes.
Oui, je viens d’apprendre que la guerre a éclaté là-bas? Pourquoi toute cette violence ? Au lieu de négocier pacifiquement pour trouver une issue à cette crise, les pays arabes sont intervenus, par solidarité, soi-disant, à côté de l’Egypte. Ils ont privilégié la guerre. Ils ont compliqué davantage la situation.
Voilà donc à quoi peut mener la bêtise humaine : le rejet de l’autre. Les politiciens et les soldats des deux clans ont préféré le recours aux armes tuant des milliers d’âmes innocentes, et expulsant des centaines de milliers de palestiniens vers les pays voisins.
Il parait que juifs et musulmans ne s’entendent plus. Pourquoi donc toute cette haine ?
Cette incompréhension ?
Ou bien ces responsables sont fous, ou bien c’est moi qui le suis parce que je n’arrive pas à saisir les nuances et les enjeux qui ont déclenché cette haine.
La religion est-elle faite pour désunir, pour déchirer les peuples ? Ne doit-elle pas, au contraire, intervenir pour raisonner les responsables chaque fois que ces derniers virent vers la xénophobie, l’extrémisme ou l’intolérance ?
Les gens ne peuvent-ils pas pratiquer leurs cultes religieux tout en vivant en harmonie ?
Quelles seront les conséquences si les Palestiniens optent, eux aussi, pour des solutions extrêmes ? Que pourra faire le gouvernement israélien contre des résistants déchainés s’ils recourent à des opérations kamikazes ?
Crois-moi, c’est la société civile qui paiera les pots cassés.
Très chère Tity,
Ce que je n’arrive pas à comprendre, c’est que chaque fois que deux religions différentes se rencontrent, elles ne peuvent jamais cohabiter ensemble.
Que m’a-t-il volé, de quoi m’a-t-il destitué celui qui ne pratique pas ma religion ?
Écoute moi ma chérie, dorénavant, personne en Israël ne pourra vivre en sécurité. La fraternité qui régnait entre les juifs et les musulmans va céder la place à la méfiance. Les positions vont se durcir. Une éventuelle réconciliation entre les deux peuples a très peu de chance de voir le jour.
J’ai peur pour toi et pour toute ta famille.
J’espère que tu regagneras bientôt le Maroc, ton pays d’origine, le pays où tu vivais heureuse, le pays où tu as laissé une partie de toi-même.
Reviens je t’attends.
M’hamed, L’égaré
V- « De toutes les villes côtières du royaume, Essaouira reste la seule qui jouit d’un climat tempéré, aussi bien en hiver qu’en été. C’est la cité de l’amour, de l’amitié, de la fraternité et de la tolérance.
Savez vous qu’il n’y a pas longtemps, la communauté juive de cette ville, formait les deux tiers de sa population ?».
Les premières phrases que prononça leur hôte en parlant d’Essaouira. Assis à la terrasse d’un café qui donnait directement sur la plage, Tity et M’hamed écoutaient attentivement Edmond AMRAN El Maleh, un juif homme de lettres, vanter les atouts de la capitale des Chiadma. L’intellectuel à la moustache bien garnie utilisait le pronom personnel « Elle » en parlant de la ville. Il ne la décrivait pas. Il la courtisait. Un amant avouant sa passion pour sa maîtresse.
Depuis le mois de juin, Tity parlait constamment de cette ville qu’elle n’avait jamais visitée auparavant. Elle disait qu’elle s’y rendrait avec sa maman durant les grandes vacances. « Tu sais, une bonne partie de ma famille vit à Essaouira. Mon cousin Moshé, un riche orfèvre, nous a invitées à aller passer une ou deux semaines chez lui ».
« Tu as de la chance ! », lui répondit M’hamed. Il ajouta à voix basse :
« Deux semaines ! C’est une éternité ! Tu vas me manquer. »
Souriante, les sourcils froncés, elle le repoussa de son épaule en disant :
« Idiot ! Tu crois que je vais te laisser libre derrière moi ? J’ai déjà parlé à ma mère. Je lui ai dit que je vais m’ennuyer toute seule ».
-« Et qu’elle a été sa réponse ? »
-« Et bien devine ! C’est elle qui m’a demandé : « pourquoi tu n’invites pas ton ami M’hamed ? »
-« Et tu vas inviter ton ami M’hamed ? », ironisa-t-il.
-« Je ne sais pas, je réfléchis. D’ici là je vais voir. S’il reste sincère et fidèle, je vais peut-être l’emmener avec moi »
-« Dévoué comme il est, je crois que tu n’as rien à lui reprocher »
-« Alors je te fais confiance. Je l’inviterai donc ».
Elle lui tendit la main : « Marché conclu ! »
Il saisit la main et l’embrassa tendrement.
Ils rirent tout au long du chemin.
Les deux jeunes s’estimaient chanceux cette année là. Leur séjour à Essaouira souda davantage leur relation.
Tôt chaque matin, ils se promenaient le long de la belle plage. Ils se tenaient par la main. Leur bonheur n’avait pas de limite.
Rigine ne pouvait pas les accompagner dans leur randonnée matinale. Son mal de genou ne lui permettait pas de marcher ourester longtemps debout. Elle les attendait avec une ou deux de ses amies juives sur la terrasse d’un café.
Par contre, l’après midi, elle les accompagnait près de la mer. L’air songeur, elle restait silencieuse. Les deux amoureux jouaient aux cartes près d’elle.
Tity demandait au jeune homme de l’aider à appliquer sa crème anti solaire sur son corps. Une sensation de plaisir les envahissait tous les deux.
Le soir quand il faisait frais, ils sortaient tous les deux pour se promener dans les ruelles étroites de l’ancienne médina. Tity était fascinée par l’artisanat local : la maroquinerie, les petits objets en bois poli, en bronze. Parfois, elle restait de longs moments, admirative, devant un tableau ou une statuette.
Avant de revenir à la maison, ils n’omettaient pas de faire un détour par la Sqala de la Kasbah, des remparts qui donnaient directement sur la mer et où sont alignés d’anciens canons portugais. Là, ils s’assoyaient pour passer quelques doux moments à admirer le coucher du soleil. Elle avait pris l’habitude de se blottir entre les bras de son ami en le priant de lui rappeler une de leurs aventures.
Ce soir là, souriante, elle exigea qu’il lui parle de leur refuge près du mausolée
« Calme-toi. Écoute plutôt les vagues de la mer et admire ce merveilleux soleil rouge qui va bientôt disparaitre », lui ordonna son ami.
Toujours souriante, elle le tira par les cheveux et l’embrassa sur la bouche :
« Notre aventure est mille fois plus merveilleuse que tes vagues et ton coucher de soleil. Vas-y je t’écoute ».
Il s’exécuta :
« Ce jour là, nous sommes sortis du lycée à neuf heures parce que les professeurs avaient un conseil de classe, je crois… »
« Non, rectifia la jeune fille. Ils avaient réunion avec le proviseur du lycée. »
« C’est vrai tu as raison. On avait mis tout les élèves dehors ; et sur la route, tu m’avais demandé de t’accompagner au mausolée des sept fils de Ribbi Benzmiro. On était au mois de décembre. Le ciel était couvert et il faisait très froid. Avant d’arriver sur les lieux, à une centaine de mètres environ, la pluie a commencé à tomber. Une pluie forte que le vent violent de ce jour là rendait cinglante. Nous avons couru rapidement vers le bâtiment funéraire pour nous mettre à l’abri. Nous nous sommes précipités dans le couloir étroit et un peu obscur qui mène vers la porte du mausolée. Tes cheveux étaient trempés. Nous sommes restés là plus de deux bonnes heures avant de rentrer chez nous ».
« C’est tout ce que dont tu te souviens ?, lui demanda Tity. La pluie, le couloir obscur, mes cheveux trompés… Et quoi encore ? » . Elle poursuivit :
« Écoute mon amour, si je te demande de me raconter cette aventure, c’est parce qu’elle me rappelle le moment le plus heureux et le plus délicieux dans toute mon existence. Alors sois gentil et raconte-moi dans les plus infimes détails ce moment de bonheur. Tu ne peux pas imaginer le plaisir que je ressens chaque fois que tu me relate cette histoire ».
« Puisque ça te fait plaisir… ».
La jeune fille se retourna vers lui et le fixa d’un regard sensuel :
« Dis-moi sincèrement, cette aventure ne représente rien pour toi ? »
« Sincèrement ? Sincèrement ? Les moments que nous avons passés ce jour là resteront gravés dans ma mémoire pour toujours. Je souhaite me souvenir jusqu’à la dernière minute de ma vie des douces sensations que j’ai éprouvées ce jour là ».
« Alors parle ! Qu’est-ce que tu as fait lorsque nous sommes entrés dans le couloir ? », La voix de Tity était presque suppliante.

(A suivre)

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Auteur Commentaire en débat
Loriane
Posté le: 19-09-2013 18:50  Mis à jour: 19-09-2013 18:50
Administrateur
Inscrit le: 14-12-2011
De: Montpellier
Contributions: 9499
 Re: Les retrouvailles ( suite )
C'est bien écrit, bien construit.
Oui, et oui : c'est religions détruisent le monde, elles séparent plus qu'elles ne rapprochent, elles sont redoutables, c'est une calamité surtout lorsque l'on lit des incitations à la haine qui recommandent de tuer les mécréants.
merci
Mes préférences



Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
.

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