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Nouvelles confirmées : Ma Vérité, quatrième partie
Publié par dominic913 le 12-12-2013 10:43:32 ( 976 lectures ) Articles du même auteur
Nouvelles confirmées



Les rapports que j’entretien avec la famille de Dominique sont tout à fait différents. Eliane (sa Mère) et Mémé Yvonne (sa Grand-mère) viennent nous rendre visite à Valognes environ quatre à cinq fois par an. Quand j’y songe, elles ont passé davantage de temps chez nous que toutes les fois où Papa et Maman sont venus nous y voir. Eliane et Mémé Yvonne vivent à plus de 300 kilomètres de chez nous, Papa et Maman à une dizaine de kilomètres tout au plus. Cela montre, si c’était nécessaire, laquelle des deux familles fait le plus d’effort pour aller à notre rencontre.
D’autre part, Eliane nous téléphone régulièrement ; au minimum une fois par semaine, parfois plus. Elle prend ainsi de nos nouvelles, à tous les deux je tiens à le préciser. Evidemment, nous leur en donnons des nôtres. Dominique et sa mère s’appellent aussi parfois, juste pour le plaisir de discuter cinq minutes. Parfois aussi, ils se contactent grâce à Facebook, puisqu’Eliane utilise régulièrement Internet, et ce réseau social, pour ses activités associatives. De temps en temps, ils s’envoient des emails, parce que sa Maman qui participe a des compétitions canines, lui envoie des photos de ses deux Boxers. Et Dominique et moi lui téléphonons, évidemment, tout aussi souvent qu’elle.
Je tiens à dire que Papa et Maman, eux, ne se donnent jamais la peine de nous téléphoner. Sauf exception – c'est-à-dire, lorsque la date d’une réunion de famille approche et qu’ils ont décidé que je devais y être présente -, ils ne prennent jamais de nos nouvelles. Ils savent pourtant pertinemment que Dominique et moi ne pouvons pas nous déplacer, vu que nous n’avons pas de moyen de locomotion. Le téléphone permet donc de rester en contact les uns avec les autres assez aisément. Or, c’est toujours moi qui dois en prendre l’initiative. J’ai parfois l’impression que, pour eux, il s’agit d’un objet qu’il faut utiliser qu’en cas d’extrême nécessité ; de même qu’Internet. Nous sommes au début du 21ème siècle, et quand j’y songe, j’ai le sentiment qu’ils en sont restés au milieu du 20ème siècle.
J’ai beau leur dire qu’ils peuvent me contacter quand ils le souhaitent, ils ne le font jamais. Et, quand j’effectue cette démarche, ils ne me parlent que d’eux, et, comme d’habitude. Tout ce qui me concerne au quotidien, tout ce que je vis au jour le jour avec Dominique ne les préoccupe pas. Une fois encore, ce comportement de leur part m’attriste et me blesse profondément. Quand je vois la complicité qui unit Dominique à sa Mère, j’en suis meurtrie. L’attitude de Papa et de Maman m’humilie. Lorsque je vois qu’Eliane et Mémé Yvonne ne font aucune distinction entre lui et moi dans leur comportement, j’en suis d’autant plus blessée.
Quand Eliane et Mémé Yvonne viennent passer quelques jours chez nous, elles s’adaptent à notre rythme de vie. De notre coté, nous changeons également un peu nos habitudes. Par exemple, les deux Boxers d’Eliane doivent régulièrement être sortis pour qu’ils puissent faire leurs besoins ; et cela, dès huit heures du matin environ. Donc, nous nous réveillons plus tôt que d’habitude. Par contre, chez nous, l’heure des repas est un peu plus tardive que chez elle. Mais cela ne lui pose aucun problème ; de même qu’à Mémé Yvonne. D’autre part, Eliane et Mémé Yvonne savent que nous aimons regarder des films. Dominique prépare des Thrillers – genre qu’elles apprécient particulièrement – avant qu’elles n’arrivent. Et durant leur séjour, elles les visionnent le soir avec nous. Elles discutent également avec nous de notre quotidien, de nos centres d’intérêts, de nos passions, de livres que nous avons lus, d’émissions que nous avons vues. Elles questionnent Dominique sur ses figurines, sur ce qu’il est en train d’écrire. Nous les interrogeons sur leur vie de tous les jours dans la Sarthe, des gens que nous y fréquentons lors de nos vacances là-bas. Elles se rendent encore à Saint-Vaast, à Sorthoville, ou ailleurs, de temps en temps avec nous, d’autres fois sans nous. Cela dépend de notre envie, en fait. Elles nous aident dans notre vie quotidienne en nous emmenant au supermarché si nous en avons besoin. Il y à un véritable partage que, je l’avoue, je n’ai jamais trouvé chez Papa et Maman.
Cette façon de procéder, de la part d’Eliane et de Mémé Yvonne, à chaque fois, me fait véritablement plaisir. Elles s’impliquent auprès de moi autant qu’auprès de Dominique ; sans parti-pris ni montre de favoritisme. Elles m’écoutent attentivement autant que lui, malgré mes bégaiements, malgré ma lenteur pour m’exprimer. Elles m’encouragent, sans me forcer, à mon rythme, ne me jugent pas, et me donnent des conseils qui restent des conseils, quand elles le peuvent.
Dans la Sarthe, lorsque nous sommes en vacances chez Eliane, il n’y a pas de grandes différences. Nous nous adaptons à leur mode de vie, autant que ces dernières s’adaptent au notre. Nous y menons une existence calme et tranquille. Nous y avons nos habitudes. Eliane poursuit ses activités, tandis que nous vaquons aux nôtres, en prenant le temps dont nous avons besoin. Ainsi, nous nous levons à peu près aux mêmes heures que chez nous. Nous prenons notre petit déjeuner, nous nous lavons, ou nous nous changeons, à peu près aux mêmes horaires. Le matin, Dominique est sur son ordinateur ; moi, j’aide aux taches quotidiennes de la maisonnée. L’après-midi, nous nous isolons dans notre chambre pour y visionner des films sur DVD ou des émissions que nous avons enregistrées sur le lecteur-enregistreur DVD les jours précédents. Le soir, nous lisons ou regardons la télévision. La seule différence majeure concerne les repas du midi et du soir. Ils sont plus tôt que chez nous. Eliane étant une excellente cuisinière, elle nous prépare toujours de bons petits plats, gourmands et non diététiques il faut bien l’admettre. Mais, autant Eliane que Mémé Yvonne essayent toujours de nous faire plaisir en ce qui concerne la nourriture.
Autre différence majeure : les grands repas de famille semblables à ceux de Papa et Maman. Ceux-ci y sont beaucoup moins nombreux. Le seul que je pourrais comparer à ces derniers est celui de Noel. Il dure un après-midi entier. Quant aux anniversaires, ou autres, ils ne s’étendent jamais plus de deux heures, au maximum. En outre, dans ce cas, nous avons la possibilité de quitter la table une fois le repas terminé. Les invités continuent à discuter un moment avec Eliane et Mémé Yvonne, bien évidemment, tout en buvant un café ou un digestif. Mais Dominique et moi quittons les lieux parce qu’épuisés, et personne ne trouve rien à y redire. Nous rejoignons alors notre chambre pour nous y reposer ; moi, je fais une sieste, Dominique lit. Quand je me réveille, nous regardons un DVD. Et finalement, lorsque les gens s’en vont, nous les rejoignons afin de leur dire au revoir.
Tout le monde, dans l’entourage d’Eliane sait que lui et moi fatiguons très vite dans ce genre de circonstances. Ils savent que nous avons du mal à suivre leurs conversations puisqu’il s’agit de sujets évoquant le club Hippique de la Sœur de Dominique, ou détaillant les différentes activités associatives d’Eliane. Donc, nous les suivons tout le long du repas proprement dit. Mais, lorsque celui-ci est terminé, ils ne nous reprochent aucunement le fait que nous les quittions afin de nous adonner à nos propres activités. Ceci n’empêche pas que nous les appréciions et qu’ils nous apprécient, et que nous avons plaisir à les rencontrer.
Il faut dire que les occasions de croiser des personnes issues de milieux différents et variés sont nombreuses. Comme Papa et Maman, Eliane exerce de multiples fonctions au sein d’organisations locales. Ceci nous fait croiser beaucoup de monde. Cela nous permet de connaître davantage de personnes que nous n’en voyons à Valognes. Par contre, cela ne nous perturbe aucunement notre quotidien. Nous côtoyons ces personnes lorsque nous le désirons. Nous menons les activités qui nous plaisent, sans que quiconque ne nous impose son point de vue ou son jugement. Si nous voulons nous mêler aux gens qui viennent voir Eliane, nous le faisons ; si nous ne le voulons pas, nous ne le faisons pas ; et nul ne s’en sent offensé ou blessé. Nos choix et nos décisions sont respectées.
Un autre aspect du lien qui existe entre Dominique, Eliane et moi est qu’ils ne sont pas toujours d’accords sur leur façon de voir les choses. Contrairement à ce qui se passe entre Papa, Maman et moi, ils trouvent cela naturel et ne s’en formalisent pas. J’ai, personnellement, déjà assisté à plusieurs altercations entre eux assez virulentes. Moi qui n’ai jamais osé affronter Papa et Maman ouvertement, j’en suis toujours resté ébahie et envieuse. Je ne sais pas quelle force intérieure permet à Dominique de se mesurer à sa mère. Car parfois, les mots qu’ils se disent sont sévères. Je l’envie aussi du fait qu’une fois qu’ils se sont expliqués sur leurs désaccords, Dominique et Eliane n’ont aucun mal à tourner la page de ce qui vient de se dérouler entre eux. Bien qu’ils n’arrivent pas, de temps en temps, à trouver un compromis, ils sont capables de dépasser leurs désaccords ou leurs différences. Ils assument leurs opinions tout en se montrant toujours autant d’affection,
Comme j’aimerai que ce soit pareil avec Papa et Maman. Je ne les ai jamais vu accepter que quelqu’un – et Dominique en particulier – ne se soumette pas à leurs points de vue. Non seulement cela, mais ensuite, ils deviennent hostiles et rancuniers. Leur orgueil et leur fierté – mal placés – ne les autorise pas à reconnaître que d’autres ont le droit d’avoir des opinions à l’opposé des leurs. Que ces personnes, ainsi que leurs idées sont tout aussi respectables, cela les hérisse au plus haut point. Je me demande si, dans notre famille, quelqu’un a déjà osé les confronter à des idées si différentes des leurs avec autant de détermination et de fermeté. Si c’est le cas, je ne m’en souviens pas.
Je suis persuadée que si je me permettais d’avoir la même attitude, de vive voix, ils seraient convaincus que j’ai été manipulée par Dominique. Ils ne me le pardonneraient jamais. Et vu l’état de nos relations actuelles, je me rends compte que je ne me trompe pas.
C’est pour toutes ces raisons, donc, que je suis plus détendue, plus épanouie, plus heureuse que chez Papa et Maman, lorsque je pars en vacances dans la famille de Dominique.

Maintenant, je m’attèle à la partie la plus difficile de ce texte peut-être, puisqu’elle évoque l’année et demi qui vient de s’écouler. Elle évoque de quelle manière ma Sclérose en plaques a été découverte ; et les conséquences que cette dernière a eue sur les relations que j’entretiens désormais avec Papa et Maman.
Les premiers symptômes de ma maladie se sont manifestés sous la forme de fuites urinaires épisodiques. Dominique et moi n’y n’avons pas fait très attention, il faut bien l’avouer. D’autant que, lorsque nous avons parlé de celles-ci au Docteur DeGeyer, notre médecin traitant, il nous a dit que ce genre de choses pouvait arriver à tout le monde. Et, quand nous en avons parlé à mon Neurologue, le Docteur LeBiez, celui-ci également n’y a pas prêté attention.
Ce n’est que le Vendredi précédant le 1er tour des élections présidentielles de 2012 que ma Poussée Inflammatoire s’est déclarée. A ce moment là, j’étais en train de passer l’aspirateur dans notre chambre. Tout à coup, je me suis écroulée sur place parce que mes jambes ne pouvaient plus me porter. Dominique, qui se trouvait non loin de là s’est immédiatement précipité à mon secours afin de m’aider à me relever. Mais je me suis effondré une nouvelle fois. Il faut dire que mes jambes étaient emmêlées au tube de l’aspirateur. Tout d’abord, Dominique et moi avons donc cru que c’était la cause de ma chute. De fait, il m’a éloigné de l’aspirateur. Il m’a demandé de m’asseoir sur le lit pour me reposer, pensant que j’étais fatigué à cause de l’effort fourni. Au bout de cinq minutes, imaginant que tout était rentré dans l’ordre, j’ai voulu me lever. Dominique, lui, me conseillait d’attendre encore un peu. Je n’ai pas avancé de deux pas que je me suis de nouveau écroulé. Dominique m’a relevé, m’a allongé sur le lit, en m’imposant de me reposer au moins une demi-heure. Il en a profité pour téléphoner au docteur DeGeyer pour lui demander de venir m’ausculter au plus vite. Et ce n’est que le soir, soit plusieurs heures après que celui-ci est arrivé.
Le Docteur DeGeyer m’a donc examiné. Il a estimé que mon état de santé était loin d’être alarmant. Pour lui, à l’issue de quelques jours de repos, tout rentrerait dans l’ordre. Il m’a une fois de plus expliqué que ce genre de choses pouvait arriver à tout le monde de temps en temps. Il ne fallait pas que je panique puisque je marchais de nouveau correctement.
Le lendemain matin, je suis allé chercher du pain à la boulangerie en face du Lycée Henri Cornât. C’est au retour, alors que je pénétrais dans la cour de notre immeuble, que je me suis effondrée et que je n’ai plus pu me relever. Heureusement qu’un couple passait non loin de là, et m’a aidé à me relever. Je me suis appuyé sur eux, le temps que je puisse atteindre la porte d’entrée de l’appartement. Dominique m’a, une fois de plus, demandé de me reposer. Il a rappelé le docteur DeGeyer pour qu’il vienne en urgence. Et il est revenu m’ausculter deux ou trois heures plus tard. Je m’en souviens parfaitement, puisqu’il s’agissait d’un Samedi après-midi.
Le Docteur DeGeyer m’a une fois de plus examiné. Mais, une fois encore, il n’a rien vu d’alarmant. Dominique, très inquiet, a insisté pour que quelque chose soit fait. Se rendant compte de sa détermination, le Docteur DeGeyer nous a proposé de nous rendre aux urgences de l’Hôpital Pasteur dès le Lundi suivant. Ainsi, un certain nombre d’examens médicaux seraient effectués sur moi, « afin de nous rassurer ». Il a rédigé une ordonnance médicale en ce sens. Puis, il est parti.
C’est après qu’il nous ait quitté, et surtout le lendemain, que nous nous sommes aperçu que ma façon de marcher n’était pas naturelle. En effet, le jour suivant – le Dimanche -, nous étions invités chez Papa et Maman pour l’anniversaire de Déborah et de Matthieu. A notre arrivée chez eux, Dominique les a tout de suite informés des événements des deux jours précédents. Il leur a expliqué qu’à son avis, je ne me mouvais pas correctement ; que j’étais la proie de claudications. Maman m’a fait marcher avec et sans mes chaussures à légers talons hauts. Ces dernières étant usées, il faut bien avouer qu’elles ne facilitaient pas ma progression. Mais à l’époque, c’est les seules que j’avais. En tout cas, Maman, puis Papa, puis les autres membres de la famille présents à cette occasion, ont effectivement constaté que je marchais de manière inhabituelle. Et Maman a décidé de nous accompagner aux urgences de l’Hôpital Pasteur dès le lendemain.
Je me souviendrai toute ma vie du jour de mon hospitalisation et de l’attente qui a été la mienne durant ces premières heures. Heureusement, Dominique et Maman m’accompagnaient. Nous sommes arrivés aux urgences aux alentours de 14 heures. Mais, ce n’est que vers 23 heures que les soignants m’ont expliqué qu’ils devaient me garder. Ils voulaient me faire faire des examens plus approfondis. Ils m’ont donc trouvé une chambre pour la nuit. Et ce n’est que le lendemain qu’ils m’ont transféré dans le service Gériatrie. J’y suis resté durant les deux semaines suivantes, puisque le Docteur Lebiez – mon Neurologue – a été absent durant toute cette période. Or, il était le seul habilité à suivre de près mon état de santé.
Malgré tout, ces deux semaines n’ont pas été inutiles, puisque l’on m’a ausculté afin d’éliminer un certain nombre de premières hypothèses. J’avoue que j’ai trouvé le temps particulièrement long, même si Dominique venait me voir tous les jours. Durant mon séjour à l’Hôpital Pasteur, Papa et Maman l’accompagnaient le matin, le laissaient sur place, et revenaient le chercher pour le ramener le soir. Quand j’ai été au Centre de Rééducation Fonctionnelle de Siouville, ils l’y conduisaient une ou deux fois par semaine ; parce que le trajet était beaucoup plus long. Il s’est aussi arrangé pour que d’autres personnes de notre connaissance l’y emmènent plusieurs fois.
Je peux dire qu’à ce sujet, Papa et Maman se sont montrés très compréhensifs et très serviables ; comme ils savent l’être dans ce genre de circonstances exceptionnelles. Ils n’étaient pas obligés, mais ils s’en sont donné la peine de me faire plaisir, parce que Dominique me manquait. Ils se sont rendu compte que j’avais besoin de sa présence à mes cotés. Dominique me téléphonait aussi au moins deux fois par jour afin de prendre de mes nouvelles. Cela nous donnait l’occasion de discuter de choses sérieuses ou autre. Pour l’anecdote, il se trouve que, parfois, je n’étais pas dans ma chambre au moment où il m’appelait. En effet, j’avais sympathisé avec plusieurs de mes voisines de chambre. Je conversais souvent avec elles, et j’étais absente de mon lit. Ce n’était pas bien grave, il me retéléphonait un peu plus tard.
Mon plus grand regret est que ces amitiés n’ont duré que le temps de mon hospitalisation à Pasteur ou à Siouville. Je ne les regrette pas ; elles ont été des expériences très enrichissantes qui m’ont ouvert vers l’extérieur. Elles m’ont permis de croiser d’autres modes de vie, de pensée, etc. Elles m’ont prouvé que j’étais capable de m’ouvrir en dehors de mon environnement habituel.
La seule erreur de Dominique pendant ces semaines de convalescence a été de croire que je pourrai rentrer chez nous assez rapidement. Il était impatient que je guérisse. Cela peut se comprendre. Je pense que c’était sa façon à lui d’espérer que mon cas ne soit pas trop grave. Mais Papa et Maman n’ont pas hésité à s’en prendre à lui en disant sèchement que je demeurerai à l’Hôpital Pasteur le temps qu’il faudrait. Evidemment, lorsque Dominique s’est rendu compte de la gravité de ma maladie, il s’est amendé et a reconnu son erreur. Mais Papa et Maman, dès cet instant, en ont voulu à celui-ci. Et la dégradation des relations entre eux a débuté à ce moment là. Leurs reproches à l’encontre de Dominique se sont dès lors multipliés, et n’ont plus jamais cessé.
De fait, Maman a immédiatement décidé de prendre en charge la gestion quotidienne de mon séjour. Sans demander l’avis de Dominique, elle a régulièrement confisqué mes vêtements pour les laver elle même. Jugeant que ceux que je portais n’étaient pas dignes, elle en acheté d’autres afin de les remplacer. Je n’ai pas pu lui dire que je n’étais pas d’accord, intimidée comme je l’étais depuis toujours devant elle. Je n’ai pas osé, une fois encore, lui dire non pour ne pas la vexer. Malgré tout, j’avais l’impression qu’elle me préparait pour un défilé de mode. Pour elle, les couleurs de mes habits n’étaient pas assorties les unes aux autres. Je n’avais pas suffisamment de sous-vêtements, de pantalons, etc. Malgré le fait que Dominique et moi avions organisé mon hospitalisation, cela ne lui convenait pas. Pour elle, Dominique n’était pas capable de s’occuper correctement de moi.
Maman s’est également tout de suite intéressée à mon hygiène. Celle-ci, aussi, ne lui convenait pas. Elle a commencé à vouloir me laver les dents elle même chaque jour. J’ai alors eu l’impression d’être une incapable, impotente et humiliée. J’ai eu le sentiment de redevenir une enfant de cinq ans à qui on devait apprendre de quelle manière il fallait faire. Tous les soirs, Maman effectuait donc son inspection générale de mon hygiène. Dominique n’avait, bien entendu, pas son mot à dire. J’entends toujours les paroles de Maman, lui expliquant : « C’est notre moment d’intimité, de partage, à Vanessa et à moi. » Un jour pourtant, Dominique a essayé de lui faire comprendre que je n’étais plus un bébé auquel elle devait enseigner ce qu’était l’hygiène. Maman s’est braquée. Elle lui a brutalement rétorqué : « c’est un moment privilégié entre Vanessa et moi. ». Dominique s’est tu, mais il m’a ensuite avoué qu’il a réalisé à cet instant précis que Maman s’imaginait que j’étais dans un état de déchéance généralisé. Pour elle, je n’étais pas apte à m’occuper de moi par mes propres moyens. En même temps, elle a fait en sorte d’empêcher Dominique d’avoir à intervenir. Ils ont d’ailleurs plusieurs fois échangé des propos assez virulents à ce sujet. Et le fossé entre eux s’est encore élargi.
Cela n’a pas suffi aux yeux de Maman : après, c’est la composition de mes repas qui l’a préoccupée. Il faut dire qu4à chaque fois que je la rencontrais, elle me répétait systématiquement : « Ma fille, tu as encore grossi. ». Ce n’était évidemment pas vrai, puisqu’a chaque fois que le Docteur DeGeyer me pesait au cours de nos visites de contrôle ou de renouvellement de médicaments, mon poids ne variait pas. Mais, pour Maman, peu importait. C’était une de ses obsessions ; elle était convaincue et déterminée à démontrer qu’elle avait raison. Dès lors, les quelques jours où j’ai été obligée de suivre un régime sans sel, elle a voulu s’en mêler. Certaine que mon alimentation quotidienne était trop riche, elle a tenté de prolonger celui-ci. Elle était persuadée que c’était le seul moyen afin de me faire retrouver un poids, à ses yeux, normal.
Ce comportement de sa part s’est ensuite poursuivi tout le long de mon séjour au Centre de Rééducation Fonctionnelle de Siouville. Les Médecins ont évidemment tenté de lui faire comprendre que je n’avais pas à rougir de mon poids. Elle n’a rien voulu entendre ; elle était convaincue qu’elle se devait d’intervenir également dans ce domaine de ma vie. C’est pour cette raison d’ailleurs que, lorsque j’ai quitté Siouville, elle a pensé que l’intervention régulière d’une « Aide à Domicile » serait une bonne idée. Sur le principe, je n’étais pas contre. Bien au contraire, si cela pouvait me soulager – ainsi que Dominique – de certaines taches ménagères difficiles à effectuer. Or, Dominique et moi avons très vite découvert que son souhait était en fait que cette Aide Ménagère me porte des repas préparés à l’avance. Ou, au mieux, que ce soit elle qui les confectionne directement à l’appartement pour moi, laissant ainsi Dominique se débrouiller seul pour organiser les siens. J’ai alors eu le sentiment que c’était un moyen supplémentaire, pour Maman, de fissurer notre couple.
J’avoue qu’à cet instant précis, j’ai tout à coup eu le sentiment d’être devenue inutile. Une fois encore, Maman avait décidé de ce qui été le mieux pour moi, sans me demander mon avis. J’ai eu l’impression que toute initiative personnelle m’était retirée. J’ai réalisé que je ne serai plus jamais maitre du choix de mes repas. Et j’en ai terriblement souffert. Heureusement que Dominique et moi avons modifié le dispositif que Maman s’apprêtait à mettre en place très rapidement. Sinon, la blessure que m’avait déjà infligée Maman m’aurait encore plus meurtri.
Ainsi, Maman a peu à peu pris le contrôle de mon quotidien. Elle a éjecté Dominique de tout ce qui pouvait me concerner directement. Elle lui a fait comprendre qu’il n’avait plus son mot à dire. Elle a exercé une pression constante pour qu’il ne se manifeste plus dans tous ces domaines. Dominique a eu le sentiment que sa place au sein de notre couple était en danger. Il a pensé que Maman avait l’ambition de le remplacer au sein de ce dernier. Il a eu l’impression qu’elle s’y accrocherait de toutes ses forces, et qu’elle ne le lâcherait plus.
De mon coté, comme c’est le cas à chaque fois que je suis en face de Papa ou de Maman, je n’ai pas osé me confronter à elle. J’ai laissé Dominique tenter de défendre sa place de conjoint seul. Dominique et moi en discutions ensuite. A ce moment là, je lui disais que, pour moi aussi, le comportement de Maman n’était pas normal. Mais je lui expliquais aussi que je n’avais pas le courage de l’affronter directement : les rares fois où j’ai tenté d’expliquer à Maman mon point de vue ; donc, j’ai estimé que je ne pouvais rien faire.

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Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
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