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Nouvelles : Chronique d'une Renaissance
Publié par alexis17 le 20-06-2014 18:30:00 ( 863 lectures ) Articles du même auteur



Salut à vous,
Obsédé par mes révisions, je n'ai pas eu le temps de me prélasser un peu dans mes écrits et je poste donc un texte déjà publié pour un défi mais dont j'ai retouché quelques phrases maladroites. Ceux qui l'ont déjà lu ne devrait pas perdre leur temps à me relire.
Alexis 17


Les alizés balayèrent le lac et sa main délicate, animée par la brise, glissa le long de son épaule nue ; une caresse ; un frisson ; son dos humide se courba, se recroquevilla dans un geste succinct mais d’une violence inouï. Les feuilles frémissantes se turent et, l’espace d’un instant, seul son souffle sauvage fit écho sur le lac infini. De son bras tatoué « Valkyrie », elle le repoussa et son corps las s’étala sur l’herbe sèche. Elle retira sa chemise et s’élança furieuse dans l’eau trouble. Le courant glacial saisit sa peau de velours, la compressa et elle se sentit étouffer sous l’étreinte du lac mais elle continua de s’enfoncer en son cœur. « Ils me méprisent, pensa-t-elle ; mais ils abhorrent mépriser et c’est pour cette raison qu’ils ne désirent que mon départ. Ils crachent, maudissent, calomnient, humilient mais haïr est l’essence même de leur triste nature. Ils se détestent les uns et les autres et, par peur de leur propre tribu, délestent leurs pauvres sentiments sur moi. ».

Depuis la berge, il l’admirait et relisait les lettres noircies sur son dos : « Souviens-toi de tes maux, ne les oublies jamais. Ils sont encrés sur ta peau, ta chair, ton sang ; tu ne les vois pas en permanence, mais, lorsque tu te retournes, ils sont là. N’oublies pas, tu es Juliette Petrovski mais ton nom n’est qu’un artifice qui dissimule tes mémoires dans ton corps ancrées. Tu es une Valkyrie et un jour, tu renaitras de la guerre. ».



La tribu s’était réunie autour du patriarche et monarque qui feuilletait sèchement le papier glacé du journal immobilier. « M’man, tu peux me passer un peu de fric, je dois emmener la Mercedes au garage. ». Un regard assassin s’abattit alors sur le visage enjoué de Gabrielle qui se pétrifia de peur ; elle détourna son regard vers la figure rassurante de sa mère, incapable de soutenir les yeux injectés de sang de son autocrate de père. « Tu vas encore allez voir le garagiste ? J’ai toujours su que tu ne serais qu’une pute, ma fille. J’espère qu’il prendra soin de tes rejetons car n’espère pas venir me supplier la moindre pièce pour ces bâtards. ».

La serveuse apporta la viande saignante du paternel et la table se plongea dans un silence oppressant ; son couteau déchira le steak en deux et l’assiette se gorgea de sang. Après quelques bouchées, il s’essuya goulument la bouche et jeta la serviette sur la poitrine de sa femme. « Et donc, vous travaillez dans quoi Juliette ? ». Son regard était insistant, perçant, meurtrier et, dissimulées sous la table, les jambes de la jeune femme tremblaient frénétiquement, mues par une terrible crainte, la même crainte que le reste de la tablée.

« J’étudie encore. Je suis en train d’écrire une thèse sur le silence dans la littérature et sur la… ». Le père, sans l’écouter, se replongea dans son plat et ignora son discours ; elle poursuivit vainement ses paroles mais, dès que la voix stridente de la jeune femme incommoda son repas, le patriarche fit crisser ses couverts contre l’assiette blanchâtre. « A votre âge, seul le travail vous paraitra gratifiant, fit-il entre deux puissantes mastications. Mon père vendait des clopes de contrebande aux dockers ; moi, j’étais agent de… ». Joseph roula des yeux et laissa divaguer son esprit au-dehors ; une fois de plus, le discours de son père s’étalerait interminablement et personne ne l’arrêterait dans son flot de souvenirs ingrats.

« J’étais agent de ce que l’on appelait les « autres », ceux que l’on avait choisi d’écarter de la société. J’avais embauché tous les difformes et les monstres de mon quartier et l’on paradait dans toute la ville avec notre spectacle. Je ramassais un gros paquet, eux leur part, et ils étaient heureux ainsi. Avec le temps, j’ai vu plus haut, je suis passé aux comédiens, puis aux acteurs, je me nourrissais de leurs désirs et de leurs porte-monnaie. Maintenant, je fais de l’immobilier, peut-être qu’un jour je serais producteur ou courtier ou je ne sais quoi. Mais vous, vous être comme mon fils, vous vous nommez intellectuels, un bien joli mot pour décrire la fainéantise. Il faut savoir être intelligent et il faut savoir travailler ; les gens comme vous se complaisent sur leur savoir et n’en font rien si ce n’est du vide. Croyez-moi. ».

Joseph voulut serrer sa main mais elle la retira vivement ; un sentiment d’humiliation l’envahissait et le patriarche ne désirait que son départ, que son abandon, sa défaite. « Un jour, vous comprendrez que penser n’a jamais nourri le peuple ; le peuple a besoin de pain et il est trop inculte pour votre beau savoir ; le peuple a besoin de mensonges. Dîtes-lui qu’il doit travailler pour être heureux et il le fera ; dîtes-lui qu’il doit penser et il se révoltera. Le savoir, cela n’apporte que du malheur. Trouvez-vous un travail ou quelqu’un de plus fortuné que mon fils qui pourra entretenir vos besoins et vos désirs. Regardez ma femme, elle est fainéante mais elle m’a épousé moi. ».


Sur le parking du restaurant, elle s’était allumé une cigarette ; elle écrasa son mégot de même que le père réduisait son fils à un sous-être. « Tu me ramènes une telle pute à table ? Regarde-la habillée comme un homme avec sa chemise et son jean : tu veux une camionneuse ou une femme sous ton toit ? Tu n’es qu’un idiot, fils. Cette femme-là, elle te trompera et chez qui viendras-tu pleurer ? Tu es comme ta sœur, un incapable. Qu’ai-je donc fait pour vous mériter ? Regarde-la avec ses tatouages sur les bras et les épaules, tous ces mots vulgaires écrits sur son bras. Valkyrie… Tu veux une femme ou un roman quand tu te couches le soir ? Sa peau noircie à l’encre ne t’apportera rien d’autre que des idioties. ». Il se taisait et laissait son père humilier Juliette. Cette scène s’éternisa et elle engloutit une autre cigarette, puis une cinquième, une huitième…

La mère fit alors claquer ses talons sur l’amer béton, trottina jusqu’à elle et lui adressa ses premiers mots : « Juliette, où habitez-vous ? ». Elle lui répondit qu’elle logeait un maigre appartement dans les quartiers nord, juste après le quartier des artistes. « Le quartier nord. [C’est un quartier peu cher]. Je m’en doutais lorsque j’ai vu vos habits, vous n’êtes pas quelqu’un qui se soucie de son apparence, c’est certain. J’aurais justement besoin… ». Elle cessa d’écouter la matriarche à l’issu de cette dernière réplique. Au fil du repas, elle l’avait érigée en victime mais, derrière son silence, seule la médisance régnait. Gabrielle héla alors sa mère qui interrompit ses paroles et accourut en direction de la Mercedes argentée.



Lorsqu’elle revint sur la berge, Joseph était encore allongé et n’osait la regarder. « Pourquoi est-ce que tu ne m’as pas défendu lorsque ton père m’a insulté. Tu n’es qu’un lâche, tu es pire qu’eux ! Tu te laisses rabaisser depuis tout ce temps parce que tu n’as même pas la force de les haïr. Tu te caches derrière eux, ils te protègent et, en contrepartie, lorsque les victimes leur manquent, ils délestent leur trop plein de haine sur toi. Hier, lorsque ta sœur m’a appelée, je croyais qu’elle s’excuserait ou qu’elle compatirait mais elle a continué le ballet de dégout. Je lui ai raccroché au nez et t’ai demandé de la rappeler. Tu n’as rien fait et, aujourd’hui je comprends. Tu fais partie intégrale de leur tribu, tu es comme eux. Peut-être que tu m’aimes, mais qui haïras-tu si ce n’est mes amis, ma famille, nos enfants. Tu crois ne pas être comme eux ; tu te trompes. Tu es un membre de leur tribu. ».

Il n’osa parler et elle soupira : elle avait vu juste. Elle se retourna et s’apprêta à partir lorsqu’il l’interpella : « Ton tatouage, il a disparu. Ton dos, il n’est plus fait que de peau lisse et blanche. ».

« Souviens-toi de tes maux, ne les oublies jamais. Ils sont encrés sur ta peau, ta chair, ton sang ; tu ne les vois pas en permanence, mais, lorsque tu te retournes, ils sont là. N’oublies pas, tu es Juliette Petrovski mais ton nom n’est qu’un artifice qui dissimule tes mémoires dans ton corps ancrées. Tu es une Valkyrie et un jour, tu renaitras de la guerre. ».

« C’est parce que je commence une nouvelle ère loin de toi, je ne suis plus Juliette Petrovski, je ne porte plus d’histoires ni de souvenirs, je commence une nouvelle ère loin de ce que je suis. Je n’ai plus besoins de ces mots, plus besoin de mon passé. Je suis une Valkyrie et, aujourd’hui, je me relève après le combat, je marche entre ces corps prodigués qui jadis m’appartenaient et je m’élance vers l’ivresse du vin et de l’hydromel, je m’élance vers une nouvelle vie. ».

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Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
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