Que je vous connais bien, passagers éphémères
Qui partagez le train parcourant notre vie !
Je vous ai observés, arrachant à l'envi
Des morceaux de bonheur au goût souvent amer.

Beaucoup vont, jusqu'au bout, ignorer qui ils sont
En feignant, néanmoins, de pouvoir se connaitre
Et se verront passer, tout comme, à sa fenêtre,
On regarde un passant, sans but et sans raison.

Oh oui, je vous connais. J'ai appris à le faire.
Le mot que nous gravons n'est pas là par hasard.
Derrière chacun d'eux, j'ai l'impression bizarre
Qu'il y en a un autre et que lui, veut se taire.

On voudrait tout se dire par quelques paraboles
Quelques mots anodins, parfois des ' au secours ! '
Que personne n'entend...et personne n'accourt.
Et les cris s'atténuent, s'éteignent et puis s'envolent.

Certains, au lourd passé, commencent leur bilan
Pensant qu'en écrivant ils pourront tout comprendre.
Mais au delà des mots, ce qu'ils pourront apprendre
Est la part oubliée, au caprice des ans.

Après avoir écrit dans son coin, solitaire,
Isolant des regards ce qui nous est secret,
Comment pouvons-nous faire ce geste si concret
De par un seul déclic, en informer la terre ?

Et puis il y a ceux qui n'écrivent jamais,
Pas plus qu'ils ne liront la moindre poésie,
Ricanant de nos textes et de leurs hérésies;
Ayant d'autres passions, et cela, je l'admets.

Mais je vous dis à tous, amis de toutes plumes :
Nous avons le talent de vouloir en avoir.
Et chacun, disposant de ce qu'il peut savoir,
A, dés le soir tombant, sa lampe qui s'allume.