| A + A -
Connexion     
 + Créer un compte ?
Rejoignez notre cercle de poetes et d'auteurs anonymes. Lisez ou publiez en ligne
Accueil >> xnews >> Sur la murette du sage - Poèmes - Textes
Poèmes : Sur la murette du sage
Publié par Cavalier le 13-01-2016 19:20:00 ( 1243 lectures ) Articles du même auteur



Sur la Murette du Sage

Derrière la montagne, le soleil se couchant
Aux creux des vallons colore le maquis.
D’un reflet rose,
Sur un ciel bleu, tout embaumé.

Les carabes cuivrés, les abeilles,
Les oiseaux et les papillons s’activent encore.

Là-haut sur la colline
Dans les frondaisons de la forêt,
L’air s’emplit de l’écho du chant sonore des sittèles.

L’agitation du monde me semble si lointaine.

La grande bâtisse un peu délabrée,
Toujours pleine de charme, me fait de l’œil.
Les huisseries écaillées, les gros linteaux de granit,
Les murs de pierres sèches
Les interstices remplis de fleurs, gorgées de soleil.

Et les tuiles rouges du toit presque plat
Sommeillent encore.

Près de la maison, les murettes,
Les grands romarins bien taillés, les escaliers fleuris,
M’accueillent comme Ulysse, après un long voyage.

Chaleur de la pierre, odeurs offertes.

Le bon chien vient vers moi, il me reconnaît.
Tommy, fidèle. Oui, je suis bien Ulysse.
Le Père Badi avait raison.
En contrebas, le gargouillis du lavoir.
Un garçonnet et une fillette,
Jean Jean et Fanfan, courent autour.
Et chassent des papillons blancs,
Mais ceux–ci sont bien trop agiles.

Je suis un peu fatigué.
La poussière du chemin sans doute.

Sur le rebord de la fontaine,
Deux autres gamins sont plus sages.
Ils lisent, rient.
Je sais que ce livre est leur roman. Comment ?
Grâce au Mur où je suis assis,
Sans doute.

La Murette du Sage.

Mais dites, comme c’est bon, là !
Je bois sa douce chaleur.
Par tous les pores de ma peau.
La vieille Mado m’offre un verre de vin
Du Clos Réginu. Elle a toujours vécu ici,
Ça je le sais aussi.

Elle sourit.

Se rides me parlent. L'occhju è rottu !
Oui, ça je le savais aussi.

Son homme près d’elle est si prévenant.
Escogriffe, de velours, Nydåm le Grand,
Sampiero Corso, les oreilles poilues,
Les mains larges comme des bachiles,
Comme de grandes batulles.
Il l’entoure de sa tendresse.
Sa signatora.

Entre les romarins, sous la tonnelle de vignes
une grande table de bois.
Du lait de brebis, du miel, et aussi du jambon,
Des saucissons, une grosse miche,
Une fiasque de vin, du fromage, des fraises.

Et cette odeur tenace, envoûtante –
Qui ouvre grand mon appétit.
Odeur qui remonte des lentisques, des bruyères,
Des genêts, des lauriers thym, des cytises, des tamaris,
Des prunelliers, des arbousiers.

Et ces deux-là, attablés, sont amants, je le sais.
Pierre et Hélène, ils mangent du raisin.

Les papillons blancs ont les ailes tagués
De souffrances, de regrets,
De cœurs qui saignent, de chagrins.
Ils volent et bruissent près de la grande maison.
Dans tout le jardin.

Leurs écrits sont presque effacés,
Déjà.

Antønje et Petru lisent toujours,
Au fur et à mesure que les mots
De leur roman s’écrivent,
Se gravent, sur les pages.
Ils rient aux larmes. Best Seller.
Et ne s’en alarment.

Maria Helena et U Saviu s’échangent encore des grains de raisin.
Tendrement, comme des colombes.
Les cheveux de cuivre de la belle illuminent le couchant.
Quelle douceur, quel silence.

Juste le son d’une Chjamà e rispondi, un peu plus loin,
Qui nous parvient.
J’y reconnais mes ténors.
Ce n’était pas dans l’Odyssée, mais que m’importe.
Si sbaglia u préte à l'altare…

Ulysse, ou Vévé, je suis entouré
De centaines de papillons blancs,
Graciles, aux ailes maintenant immaculées.

Le sentier, mon chemin, ma route de la Consolation,
A traversé le miroir sans tain, sans un seul bris de glace.

Cela ne me laisse pas froid, bien au contraire.

Ici, au Pays de l’Amour,
J’ai le cœur, chaud, tout gonflé.

Cavalier




Postscriptum

Autre titre par moi parfois donné Nantu à a Muraglietta di u Saviu : sur la Murette du Sage

L'occhju è rottu : le mauvais œil est brisé, conjuré...

Bachile, batulles : grands battoirs de bois

Signatora: femme capable d'exorciser le mauvais Å“il

Chjamà e rispondi : "En Corse où il ne reste qu’une dizaine de poètes chanteurs pratiquant ces joutes, les soirées chjama e rispondi connaissent un nouvel engouement. La dernière a eu lieu dans la plaine de Peri à l’occasion de la fête de la figue. Une autre se déroulera cet hiver dans la vallée de la Gravona.

Imaginez. Vous partez de l’écorce qui flotte sur le ruisseau et vous en arrivez au taux de participation de l’Etat dans le tour de table de la recapitalisation de la SNCM. L’un d’entre vous plaide pour 25 %, l’autre pour 50. Celui qui souhaite que l’Etat reste majoritaire raille le partisan de la privatisation en l’accusant de vouloir placer ses copains dans l’affaire. L’autre lui rétorque qu’en tant que défenseur d’une Corse autonome, voire indépendante, il est bien ridicule de faire appel à Paris. Et ainsi de suite. Le tout en chanson et en rimes. Un troisième débatteur, puis un quatrième, voire un cinquième, se mettent de la partie, défendant l’un ou l’autre ou encore soutenant un point de vue encore différent. Tout cela au coin d’un comptoir, d’une table de bar. Rythmé éventuellement par une consommation croissante de vin, de pastis, de charcuterie et de fromage.

C’est un peu ça, le chjama e rispondi (littéralement : appel et réponse). in http://www.camperemu.com/viewtopic.php?f=14&t=8186

Certains noms évoqués ici dans mon poème sont vikings, norvégiens, ancêtres présumés de chevaliers normands, eux même ancêtres présumés de siciliens, sardes et autres corses actuels...

Si sbaglia u préte à l'altare : le prêtre, lui, se trompe bien aussi à l'autel...


Bonne lecture

Article précédent Article suivant Imprimer Transmettre cet article à un(e) ami(e) Générer un PDF à partir de cet article
Les commentaires appartiennent à leurs auteurs. Nous ne sommes pas responsables de leur contenu.
Auteur Commentaire en débat
Loriane
Posté le: 13-01-2016 21:28  Mis à jour: 13-01-2016 21:28
Administrateur
Inscrit le: 14-12-2011
De: Montpellier
Contributions: 9499
 Re: Sur la murette du sage
Tu nous viens en nous faisant partager un merveilleux moment de bonheur.
Est-ce notre cher Bacchus qui t'envoie depuis son paradis. ?
Je pense que je reviendrais suivre les papillons blancs.
Les vers libres nous offrent la place du rêve, puis du dialogue avec le lecteur, cette forme souple convient parfaitement à cette promenade parfumée, visite guidée.
Très belle lecture.
Citation :

Sur le rebord de la fontaine,
Deux autres gamins sont plus sages.
Ils lisent, rient.
Je sais que ce livre est leur roman. Comment ?
Grâce au Mur où je suis assis,
Sans doute.

Le mur des sages me fait penser aux bancs de Sartène où d' augustes derrières siègent face à la vallée.

Merci pour le plaisir.


Je te souhaite la bienvenue parmi nous et une longue route sur L'ORée des rêves.
Tu peux aller te présenter sur le forum "qui je suis"
Tu trouveras le règlement du site dans la section "L'ORée des rêves" que se trouve dans la barre de navigation, avec les forums, les ateliers, les concours et défis. ...
Pour une aide technique tu trouveras des explications et des réponses dans "aides techniques" dans la section "ateliers"
Visite, découvre et si tu as un problème demande de l'aide sur la box ou par MP, ta messagerie privée, dans le menu utilisateur à droite.
Merci pour ta participation.
Cavalier
Posté le: 20-01-2016 14:17  Mis à jour: 20-01-2016 14:17
Accro
Inscrit le: 13-01-2016
De: France
Contributions: 151
 Re: Sur la murette du sage
Merci Loriane pour cet accueil et pour ces conseils instructifs

à bientôt

Pl
Mes préférences



Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
.

Connexion
Identifiant :

Mot de passe :

Se souvenir de moi



Mot de passe perdu ?

Inscrivez-vous !
Partenaires
Sont en ligne
67 Personne(s) en ligne (19 Personne(s) connectée(s) sur Textes)

Utilisateur(s): 0
Invité(s): 67

Plus ...