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Nouvelles : Mes 14 juillet ..... sous le chêne.
Publié par cuga le 11-07-2012 14:40:00 ( 1653 lectures ) Articles du même auteur




Il y a bien longtemps, bien longtemps déjà, chaque mois de juillet, tout le monde se réunissait pour un pique-nique familial à la sortie du joli village d'Urrugne, en bas du col d'Ibardin. Vous dire comment l'endroit devint par la suite l'objet du pèlerinage annuel, je ne m'en souviens pas.
Toujours est-il que le 14 fut le jour choisi par mes parents : il devait devenir incontournable. Cette tradition s'imposa au fils des ans, d'abord pendant toute notre enfance et notre jeunesse avec mes frères, puis, plus tard avec nos propres enfants.
Je vous parle d'un temps où Schengen n'existait pas, où les douaniers de Dany Boon régnaient en maître dans leur bicoque blanche posée comme un bateau au bord de la route. La barrière, quand elle se levait, servait de mâture à la cahute.
Le vieux poste de douane laissait passer le flot de voitures qui montaient pour quelques heures aux
"ventas" du col d'Ibardin.

Les nuages cotonneux recouvraient encore le
haut de la montagne. Arrivés de l'océan ils avaient été poussés un à un par le vent d'ouest, en contrebande.
Quand nous arrivions le soleil était encore bas et nous montions le col le long de l'ubac, dans la fraîcheur matinale, avant d'émerger au sommet en pleine lumière. Des moutons en liberté traversaient parfois la route en lacets au détour d'un virage : mon père restait vigilant jusqu'à l'arrivée. Au sommet, la brume enfin dissipée, nous pouvions apercevoir à l'horizon la ligne bleutée de l'atlantique vers la baie de Saint Jean de Luz.
La "venta PEIO" était notre caverne d'Ali Baba. La boutique à plusieurs étages renfermait quantité de marchandises et d'objets hétéroclites. Mon père y achetait du "Moscatel", du jambon, du fromage de brebis et des boîtes de "Mélocoton"....
Quand nous redescendions en début d'après-midi, saoulés par l'air d'altitude, nous pincions immanquablement notre nez en soufflant fortement, pour supprimer cette désagréable impression d'oreilles bouchées.
En bas du col, après la dernière épingle à cheveux de la route étroite, à droite, noyé dans les fougères, le chêne centenaire apparaissait enfin : point de rassemblement du pique-nique familial, il était là, majestueux. Ses racines énormes et tordues comme autant de doigts sortant du sol, griffaient la terre rouge.
En quelques instants sous les grosses branches ridées et basses, les plaids se dépliaient. J'aidais mon père à installer le déjeuner, pendant que ma mère et mes frères allaient vérifier si le petit ruisseau était toujours là, à courir entre mousse et galets.
Ah ! ce filet d'eau, si ténu, que notre imaginaire comparait à un torrent : son clapotis résonne encore à ma mémoire.
Avec mes frères nous construisions après le repas, des moulins à eau : avec un canif nous fendions légèrement de quatre petites entailles une brindille, dans laquelle nous insérions des morceaux d'écorce pour former une roue. Le système, amélioré tous les ans, était ensuite posé de part et d'autre du ruisselet sur deux cailloux. Nous étions très fiers de notre fabrication, cela nous remplissait de bonheur.
L'après-midi s'étirait ainsi, dans le calme et la plénitude. Tout le monde s'alanguissait, accompagné par le chant des grillons, à l'ombre des arbres dans la chaleur de l'été.

Le temps a fait son oeuvre. Tout est passé trop vite. Chacun a fait sa vie : la famille s'est agrandie, s'est séparée, puis s'est réunie de nouveau pour s'agrandir encore. Mes parents ne sont plus là et la tradition s'est éteinte avec eux.
Je suis repassé par le col d'Ibardin il n'y a pas très longtemps pour raconter l'histoire à mon petit-fils et lui montrer les paysages de ma jeunesse :le ruisseau ne coule plus, la prairie de fougères m'a semblé bien petite et le chêne bien vieux .....
- Tu m'apprendras papy à construire un moulin à
eau ?
J'ai souris en le regardant tendrement, il a senti mon émotion. Puis sa main a serré la mienne.

Cuga
( à mes frères )

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Les commentaires appartiennent à leurs auteurs. Nous ne sommes pas responsables de leur contenu.
Auteur Commentaire en débat
Bacchus
Posté le: 11-07-2012 16:24  Mis à jour: 11-07-2012 16:24
Modérateur
Inscrit le: 03-05-2012
De: Corse
Contributions: 1186
 Re: Mes 14 juillet ..... sous le chêne.
Cela me rassure de voir qu'il y a encore des personnes qui ont des souvenirs et qu'ils peuvent les raconter avec sensibilité et poèsie.
Etait-ce la douceur de vie de cette époque qui lui donnait cette saveur qu'on ne peut plus retrouver ?
Merci Cuga. Continuons à raconter à nos petits-enfants nos campagnes, nos rivières et nos jeux de plein air.
Loriane
Posté le: 11-07-2012 23:21  Mis à jour: 11-07-2012 23:21
Administrateur
Inscrit le: 14-12-2011
De: Montpellier
Contributions: 9499
 Re: Mes 14 juillet ..... sous le chêne.
Un 14 Juillet sans pétard, sans bousculade, sans foule qui piétine !!
Inattendu et merveilleux, un rêve de beauté et de tendre famille.
Un beau moment de lecture.
Merci
Iktomi
Posté le: 13-07-2012 16:00  Mis à jour: 13-07-2012 16:00
Modérateur
Inscrit le: 11-01-2012
De: Rivière du mât
Contributions: 682
 Re: Mes 14 juillet ..... sous le chêne.
Merci pour ce beau moment de nostalgie sans passéisme.
Mes préférences



Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
.

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