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Nouvelles confirmées : l'arrivant V
Publié par Loriane le 11-07-2012 14:30:00 ( 1200 lectures ) Articles du même auteur
Nouvelles confirmées



L'arrivant V


Encore un peu de rêverie comme ça et j'aurais bientôt fini de manger mon stylo, et il faut dire que je n'ai pas beaucoup travailler.
" Florian, Sacha, Virginie, Rodéric, allez on s'en va ... allez vous passer à la douche "
" Oh nooon, papa, j'ai pas fini de jouer "
Rodéric se plaignait, Il n'était jamais d'accord pour sortir de l'eau.
" Ben tu finiras demain, parce que le soleil lui, il a fini sa journée, il va se coucher et dans une demi-heure il fera nuit "
Je secouai les serviettes, je rangeai les sacs, et je me dirigeai lentement vers la suzuki, sachant que j'allais devoir encore attendre les enfants et les rappeler plusieurs fois.
Comme d'habitude, Clhoé avait été la première assise dans la voiture.
Après avoir quitté le chemin nous roulions lentement sur la route.
Nous suivions un pick-up, ces véhicules à tout faire, à tout porter, qui sont si nombreux ici.
Le conducteur conduisait à la Tahitienne et prenait ses virages sans douceur, sans aucun ménagement malgré son chargement humain assis à l'arrière, chargement que l'on voyait secoué comme des quilles, de droite à gauche, et d'avant en arrière.
Sur la plateforme du véhicule les tahitiens passagers avaient installé une table et des chaises, et assis à l'arrière ils jouaient tout simplement aux cartes, ils tapaient le carton comme si ils étaient tout simplement assis devant leur fare.
Ils penchaient d'un côté à l'autre, sursautant sur les trous de la route, ils se raccrochaient, se redressaient, se relevaient après chaque chocs, complètement indifférents aux secousses et aux tournants secs qui les déséquilibraient.
Ce jour là, ce spectacle habituel était agrémenté d'une variante, d'un détail supplémentaire nouveau pour nous : deux des passagers joueurs, par manque de place autour de la table, étaient assis sur le toit de la cabine du conducteur, dos à la route et ils se penchaient vers la table pour déposer leur jeu quand venait leur tour.
"Pourquoi pas ?"
JF me regarda en riant,
"Ben oui t'as raison, où est le problème ?
J'étais toujours étonnée, amusée, désapprouvant cette insouciance folle, mais malgré tout, je conservais pour cette liberté un soupçon d'admiration, peut-être mon petit coté transgressif frustré ?.
Et pendant ce temps là les autorités Françaises tentaient d'instaurer le port "obligatoire" de la ceinture de sécurité à l'arrière des véhicules ! Bon courage Mrs les pandores !
C'était pas gagné ! Il y avait entre eux et les réglementations, une certaine divergence sur le contenu, sur le sens même du mot "danger" et sur la nécessité de l'éviter.
"JF, j'ai pas envie de cuisiner ce soir, on passe au supermarket, on mangera chinois, je cuirai le uru demain midi."
"D'accord, et les bananes tu vas les cuire ? "
"Ah oui, zut, il faut que je m'occupe de ce régime, je vais faire du po'e (nous prononçons poé) que je mettrai au congel, mais je n'ai plus d'amidon, c'est mieux de passer à intermarket"
"Du po'e ... du po'e ... du po'e.. miam, miam "
Le chœur improvisé des enfants scandait leur plaisir, le po'e tous nos enfants appréciaient.
En fait dans la cuisine traditionnelle tahitienne le po'e était le seul dessert cuisiné digne de ce nom.
Il consistait en des fruits, mais plus souvent de bananes ou de papayes, cuits, écrasés grossièrement à la fourchette et mélangés à une farine de manioc tamisée très finement, appelée ici amidon, puis ensuite ils étaient cuits au four et arrosés de lait de coco.
La moitié de nos bananes stockées au garage, étaient des bananes fruits, elles seront donc cuites selon cette recette et le reste sera porté et distribué aux voisins par les enfants.
Nous arrivions sur Papeete et au moment de traverser la ville nous fumes bloqués par une manifestation de dockers. Cet imprévu nous contraint à faire le tour par le port et l'usine électrique.
Ce gros bâtiment sombre grognait et tremblait comme une grosse bête qui piétine.
Ses bruits et secousses résonnaient dans le sol et traduisaient une activité incessante, nuit et jour.
Cette activité était importante, bien utile et alimentait en énergie, courant électrique, toute l'île jusqu'à la presqu'île de Taiarapu, Tahiti nui, (Tahiti le petit) jusqu'à Taravao à plus de 60 Kms de là.
Après ce détour nous retrouvions notre route habituelle, nous dépassions le centre Vaïma, ce centre commercial était la concession au modernisme, puis vint ensuite le temple de Paofai, la poste et nous nous garions devant notre supermarché habituel.
Clotilde était somnolente, elle décida de rester dans la voiture ce que me convenait très bien, mais les trois petits et Rodéric nous suivirent espérant probablement en tirer l'acquisition d'une sucrerie quelconque.
A peine entré dans le magasin, JF, fut sans délai capté par Céline.
" Bonjourrr, tu vas bien ? "
Dix "r" roulaient en traînant sous sa langue, elle le regardait en souriant, usant de toute sa séduction, elle se tenait le plus proche possible de lui, elle minaudait toute douce et câline.
"Tu dis pas bonjour à ma femme, Céline ?"
"Bonjourrr madame"
Le ton était boudeur, grognon, sec, aussi peu aimable que possible. Le "tane" l'avait demandé et elle s'y pliait mais de très mauvaise grâce, cette concession lui pesait, et elle le laissait bien entendre.
Mais comment résister aux ordres de son béguin ? Son devoir envers la politesse rempli, elle se tourna de nouveau vers l'objet de son désir :
"Tu veux que je te serrrve, chéri ?"
Le fort accent Tahitien donnait tout son sel et un goût particulier à ses phrases.
Je faisais déjà le tour des rayons, j'avais presque terminé de remplir mon caddie, et je faisais la queue au rayon des plats préparés et de la charcuterie.
"Qu'est-ce tu veux ?"
La demie (métis) qui était derrière le comptoir était un prix de beauté, une fille superbe, elle avait, comme presque tous les demis, reçu une alliance de la beauté et du charme des deux peuples.
Les demis de Chinois étaient ceux que je préférais, ceux qui en général remportaient le plus de suffrages auprès de tous, et pourtant à mes yeux les humains les plus parfaits en ce lieu étaient ces mêmes demis avec de plus des ascendances européennes mêlées.
Ces tahitiens là, portaient magnifiquement dans leur sang, les qualités complémentaires de leurs origines diverses et leur grâce me séduisait plus que tout.
En me parlant Mareva s'était assise sur le rebord du comptoir, elle soupira très fort.
Elle déposa, comme si c'était un poids de 10 Kg, ma barquette de porc aux légumes qu'elle venait de remplir.
" Tu veux du pâté de campagne ? alors prrrend autre chose, la terrrrine est vide, j'en commence pas une autrrre, j'suis fiu"
Oh la, la ! si elle est fiu, alors tant pis.
"Être fiu", "être fatiguée", avoir la flemme", "en avoir ras le bol," "en avoir marre", avoir le bourdon", "en avoir par dessus la tête"... sont tous des synonymes, et ce sont là des raisons impérieuses et valables .
Ne pas aller travailler parce qu'on est fiu est une raison tout à fait acceptable.
Il faut noter à ce sujet que dans la langue tahitienne, le mot "travailler" ne se traduit pas.
En revanche ce serait un raccourci sans fondement et injuste d'un déduire que les Tahitiens ne font rien, même si en les voyant danser et chanter toute la journée, mon cousin en visite chez nous avait fait cette remarque :
"Quand on les voit vivre, on voit bien que le travail n'est pas leur première préoccupation".
Donc en tahitien "travailler " pour travailler n'a pas de sens , il faut dire que l'on pèche, on nettoie le jardin, on écrit, on rame, on ramasse les cocos, on récolte les tarots etc ...On agit selon les besoins et c'est tout.
Les tahitiens sont actifs, je n'ai jamais vu des gens avoir le balai aussi facile, leur environnement est parfaitement conservé, faré ou jardins sont minutieusement entretenus, eux mêmes sont toujours soignés et bien mis en dépit de la chaleur, mais travailler pour travailler, travailler pour s'enrichir n'a pas de sens.
Et voilà, quand on est fiu, on est fiu et on arrête tout.
Et soyons logique faudrait-il que la Nouvelle-Cythère terrestre, si belle désirable et lascive, alla pointer chaque matin ?
Qu'en serait-il de sa volupté, alors que Cook ou Bougainville, je ne sais lequel, disait en la découvrant :
"Vénus est ici la déesse de l’hospitalité, son culte n’y admet point de mystères, et chaque jouissance est une fête pour la nation " ?
" Maman je veux faire pipi"
Rodéric assis dans le caddie comme de coutume à intermarket, mangeait sa pomme prise sur le rayon en entrant, pomme qui ne passera pas sur la balance comme toutes celles qu'il mangeait pendant les courses.
"Oui, poussin, on y va "
"Dis Mareva tu connais quelqu'un qui veux un chien ?"
Elle me regarda et partit dans un grand éclat de rire :
" Si, si je connais quelqu'un, mon voisin, mais il va le bouffer"

Loriane Lydia Maleville
Illustration : Papeete la ville, le port et au fond Moorea




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Auteur Commentaire en débat
Bacchus
Posté le: 11-07-2012 16:43  Mis à jour: 11-07-2012 16:43
Modérateur
Inscrit le: 03-05-2012
De: Corse
Contributions: 1186
 Re: l'arrivant V
Dépaysement complet et garanti !
Cela m'a rappelé que l'équivalent de fiu, à Marseille, est 'fatigué', qui veut dire également ' malade, dépressif, démoralisé, découragé '. C'était pour moi, qui arrivait de Normandie, un mot honteux qu'on ne s'attribuait qu'en de rares occasions, c'était avouer sa faiblesse.
Pour la ceinture, je me souviens d'un CRS , à l'entrée d'Ajaccio, qui était sur le point de manger son chapeau, de rage, parce que personne n'avait sa ceinture. Comme j'étais arrêté près de lui, je lui avait dit, fielleux : " Pas la peine de vous fatiguer, personne ne la mettra jamais, ici ! " Il a trépigné et m'a répondu : " On les obligera bien à la mettre ! on les obligera ! "
Il avait raison.
Mes préférences



Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
.

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