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Nouvelles confirmées : L'arrivant XIII
Publié par Loriane le 23-07-2012 21:30:00 ( 1252 lectures ) Articles du même auteur
Nouvelles confirmées



L'arrivant XIII

JF descendit vivement dès la voiture arrêtée à sa place habituelle.
"Merde, et meerde ... là ça suffit ! j'en ai marre de ce chien !!"
"Papa tu dis des gros mots et tu es trop méchant ... je t'aime plus papa, pôv Gaston !"
Rodéric, accroupi au milieu de la pelouse entourait le "pôv gaston " de ses deux bras affectueux; il posait sa tête sur son cou
"papa est méchant Gaston, je l'aime plus; il est trop, trop méchant "
" Oh ça va Rodéric ! si c'est comme ça, tu vas rester avec lui pour le garder et nous on partira en vacances sans vous, Marcelle et Marie-Pierre vont bientôt arriver et comment on fera.?"
JF était extrêmement irrité par les retours insistants du chien.
Rodéric vint se réfugier dans mes jambes en pleurnichant.
"Papa a raison cow-boy"
JF était fils unique et comme tous les étés nous attendions la visite de sa mère et de sa marraine, elles passeraient deux mois avec nous.
Marie-Pierre, la mère de Jean-François, était une mère célibataire, "fille mère", comme on le disait joliment dans sa famille très catholique, de l'Alsace croyante.
Elle avait gravement péché dans les années après guerre et avait dû aller cacher son impardonnable faute, sa honte, loin du regard et des médisances sans commisération des vipères de son village.
Elle avait été priée sans ménagement d'aller se débarrasser de son fardeau et d' accoucher en secret à Avignon, chez sa cousine Marcelle.
Celle-ci célibataire, elle aussi, et autre pécheresse impénitente, était ravie de n'être plus seule dans son purgatoire familial.
Le poids de l'infamie est plus léger à deux et cela avait pour toujours rapproché les deux femmes.
"J'aurais préféré qu'elle soit morte" avait dit la mère mortifiée de la "pécheresse" .
Belle conception de la vie et de l'amour, mais la religion ! quel débat !
Sa naissance honteuse faisait dire à JF,
"Je suis né à Avignon parce que ma mère n'était pas là"
J'avais été, dès notre première rencontre, profondément touchée, émue par la souffrance dissimulée derrière cette curieuse boutade.
La visite de ces deux femmes approchait, elle était proche et je commençais, les projets, les divers organisations et réservations pour ce séjour et pour notre balade dans les îles chez les amis et chez l'habitant.
La venue intempestive de notre "arrivant " était mal venue et compliquait nos charges.
"J'appelle tout de suite le gars, qu'il revienne le chercher, tu as son numéro j'espère "
JF, laissant les portières de voitures grandes ouvertes abandonna, femmes , enfants et les sacs de fruits. Il avalait les marches à toute vitesse et disparu rapidement dans le séjour.Je le savais hors de lui et surtout décontenancé devant la résistance de ce cabochard à la fidélité indésirable.
"C'est sur un papier, sur le bahut au milieu des coquillages".
Le grand et long bahut du séjour était couvert de tous les plus beaux coquillages dont on puisse rêver, je les avais ramassés jour après jour, au cours de nos déplacement nombreux, et je les époussetais chaque matin avec amour et soin.
L'ambiance était électrique et les enfants ne disaient mot.
Mais je vis les trois petits s'attarder pour venir faire une caresse de soutien au casse-pied indésirable.
"Le pauvre, tu crois qu'il comprend, maman ?"
Les trois petits entouraient le "délinquant" avec compassion.
"Bof, tu parles c'est qu'un sac à puces, un vrai pot de colle"
"Oh ça va toi, la grande nerveuse insensible, y'a pas que les chats, eh attardée, va !"
"Ta gueule abruti . toi tu ... ."
"STOP !! C'est pas le moment ! c'est nécessaire de se parler comme ça ?"
Ces deux grands adolescents avaient oublié leurs câlins d'autrefois et se cherchaient à la moindre occasion, ils libéraient, sans retenue, leur agressivité l'un sur l'autre.
En arrivant sur la terrasse je vis dans le séjour JF raccrocher avec énergie. Hum ... ça n'a pas l'air d'aller, ça ne présage rien de bon, me disais-je.
"Alors ?"
"Alors, il ne veulent plus le prendre, il s'est sauvé, il ne savent pas par où, ni comment et d'après sa femme et sa belle-mère il fait venir les Tupapa'u (Tupapaou)."
" Rien que ça ? et pourquoi elles disent ça ? "
"D'après elles, les ampoules ont pétées quand il est arrivé et en plus cette nuit la grand'mère s'est levée, et elle dit qu'elle l'a vu assis sur le canapé, il la regardait fixement et il avait les yeux rouges"
"OK, j'ai compris inutile d’insister, jl avait peut-être bu leur whisky ? bon ! je retourne à RFO demain matin en partant."
L'argument des tupap'us faisaient que le problème était insoluble, vraiment sans solution, si la magie s'en mêlait que dire ? , Les Tupapa'u, sont les démons locaux, les esprits polynésiens, des morts qui viennent la nuit tourmenter les humains. Certains sont inoffensifs, d'autres malveillants, d'autres encore sont dangereux.
Je ne sais à quelle catégorie appartenait, selon elles, Gaston mais je sais que se battre contre les croyances et superstitions est une oeuvre inutile.
L'histoire des ampoules me faisait rire car avec l'humidité du climat et les variations de tension dans la distribution électrique de l'île, les ampoules qui grillent sont habituelles et il fallait être mal intentionné envers Gaston pour le rendre responsable de ce fait habituel ici.
Mais la coutume veut aussi qu'une simple lumière effraie les tupapa'u et les éloigne radicalement, à cet effet nombre de Tahitiens laissaient allumée une ampoule toute la nuit devant leur maison pour se préserver de leurs actions néfastes si redoutées dans ces îles..
Donc, on pouvait supputer que c'était bien dans la stratégie d'un tupapa'u de rendre inopérante, une, voir deux ampoules, pour dès son arrivée agir en toute liberté et pratiquer ses basses-oeuvres.
"Gaston, tu as pris du galon, d'emmerdeur patenté te voici promu au rang de chef des fantômes."
Marcel tu vas encore passer une nuit avec ton copain, mais s'il te plaît, toi non plus ne t'habitue pas trop à sa compagnie. Gaston doit partir".
Lorsque, plus tard, au moment de dormir, j’éteins pour la nuit la lumière extérieure, puisque, moi pauvre farani, j'étais exemptée de la crainte des tupapa'u, je vis les deux chiens couchés ensemble, collés l'un à l'autre me regarder fixement.
Je ne pus m'empêcher de commenter à voix haute :
"Je crois qu'ils se paient notre tête ces deux là"
Après une bonne nuit de courbatures consécutives, comme toujours, au crapahutage dans le 4X4, je retournai de très bonne heure à RFO , j'allais passer ma troisième annonce pour placer Gaston.
Le fou rire et les moqueries de l'hotesse présente ce matin là, étaient prévisibles.
J'avais à peine expliqué la raison de ma visite que je déclenchai un éclat de rire général.
"Oh ! la ! la ! ce chien quel con !! mais bouffez le ! ah ah ah... "
Elle s'en étouffait de fou rire.
"Oui, ben je crois que ça finira par arriver parce que, là, JF est très en colère "
Après les railleries et les rires de toute la station, je repartis et je me dis qu'il fallait que cette fois soit la bonne.
En revenant à la maison pour le déjeuner, je passais à l'école prendre un Rodéric tout heureux de retrouver son copains Gaston.
"Il ne va pas rester bonhomme, il faut que tu t'habitues à son départ, si tu énerves papa avec ça, il sera très en colère, il faut le comprendre, hein mon cow-boy , tu m'écoutes ?"
Un bruit de moteur derrière nous s'amplifia très vite.
"papa, papa, papa, c'est papa.
Rodéric courait déjà vers son père qui était arrivé à grand vitesse derrière nous.
"Papa, Gaston veut rester à la maison, c'est mon copain, moi je l'aime et maman dit que je dois pas te le dire"
Bon, d'accord, j'ai encore été bien comprise, j'abandonnai le père et le fils en bas de l'escalier, il allait probablement y avoir entre les deux une "explication de texte" à laquelle je ne tenais pas vraiment à assister.
Dans la maison, comme toujours la radio fonctionnait, Gabilou, chanteur Tahitien en vogue était sur l'antenne,
Immédiatement j’augmentai le niveau sonore de la radio, j’aimais tant la musique et les chants que j'avais comme les tahitiens, amoureux des bringues, l'habitude d'écouter le son à fond, mais je baissai lorsque la voix du présentateur succéda à la musique. J'écoutais son annonce.
"Tu entends JF, ce qu'il vient de dire ? Ils vont faire venir de nouveaux groupes pour le Tiurai."
Le regard ahuri de JF me fixait avec une inquiétante stupéfaction.
"Ben quoi qu'est-ce que j'ai dit ?
"Parce que tu comprends le tahitien, toi maintenant ?
"Mais ?!! "j'eus un instant de silence,...
"Euh !, ben ? ah! oui ! il a pas parlé Français ? ah ! mais ... oui ...mais j'ai tout compris ...!!"
Je me sentais mal à l 'aise, choquée par ce qui venait de m'arriver, c'est un phénomène stupéfiant.
Depuis des années j'écoutais ce langage inconnu, fait d'onomatopées et de hiatus, je le trouvais joli, heureux, je ne tentais pas de l'apprendre absolument, j'acceptais ses sonorités sans contraintes, je ne les ai jamais apprises, est-ce possible qu'elles soient entrées en moi, insensiblement sans effort, et sans que j'en prenne conscience ?
Est-ce un miracle ? une aptitude nouvelle que je ne me connaissais pas ? ou juste un plaisir d'écouter cette musique séduisante pour moi ?
Je n'avais aucune explication, rien pour comprendre, je n'avais que cet émerveillement de me sentir non plus extérieure à ces mots, mais comme par illumination devenue acceptée à l'intérieur de cet univers linguistique.
J'avais souvent la désagréable impression que JF me regardait comme une personne pas tout à fait dans la norme, je crois que mon mari me considérait parfois comme si j'étais moi même un tupapa'u, et qu'il avait depuis toujours la conviction que j'étais bizarre, était-ce mes rêveries fréquentes ? mon besoin de liberté, il n'empêche que je n'appréciais pas franchement ce jugement dont je me défendais avec agacement.
Mais un fois son grand étonnement passé, mon chéri était occupé à autre chose. Il se tourna vers nous.
"Vous venez avec moi, je vais voir mon colonel à Papara ?"
"Oui bien sûr"
J'avais une foule de travail en retard mais, pas grave, en revanche rater une balade ça je ne me le pardonnerais pas.
A cet instant des cris d'effroi vinrent du garage, JF et moi nous précipitâmes et nous arrivâmes ensemble sur la terrasse, la tête au dessus de la rambarde, penchés au dessus de la grande porte du garage..
"Qu'est-ce qui se passe les enfants ?"
"Maman !! y'a deux gros cent-pieds sous la machine à laver ..."
Les trois petits remontaient en courant comme si les terribles "cent-pieds" allaient les rattraper.
JF descendit en courant pour aller chasser les deux scolopendres dont la piqûre est des plus douloureuses et peut conduire à l’hôpital.
Je le vis attraper prestement au passage, le coupe-coupe, que l'on appelle lame et que nous laissons toujours planté dans la terre sous les larges feuilles des gingembres rouges au pied de l'escalier. Cet outil à l'usage quotidien restait là, à disposition, plantée en permanence dans la terre, au milieu des jolies plantes abondantes et serrées qui poussaient au pied de la terrasse.
Dans ce paradis terrestre que sont Tahiti et les îles de Polynésie, ne sévissent aucun animal redoutable, rien de dangereux ne nous menace, pas de serpent, pas de vipère, de crotale ou de boa, pas de fauve ou de gros animaux à craindre, pas de reptiles effrayants, les promenades dans la forêt tropicale ou dans la montagne sont sans aucun danger et n'offrent que du bonheur.
L'affreux cent-pied et le poisson pierre étaient les deux seuls animaux malfaisants du lieu, les deux seuls contre lesquels il avait fallu mettre les enfants en garde. Oui, seuls, deux animaux dangereux ont reçu dans ces îles un droit de séjour, ce sont, sur terre le scolopendre, appelé aussi milles pattes et ici cent-pied, et dans l'océan sur la barrière de corail ou dans le lagon, le poisson pierre, tout aussi dangereux, et que l'on peut parfaitement ne pas voir, ne pas reconnaître en posant son pied sur les pierres ou sur le corail.
En bas, dans le garage, la course-chasse aux cent-pieds était encore en cours et battait son plein, lorsque le téléphone sonna.
"Qui c'est ?"
Cria JF en remontant l'escalier quatre à quatre, et après avoir mené à bien l'assassinat des agresseurs scolopendres.
Occupée par ma conversation je ne répondis pas tout de suite, je vis JF debout à mes côtés écouter avec impatience.
"Alors ?"
"C'est un gars de Taiarapu, Ils vont venir prendre Gaston ce soir tard, ils viennent de la presqu'île, il va vivre dans la ferme et il sera enfermé avec les vaches, ils ont besoin d'un chien pour garder"
"Ben dis donc ! ils ne seront pas déçus !!! les pauvres , tu les as prévenus ? mais bon la presqu'île soixante cinq Kilomètres, ça, il reviendra pas cette fois ! "
" Non, cette fois sera la bonne"


Loriane Lydia Maleville


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Par une aquarelle de Tchano

Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui bat d'une aile à dessiner
Qui bat d'une aile à rédiger
Par une aquarelle de Folon
Il vole à moi un vieux cahier
Qui dit les mots d'anciens poètes
Les couleurs d'une boîte à crayons
Il souffle des mots à l'estrade
Où il évente un émoi rose
A bord de ce cahier volant
Les animaux font des discours
Et les mystères vous font la cour
A bord de ce cahier volant
Un âne triste monte au ciel
Un enfant soldat dort la paix
Un enfant poète baille à l'ourse
A bord de ce cahier volant
Vénus éteint la douce brune
Lune et clocher vont bilboquer
L'eau le soleil sont des amants
Les cages aux oiseux sont ouvertes
Les statues font des farandoles
A bord de ce cahier volant
L'hiver soupire le temps passé
La porte est une enluminure
Les croisées des lanternes magiques
Le plafond une aurore polaire
A bord de ce cahier volant
L'enfance revient pousser le temps.
.

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