Juste merci

Date 01-01-2014 18:00:00 | Catégorie : Nouvelles confirmées


Merci

Aujourd'hui Montpellier, inexorablement, s'est vêtu entièrement de gris.
Les rues, les trottoirs, les allées, tous brillent d'une humidité froide et maussade qui les assombrisse et les couvre d'une lumière triste.
Les passants, simples silhouettes rabougries, glissent prestement, sans mot dire, enfouis dans de gros manteaux aux couleurs de deuil, la tête dans les épaules, cachés sous de longues écharpes et chapeautés jusqu'aux yeux.
Le vent froid a volé les paroles des passants, il leur impose un silence pesant, il les poussent en sifflant le long des murs, et vers les toits, tout en s'enroulant entre les arbres dénudés, il a volé lles paroles des passants et
Ramassés sur eux mêmes les aventuriers de l'hiver gardent leurs visages baissés, le nez vers le sol et tentent d'absorber le moins possible de cet air froid et lourd.
Les platanes toujours aussi nus depuis de longues semaines brandissent leurs maigres bras d'écorce vers de longs nuages sombres, ils semblent tendus vers ses nuées cotonneuses qui courent si vives et rapides sur un ciel de fond gris clair, là, juste au dessus de nos têtes.
Dehors le silence est retenu, le jour est suspendu dans l'attente de la nuit complète que prépare le clair obscur des cieux.
La vie est en attente.
Derrière ma fenêtre je regarde avec volupté les rues attristées et vides.
Je contemple, là, au milieu, la rivière qui, sous les frissons et les remous de la houle, serpente et clapote en roulant nerveusement vers la mer proche, ses eaux frissonnent et frisent sous le souffle brutal et incessant du vent d'hiver.
Je regarde les berges détrempées, couvertes de flaques de boue, qui comme autant de petites tâches brunes sont parsemées ça et là dans l'herbe verte.
Mon regard s'arrête, attendri, sur les petites ombres sombres des canards, frileux.
Ils sont venus en claudiquant avec drôlerie, se rassembler sur les rives herbeuses et détrempées du Lez, Ils s'agglutinent en petits tas pour tenter de se réchauffer et de se protéger l'un, l'autre.

Sur mes vitres, roulent, lentes, lourdes, de grosses gouttes d'eau sale et froide.
Derrière ma fenêtre bien close, enroulée dans mon doux châle, devant mon bureau, calée dans mon fauteuil, je suis spectatrice protégée, je goûte avec un infini délice, comme une gourmandise délicieuse, ma chance de sentir la chaleur douce de ma "maison".
Mon cocon est bon.
Ma porte est solide, dans ma cuisine, il y a la nourriture, il y a des réserves de pain, il y a des fruits et du chocolat, et, au dessus de mon canapé moelleux vit le cercle de la douce lumière de la lampe, du robinet coule de l'eau chaude pour mon bain, bain chaud que je parfume à mon gré, dans mes placards attendent des piles de jolis vêtements, sur mes étagères sont alignés mes livres et les photos de ceux que j'aime, une foule de disques, de films, de musiques qui me transportent, emplissent l'espace sonore et habillent mes murs de beauté et de rêves, sur la table des fleurs parfumées, dans mon lit des draps doux.
Sur mon bureau, les jolis papiers, les stylos, l'écran de l'ordinateur, mon clavier pour écrire et le téléphone qui me relie à mes semblables.
Et, enroulées sur mes genoux, douces, chaudes, deux petites boules de poils qui me lèchent et me câlinent.
Mais, mais,......

Mais, en cet instant, où sont les les malheureux sans toit ?
Mais, ce soir, où sont les misérables sans maison ?
A cette heure, où sont les pauvres abandonnés?
Où, comment, vivent-ils?
Où sont-ils couchés ?
Mouillés, transis ?
Pourquoi eux ?
Pourquoi moi ?
J'aime le bonheur,
Il est venu tout seul.
Merci de me donner tant.
Merci la vie
juste merci.

Lydia Maleville




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