Conversations au zinc....

Date 28-03-2015 01:30:00 | Catégorie : Nouvelles confirmées


-Dis donc, Dédé, tu ouvres bien tard ce matin.
-Et toi, Vise à gauche, tu me chier, bien tôt !

Il était comme ça, vise à gauche, l’heure c’est l’heure.

Il devait son surnom à un léger strabisme divergent survenu à la suite d’une rixe ou il s’était fait cogner par 3 lascars, qui lui auraient chauffé son larfeuille, avec 150 € à l’intérieur.
Ca, c’était la version estampillée par Vise à gauche, car coté agression, c’était un trottoir sournois qui l’avait frappé en traite, un soir ou sa musette était pleine.

Faut savoir qu’il était à cheval sur l’heure, pour des raisons parfaitement respectables. Son tout premier boulot, dés l’ouverture du bar de Dédé, était de se jeter sur le journal, rubrique offres d’emploi.
Il est vrai qu’au chômage depuis 35 ans on pouvait comprendre sa rage, en terme de recherche de turbin, mais en fait, le boulot il n’y tenait pas vraiment, trouvant qu’il y avait incompatibilité d’humeur entre eux deux.

De toute Facon, son rêve à lui c’était de devenir musicien
-Mais qu’en j’étais petit, j’étais gros, et en cours de musique on jouait de la flute à bec; moi on m’appelait flute à groin, ça m’a dégouté. C’est con parce que la musique moi j’ai ça dans l’sang, tiens, rien qu’a écouter la musique de cette publicité pour l’assurance, j’ai des frissons dans le dos.
A quoi ça tient une vocation.
-Tiens Dédé, remets la même chose faut’qu’j’me’r’mettre, rien qu’à lire les offres d’emploi, j’suis crevé.

- Salut la compagnie.
C’est Jojo le comptable qui faisait son entrée dans le bistro, mais il attendait toujours pour commander un godet…, des fois que quelqu’un lui offrirait un verre. C’est qu’il avait des oursins dans les profondes le Jojo.
Tenez, quand le marchand de journaux à fermé définitivement son échoppe dans son village, Jojo à racheté, à petit prix, tout le stock de cartes postales avec l’église du village en photo. Dés lors, que Jojo soit en vacances, aux Sables-D’olonne, à Sète ou dans les Vosges vous receviez toujours la même une carte postale avec la dédicace:’’ Superbe région’’ et au dos l’église du village de Jojo!!!
Un rapiat l’comptable.
Passionné par les chiffres, il avait une thèse pour faire baisser le cout de la boisson dans les bars le jojo, il disait: ‘Quand la bouteille de Ricard est pleine, la dose devrait être moins chère que quand elle est à moitié vide, si on fait le même système que pour le pétrole’’.
Pas faux !!!
C’était l’intellectuel du quartier le jojo, et la conscience cérébrale du café, ce qui ne l’empêchait de se voir contester, de temps en, temps, certaines de ses théories avant-gardistes.
Ainsi quand il a prétendu qu’il fallait remettre l’homme au milieu du système, il s’est fait reprendre de volée par Pompom, qui lui a rétorqué : Mais merde, vous ne pouvez pas lui foutre la paix à l’homme !!’’.

Pompon, c’était le marginal du coin, il vivait dans un ancien logement, situé derrière la boutique de mon père, et qui était inoccupé depuis des années. C’était Plombette, le marchand d’article de pèche du bout de la rue, qui un jour avait demandé à mon père si il n’avait pas un endroit pour loger un de ses copains à la peine, le temps de trouver autre chose, juste pour quelques jours…..
Pompon a logé là pendant 9 ans !!!

C’était un philosophe le Pompon.
Ainsi, à une relation de bistrot avec lequel il devisait devant le zinc, en se jetant un mélé-casse derrière le jabot, et qui lui avançait comme argument la fameuse devise : ‘’ on ne peut être après avoir été’’, au sujet du temps qui passe inexorablement, Pompon répondît : Ca dépend, regarde nous, ça combien de temps qu’on s’connait ? Plus de 20 ans. Eh bien y a 20 ans t’était cocu, et aujourd’hui tu l’es encore, donc on peut être, et avoir été !!’’
Irréfutable démonstration, un philosophe le Pompon.
Aussi, en lisant les nouvelles locales, ou il était rapporté qu’un patron de bistrot avait été condamné pour avoir servi un client déjà ivre, qui s’était livré ensuite à des exactions, Pompon s’emportât :
- Ben merde alors, le patron du bistrot n’est pas responsable si un client bourré fait des conneries, ou alors il faut aussi enfermer la vigne et le vigneron

Voila les échanges, que j’ai eu la chance d’entendre pendant des années durant mon adolescence , dans cette rue ou mon père a tenu boutique pendant plus de 30 ans, et ou toutes les couches de population, de toutes origines se côtoyaient, sans que ces pseudos différences n’aient jamais posé le moindre problème.




Cet article provient de L'ORée des Rêves votre site pour lire écrire publier poèmes nouvelles en ligne
http://www.loree-des-reves.com

L'url pour cet article est :
http://www.loree-des-reves.com/modules/xnews/article.php?storyid=6029